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8 mars 2018 4 08 /03 /mars /2018 05:55

À travers le monde, Elvis Presley compte quantité de sosies. En Belgique, Elvis Cadillac est un de ses admirateurs, qui connaît une certaine notoriété en tant que sosie du chanteur. Mais le Belge admet ses limites : “[Il] était loin d’avoir la beauté insolente, virile et racée du King. Il n’avait pas non plus le charisme, ni la voix chaude de baryton, veloutée et animale de son idole, mais il se sentait habité par lui et était persuadé d’avoir été choisi pour perpétuer son souvenir, parce qu’il le valait bien. Premier blanc à chanter comme un noir, un mélange de folk, de boogie et de blues dans les années cinquante d’une Amérique puritaine, Elvis Presley, avec son look rebelle et sexy, faisait craquer les teenagers. Cadillac, lui, faisait craquer les vieilles dans les homes. Il était né trop tard.”

Avec sa chienne Priscilla et sa Cadillac rose 1955, le sosie trouve l’occasion de s’éloigner de sa mère, l’envahissante Raymonde Pirette. Il a décroché un contrat sur la Côte Fleurie, pour interpréter quelques chansons aux obsèques de M.Maurice, admirateur de Presley. La Normandie du côté de Dives-sur-Mer, il ne connaissait pas encore, mais il est tout de suite séduit par l’ambiance envoûtante. Quand il prend un auto-stoppeur, un vieux Normand fantomatique et cultivé, Elvis Cadillac se dit qu’on croise de curieux personnages par ici. À Dives, la population n’est guère prolixe concernant M.Maurice. D’ailleurs, il n’y a qu’une seule personne à ses obsèques, sa voisine Hortense, qui fait figure de gardienne de leur quartier, le pittoresque village de Guillaume-le-Conquérant.

Remarquant une photo du défunt M.Maurice, Elvis Cadillac s’aperçoit que c’est l’étrange auto-stoppeur qu’il avait embarqué. Pourtant, Hortense confirme que son voisin est bien mort dans sa cabane de pêche, et qu’il n’avait pas de frère jumeau. Le sosie s’autorise une visite clandestine chez M.Maurice, mais aucun indice n’apparaît probant… Le décès de M.Maurice n’est pas la seule mort énigmatique s’étant produite ces derniers temps. Deux jeunes filles, Carine Bintje et Violette Chenu ont été assassinées. La première, dont on n’a pas retrouvé la tête, était la fille de Charles Bintje. Cet homme prétentieux est surnommé Patate, dans la région. Quant à Violette Chenu, elle était enceinte. Sa sœur Myrtille, bien moins ravissante qu’elle, cherchera à savoir qui était le père du futur bébé.

Rose, la grand-mère de Carine Bintje, ne devrait sans doute pas tant fouiner autour de son détestable gendre, ça pourrait mal finir. Quant à Elvis Cadillac, il doit en rester à des hypothèses, suspectant tel ou tel d’avoir supprimé M.Maurice. Possible qu’en interrogeant Myrtille, ça ferait avancer son enquête. La chanson de Little Richard “Tutti frutti”, aussi interprétée par Presley, obsède Elvis Cadillac. Il doit bien y avoir une raison…

Nadine Monfils : Le rocker en pantoufles (Fleuve Noir, 2018)

Il ouvrit la boîte et étala les articles découpés dans les journaux. Les lut minutieusement, y cherchant des détails susceptibles de lui faire comprendre ce qui pouvait rattacher ces meurtres à l’intérêt que leur portait M.Maurice. Un goût morbide pour les faits-divers sanglants ? Ou autre chose… Quel lien cet étrange personnage avait-il avec les fillettes ? Les avait-il tuées ? Et s’il était revenu sous forme de fantôme pour se racheter ? […]
Les corps de Carine et Violette avaient été retrouvés près des falaises des Vaches Noires à Houlgate, donc pas loin de Dives-sur-Mer. Plus précisément dans une balise ou bouée charpente rouge, vérolée par la rouille. C’est un des gardes-côte qui, voyant qu’elle ne s’allumait plus et risquait de provoquer des accidents avec les bateaux, était allé vérifier et, en passant par la petite porte appelée "trou d’homme", avait découvert les corps des jeunes filles.
Par contre, on n’avait pas retrouvé la tête de Carine, malgré les recherches des hommes-grenouilles. Mangée par les poissons ?

L’atmosphère des romans de Nadine Monfils se compose d’une large dose de fantaisie, de quelques faits criminels dont la police ne s’occupe guère, de comportements bizarres chez les uns ou ridicules chez les autres, de références allant de Lewis Caroll à Frédéric Dard. Sans oublier la belgitude revendiquée par l’auteure, offrant un piment supplémentaire. Si certains polars sont construits dans les règles de l’art, ce qui est louable, Nadine Monfils se démarque incontestablement en menant le récit plus librement. Son héros drôlatique, et diablement sympathique, collecte des éléments épars, mais aucune méthode ne guide ses investigations en détective amateur. D’ailleurs, s’il a accepté cette prestation sur la Côte Fleurie, c’était juste pour changer d’air, loin de son agent et de sa mère.

Bien que l’humour soit omniprésent, en témoignent les portraits ironiques de la plupart des protagonistes, l’intrigue polar est bien présente. Des meurtres grand-guignolesques, pour rester dans la tonalité. Passons sur la carte postale d’un coin idyllique de Normandie, du côté de Cabourg, célébré jadis par de grands peintres et autres artistes originaux. Charmant, mais retenons surtout les tribulations d’Elvis Cadillac qui, même chaussé de pantoufles, démêlera cette sinueuse affaire. Bienvenue dans l’univers de Nadine Monfils !

