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14 décembre 2016 3 14 /12 /décembre /2016 06:06

En 2016, il s’est encore publié pléthore de polars en France. Confirmations ou nouveaux talents, la tendance est toujours à une très belle qualité. C’est vrai pour les titres français comme étrangers. Lorsqu’on a la capacité de lire beaucoup de polars noirs sur une année, il faut opérer des choix : être curieux d’auteurs qu’on n’a pas encore lus, ne pas négliger ceux que l’on connaît. Face à la diversité des inspirations, des intrigues, des tonalités, lire avec l’esprit ouvert apparaît une évidence. On est contraint de faire l’impasse sur quelques titres peut-être majeurs, mais qu’importe si c’est pour en découvrir d’autres également de très haut niveau. Le bilan de ces lectures variées n’est pas absolument simple à établir.

Cette année, ma sélection se compose de vingt romans. Dix pour cent des lectures ayant été chroniquées ici, environ. Ça ne signifie pas un rejet des quatre-vingt-dix autres pour cent, que j’ai aussi appréciés. Parmi eux, on trouve d’ailleurs un recueil de nouvelles de Stephen King, toujours hors-compétition. Ou certains qui m’ont semblé un peu trop conventionnels. Voire des auteurs émergents, qui auront plus tard toutes leurs chances, je leur fais confiance. Existe-t-il un point commun entre ces vingt romans qui apparaissent supérieurs ? Tous possèdent leur ambiance, leur écriture, et la plupart se rapprochent sur deux points : le contexte social et le caractère humain. Au-delà de l’intrigue, aussi forte ou perfectionniste soit-elle, la fiction a besoin de situations et de héros proches du réalisme.

Les 20 meilleurs polars de 2016 – la sélection de l’année

La révélation française de l’année, c’est incontestablement Chloé Mehdi avec “Rien ne se perd”. Si l’on ne devait en lire qu’un, ce serait celui-là. Les étudiants du Master Humanités et Industries Créatives de l'Université Paris Ouest Nanterre la Défense lui ont décerné leur "Prix Étudiant Polar" à la Bibliothèque des Littératures Policières.

Confirmation pour trois autres auteurs français, entre social et Histoire : Hervé Commère (Ce qu’il nous faut c’est un mort), Romain Slocombe (L'Affaire Léon Sadorski), Emmanuel Grand (Les salauds devront payer). Trois excellentes surprises, alliant solidité et subtilité : Patrick Eris (Les arbres en hiver), Pierric Guittaut (D'ombres et de flammes) et Ahmed Tiab (Le désert ou la mer). Plus un roman d’aventure percutant issu de la meilleure tradition, signé Dominique Maisons (On se souvient du nom des assassins).

Les 20 meilleurs polars de 2016 – la sélection de l’année

Chez les romanciers étrangers, honneur à deux Britanniques du côté de l’Écosse, avec Gordon Ferris (Les justiciers de Glasgow) et Peter May (Les disparus du phare). Un Australien mérite d’être retenu : Peter Temple (La rose de fer). L’Italie est représentée par Giampaolo Simi (La nuit derrière moi). On n’oublie pas l’Asie dans cette sélection, avec deux Japonais : Kazuaki Takano (Treize marches) et Keigo Higashino (La fleur de l’illusion), ainsi que le Hongkongais : Chan Ho-kei (Hong Kong noir).

Chez les Américains, on ne peut passer à côté de Thomas H.Cook (Sur les hauteurs du mont Crève-Cœur), David Joy (Là où les lumières se perdent), Ron Rash (Le chant de la Tamassee), Alex Taylor (Le verger de marbre), et Ryan David Jahn (La tendresse de l'assassin). Rien que des lectures qui ont peu de risque de décevoir les lecteurs…

Les 20 meilleurs polars de 2016 – la sélection de l’année

Ci-dessous, pour plus de détails sur chacun, il suffit de cliquer sur chaque titre pour lire la chronique qui a été consacrée au roman cité…

 

Chloé Mehdi : Rien ne se perd (Ed.Jigal)

Hervé Commère : Ce qu’il nous faut c’est un mort (Fleuve Ed.)

