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7 juillet 2014 1 07 /07 /juillet /2014 04:55
Ingrid Desjours : Sa vie dans les yeux d'une poupée (Pocket, 2014)

Barbara Bilessi est une esthéticienne fraîchement diplômée âgée de vingt-quatre ans. Elle habite avec sa mère aveugle, Marthe. Les deux femmes ne s'entendent pas très bien, la mère se montrant mordante avec sa fille. Barbara collectionne les poupées authentiques. Elle vient d'en acquérir une quand, rentrant chez elle ce soir-là, elle est agressée et violée dans un parc. Peu après, Barbara commence à travailler dans un institut de beauté. Elle reste dans le déni de son récent viol. Elle dialogue régulièrement avec la dernière poupée achetée, Sweet Doriane. Barbara se fâche contre l'influence qu'exercerait sur elle cette poupée, et la martyrise. Si elle a un petit ami, ce Raoul Poncet n'est certainement pas le prince charmant. Il se proclame “son mec”, mais ignore bien des choses sur Barbara.

Dans son personnage de Barbie, la jeune femme augmente son salaire en se prostituant. Ce second métier ne nécessite aucune attirance sexuelle, juste d'avoir l'esprit clair vis-à-vis des hommes. Par le bouche à oreille, elle se fait vite une petite clientèle. Dans son déni du viol, Barbara a vécu une grossesse fantôme. La voilà qui accouche par surprise d'un bébé. Un garçon, qu'elle n'a pas l'intention de déclarer officiellement. Fatalement, la mère de Barbara est mêlée à cette situation. C'est Marthe qui surveillera le petit quand, après quelques jours d'arrêt-maladie, l'esthéticienne retourne à l'institut de beauté. Barbara se comporte telle une maman attentive. Par contre, l'arrivée du bébé entraîne des disputes sérieuses avec la jalouse poupée Sweet Doriane.

Policier, Marc Pergolès a été victime avec sa compagne Annabelle d'un accident de voiture. La femme est décédée. Le policier a été amputé d'une jambe. Il est maintenant équipé d'une prothèse. De l'avis de son collègue et ami Ange Gardeni, Marc aurait dû prolonger sa convalescence. Car le caractère de Marc est plus agressif que jamais. Peut-être parce qu'il savait qu'Annabelle lui était infidèle, l'accident prend un autre sens dans sa tête. Il ne se contente pas de jouer au provocateur, mais pratique aussi la roulette russe. Ange est inquiet pour la santé mentale de Marc. Tandis qu'il suggère à son ami de voir un psy, il fait intégrer le policier dans la brigade des mœurs de leur commissariat.

Marc Pergolès va y être bientôt confronté à une affaire qui captive son attention. Le psy qu'il a rencontré est la troisième victime d'une prostituée. Celle-ci attache ses clients, se grime avec une moustache, et torture les hommes venus la voir. Marc, ayant esquissé un profil assez juste de la coupable, estime que cette femme n'en restera pas là. Qu'elle va finir par carrément tuer ses clients. Marc réussit à identifier la prostituée, et se propose de servir d'appât pour l'arrêter. Il imagine la détresse psychologique de la coupable, ce qui n'est pas sans l'émouvoir, lui qui n'éprouve plus guère de sentiments…

“Barbara a besoin d'être aimée. Par son enfant, par sa mère, par un homme. Et cet amour, elle l'obtiendra, même si ce doit être par la force.”

“Barbara a besoin d'être aimée. Par son enfant, par sa mère, par un homme. Et cet amour, elle l'obtiendra, même si ce doit être par la force.”

Moitié-moitié. C'est la forme choisie par l'auteure pour nous raconter cette histoire. D'un côté, il y a Barbara. Un cas psychiatrique, pas la peine de le taire. De l'autre, il y a Marc. Un caractériel suicidaire, inutile de le cacher. Existent donc deux possibilités pour les lecteurs. Soit on les accepte tels qu'ils sont, avec risque d'aggravation de leur état, car une amélioration est improbable pour l'un des cas. Soit on les juge négativement, en tant que personnages dérangés. Car la folie, schizophrénie ou instincts violents, peut constituer une explication, pas une excuse à tout.

