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17 mars 2012 6 17 /03 /mars /2012 06:32

 

À partir de 1966, Dominique Arly fut un des piliers de la collection Spécial-Police du Fleuve Noir, tout en publiant aussi des romans d’Angoisse. La plupart de ses titres sont de bons romans à suspense, avec une brochette de suspects, des fausses pistes, quelques scènes suggestives, et un dénouement à la hauteur. Il mit en scène plusieurs limiers : l’inspecteur Solin, l’étudiant Hugues Marestier, le policier retraité Émile Delmont, sont quelques-uns des enquêteurs qu’on retrouve au fil de ses romans. Il en est un autre, qui apparaît dans au moins une demie-douzaine de romans, Jean-Pierre Martin. C’est un jeune gendarme qui ne manque pas d’initiative, ni de sens de l’observation. Ses aventures dans des petites villes tranquilles restent exemplaires de leur époque.

À travers ce personnage, Dominique Arly ne fait pas exactement l’apologie de la gendarmerie. Car Jean-Pierre Martin enquête principalement en solo, en parallèle. Néanmoins, on peut supposer sa vision des choses par cet extrait, dans Les créanciers (1974) : Les gendarmes ! La police en tenue française est la plus mal aimée du monde. La plus méconnue également. Les Français veulent ignorer que leur gendarmerie a évolué. Et, comme sous l’effet de quelques scandales retentissants, l’opinion publique a tendance à considérer que la police en civil est corrompue, il ne reste à proposer à l’admiration des foules que les exploits romanesques des Privés. Lesquels, en réalité, ne sortent pratiquement jamais de leur basse besogne de mouchards. Puisque nous sommes en France, autant que l’enquêteur s’inscrive dans notre tradition quelque peu franchouillarde…

Voici quatre exemples de cette petite série de romans.ARLY-1

 

Meurtre en Eurovision (1966)

Compétition de descente à skis à Megève. Favori, le Français s’élance sous l’œil des caméras de télévision. Il franchit le Mur des Épines, puis tombe par accident. En réalité, il a été abattu par un tireur caché. Tous ses amis, dont le gendarme Jean-Pierre Martin, ont vu les faits en direct à la télé. Grippé, au repos, Martin tient à savoir ce qui s’est produit. Aux abords de la piste, il relève des traces menant à une grange, où il trouve un foulard vert parfumé. Parmi les champions étrangers rivaux de son ami, certains n’ont pas participé à la course: où étaient-ils ? Anne-Marie fut longtemps la petite amie du défunt skieur. Il s’était montré fort incorrect avec elle, depuis qu’il connaissait la notoriété. Elle a pu vouloir se venger, d’autant qu’elle n’a pas d’alibi précis. Les relations entre le champion et les gérants de sa boutique pour skieurs à Megève n’étaient pas très bonnes, non plus. Un commerce qui mériterait d’être surveillé. Les policiers menant l’enquête officielle devraient davantage s’intéresser aux indices fournis par le gendarme. Y compris concernant un jeune Parisien, peut-être pas si blessé qu’il le dit…

 

ARLY-2La menteuse (1968)

Le gendarme Jean-Pierre Martin est de garde à la brigade de Sauzier, quand Mme Verneil l’informe de la disparition de sa fille Jacqueline. Trois heures plus tôt, une voisine aurait vu la jeune fille d’à peine dix-huit ans à la porte de leur maison. Un instant après, elle n’était plus là. Gilbert, le jeune frère de Jacqueline, ne sait rien de plus. Débute une enquête de routine pour le gendarme Martin. La meilleure amie de Jacqueline affirme que la disparue invente divers mensonges concernant sa vie privée. Dans l’armoire de la jeune fille, Martin trouve des vêtements et des produits coûteux. Le maigre salaire de Jacqueline était insuffisant pour se payer ce luxe. Ce n’est pas Jacky, qui fut un temps son petit ami, qui lui aurait offert ça, non plus. Le fou échappé d’un asile voisin est-il concerné par l’affaire ? La jeune fille a laissé une lettre, annonçant qu’elle part avec l’homme de sa vie. Les Redon père et fils semblent concerné par cette disparition. Qui devient inquiétante quand une lettre postée de Nice annonce l’enlèvement de Jacqueline. Il faudra le meurtre d’une dame âgée et un indice dans une enveloppe pour que le gendarme commence à approcher d’une vérité assez complexe…ARLY-3

 

Crimes sous le Mont-Blanc (1970)

Jean-Pierre Martin termine un stage à la brigade du Mont-Blanc, quand un crime est commis sous le tunnel. M.Bercier, la victime, est le patron d’une brasserie de la région. Il se rendait en Italie quand il a été agressé. Connaissant les qualités d’enquêteur de Martin, le commissaire Grignon lui demande de se renseigner sur l’affaire. Plusieurs pistes possibles apparaissent bientôt. D’abord Ida Renaldo, jeune et belle Italienne que Bercier était sur le point d’épouser; et Walter Sarone, l’amoureux jaloux d’Ida, sans doute celui qui a tenté d’assommer le gendarme. Chez les proches de Bercier, il y a son fils Jacques et sa fille Thérèse, pas très causante. Sans oublier le barman Maurice et la cuisinière Mme Ramuz. Collecter les moindres détails est indispensable si Martin veut avancer dans son enquête. Walter ou Jacques font de bons suspects, mais c’est grâce à un second meurtre que l’on commencera à comprendre…

 

ARLY-4Funèbre cavalcade (1973)