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14 mai 2017 7 14 /05 /mai /2017 04:55

Elvis Presley était ce chanteur américain qui interpréta entre autres la ritournelle italienne "O sole moi", rebaptisée "It’s now or never". Un rockeur tendance mandoline et guimauve, décédé il y a quarante ans, dont votre grand-mère était amoureuse. Aux États-Unis, on compte des centaines de sosies du King, le surnom de la star, version jeune Apollon ou quadra empâté. En Belgique aussi, ils ont un simili-Presley, qui présente des spectacles sous le nom d’Elvis Cadillac. Il ne ressemble que vaguement à l’artiste, plutôt admirateur que sosie. Avec sa chienne Priscilla, du nom de la compagne de Presley, et sa Cadillac rose, ça peut faire illusion. Il interprète avec conviction les succès du King, le plus souvent dans de petites salles, devant un public clairsemé de nostalgiques d’un âge avancé.

C’est ainsi qu’il va prochainement se produire du côté de Chimay, en Wallonie, ville plus connue pour sa bière que pour son fan-club d’Elvis Presley. Il donnera son spectacle au Rossignol guilleret, un "home" pour retraités déliquescents. Il en a profité pour louer une maison dans les environs, afin de prendre quelques jours de repos avant le show. D’une nature solitaire, Elvis Cadillac n’apprécie pas vraiment que la grassouillette majorette qu’il a embarquée s’incruste auprès de lui. Il préfère les amours jetables au romantisme de pacotille avec le premier boudin venu. D’autant qu’elle se prénomme Rita, ce qui ne fait pas du tout classieux. Que l’on se rassure, l’intruse envahissante se fera vite occire. Si Elvis Cadillac n’y est pour rien, il n’hérite pas moins du cadavre de la majorette dodue.

Rita remplace, en quelque sorte, un précédent corps tout aussi refroidi, que la Cadillac d’Elvis avait heurté alors que le chanteur se sentait "lonesome tonight". C’était celui d’une ancienne célébrité de la télé, interné au "home" du Rossignol. Il venait d’être maltraité par un duo de gugusses, Mickey et Spéculoos, qui le croyaient richissime. Pour ces deux-là, l’embrouille continuera à cause du couple René et Jocelyne Crabaud, aussi nazes qu’eux. Deux belles paires de crétins, donc. Bon, revenons à nos "caricoles", à défaut de moutons. Car le chemin d’Elvis Cadillac va croiser celui d’une certaine Mémé Cornemuse. Dans son food-truck, en attendant le philosophe Jean-Claude Van Damme, elle vend justement des "caricoles" (spécialité culinaire belge) et des pipes (autre spécialité, mais bucco-génitale).

Faut-il rappeler qu’à tous points de vue, Mémé Cornemuse c’est plus sûrement Sophie Marteau que Sophie Marceau. C’est pas qu’elle soit chtarbée, mais il ne faut grand-chose pour qu’elle s’excite, et qu’elle révolutionne tout autour elle. Si elle entre en contact avec un minable comme Mickey, voilà des partenaires faits pour s’entendre. Par ailleurs, Elvis Cadillac va encore faire la connaissance de Marc, un artiste atypique pratiquant l’art brut, obsédé par sa muse disparue, Lou. Ne pas trop chercher à savoir si la belle est toujours de ce monde, finit par comprendre Elvis Cadillac. Tant que ces mésaventures ne font pas d’ombre à sa "carrière", tout va bien…

Nadine Monfils : Ice cream et châtiments (Fleuve Éditions, 2017)

L’intérieur du home aurait miné le moral au plus guilleret des rossignols. Les murs de couleur pisseuse s’harmonisaient au poil avec l’odeur âcre d’urine qui vous prenait au nez dès l’entrée. Ça sentait la mort qui avance à petits pas, trébuche, se relève, mais poursuit inexorablement sa route sans savoir où elle va. Un peu partout, des posters mal punaisés censés garnir le lieu et faire rêver d’horizons lointains, tous délavés, mer de poussière, montagne qui ressemble à un terril de charbonnage, fleurs séchées dans un champ brûlé par le soleil qui a tapé dessus depuis la fenêtre de la cantine. Bruits de vaisselle, relents de mauvais café, rots… Poète, emmène-moi loin des heures creuses, au pays où on ne regarde plus avancer les aiguilles. Elvis se dit qu’il préférait mourir plutôt que de se retrouver là-dedans.

Nadine Monfils, elle est comme ça. La vie quotidienne sans relief, qui se raconte avec une empathie apitoyée, une compassion larmoyante, c’est pas son truc. Faut que ça bouge un max, que le lecteur ne risque pas de s’endormir. C’est pas parce qu’il y a un macchabée qu’on doit pleurer sur son sort, quand même ! On le trimballe, on le balance au fond d’un puits, on le rattrape, on le découpe, on en perd un morceau. Et alors, où est le problème ? Pareil pour les vieux. S’agit pas de leur manquer de respect. Mais on rigole plus quand on va bouffer un plat dégueulasse dans un fast-food avec Mémé Cornemuse, que si on dîne dans un restaurant sélectionné en compagnie du gratin. Et puis, plutôt que de lire un Guide des traditions de Belgique, incluant sa cuisine, son vocabulaire et ses stars, c’est plus marrant quand c’est Nadine Monfils qui nous initie à la belgitude.

