Après “Les six naïades” de Laurent Corre, les Éditions du Caïman nous proposent un nouveau titre en cette fin 2012, “La morte des tourbières” de Jean-Louis Nogaro.
Ludovic Mermoz est étudiant en journalisme. Il vient d’hériter d’une tante dont il ignorait l’existence, Viviane Sallarue. Celle-ci habitait un village à une vingtaine de kilomètres de Saint-Étienne, dans les Monts du Pilat. Ludovic quitte son Alsace pour découvrir ce coin du Massif Central. Curieuse commune disposant d’un grand gymnase, et dont les noms de rues font très soviétiques. Au hameau Les Gueyes, la maison de Viviane Sallarue fait face à la ferme de l’antipathique Claude Bonnet. Autoritaire avec sa femme Lise, le paysan hargneux préfèrerait racheter la maison plutôt que d’avoir un voisin. Ludovic consulte le médecin de sa tante, ainsi que la gendarmerie, mais le décès par noyade de Mme Sallarue n’apparaît pas suspect. Pourtant, on peut se demander ce qu’elle faisait sur une tourbière en pleine nuit.
Ludovic réalise que le gymnase est dédié aux deux sports pratiqués ici, basket et majorettes. Les deux clubs ont même atteint un haut niveau. C’est la tante de Ludovic qui dirigeait avec fermeté l’équipe de majorette, aujourd’hui entraînée par Lola Campagnole. Une certaine rivalité existe entre les clubs, pour des raisons financières. Installé en France de longue date, l’entraîneur roumain des équipes de basket ne semble pas avoir été tellement hostile envers Viviane Sallarue. Mais des rumeurs affirmaient qu’elle attirait l’argent des sponsors en prostituant ses majorettes. Il est vrai que les conversations malintentionnées vont bon train au bistrot de Marthe. Claude Bonnet monte un commando visant à décourager son jeune voisin de rester dans les parages. Ce sera un fiasco pour les paysans.
Ludovic a sympathisé avec un marginal, surnommé Le Djerbien. Vivant dans son camping-car, il s’écarte par choix de la société actuelle. La chef des majorettes, Lola Campagnole, va bientôt compléter ce trio amical. De son côté, l’effacée Lise Bonnet va mener son propre jeu, maintenant que son mari est mal en point après l’opération commando. Le premier vrai voyage de Lise va la mener jusque dans l’Ain. Bien qu’ayant pris quelques précautions, c’est peut-être un rendez-vous risqué auquel elle se rend. Ludovic se renseigne sur l’historique des majorettes, sur la famille de l’entraîneur du club de basket, et sur Lucille Kerouec. Internée en psychiatrie depuis plusieurs années, celle-ci fut une majorette de haut niveau. Les secrets de ce village et de sa tante sont certainement fort dangereux à dévoiler…
C’est un roman d’énigme très réussi qu’a concocté Jean-Louis Nogaro, qui a déjà plusieurs suspenses à son actif. Un village et ses mystères, un contexte qui a fait ses preuves dans une multitude de polars, bien entendu. Il s’agit donc de créer une ambiance, d’apporter des spécificités à l’intrigue. Ce que l’auteur ne manque pas de faire ici, dans une histoire riche en nuances. On s’interroge sur le rôle de Lise Bonnet, on sourit de la bêtise de son mari, on adhère au petit groupe d’amis qui se forme, on observe ce petit monde avec bien des questions en tête. Qu’on ne s’étonne pas qu’une petite bourgade comme celle évoquée possède des clubs sportifs titrés. C’est le cas de nombreuses communes dans diverses régions. Voilà un polar dans la meilleure tradition, qui ne décevra assurément pas les lecteurs.