Né en 1926, Adam Saint-Moore fut un des piliers des collections du Fleuve Noir d’antan. Il a écrit des dizaines de romans policiers et d’espionnage (son héros-espion se nommait Face d’Ange). Il faut objectivement admettre que cet auteur ne fut absolument original, loin s’en faut. Ses policiers (Paolini, Tardier) sont de purs représentants de la Loi et l’Ordre, ni des rebelles, ni des flics d’action tels qu’on les conçoit aujourd’hui. Adam Saint-Moore n’hésitait pas à pimenter ses histoires avec des scènes chaudes, non dénuées d’un voyeurisme sadique. Néanmoins, assez typiques d’une époque, ces romans se lisent encore sans déplaisir. Si le contexte a vieilli, les scénarios restent plutôt solides et les ambiances fort bien décrites. Voici huit exemples parmi la grosse production de cet auteur.
Les voix de la nuit (1965)
Dans l’Amérique des années 1960, Julian W.Murchison est un chroniqueur capable d’influencer l’opinion publique, de nuire à n’importe quel personnage célèbre du monde artistique ou politique, au nom d’une morale hypocrite. Cet émule du sinistre sénateur MacCarthy prend plaisir à causer du tort à tous ceux qui méritent leur notoriété. Récemment, il s’en est pris à une grande comédienne (qui n’hésitera pas à le frapper avec violence en guise de vengeance). Celui qu’il vise aujourd’hui n’est autre que le plus célèbre et le plus talentueux auteur américain de théatre de l’époque, Thomas Hayes, qu’il déteste.
Grâce au jeune Barret, un arriviste sans scrupule, Murchison apprend que Hayes a une liaison avec une vague actrice figurante, Edna. Celle-ci serait enceinte de lui, mais Hayes n’aurait pas l’intention de s’occuper d’elle plus longtemps. Le chroniqueur écrit un virulent article accusateur contre Thomas Hayes. Peu après, Murchison est assassiné alors qu’il se rendait chez sa maîtresse. Une affaire confiée au policier Higgins, qui fait rapidement la relation avec la dernière cible en date de la victime. Est-il possible que l’exigeant Thomas Hayes ait supprimer celui qui l’attaquait aussi bassement ? Le policier Higgins mène l’enquête avec son meilleur ami, le journaliste Ben Gillis. L’arriviste Barret est à son tour assassiné. Ce qui ne surprend guère Gillis…
Sous les étoiles mortes (1966)
Baloosta, bourgade des Etats-Unis. Le jeune et costaud shérif Henson assure ici l’ordre et le calme, assisté de Gus Palmer. Le Grand Maître d’une secte implantée dans le secteur vient d’être assassiné. La coupable semble être Jennifer, une toute nouvelle adepte de cette secte. Elle ne se souvient de rien. Le shérif, qui la trouve charmante, ne la croit pas coupable. D’autant que la secte ne manque pas de cinglés, estime-t-il.
Journaliste de renom, Ben Gillis suit l’affaire, accompagné du bouillant reporter photographe Chuck. Gillis comprend mal que John Broocks, homme d’une intelligence supérieure, ait intégré la secte. Mais est-ce vraiment dans l’entourage du gourou qu’il faut enquêter ? Ou plutôt, autour de Jennifer ? D’autres meurtres se produisent, peut-être pas causés par le même assassin… (L’auteur reprendra le même thème en 1976 dans La main de Dieu).
Un été comme les autres (1967)
Le commissaire Paolini a besoin de repos. Son adjoint lui propose Castel-Loupiac, ville du Gers dont il est originaire. Paolini va séjourner dans la pension de famille d’Armande Lacombe, cousine de l’inspecteur. C’est une femme séduisante, qui a du succès avec les hommes. Joueur de rugby dans l’équipe locale, Paul Signac fait sans doute partie des intimes d’Armande. Elle semble aussi proche de Maître Noilhan, le notaire, qui n’a rien d’un bel homme. Ancien militaire, Gaston Lacombe est le mari d’Armande. Il parait s’accommoder de l’attitude de son épouse. Pourtant, un soir de beuverie, il menace le rugbyman.
Paolini s’interroge encore sur Jeanne, l’employée d’Armande, et Mlle Mauricet, discrète amoureuse de Signac. L’ancien gendarme Languillaume le renseigne sur la vie locale. Armande est menacée dans des lettres anonymes, signées Justicia. Elle a tort de ne pas les prendre au sérieux. Quand l’affaire évolue, Paolini laisse le brigadier Joubert mener l’enquête en se trompant. Ce qui lui permet d’observer les autres suspects…
La dernière battue (1968)
PDG de Publi-Europ, Olivier Fribois reçoit des invités pour un week-end de chasse dans sa propriété de Frieuse, en Sologne. Wecheler, industriel auquel il doit faire signer un contrat, est l’invité d’honneur. D’autres notables parisiens sont présents. Paule de Vendreuil, chasseuse d’élite; Maître Severin, avocat talentueux; Juan Montaigna, jeune couturier; Adolphe Ponge, ancien ministre; Juliette, comédienne; Ariane, directrice de magazine. Sans oublier les proches de Fribois : sa maîtresse, son épouse, sa secrétaire et son adjoint.