Après “Elvis Cadillac, king from Charleroi”, voilà le 2e opus de la symphonie déjantée mise en musique par l’auteure. Il n’est pas trop tard pour faire connaissance. Un saltimbanque sans prétention, dont le seul souhait consiste à rendre hommage à Elvis Presley. Le gars bien sympa, confronté à quelques contrariétés, entouré d’énergumènes pas tristes. Juste histoire de nous faire rire, en somme. On va aussi évoquer "l’art brut", à travers un personnage forcément original. Quant à tout le reste de l’intrigue, faites confiance à Nadine Monfils pour vous divertir avec son tonus et sa fantaisie. Bonne lecture !

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23 décembre 2016 5 23 /12 /décembre /2016 06:18

À Montmartre, le commissaire Léon est entouré de Nina Tchitchi, Pinchon et Bornéo, une équipe de policiers inefficaces bien que très actifs. Il vit avec son chien Babelutte dénué de flair et sa mère Ginette, aussi Belge qu’intrusive dans la vie de son fiston. Le QG de Léon, c’est Le Colibri, le bistrot de Jeannot au cœur du quartier. Pour les ébats sexuels, il peut compter sur Lou, moitié serveuse de bar, moitié pute. Le commissaire n’est pas loin d’en tomber amoureux. Il va bientôt devoir s’immiscer chez les Rastignac, la famille bourgeoise de Lou, car de curieux événements s’y produisent. Le soir de l’anniversaire de l’homme d’affaire Arnaud Rastignac, celui-ci et son chauffeur Georges périssent dans un accident.

Pour Léon, cette famille habitant une belle propriété à Chantilly mérite qu’on s’y intéresse. Il y a le patriarche, Lionel, fondateur de l’entreprise qui a fait leur fortune. Aujourd’hui, il est en fauteuil roulant, et le seul à savoir où est caché un lot de pierre précieuses. Vient ensuite Jacqueline Rastignac, l’épouse oisive d’Arnaud. Heureusement qu’elle a Paula, leur employée de maison, pour s’occuper de tout car elle ne brille pas par son intelligence. Le fils aîné et successeur d’Arnaud, c’est Jean-François. Il est marié à Muriel, une gourde, qui lui a donné une fille moche, Violette. Écœuré, son bonheur amoureux, il l’a trouvé ailleurs et autrement, Jean-François. Ensuite, voici Alice, la sœur célibataire, détestant toute sa famille, férue de sorcellerie satanique à base de maléfiques amulettes.

Outre la jeune Louise (Lou), reste Maurice – dit Mômo – le fils attardé mental, protégé autant qu’elle peut par Paula. Quand il ne cherche pas à voir les culottes des filles, Mômo passe son temps avec Zazou, son lapin empaillé qu’il traite comme s’il était vivant. Après l’accident suspect de son père, Lou sent planer une menace autour d’elle. Ça lui donne le cafard et ça l’angoisse fortement. Quand la petite Violette disparaît dans le parc de leur propriété, les Rastignac sont bien obligés de s’adresser à la police. Le commissaire Léon peut imaginer qu’il s’agit d’une simple fugue de la gamine. Au vu des circonstances de la mort d’Arnaud Rastignac et de son chauffeur, ça nécessite quand même une enquête.

À force de jouer avec les amulettes, Alice risque de s’y brûler. Croyant retrouver seule sa fille, Muriel est victime d’une violente agression et hospitalisée dans un état grave. De son côté, Jacqueline Rastignac s’aperçoit que son défunt époux menait une double vie. S’il se rendait souvent en Amérique, ce n’était pas uniquement pour son métier. C’est bientôt sur un meurtre que vont porter les investigations du commissaire Léon. Un indice probant va conduire à l’arrestation de Jacqueline, même si elle n’est sans doute pas coupable. Léon pourrait aussi bien soupçonner Mômo, peut-être pas si débile, ou l’aïeul Lionel. À moins que, dans l’ombre, n’apparaisse l’inquiétante silhouette d’un impitoyable vengeur…

Nadine Monfils : Il neige en enfer (Pocket, 2016)

Il était certes urgent d’éliminer Lou, cette poubelle à sperme qui salissait le nom des Rastignac. Mais il fallait d’abord tenter de sauver son frère. Viendrait ensuite le tour de sa mère, pour laquelle elle n’avait pas plus de considération que pour une plante verte. Le vieux ne serait pas épargné non plus. Ce n’est pas parce qu’il allait à la messe tous les dimanches qu’il était mieux que les autres ! Au contraire. Alice se disait que les bigots ont toujours quelque chose à se faire pardonner. Elle ne croyait pas en Dieu, sinon il aurait créé un monde parfait rempli de gens comme elle. En revanche, elle était persuadée que le Diable était là pour sauver l’humanité, si on prenait la peine de le solliciter dans un but louable, celui de débarrasser le monde de ses zones d’ombre. Quant à Mômo, il n’existait même pas. Celui-là serait le plus facile à éliminer. Elle le garderait pour le dessert.

Si la série des enquêtes du commissaire Léon ne sont pas aussi délirantes que les folles aventures de Mémé Cornemuse, et quelques autres titres bien déjantés de Nadine Monfils, c’est déjà une très bonne initiation à l’univers de cette romancière. Selon les épisodes, ce sont les "bras cassés" de son équipe de policiers, ou l’envahissante Ginette, la mère du commissaire, qui tiennent une grande place dans le récit. Dans “Il neige en enfer”, c’est la famille Rastignac qui est à l’honneur. Grandeur et décadence de la haute-bourgeoisie, pourrait-on dire en les observant. Caricaturaux, ces personnages ? Bien sûr, c’est le but. Néanmoins, on en arriverait presque à penser qu’il en existe de semblables.