Emmanuel Grand : Les salauds devront payer (Éd.Liana Levi)

Romain Slocombe : L'Affaire Léon Sadorski (Éd.Robert Laffont)

Patrick Eris : Les arbres en hiver (Ed.Wartberg)

Pierric Guittaut : D'ombres et de flammes (Série Noire)

Ahmed Tiab : Le désert ou la mer (Éd.L'Aube noire)

Dominique Maisons : On se souvient du nom des assassins (Éd.de la Martinière)

Les 20 meilleurs polars de 2016 – la sélection de l’année
Les 20 meilleurs polars de 2016 – la sélection de l’année
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23 novembre 2016 3 23 /11 /novembre /2016 06:13

L’universitaire Régis Messac (1893-1945) est toujours à l’honneur, grâce à la revue trimestrielle “Quinzinzinzili” — dont le titre est à l’origine celui d’un de ses romans. Il publia d’autres livres, dont "Le miroir flexible", "La cité des asphyxiés", "A bas le latin !", "Valcrétin". Sans oublier sa thèse “Le «detective Novel» et l'influence de la pensée scientifique”, rééditée chez Les Belles Lettres, Prix Maurice Renault 2012 de l’association 813. L’objectif de cette publication n’est pas seulement de rappeler le parcours et les mérites de Régis Messac. Durant l’Entre-deux-guerres, les milieux intellectuels dont il fait partie sont très actifs, s’interrogeant souvent sur le futur. En tant que contributeur de la revue "Les Primaires", le pacifiste Régis Messac se fait l’écho des livres alors publiés, qu’il s’agisse d’intrigues policières ou qu’ils traitent de sujets sociaux et idéologiques.

Ce n°32 de “Quinzinzinzili” présente un hommage à André Castagné, décédé en 2015, qui fut un ancien élève de Régis Messac, début des années 1930. Cet éminent juriste de Montpellier cultivait d’autres passions plus artistiques, dont la poésie. Son érudition s’exerçait autant dans le domaine du Droit que sur les sujets culturels, ce dont témoigne Olivier Messac qui évoque leurs contacts. Autre hommage, par Anne Gabriel, au regretté Michel Jeury. Beaucoup de lecteurs se souviennent de l’auteur de SF qu’il fut. Pourtant, il faut également retenir chez cet “écrivain vagabond” une inspiration régionaliste. Ainsi que le montre un récent ouvrage, on trouve encore chez Michel Jeury une approche autobiographique, complétant le portrait de cet écrivain. Henri Barbusse, auteur de "Le feu", possiblement converti au communisme, est par ailleurs évoqué par Philippe Baudore qui a étudié ce personnage quelque peu controversé.

Le n°32 de la revue “Quinzinzinzili” est disponible

Quelques autres parutions de livres sont évoquées dans ce numéro, en lien avec l’époque de Messac. On notera par exemple la sortie d’un livre, signé Yves Frémion et Daniel Durandet, consacré à l’illustrateur Raylambert (1889-1967). Dans les années 1930, nous dit-on, il révolutionna les manuels scolaire grâce à des images beaucoup moins austères, bien plus vivantes. Il participa à élargir “les bienfaits de la découverte et l’appropriation du savoir” par ses illustrations plus chaleureuses… Une large place est ici faite à un échange de courriers entre Régis Messac (et plus tard sa famille) et son ami René Bonnet. Outre le contexte de leur temps, tous deux développaient le projet d’une bibliothèque, le “Musée du soir”, pour proposer des auteurs sélectionnés au public. Cette correspondance est évidemment le reflet d’une époque.

Autour d’un roman de Fitz-James O’Brien, “The diamond lens”, Étienne d’Issensac présente un tableau comparatif des quatre traductions de cette histoire. Exercice fort intéressant, qui permet d’observer (sur quatorze extraits, avec les phrases d’origine en Anglais) les nuances apportées par chaque traducteur. En préambule, dans l’article “La forme, c’est le fond”, Étienne d’Issensac rapporte avec malice des propos que j’ai écrits – dans une réponse à un commentaire – chez Action-Suspense. J’y explique, de façon assez souriante, pourquoi je ne cite jamais les traducteurs. Pour autant, il n’est pas question de minimiser leur rôle essentiel, qui va au-delà de la simple compétence, c'est certain. Vaste débat, les lecteurs ne pouvant se substituer aux éditeurs dans la mise en valeur de ce métier.