Ingrid Desjours maîtrise très bien la construction de l'intrigue. Le déni de grossesse après viol, le petit ami qui ne correspond nullement à la jeune femme, les sautes d'humeur du policier, tout cela est distillé selon un bon dosage. Néanmoins, on pourra regretter une tendance à surcharger certains effets. Débuter un chapitre par “Putain de bordel de merde !”, parce qu'une sixième agression est découverte, c'est excessif. Si les dialogues avec la poupée sont justifiés, quelques passages de ces conversations apparaissent plus artificiels. En somme, la tension est déjà présente, n'en rajoutons pas. Petit défaut qui n'a rien de rédhibitoire, toutefois. En acceptant le jeu psychologique, c'est un roman qui se lit avec un certain entrain.

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commentaires

S
Bonjour, bien d'accord avec vos réserves! Sauf que je vais hélas plus loin:des "putain de merde" à chaque coin de page , histoire de choquer le bourgeois (à qui il en faut bien davantage), des personnages caricaturaux :la mi-pute mi-vierge, ( dénommée Barbara-Barbie, le ridicule ne tue pas la littérature, et c'est tant mieux) le flic amputé et border-line, la mère dérangée, le petit ami maquereau prénommé Raoul (oui...), une poupée qui parle (bien mal), des situations lues déjà mille fois...Et SURTOUT, une écriture bien faible, quand elle n'est pas maladroite..Mais je vous concède une construction correcte. Ce qui ne rattrape en rien les 24 euros dépensés. Si le thriller veut acquérir quelques lettres de noblesse, ce ne sera sûrement pas avec ce genre de production sans ambition ni inventivité, mais qui a pourtant bénéficié d'une publicité médiatique parfaitement injustifiée. Pour ajouter une note positive à mon commentaire, et mettre en avant une jeune auteure qui a choisi elle aussi le genre du thriller,je conseille fortement Reflex de Maud Mayeras, à la plume déjà très maîtrisée, et à l'atmosphère subtile et innovante.
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C
Bonjour Sophie<br /> J'ai débuté mon commentaire par &quot;&quot;moitié-moitié&quot;. Ce qui évoquait la forme narrative, mais aussi mon sentiment sur ce roman. Néanmoins, je reste moins sévère. Si je puis dire, le suspense psychologique &quot;ça passe ou ça casse&quot;. On y adhère en acceptant le postulat, ou pas. Je me souviens d'anciennes lectures, les romans de Boileau-Narcejac que j'adorais. J'avoue pourtant être totalement passé à côté de trois ou quatre de leurs suspenses psychologiques, sans raison objective, parce qu'ils ne &quot;passaient&quot; pas. <br /> Quant à l'étiquette &quot;thriller&quot;, elle est bien commode pour les éditeurs. Une tonalité assez violente, un suspense sur la démence, et hop voilà un thriller. Aux lecteurs de ne pas se laisser guider par cette seule étiquette (car il existe, oui, de bons thrillers).<br /> Je ne condamne donc pas du tout ce roman d'Ingrid Desjours, mais je comprends qu'on puisse être moins enthousiaste (surtout si on l'a acheté au tarif grand format).<br /> Amitiés.
Y
Salut Claude, <br /> je n'en ai lu qu'un de cette auteure (Écho) qui franchement ne m'a pas emballé, assez prévisible et &quot;déjà lu-déjà vu&quot;, je ne crois pas réitérer mon expérience il y en a tellement d'autres à découvrir<br /> Amicalement,
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C
Salut Yves<br /> &quot;Potens&quot; et &quot;Sa vie dans les yeux d'une poupée&quot; sont de bons thrillers où la psychologie joue un grand rôle, ce ne fut donc pas du tout un pensum de lire ce roman. Dans la mesure où nous avons l'embarras du choix, et beaucoup à découvrir, on peut s'orienter au gré de nos envies. Amitiés.
R
Un roman remarquablement bien construit ! L'intensité du récit et la qualité de la psychologie des personnages en font un thriller de haut niveau.<br /> À lire !
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C
Merci pour cet enthousiasme, mon cher Richard !<br /> Une histoire psychologique et intense, c'est certain.<br /> Amitiés.
P
C'est un roman que j'ai beaucoup aimé l'année dernière. Et les défauts que tu cites ne m'ont pas gênés. Par contre l'intrigue m'a bien secoué par sa construction. Amitiés
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C
Salut Pierre<br /> J'ai bien aimé aussi, sinon je ne l'aurais pas lu et chroniqué. Je pense qu'il faut juste prévenir de futurs lecteurs que le ton est, parfois, à la surenchère. Est-ce gênant ? Non, car la psychologie des deux héros &quot;tient la route&quot; par rapport à l'histoire, fort bien construite, oui. Amitiés.

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