La pétillante Nadine Monfils n’ignore pas qu’écrire une comédie policière, ça ne signifie pas seulement faire sourire les lecteurs. Si la fantaisie est indéniable et franchement agréable, l’intrigue n’en est pas moins celle d’un polar. L’accident mortel initial n’est pas le seul acte criminel, d’autres émailleront cette histoire. Malgré son apparent dilettantisme, la rigueur du limier n’étant pas sa qualité principale, comptons sur l’instinct du commissaire Léon ! On ne s’ennuie jamais en lisant les romans de Nadine Monfils.

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9 novembre 2016 3 09 /11 /novembre /2016 07:48

C’est à Montmartre que se situe l’univers du commissaire Léon. C’est là qu’il habite, avec sa envahissante mère Ginette. Plus Belge qu’elle, ça n’existe pas. Plus intrusive dans la vie de son fiston Léon, c’est pas imaginable. Il y a aussi le chien du commissaire, Babelutte. À peu près inutile, car sans le moindre flair. Toujours prêt à fuguer, dès que ses instincts sexuels se réveillent. Le QG de Léon, c’est Le Colibri, le bistrot de Jeannot (pas loin du Lux Bar, cher au regretté Bernard Dimey). La fine fleur de la faune montmartroise y est ancrée quasiment du matin au soir. Il paraît même qu’on y croise parfois des auteurs de polars, Thierry C. ou Mouloud A. Et puis, il y a le commissariat où Léon tricote en cachette de ses adjoints, pour s’empêcher de fumer. Nina Tchitchi, Pinchon et Bornéo, voilà une équipe de policiers hors norme qui s’active, même si leurs résultats peuvent laisser sceptique.

Le commissaire Léon part enfin en vacances, et même en croisière. Pas aux antipodes, sur un paquebot luxueux. Tout en restant aux portes de Paris, Léon et Babelutte vont naviguer sur le Canal de l’Ourcq. Un voyage bucolique et solitaire pour le commissaire, qui n’a pas embarqué sa mère Ginette et qui évitera de trop répondre au téléphone, si possible. Sauf que Léon découvre du côté de Sevran le cadavre d’une jeune rousse de dix-huit ans, complètement défigurée, attachée à une échelle sous l’eau, près de la rive. Si elle n’a pas été violée, elle a le lobe d’une oreille arraché. Léon appelle Nina, Bornéo et Pinchon à la rescousse, pour mener l’enquête tandis qu’il poursuit sa croisière sur l’Ourcq. Dans un coin de forêt, il découvre une maison lugubre, habitée par la petite Aurélie, qui ne parle pas, et par sa grand-mère impotente, à l’allure de vieille sorcière digne des contes d’antan.

Bien que Léon l’ignore, la fillette Aurélie est sacrément perturbée par l’image fantôme de sa mère disparue, qui s’adresse à elle dans sa tête. S’il est vrai que rôde un être pervers, la gamine pourrait être séquestrée dans la cale d’un bateau à l’abandon. Encore qu’elle soit capable de se sortir, momentanément, de ce mauvais pas. Un peu plus loin, dans les bois de Claye, c’est le cadavre d’un jeune pendu qui est à son tour retrouvé, le visage arraché comme pour la rousse. Rebelote pour l’équipe du commissariat. Léon rencontre alors Minouche et surtout son frère Bilou, drôle de bonhomme. Suspect, ce cantonnier de Villeparisis obsédé par les nains de jardin est longuement interrogé par les limiers-adjoints de Léon. Plus sûrement le profil d’un chtarbé que d’un criminel, le Bilou : en le cuisinant à point, peut-être livrera-t-il malgré tout un ou deux détails intéressants ?

Dans le même secteur géographique, une infirmière assez moche a été agressée par un type tout juste évadé de prison. En soupçonnant ce nommé Bullit, les enquêteurs sont-ils enfin sur la piste du tueur ? Rien n’est moins certain, mais en voilà un autre capable de fournir des indices. Tout en poursuivant son périple pas si paisible sur le canal, Léon va s’occuper de la petite Aurélie, tout en n’oubliant pas qu’un tueur reste dans l’ombre…

Nadine Monfils : Le silence des canaux (Pocket, 2016)

…Et s’il était entré dans la police, les histoires de sa grand-mère y étaient pour quelque chose. Elle lui avait donné le goût de l’intrigue et une fascination pour l’inexplicable. Pour lui, un criminel était une énigme.
La nature lui faisait du bien. Elle lui redonnait la force dont il avait besoin. Toutes ces nuits, il les avait passées à reconstituer les crimes. Il s’était mis tour à tour dans la peau des victimes et dans celle de l’assassin. Être flic, c’est comme être comédien ou écrivain. C’est se mettre dans la peau des autres pour ressentir et chercher à comprendre. Et le grand danger, c’est la compassion. Tant pour les bourreaux que pour les victimes. C’est là qu’on risque de basculer. De se prendre pour Dieu.