Chaque numéro de la revue “Quinzinzinzili” coûte 7€. On peut s'y abonner en s'adressant à la Société des Amis de Régis Messac (71 rue de Tolbiac, Paris 13e). À Paris, cette revue est disponible chez plusieurs libraires. Les romans et autres écrits de Régis Messac sont réédités aux éditions Ex-Nihilo, 42bis rue Poliveau, Paris 5e. Le prochain livre de cet auteur, tropical roman d’aventure intitulé “La loi du Kampilan” (un inédit) sera publié aux Éditions Ex-Nihilo dès le 16 janvier 2017. Ce tirage est limité, il n’est peut-être pas trop tard pour pré-commander ce livre.

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20 novembre 2016 7 20 /11 /novembre /2016 16:08

Les Trophées 813 ont été décernés le week-end du 19-20 novembre 2016 lors du festival Noir sur la ville à Lamballe.

Les lauréats des quatre récompenses :

Trophée 813 romans français :

Christian Roux, "Adieu Lili Marleen", éd. Rivages.

Trophée 813 romans étrangers – Prix Michèle Witta :

Jo Nesbo, "Le Fils", Série Noire Gallimard, (traduit par Hélène Hervieux).

Prix Maurice Renault (documentaire) :

"C'est l'histoire de la Série Noire", Collectif, Gallimard.

Édition publiée sous la direction d'Alban Cerisier et Franck Lhomeau avec la collaboration d'Aurélien Masson, Claude Mesplède, Patrick Raynal et Benoît Tadié. Avant-propos d'Antoine Gallimard.

Trophée 813 Bande-Dessinée :

"Les Nuits de Saturne", dessin Pierre-Henry Gomont, d'après "Carnage constellation" de Marcus Malte.

Trophées 813 : les vainqueurs 2016
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18 novembre 2016 5 18 /11 /novembre /2016 06:05

La guerre d’Espagne pose un problème politique au gouvernement de Léon Blum. Un soutien visible aux Républicains est impossible, ce qui n’empêche pas la France de livrer des armes à ceux qui combattent le Général Franco et ses troupes. À Paris et dans plusieurs villes du pays, des attentats sont très certainement l’œuvre d’agents des services secrets espagnols traquant leurs adversaires. Aussi compétent soit-il, le ministre de l’Intérieur Marx Dormoy, proche de Blum, ne peut rien pour résoudre ces affaires. Même s’il imagine que les franquistes ont pu bénéficier de l’aide de l’extrême-droite, en particulier ceux de l’Action française.

En août 1937, la guerre civile se poursuit en Espagne, quand un sous-marin espagnol battant pavillon républicain fait escale dans le port de Brest. Le commandant de ce sous-marin est plutôt franquiste, mais il a craint une mutinerie. L’arrivée du C2 – c’est le nom du submersible – dans le Finistère n’échappe pas aux services secrets de Franco. Le 18 septembre, un commando dirigé par le commandant Julian Troncoso, maitre espion du Caudillo, basé à Irun, prend d’assaut le C2. Grâce à l’un des marins qui résiste, l’opération est un échec. Trois puissantes voitures prennent la fuite en direction de la frontière espagnole. Plus tard, la plupart des franquistes seront interpellés. Y compris Troncoso, malgré ses excellentes relations avec la France.