Le commissaire Paolini et son adjoint Ducuing font aussi partie des invités. En effet, le PDG a reçu des messages anonymes par courrier. Il y a bien un danger, ce dont le policier s’aperçoit quand il est pris pour cible. Lors de la battue du lendemain, Fribois est légèrement blessé au bras. Le tireur a laissé des traces. Tout le monde est soupçonnable, à divers titres. La ravissante Suédoise Birgitt, maîtresse de Fribois, arrive en tête de liste…
La main de Dieu (1976)
L’Église de l’Arche du Dernier Jour est une communauté religieuse basée non loin de Paris. Cette secte vénère une sorte de Dieu vivant, Étienne Maugelin. Il se fait appeler par ses fidèles Le Seigneur-Revenu. Le groupe est dirigé par le Pape Pierre, qui possède une grande force de persuasion. Des Apôtres, des Sœurs et des Novices, l’entourent dans leur propriété, interdite aux non-initiés. Fille de boucher, un peu déboussolée, le jeune Elisabeth vient d’intégrer ce petit monde. Elle rencontre Sœur Marthe et Sœur Lucie, qui voit le diable partout, en particulier dans le chat rôdant dans le domaine. Elisabeth est remarquée par le Pape Pierre, qui l’initie selon sa méthode personnelle.
Alerté par le père de la jeune femme, le commissaire Tardier ne peut guère intervenir tant qu’aucun trouble de l’ordre public n’est constaté. Une nuit, un automobiliste recueille une femme atrocement mutilée, qui va mourir avant d’être soignée. Un lien est possible avec la secte, mais Tardier ne possède toujours pas de preuve formelle. Un mystérieux témoin le contacte. Plusieurs meurtres vont s’enchaîner avant que le policier n’approche la vérité…
Autopsie d’un viol (1978)
Tous deux issus de milieux aisés, Marie-Claude Grandier est la ravissante compagne du jeune et élégant commissaire Tardier. Alors qu’elle participe à un stage sur la créativité, le jeune femme est victime d’une tentative de viol. L’obsédé sexuel qui l’agresse n’avait pas caché son attirance pour elle. Quand elle reprend conscience, elle s’aperçoit avoir tué l’homme avec le couteau dont il la menaçait. Elle appelle Tardier, qui ne peut que constater les faits de légitime défense. Toutefois, un détail illogique intrigue le policier. Que le commissaire veuille disculper son amie déplait au juge d’instruction, plus misogyne que la moyenne.
Pourtant, Tardier poursuit son enquête sur la victime. Le fils de cet homme offre une piste intéressante : son père faisait réaliser par un photographe pro des images sadomaso, scènes élaborées et salaces. Tardier voudrait aussi en savoir plus sur la belle asiatique Kiwa, et sur une employée du centre où se déroulait le stage, Manuella. Une perquisition dans la maison de campagne de l’agresseur tué montre son degré de perversité. En effet, ses caves sont fort inquiétantes. Reste à comprendre les circonstance de sa mort…
Les chiens sont lâchés (1980)
Encore jeune, Marc Avocourt vient de quitter la police après avoir commis l’erreur de trop bien faire son métier. Il est engagé par Le Guennec, ancien flic, directeur de la société GARSUC (Gardiennage et Sécurité). Connaissant ses qualités Le Guennec destine Marc à des missions délicates : assurer la sécurité de personnalités menacées (à l’époque les mouvements terroristes pratiquaient régulièrement l’enlèvement). Son premier client sera Philippe Boussault, héritier de l’empire Boussault créé et encore dirigé par son père. Le fils est actuellement menacé par un certain Front Armé de Lutte Anti-Impérialiste, réclamant dix millions pour ne pas le kidnapper. Il a besoin de protection.
L’entourage de Philippe Boussault, jeune homme trop gâté par la vie, se compose de plusieurs personnes. D’abord sa sœur Sylvie, qui semble avoir une grande influence sur lui ; Stéfan (que Marc surnommera Attila), l’homme à tout faire de Philippe, que Marc n’aime pas beaucoup ; Kristina, jeune mannequin suédoise. Quand ils se replient à Louveciennes, dans la propriété familiale, Marc fait la connaissance de l’antipathique Machaud, le gardien. Les chiens de celui-ci, de puissants dobermans, permettront d’assurer la sécurité de Philippe. Par ailleurs, Marc occupe le jeune homme en lui enseignant les arts martiaux. Et il passe ses nuits dans les bras de Sylvie. Au fil des jours, les terroristes sont devenus discrets. Faut-il pour autant espérer qu’ils ont renoncé ? Au contraire, cette première mission, qui s’annonçait pourtant bien, va-t-elle être un terrible échec pour Marc ?
Le juge et le gendarme (1981)
Cesare Cortazi sait mettre au pas les prostituées ayant des envies de liberté. Les paresseuses, il n’aime pas ça parmi son cheptel. Pour se faire respecter des filles, il utilise des moyens cruels et violents. Il les marque au poignard, les brûle, les frappe, les contraint à l’abattage dans les pires conditions. Sa manière à lui de les calmer. Yolande, il est allé la rechercher à Nice. Mais il n’a pas pu l’obliger à obéir. On a retrouvé le cadavre de la prostituée dans la rivière.
Gina est serveuse dans la pizzeria des frères Zaccura, Calabrais d’origine. Elle vient de comprendre brutalement ce qui l’attend, et qu’elle a peu de chances d’y échapper. À moins de faire confiance au juge d’instruction Pelletier. C’est le Maréchal des logis chef Maublanc qui a constitué un dossier sur la bande des Calabrais, avant de le soumettre au juge, dont c’est le premier poste. Pelletier n’hésite pas à suivre le gendarme, ce qui déplait fort à sa greffière, Mme Rambaud. Elle n’a pas tort de penser qu’il va se faire des ennemis. Après l’arrestation de la bande, l’hostilité des notables et la pression de la hiérarchie pèsent sur le jeune juge. Sans compter les menaces des truands contre lui et sa famille. Quant aux accusatrices, ces prostituées seront-elles encore vivantes pour le procès ? (Cette histoire s’inspire d’une affaire réelle qui se déroula à Grenoble vers 1980).