Inutile de préciser que “Le silence des canaux” est un jeu de mot en référence au roman de Thomas Harris “Le silence des agneaux”, mettant en vedette le célèbre Hannibal Lecter. Toutefois, ce sont plutôt des allusions à Georges Simenon et à son œuvre qu’il faut voir dans le présent roman. À bord de la péniche l’Ostrogoth, le créateur de Maigret navigua sur les canaux à travers la France vers 1930. De “La maison du canal” au “L’Écluse n°1”, en passant par “Le charretier de la Providence”, “Chez les Flamands” ou “Le baron de l’écluse”, canaux et cours d’eau lui servirent bien des fois de décors. Ici, le commissaire Léon embarque sur une péniche nommée “Le bateau d’Émile”, une nouvelle de Simenon. Il sera encore question d’un château de Saint-Fiacre, bien que celui de Maigret se situe dans l’Allier, alors que nous restons sur le Canal de l’Ourcq à quelques encablures de Paris.

Dans ses romans pleins d’inventivité, Nadine Monfils nous offre un feu d’artifice coloré de fantaisie, d’humour débridé, de caricatures réussies. Néanmoins, jamais elle n’omet que la "comédie policière" se base obligatoirement sur une intrigue criminelle, si possible forte. La noirceur qu’elle décrit est héritée des contes d’autrefois qui, s’ils sont édulcorés pour les enfants, étaient d’une férocité cruelle. Le crime n’épargne pas les petites filles, c’est un des thèmes souvent exploités par cette auteure. Le surnaturel ou l’ésotérisme ne suffisent pas toujours à les sauver des griffes d’obsédés martyrisant leurs victimes (et les ours en peluche), quel que soit le rôle joué par une sorcière dans l’histoire. Une drôle d’alchimie entre noirs mystères et francs sourires, voilà ce qui rend vraiment agréable la lecture des suspenses originaux de Nadine Monfils.

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4 mars 2016 5 04 /03 /mars /2016 05:55

Le culte d'Elvis Presley a redoublé depuis le 16 août 1977, date de son décès. À travers le monde, il compte une multitude de sosies, dont la plupart présentent des spectacles en hommage à leur idole. On ne s'étonnera pas de trouver un de ses imitateurs en Belgique : Elvis Cadillac. Sa mère Raymonde Pirette lui avait réellement attribué le prénom du King. Quand elle disparut mystérieusement, le petit Elvis Pirette fut placée dans une famille qui admirait Georgette Plana. Si "Riquita jolie fleur de Java" fut la chanson la plus populaire de 1968, pas vraiment le même univers musical que Presley. Depuis quelques années, Elvis Cadillac et sa chienne carlin Priscilla mènent une vie entièrement dédiée au King, même si le sosie commence à ressembler à l'Elvis rondouillard des années 1970.

Tiens, Raymonde Pirette est de retour dans la vie de son fiston. Cette admiratrice d'Hervé Vilard s'avère vite envahissante, prétendant prendre en main la carrière d'Elvis Cadillac. Un programme plein d'ambition, qui passe par l'élimination de Priscilla, mais la chienne survit à cette épreuve. Quant à Elvis, il se concentre sur son prochain contrat. La famille Montibul van Piperzeel l'a engagé pour l'anniversaire de leur riche aïeule Olivia, qui fêtera ses quatre-vingt ans. Rendez-vous est pris au château de Tourinnes-Saint-Lambert, dans le Brabant wallon. Les chansons du King, ça rappelle à Olivia son amant Mario, et le fils qu'ils ont failli avoir ensemble. Quant aux héritiers de la châtelaine, ils sont gratinés : une belle bande de bons-à-rien, toutes générations confondues.

D'un côté, on trouve Philomène et son mari Philibert, dit Fifi. Leur fils Aurélien fréquente volontiers des petits voyous dans le genre de Joe, et des travelos comme Pepita (qui se prénommait précédemment Gérard). De l'autre, il y a Colette qui, malgré son flagrant manque de talent, se prend pour une poétesse. Avec son mari Charles-Henry, qui claque tout l'argent qu'il n'a pas en jouant aux courses et en entretenant une maîtresse. Leur fille Caroline a deux passions : le théâtre et son chat Houellebecq. Doter un chat du nom de ce littérateur, indique bien qu'elle n'est pas plus fine que les autres Montibul van Piperzeel. Néanmoins, la vieille Olivia et elle éprouvent une tendresse mutuelle. Philibert prépare de sombres projets (et un gâteau au chocolat) à l'occasion de cet anniversaire.

Le reporter Robert Bertache sera présent pour la fête, afin d'écrire un article élogieux sur Elvis Cadillac, une initiative de Raymonde Pirette. Homard et champagne sont au menu du repas d'anniversaire, histoire d'installer une dose de bonne humeur, avant le spectacle du sosie du King. Caroline est perturbée, car on la fait chanter. Aurélien ne l'est pas moins, à cause du drag-queen Pepita. Malgré tout, la fête pourrait se dérouler sans anicroche. Sauf qu'il y aura des cadavres. Pas sûr que le commissaire Cramik soit à la hauteur pour mener l'enquête. Le sosie pense qu'Elvis Presley essaie de lui donner un coup de main : “Et si c'était vraiment le King himself qui l'avait appelé de l'au-delà pour l'aider à résoudre cette affaire ?” Se mêler de tout cela n'a peut-être pas grand intérêt pour lui…

Nadine Monfils : Elvis Cadillac King from Charleroi (Fleuve Éd., 2016)

Avec les romans de Nadine Monfils, on entre davantage dans le domaine de la comédie que dans celui du polar. Même si l'intrigue comporte quelques éléments énigmatiques, qui pimentent le suspense. Avant tout, l'auteure fait preuve d'une fantaisie entraînante, dont le but premier est évidemment de nous amuser. Adepte de Frédéric Dard, elle inclut même ici un drôle d'oiseau qui connaît par cœur les pensées drolatiques du créateur de San-Antonio. Elle ne peut manquer d'évoquer l'hilarante Mémé Cornemuse, le personnage qu'elle créa pour une série de romans : vieille dame indigne devenue l'égale des people (ou presque), elle rêve toujours d'épouser un certain Jean-Claude Van Damme.

