Dans la collection Polars en Nord (Éd.Ravet-Anceau), le nouveau suspense de Maxime Gillio est intitulé “La fracture de Coxyde”. Une enquête périlleuse chez les Flamands pour un héros téméraire…
Amateur de bières, de tabacs forts, de plats en sauces, de nuits blanches et de bastons virulentes, le quinquagénaire parisien Jacques Bower doit suivre l’avis de son médecin traitant, et se mettre à la diète. Pour commencer, il va prendre l’air sur la côte belge, vers La Panne et Furnes. Pas tellement pour raisons de santé, ni même pour fuir sa compagne Véro, shampouineuse pour animaux. Un fait divers a attiré son attention. Van Haag, ex-conservateur du musée Paul Delvaux à Saint-Idesbald, est mort dans l’éplucheuse automatique d’une usine de frites surgelées en Flandres. Bien que sa présence là reste inexplicable, on a conclu à un simple accident.
Tout juste Bower sait-il que Van Haag organisa une rétrospective consacrée au peintre Paul Delvaux, exposition annulée au dernier moment. Madeleine, actuelle conservatrice du musée, lui apprend que Van Haag fut jadis membre d’un obscur mouvement artistique, les Reculistes. Devenus proches de Delvaux grâce à leur égérie Lotte, aucun d’eux n’a jamais connu la célébrité. Sauf Wout Baeteman, qui expose dans une galerie de La Panne, à la place de la rétrospective prévue autour de Delvaux. Bower ne tarde pas à sympathiser avec Léopold Spriet, un des derniers Reculistes. Ce littérateur anachronique est un bon vivant. De leur groupe artistique, il resta ami avec Van Haag et le comédien Jonas.
Peu après, Bower visite l’expo des œuvres de Baeteman. Selon Colvenaer, propriétaire de la galerie, c’est de l’art transgressif. Pour Bower, c’est merdique, littéralement à vomir. Le lendemain à Furnes, il tente de contacter Jonas, à l’occasion de la Procession des pénitents. Le comédien est abattu d’une balle en pleine tête. Au domicile de Jonas, il trouve pour principal indice une date, le 2 août. Les mêmes adversaires s’en prennent bientôt à la maison de Madeleine, la conservatrice du musée. Ça sent le roussi dans la région de La Panne.
Bower se rend à Merwijk, ville dont le bourgmestre n’est autre que Colvenaer, propriétaire de la galerie d’art. Il perçoit vite ici l’hostilité des Flamands contre l’ensemble des francophones. Une ambiance cultivée par le bourgmestre Colvenaer, leader d’un groupe politique à l’idéologie fasciste, prônant une supériorité flamande. Ceux qui, tel Bower, le dérangent ont droit aux méthodes musclées de Clarence, son homme de main. S’il est expulsé manu militari de chez Colvenaer, Boer a quand même croisé la fameuse Lotte. Ce n’est pourtant pas la compagne de cet homme. Après avoir interviewé le médiocre peintre Baeteman, Bower est sévèrement agressé sur ordre de Colvenaer. Il trouve refuge et soins chez Léopold Spriet, qui préfère s’éloigner. Il est temps que Bower soit rejoint par son ami Karim, afin d’affronter en duo leurs ennemis…
Si Jacques Bower est un proche cousin de Gabriel Lecouvreur, aussi fouineur et indépendant que lui, partageant certains de ses goûts, il possède son caractère personnel. D’ailleurs, le surnom de Bower est "Le Goret", ce qui désigne un jeune cochon, non pas un célèbre octopode à longs bras genre pieuvre. Les tribulations flamandes de cet enquêteur autonome l’amènent à prendre de vrais risques. Les milieux artistiques belges s’avèrent terriblement dangereux. Ses mésaventures sont toutefois ironiques et souriantes, l’auteur prenant plaisir à nous entraîner dans de multiples péripéties.
On retrouve la tonalité de son précédent roman, “Les disparus de l’A16”, avec cette forme narrative mouvementée et débridée qui convient à Maxime Gillio. Si elle est diablement agitée, cette histoire se veut aussi un hommage au peintre Paul Delvaux. En outre, l’auteur y effleure la délicate situation politique belge, gangrenée par les alliances entre nationalistes flamands et groupes néo-nazis, cause du bourbier dont ce pays ne parvient pas à sortir. Mieux vaut retenir, comme on le fait ici, les spécialités culinaires et l’assortiment de bières qu’offre la Belgique. Voilà une fort excitante comédie policière, dans la meilleure tradition du roman populaire.
On peut aussi cliquer pour mes chroniques sur les deux premiers romans de Maxime Gillio, sur "Le cimetière des morts qui chantent", sur "Les disparus de l'A16" ou encore pour le "Portrait chinois" auquel a répondu M.Gillio.