Mystères en Bretagne, pour le premier roman de Guillaume Béchard "Abers amers", qui sort chez Pascal Galodé editeurs. Petit résumé, autour d'un mariage qui vire au carnage...
Bouquiniste et journaliste, Erwan est un rennais d’une cinquantaine d’années. Son vieil ami Raoul de Tregarec l’invite au mariage de sa fille Haude avec Patrick de Poulfanc, dans sa propriété finistérienne. Pour Erwan, c’est l’occasion de se souvenir de ses années estudiantines. Ils formaient un groupe d’amis défenseurs de la culture bretonne, avec Corentin Kerniel, Dominique Frugy, Raoul, et leur égérie Vefa de Lansulliac. S’affichant toujours dans l’esprit militant, Corentin est devenu banquier. Dominique dirige un magazine, auquel Erwan a longtemps collaboré. Quant à la riche Véfa, elle vit largement de la vente progressive de ses biens. Ce n’est pas le cas de son cousin Raoul, châtelain désargenté. Certes, la belle-famille de sa fille ne compte que de détestables parvenus friqués. Raoul espère pour ses fils un avenir plus brillant, peut-être illusoire.
Erwan a sympathisé avec Annick, qui tient le bistrot local Chez Marguerite. D’un milieu modeste, la jeune femme
s’épanouit ici. Après la messe de mariage, où se mêlent petite aristocratie et officiers de la Marine, vient la fête au manoir de Tregarec. Outre le vieil employé Sezni, c’est Annick qui assure
le service. Erwan, Vefa et Dominique se regroupent, sans que Corentin se joigne à eux. Soudain, le mariage bascule dans le drame. Aux tables d’honneur, vingt-huit invités sont victimes d’une
intoxication alimentaire. Malgré l’arrivée des secours, on ne sauve que provisoirement la mariée. Famille, nobliaux, officiers, sont décimés par un plat empoisonné. Le policier chargé des
premières constatations est Arsène Le Bodiec, vieil ami d’Erwan qui le considère comme un fin limier. Il est assisté du flic Lagadu qui, lui, porte un regard suspicieux sur tous les survivants.
Il est possible que l’affaire soit accidentelle, des gamins ayant joué avec du poison.
Vefa et Erwan décident de tenter la vie de couple, entre le château de Lansulliac et Rennes. Chez son amie, le bouquiniste pourra consulter la documentation paternelle, afin d’établir un ouvrage
généalogique sur cette famille. C’est Vefa qui organise la cérémonie des obsèques pour toutes les victimes. L’enquête se poursuit, Vefa étant interrogée en tant que cousine du défunt Raoul.
Larsonnec, vieil officier de Marine rancunier, s’accuse d’avoir empoisonné ces gens dont il était jaloux. Mais son cas relève davantage de la psychiatrie que de la justice. Par Arsène Le Bodiec,
Erwan a pu suivre l’évolution du dossier. Le rapport officiel policier amène à clore l’affaire, ce que confirme bientôt une décision judiciaire. Tandis qu’Annick hérite du bistrot Chez
Marguerite, Arsène est désormais un heureux retraité. Le couple Vefa et Erwan entretient de bonnes relations avec ces derniers. Pourtant, Erwan s’interroge toujours sur le drame. Un élu local
haïssait-il Raoul au point de supprimer l’ensemble des convives ? La généalogie va ouvrir une piste capitale pour Erwan…
Sans doute peut-on parler de “polar régional”, puisque l’histoire est ancrée dans des références bretonnes. D’ailleurs, le fond de l’intrigue s’inspire d’une légende traditionnelle. Si le décor a
son importance, c’est bien à travers les personnages que ce suspense trouve son meilleur atout. Issus de familles aristocratiques de souches anciennes (ou plus récentes), ce sont eux qui créent
le contexte. Raoul sauve les apparences, Dominique est le plus authentiquement noble du groupe, Vefa ne sait que faire de sa fortune, et le banquier se nomme Kerniel (!). Sans oublier le côté
villageois, avec le bistrot d’Annick et ses habitués. Une ambiance bien restituée, dans tous les cas. Même si Erwan reste un détective amateur dilettante privilégiant sa propre vie, et bien que
l’enquête n’aboutisse guère, la vérité arrivera discrètement. La tonalité assez enjouée du récit rend ce roman fort agréable à lire.