Cette histoire permet également de nous initier à la belgitude. On apprendra ainsi que les langages wallons et bruxellois, avec (entre autres) leurs stûûts, leurs clouches, leurs rawètes, leurs essuies, leurs slaches et leurs crolles, diffèrent sensiblement du parler académique français. Toutefois, on n'est pas obligés de boire de la Jupiler tout en lisant ce livre, aussi populaire que soit cette bière. On eût aimé un peu plus de respect pour Georgette Plana, et un peu moins pour Michel Houellebecq. Mais puisque c'est une Belge qui caricature ses compatriotes, ne boudons surtout pas notre plaisir : les tribulations d'Elvis Cadillac et de Priscilla nous offrent un très bon moment de lecture.

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21 octobre 2015 3 21 /10 /octobre /2015 07:00

Le commissaire Léon est le plus singulier des enquêteurs de la PJ. Montmartrois de cœur, ce quadragénaire a ses habitudes au Colibri, un bistrot typique du quartier. Il habite avec sa mère Ginette, une Belge fière de ses origines. Même au bureau, il ne peut se passer de son chien Babelutte (c'est le nom d'une friandise, en Belgique). Si le commissaire Léon tricote, en cachette de ses subalternes, c'est pour ne pas fumer. En outre, ça lui permet de réfléchir posément. Entre son exubérante secrétaire Nina Tchitchi et ses inspecteurs, il a besoin de ces moments de répit. Si Babelutte disparaît, le temps d'une aventure sans lendemain avec le chien du voisin, il préférera bientôt le confort auprès de son maître.

Catherine Grangier, Héléna Danvers et Maura Servier sont trois amies des quartiers chics de Paris. Le père de Catherine n'est autre que le maire de Neuilly, Charles Grangier. La jeune femme est obsédée depuis quelques temps par son viril amant, Gilles. Son père se doute bien que ce gugusse doit avoir un casier judiciaire. Héléna Danvers vit avec sa fille de quatorze ans Carole et sa mère Clara. Cette dernière n'est pas exactement la sage vieille dame qu'imagine Héléna. Elle s'en apercevra sur le tard. Maura, épouse de Pierre Servier, a un fils de sept ans, Louis (Loulou). Elle aimerait bien renouer avec François, son amour d'antan sur lequel elle fantasme. Pierre, lui, va souvent chez les putes.

La rousse Maura picole beaucoup depuis quelques temps, siphonnant des litres de vodka. C'est que, trois mois plus tôt, elle a causé un accident de voiture mortel, en présence de ses amies Catherine et Héléna. Une gamine de sept ans, Lily, en a été la victime. Elles ont averti la police, mais elles ont préféré fuir le lieu de l'accident. Depuis, elles ont évité de se recontacter, et aucune des trois n'a parlé à quiconque de leur mésaventure. À vrai dire, Catherine n'a pas pu s'empêcher de raconter ça à son amant Gilles. Ce qui pourrait donner des idées malsaines à un type comme lui. De son côté, le petit Loulou a également trouvé un indice concernant cette affaire. Ce qui risque d'avoir des conséquences meurtrières.

François a fixé un rendez-vous nocturne à Maura, qui en est tout excitée. Il s'agit d'un piège pervers, destiné à l'humilier et à faire chanter son mari Pierre. Celui-ci paie la rançon exigée, et engage le détective Mario Vandensick afin de récupérer son fric. Pas sûr que l'enquêteur soit à la hauteur. Pierre découvre les dessous de l'affaire, le dramatique accident qui fut causé par son épouse Maura. Ce qui ne le retient pas de retourner voir les putes. D'autant qu'une certaine China est plus experte que la moyenne de ces pros du sexe. Quand Loulou découvre les maquettes secrètes de son père Pierre, il aurait matière à s'interroger. Mais le petit garçon va être bientôt kidnappé, et séquestré au côté d'un rat.

Quand le maire Charles Grangier est abattu, le commissaire Léon s'intéresse de plus près à ce cercle d'amis. Le douteux Gilles n'a pas le profil d'un tueur, mais sait-on jamais ? Ça sent la vengeance, ce genre de crimes. D'autant que la disparition de Loulou est signalée, et que la victime suivante n'est autre que Clara Danvers, la mère d'Héléna. La série est loin d'être terminée. Le commissaire Léon réalise que dans tous ces cas, il y a des traces de coquelicots autour des victimes. Ce qui n'est pas sans rappeler la mort de la petite Lily, dont le policier n'a que vaguement entendu parler jusqu'alors. Il essaiera d'intervenir afin de sauver ceux qui n'ont pas encore été atteints par cette suite criminelle…

Nadine Monfils : La nuit des coquelicots (Pocket, 2015)

Voilà un résumé pouvant apparaître un peu sérieux, alors qu'on connaît bien la fantaisie dont Nadine Monfils est coutumière. Qu'on se rassure, les enquêtes du commissaire Léon "n'engendrent pas la mélancolie". Entre un inspecteur maladroit, un curé commettant de curieux vols, la mère du policier avec son franc-parler, quelques habitués du Colibri (et de Montmartre) ainsi que bien d'autres personnages, on s'amuse beaucoup. L'auteure se plaît à épicer le récit grâce à des scènes érotiques, explicites et bienvenues car correspondant à l'état d'esprit des héroïnes dans ces moments excitants.