L’enquête de police sur l’affaire du C2 commence, révélant d’étranges liens avec les évènements parisiens, les attentats visant des Espagnols et l'extrême-droite française. Eugène Deloncle et les groupuscules fascistes restent actifs depuis le 6 février 1934, ratant de peu un coup d’État. Ils ont monté un réseau puissamment armé, en lien avec les dictatures européennes du moment : la Cagoule. Il existe des rapports très directs entre les services secrets de Troncoso (désavoué par Franco quand il sera arrêté) et les fascistes français, dont la police découvre les caches d’armes et met en prison les meneurs. Mais le contexte de ces années précédant de peu la 2e Guerre Mondiale ne permettra pas que toute la lumière soit faite…

"L’Affaire du sous-marin rouge" sur France 3 dès le 21 novembre

Écrit et réalisé par Hubert Béasse, "L’Affaire du sous-marin rouge" est une immersion documentaire dans la France de l’entre-deux guerres. Événement méconnu, l’affaire du C2 montre une nation divisée, proche de la rupture. La neutralité du gouvernement du Front populaire dans le conflit espagnol pèse sur ces années, tandis que progresse l’extrême-droite fascisante. Ce documentaire de 52 minutes présente quantité d’images d’archives, toujours impressionnantes, des animations retraçant certaines scènes, ainsi que l’analyse des faits réels et des aspects secrets du dossier par plusieurs historiens. Pour réaliser son film, Hubert Béasse s'est notamment appuyé sur le livre de Patrick Gourlay “Nuit franquiste à Brest” (Éd.Coop Breizh, 2013).

"L’Affaire du sous-marin rouge" est une coproduction Vivement Lundi !/France Télévisions avec la participation du CNC, de la Région Bretagne, de la Procirep et de l’Angoa. 

Diffusion sur France3 Bretagne et France3 Pays de la Loire le 21 novembre après le Grand Soir3 – Diffusion sur France3 Paris-Île de France le 5 décembre après le Grand Soir3 – Diffusion en replay gratuit pendant 7 jours sur Pluzz.fr à partir du 22 novembre 2016.

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15 novembre 2016 2 15 /11 /novembre /2016 10:52

Un rendez-vous télé à ne pas manquer, vendredi 18 novembre sur ARTE :

l'adaptation du roman de Marin Ledun "Les visages écrasés"

avec Isabelle Adjani dans le rôle principal.

Cliquez sur le lien ci-dessus pour lire ma chronique autour de ce téléfilm.

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12 novembre 2016 6 12 /11 /novembre /2016 05:59
Lamballe : 20 ans du festival Noir sur la Ville, 19-20 novembre 2016

Les vendredi 18, samedi 19 et dimanche 20 novembre 2016, le festival Noir sur la Ville fête son 20e anniversaire à Lamballe (Côtes d’Armor, 22). Débats, animations, expos, c’est chaque année une occasion privilégiée pour rencontrer les auteurs de romans noirs, de polars et de romans-jeunesse.

Les auteurs annoncés le week-end à la Salle municipale de Lamballe : Franck Thilliez, Hervé Commère, Franck Bouysse, Caryl Férey, Hervé Le Corre, Thomas Bronnec, Stuart Neville, Sophie Hénaff, Sophie Loubière, Olivier Truc, Morgan Audic, Tim Willocks, Jérôme Leroy, Alain Emery, Elena Piacentini, Anne-Céline Dartevel, Mouloud Akkouche, Gérard Alle, Pascal Millet, Isabelle Micaleff, Pascale Dietrich, Jean-Bernard Pouy, Patrick Raynal, Marc Villard, Jean-Hugues Oppel, Manon Fargetton, Sandra Martineau, Colin Niel, Jean-Paul Nozière, Patrick Pécherot, Benoît Séverac, Benjamin Legrand, Christian Roux, Sylvie Deshors, Marion Brunet, Jean-Noël Levavasseur, Ian Manook, Patrick Delperdange, Mickaël Mention, Pascale Fonteneau, Olivier Thomas, Luc Jacamon, Hervé Boivin, Patrick Bard, Denis Flageul, Jean-Christophe Tixier, François Guérif et Claude Mesplède. (Olivier Truc ne sera présent que le samedi, Hervé Le Corre partira le dimanche à 15h, Patrick Delperdange et Claude Mesplède partiront dimanche à 16 heures).

La plupart des auteurs présents à Lamballe ont été l’objet d’articles chez Action-Suspense. Pour les noms figurant ci-dessus en BLEU, il suffit de cliquer sur le lien pour lire ma chronique sur un de leurs romans.