S'il s'agit effectivement de comédie policière, la base de l'intrigue reste malgré tout d'une vraie noirceur. La mort, fut-elle accidentelle, d'une enfant reste un véritable drame. C'est ce qui séduit dans ce roman : sombre vengeance, d'une part ; situations drôlatiques voire proches de l'absurde, de l'autre. Au fil d'une histoire composée de courts chapitres, Nadine Monfils nous raconte tout cela avec une très belle souplesse narrative. C'est ainsi que les lectrices et les lecteurs se sentent complices, entraînés par le récit. “Madame Édouard” et “La nuit des coquelicots”, les deux premiers tomes de la série, sont disponibles en format poche.

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23 février 2015 1 23 /02 /février /2015 07:30

Pour les retardataires n'ayant pas encore goûté aux aventures de Mémé Cornemuse, une formation accélérée permettra de situer le personnage : “Plus que le pognon dont elle n'avait jamais été l'esclave, Cornemuse aimait foutre la pagaille. S'éclater était son but principal et l'avait toujours été. Au cours de sa vie tumultueuse, elle avait navigué entre la pauvreté et la richesse, prouvant que "bien mal acquis profite souvent". Mais elle était capable de tout plaquer pour rester libre. "Ni Dieu, ni maître", comme Carmen Cru. Et pas de morale, non plus. Enfin, elle avait la sienne. Une sorte de logique à l'envers. Un peu pareil à un vieux réveil qui continue à faire tic-tac mais qui ne donne jamais l'heure exacte...” Vous voyez la farfelue, vous situez l'excentrique, vous cernez l'extravagante ?

Mémé Cornemuse, c'est comme le phœnix capable de renaître de ses cendres. Fabuleux drôle d'oiseau qui a fini en captivité, internée chez les dingos, quand même. Comme une pause, avant de rebondir sur le trampoline de son imagination. L'intrépide Mémé a d'abord mis le grappin sur Gilberto Van Pinderlok, un vieux qui avait l'air riche à millions, avant de s'échapper ensemble de la cage aux chtarbés. Direction Saint-Amand-sur-Fion, charmant village du département de la Marne. Voilà où se trouvait le château féerique de son pigeon du moment, Gilberto. Pas la première fois qu'elle doit déchanter, Mémé Cornemuse. C'est de la bâtisse déclassée, du prestigieux vermoulu, le soi-disant palais de son prince décati. Bah, s'il lui reste encore quelques tableaux de maîtres à fourguer, on doit pouvoir refaire la toiture et rénover tant bien que mal le manoir.

Tant pis si Jules Pignet, le maire, avait eu d'autres projets. Qu'il s'occupe de sa femme Ramona et de son fils Kéké, celui-là. Mémé Cornemuse, c'est l'Attila du progrès villageois. On fait comme elle dit, et on s'écarte de son chemin. Le “jeune couple” s'est offert un voyage de noces, entre-temps à Étretat ─ jolie allitération, non? On voit mal Mémé qui s'encombrerait longtemps d'un conjoint, une fois pompé l'essentiel de sa fortune. Petite photo en bord de falaise, et la voici accidentellement veuve. Elle aurait juste dû prendre le temps de vérifier l'état du cadavre de Gilberto, mais Mémé Cornemuse est une fonceuse qui ne jette jamais un œil dans le rétro. Retour sous le doux climat de Saint-Amand-sur-Fion. S'agirait maintenant que son parc d'attraction, The Kingdom of Bimbo Land, lui fasse gagner un peu de fric.

Nadine Monfils : Maboul Kitchen (Éd.Belfond, 2015)

Mémé ne tarde pas à trouver une famille fortunée à racketter, les Duprez de la Tour. Vrai-faux kidnapping de leur gamin, Yanus, le temps d'une virée explosive ensemble chez Euro Disney. Après cette parenthèse hallucinée, Mémé rend le môme à ses parents, fait accuser le maire, et voit le curé local s'envoler avec la rançon. Tout est en ordre, donc. Et si on transformait le domaine en imitation de Lourdes, avec sa grotte miraculeuse et tout le bizness que ça entraîne ? C'est bien pour la notoriété de l'endroit, mais rien ne vaut un bon vieux lupanar pour attirer la clientèle. Déjà, Mémé Cornemuse a d'autres idées qui fusent dans son esprit obsédé par Jean-Claude Van Damme. Et voilà un chirurgien esthétique se nommant Mickey Spillane, comme l'écrivain de polar, et Jackie Stallone en guise de marraine. Y a que la mort qui pourrait un jour arrêter cette Mémé Cornemuse…

 

Avec leurs péripéties foisonnantes et des brochettes de personnages originaux, les romans de Nadine Monfils appartiennent à la catégorie du polar. Néanmoins, on est loin du petit suspense balisé, ou même de l'intrigue noire sur fond social. C'est un univers perso que développe depuis une vingtaine d'années cette romancière. Ses héros s'exposent aux situations les plus insensées, ne sont excités que par l'excès, ne sont jamais loin d'une démence capable d'atteindre des sommets.