Lamballe : 20 ans du festival Noir sur la Ville, 19-20 novembre 2016
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3 novembre 2016 4 03 /11 /novembre /2016 18:27

La librairie du Québec à Paris invite les lectrices et les lecteurs à rencontrer le samedi 19 novembre 2016, dès 15h, deux auteures présentant leurs livres.

Anne Pélouas : "Les Inuits résistants ! Lignes de vie d'un peuple"

Peuple de l’Arctique à l’histoire millénaire, les Inuits ont traversé le 20e siècle en passant du nomadisme à la sédentarité. Doués d’une faculté d’adaptation exceptionnelle, ils traversent aujourd’hui les temps troubles générés par le réchauffement climatique et s’attachent à concilier tradition et modernité dans leur vie au quotidien. Au Nunavut comme au Nunavik, l’auteure est partie à la rencontre des Inuits d’aujourd’hui, hommes et femmes, qu’ils soient ranger, sculpteur, pilote, pêcheur, cinéaste, garde-parc, rapper, musher, designer de vêtements… Au travers de récits vivants qui traitent aussi bien de géopolitique, que d’économie, de culture, d’environnement ou de défis sociaux, elle enquête sur le terrain et leur donne la parole. Chaque chapitre est introduit par un grand entretien avec, notamment, Peter Taptuna, Premier ministre du Nunavut, Sheila Watt-Cloutier, l’une des voix inuites les plus marquantes, Norman Vorano, spécialiste de l’art inuit, Gérard Duhaime, sociologue et politologue, et Adam Tanuyak, jeune musicien-chanteur.

Un rendez-vous québécois (à Paris) le samedi 19 novembre 2016

Monique Durand : "Le petit caillou de la mémoire"

Le petit caillou de la mémoire, c’est l’homme face à la nature démesurée. C’est William de la mer et des forêts profondes, qui pêche des saumons, abat des arbres, aime des femmes, cuit au soleil lent de sa vie. Une ode aux gens simples, aux défricheurs. Écriture somptueuse et grâce tranquille, le roman nous entraîne de Saint-Suliac sur Rance aux bords de mer gaspésiens, en passant par Terre-Neuve. "J’ai souhaité raconter un peu de cette race d’hommes et de femmes en bois dur en train de disparaître, déjà disparue sous les coups de boutoir des temps qui changent et qui bouleversent tout de nos êtres et de nos us. Simplement dire qu’elle fut, avec ses grandeurs et ses misères. Quelque chose de nous s’éteint avec elle. J’ai aussi voulu raconter, par la médiation d’un petit caillou, la transmission d’une génération à l’autre de la folle furieuse faim de vivre, du sens de la beauté du monde et de la nostalgie, le plus humain des sentiments."

La librairie du Québec, 30 rue Gay-Lussac, Paris 5e.

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30 octobre 2016 7 30 /10 /octobre /2016 06:05

Aucun auteur n’a probablement écrit un polar se passant intégralement dans un cimetière. Ce genre de décor sert parfois à quelques scènes pathétiques. Des obsèques sous une fine pluie qui symbolise larmes et tristesse. Des funérailles où l’enquêteur espère repérer un assassin, venu par obligation ou par défi. Ça peut constituer le pivot d’une intrigue, quand le crime est commis dans un cimetière, ou quand le héros est attiré en ces lieux de façon obsessionnelle. Il y aurait quantité de titres à citer, certainement.

Que toute une histoire se déroule entre les murs d’un cimetière, on doute que l’expérience ait été tentée par des romanciers. Pourtant, une parfaite unité de lieu. Ont-ils craint qu’un tel décor soit trop statique, comme figé pour l’éternité ? Diable, ça ne manque pas, les détails à exploiter, y compris dans un modeste cimetière rural. Celui de La Chèze (Côtes d’Armor, 600 âmes) vaut sûrement celui du Père Lachaise, même s’il est moins prestigieux, moins visité. La centaine de tombes du petit cimetière de Montplaisant (Dordogne) n’a rien à envier à celui de Montparnasse.