Depuis qu'elle a créé le personnage de Mémé Cornemuse (Les vacances d'un serial killer, La petite fêlée aux allumettes, La vieille qui voulait tuer le Bon Dieu, Mémé goes to Hollywood), Nadine Monfils s'en donne à cœur-joie. La vie est trop courte pour les “prises de tête” permanentes, pour ne pas goûter les plaisirs qui s'offrent à nous. L'auteure nous invite a une philosophie Carpe Diem, la plus rigolote possible. Amusons-nous une fois de plus avec cette fort sympathique comédie.

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2 janvier 2015 5 02 /01 /janvier /2015 05:55

Drôle de quartier que celui où la petite Niky habite avec ses parents, Marie et Luc Morgan. Leur voisine institutrice et amie Agnès Durieux vient de perdre la vie en vacances. Son corps a été retrouvé déchiqueté par les rochers dans les rapides de l'Ardèche. L'imaginative Niky ne croit pas en ce décès, elle est certaine qu'Agnès reviendra. Malgré tout, la maison de la défunte a été louée à une jeune femme rousse, Bettina. Celle-ci fait tout pour sympathiser avec la famille de Niky. Elle finit par amadouer la fillette. Peut-être aimerait-elle séduire le père, Luc, également ? À l'étage, c'est une dame prénommée Éva qui s'est installée. Avec sa jambe de bois et son comportement étrange, son allure de Cruella inquiète quelque peu Bettina.

Chez Niky, le plus malin, c'est Monsieur Émile. Il a compris qu'il vaut mieux se prélasser en passant pour un vieux chien con, plutôt que de participer à la vie de cette famille. Dans le quartier vit aussi Alfonse, l'ancien jardinier du château, un pervers surveillant les femmes depuis la tour de guet de l'édifice. Une rousse telle Bettina, rien de plus excitant pour lui. Et puis encore la vieille Carmen Dubouchon, dont le voisinage ignore qu'elle est auteure d'ouvrages pornographiques, mais dont on sait qu'elle adore les lapins nains. Enceinte, Marie apprend que sa sœur Chrystine a été assassinée. Décapitée chez elle, avec une mise en scène des plus sanglantes. Dans la main de la victime, un bracelet en macramé ayant pu appartenir à Agnès Durieux.

Adepte du crochet, le commissaire Kamikaze n'est pas emballé par l'affaire. Quand même, il reçoit le témoignage de Marie et Luc. Tout en expérimentant des remèdes à ses maux, Alfonse rôde la nuit dans le quartier. Ce sont les poubelles qu'il fouille, surtout celle de Bettina, pleine de précieuses reliques pour lui. Niki et Émile ont remarqué que Marie ne tourne plus très rond dans sa tête. Elle va brièvement être hospitalisée après une fausse-couche provoquée par un malaise. Marie prétend avoir été agressée par Éva-Cruella. De son côté, Carmen semblait apeurée par Dieu-sait-quoi. Le facteur signale au commissaire Kamikaze la disparition de la vieille dame. Peu après, Niki découvre le cadavre du facteur chez Carmen, bouffé par les lapins de la disparue.

Marie est placée en maison de repos, sa mémoire étant très perturbée par l'enchaînement d'évènements sinistres. L'absence de la jeune femme pourrait bien rapprocher intimement Bettina et Luc. Le commissaire Kamikaze fait le tour du quartier, questionnant Alfonse, Niki, et Bettina. Quant à Éva, elle lui fait l'effet d'une sorcière carrément maléfique. Le policier découvre l'obsession fétichiste d'Alfonse envers Bettina, et d'autres macabres détails. Si, finalement, Kamikaze est mis H.S., Luc et le chien Émile restent seuls pour secourir la petite Niky quand elle est en grand danger…

Nadine Monfils : Monsieur Émile (Série Noire, 1998)

Nadine Monfils jouit à la fois d'un large lectorat et de la reconnaissance des jurys : Prix «Polar 2007» au Salon «Polar & Co» de Cognac pour "Babylone Dream" ; Prix littéraire des lycéens et apprentis de Bourgogne 2009 pour "Nickel Blues" ; Prix de la ville de Limoges 2010 pour "Coco givrée" ; Prix de "La griffe Noire" 2012 (St Maur/G.Collard) pour l'ensemble de son œuvre. Lectrices et lecteurs adorent la fantaisie de ses suspenses. Car, si des crimes souvent horribles sont commis dans ses romans, ça se passe toujours dans des ambiances pour le moins singulières, voire carrément déjantées. L'imaginaire n'a pas de limite pour Nadine Monfils : pourquoi les petites filles ou les vieilles dames ne seraient-elles pas des monstres, par exemple ? On sourit énormément à la lecture de ses histoires.

On a peut-être oublié que Nadine Monfils fut également publiée dans la Série Noire : “Une petite douceur meurtrière” (1995) et “Monsieur Émile” (1998 et 2002). Une intrigue riche en glauques mystères, en crimes horrifiques et peuplée de personnages décalés. Tout l'univers cruel et drôle de Nadine Monfils est déjà présent, délicieux à souhaits. Le policier qui apparaît dans cette affaire doit être un cousin du Commissaire Léon, le flic qui tricote, héros fétiche de l'auteure. Si la série a été rééditée chez Belfond, sauf erreur un titre reste indisponible en France : “Les fantômes du Mont-Tremblant” (Québec-Amérique, 2009). Les titres parus chez Série Noire sont évidemment à redécouvrir.

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