On a Toussaint cimetière qui nous attend…

Au fil des allées et des travées, rares sont les sépultures identiques, monumentales ou sans artifice, selon la volonté ou les moyens des défunts (mourir coûte cher, il est vrai). On verra un ou plusieurs majestueux caveaux de familles dans le carré des véritables autochtones, des habitants ancestraux de la commune. Quelques-uns sont délaissés, faute de descendants. Là-bas, peut-être un mausolée en souvenir d’une gloire locale enterrée ailleurs ? Pas si loin, des cyprès séculaires laissent-ils peu à peu la place à des arbres plus rachitiques, minés par la pollution ? N’y a-t-il pas un remarquable chêne ou un bon vieux sapin symbolisant on ne sait plus quoi ? Ceinturés de murs de pierres à l’ancienne ou en béton grisaillant, enfermés dans leurs tombes scellées, les défunts ne s’évaderont plus d’ici.

Quand on est mort, c’est pour longtemps.

Il est à noter que, fort heureusement, nos cimetières ne regorgent pas de victimes d’assassinats. Lorsque c’est le cas, les inscriptions sur les tombes évitent les précisions du genre : "À la mémoire de l’oncle Jean-Louis, célibataire fortuné, occis par ses neveux pour se partager l’héritage". Si l’affaire fit grand bruit en son temps, à part une poignée de commères venimeuses (il en existe encore), qui se souvient de ce crime vénal ? D’ailleurs, les aimables épitaphes sont passées de modes, hélas : "La coquette mémé Huguette nous laisse tant de souvenirs chouettes" est remplacé par une simple plaque "Souvenir", d’une affligeante banalité. Pauvre mémé Huguette, vous méritiez mieux !

On a Toussaint cimetière qui nous attend…

Le cimetière, lieu de recueillement, cela empêche-t-il d’y placer l’action d’un roman ? On n’est pas obligé de penser à des saccages, des profanations, du vandalisme dû à des sagouins incultes, des malfaisants ivres, des satanistes d’opérette, ou autres sombres crétins provocateurs. Encore qu’une surveillance policière pour alpaguer les auteurs de telles dégradations, ça peut servir de base au récit. À condition qu’il y ait ensuite des trucidés au boulevard des allongés, c’est un minimum. Ou alors imaginons un rendez-vous après la fermeture du cimetière, entre chien et loup, tandis qu’une brume vespérale envahit l’endroit. Le tueur potentiel et sa future victime retardent la rencontre fatale. Un jeu de cache-cache autour des sépultures qui peut durer des heures, toute la nuit. Unité de temps, en plus.

Pour densifier l’ambiance, ponctuons-la de coups de feu sourds, chacun possédant un de ces revolvers munis de silencieux. Comme dans les films de Georges Lautner, un "plop" fuse de temps à autre. Un troisième protagoniste viendra-t-il perturber la vengeance en cours ? Apportera-t-il des révélations fracassantes sur ce qui motive la rivalité haineuse entre nos deux antagonistes ? Des rebondissements, il faut que ça bouge ! Tiens, un voisin trop curieux qui promenait son chien pointe le nez au portail ? Attention, il risque une balle perdue. Le clodo qui squatte l’appentis des services techniques municipaux ferait bien de déguerpir également, s’il est capable de sauter par dessus le mur d’enceinte.

On a Toussaint cimetière qui nous attend…

Et voici que résonne un téléphone portable dans le silence nocturne. Premier appel, si un complice s’impatiente : “Ben quoi, toujours au cimetière, tu ne l’as pas encore abattu ?” Plus tard, à la seconde sonnerie du portable, c’est le commissaire Javert (connu de la France entière) qui prévient le coupable : “Les forces de l’ordre cernent le cimetière, sortez immédiatement les mains en l’air.” Ce policier croit-il vraiment que le criminel va se rendre sans résister, sans au moins cracher ce qu’il a sur le cœur ? Des rebondissements ne sont pas impossibles, d’ici le dénouement.

Tout un polar situé dans un cimetière ? Ça aboutirait sans doute à une accumulation de clichés, au mieux à une parodie tragi-comique. Finalement, abandonnons l’idée. Gardons juste une ou deux scènes, c’est suffisant. Revenons dans la réalité : vers la Toussaint, profitons de prendre l’air tout en rendant hommage à nos défunts, décédés de mort naturelle.

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