C’est jour de fête à Vériville. Dans le défilé des chars de la parade, celui du club de foot (La fusée de Vénus) a du succès. Mais c’est L’Île de Tahiti qui attire le plus les regards. Surtout celui du gendarme Jean-Pierre Martin, pas insensible au charme de la vahiné blonde Véronique. Un incident se produit, M.Corbel perdant le contrôle de la voiture tractant le char. Il a été empoisonné par le vin qu’il buvait pour se désaltérer. Une bouteille mal lavée où il restait un fond de poison, ou bien s’agit-il plutôt d’un acte criminel ? Président du Club de foot et de l’association des chasseurs, prêtant ses hangars pour la fête, M.Corbel semblait apprécié de tous. Célibataire, il avait quelques maîtresses, et l’ancien président des chasseurs M.Manichon le détestait. Rien qui donne une nette explication. Nostalgique de Tahiti, le jeune Jean-Paul a-t-il supprimé le patron de son amie Claire pour qu’elle parte avec lui au bout du monde ? Léon Chagny est-il jaloux de sa belle-sœur Juliette, qui devait épouser Corbel, au point d’avoir tué la victime ? Quel est donc le rôle exact de Véronique dans cette affaire ? Une chose parait sûre, l’habile assassin fait partie des organisateurs de la fête…ARLY-5

 

Jean-Pierre Martin enquête également dans Les créanciers (1974) alors qu’il est en poste à Bourgamont, puis dans Une si jolie majorette (1976) où il est de retour à Vériville (où a été étranglée et violée Marie-Ange, la capitaine des majorettes). Je n'ai pas le souvenir d'autres aventures de ce personnage. Notons que Michel Gourdon offrit de séduisantes illustrations aux romans de Dominique Arly.

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16 mars 2012 5 16 /03 /mars /2012 06:29

 

Le premier polar de Jérémie Guez Paris la nuit est disponible chez J’ai Lu. Bonne occasion de découvrir ce jeune auteur…

GUEZ-2012JluParis Nord, c’est le territoire d’Abraham depuis toujours. Longtemps j’ai cru que l’existence c’était ça, ce bordel incessant. Ce n’est qu’en vieillissant que je me suis rendu compte que le bruit n’est inhérent qu’à la pauvreté. Cette fureur qui s’autoalimente est créée par le manque d’éducation, la violence et l’absence totale d’intimité. Dans ma rue, le repos est interdit, et on grandit tous de la même façon. Abraham loge chez son père, vit de combines et de petits trafic, se drogue un peu. Il a une petite amie étudiante, Julia. Goran est son meilleur copain depuis l’enfance. Toujours de connivence, ils partagent certains moments excitants, telle cette baston à Pigalle, qui se termine par une nuit au poste de police.

C’est en accompagnant leur pote Nathan dans un clandé qu’Abraham émet l’idée de braquer les clients de cette salle de jeu d’argent. Sans doute Nathan y avait-il déjà pensé, mais c’est Abraham qui est capable de réunir une petite bande. Avec Goran et Nathan, Trésor (un grand Black), et Karim pour s’occuper de la voiture, le braquage apparaît possible. Un peu de préparation et un bon repérage, l’affaire est lancée. Abraham a besoin d’amphètes, mais aucun de ses complices ne craque durant l’attaque du clandé. Écoutez les mecs, vous avez voulu jouer les durs, vous allez me prendre un peu de pognon. Mais croyez-moi, je vais vous retrouver parce que Paris, pour les gars comme nous, c’est petit leur promet-on.

8000 Euros chacun, joli pactole qu’il convient de ne pas trop exhiber. Larguant Julia, Abraham se rapproche d’un groupe d’étudiants du Quartier Latin. Il méprise Pierre et ses amis, mais ceux-ci deviennent rapidement de bons clients toxicos. Si la jeune Alexandra ne manque pas de charme, Abraham se doute qu’elle sera vite accro aux drogues. Les semaines ont passé. Nathan et Trésor sont partis claquer leur part sur la Côte d’Azur. Goran se montre maintenant inquiet. Il pense que Karim les a balancés à leurs victimes du clandé. Même si ça ne suffit pas, il est prudent pour le duo de changer de planque. La violence ne tarde pas à s’exprimer de plus en plus fortement pour Abraham et Goran…

 

Utilisant un sujet qui a fait ses preuves, c’est un sympathique premier roman que produit ici Jérémie Guez. Petits truands combinards, braquage et partage du butin, un quotidien tout aussi médiocre par la suite, le risque impalpable en supplément. Des ingrédients solides du roman noir, correctement maîtrisés. Des personnages intemporels de la criminalité. Toutefois, on cherche vainement l’argument de LCI figurant en quatrième de couverture : Avec des dialogues à la Audiard, des discours prenants et percutants. Non, rien de vraiment neuf dans la narration, ni dans un dialogue tel que Mais putain de merde, c’est un coup en or. On peut se faire un peu de blé sans risque, mec. C’est de l’argent sale, donc pas de police à l’arrivée. On peut penser que cet auteur trouvera probablement sa propre tonalité dans ses romans suivants, car on sent un potentiel. Ça reste un polar de bon niveau, plutôt agréable à lire.

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15 mars 2012 4 15 /03 /mars /2012 06:14

 

Aurélien Molas a publié il y a deux ans son premier roman "La onzième plaie" (Albin Michel). Après ce beau succès, allait-il confirmer avec un deuxième titre de qualité ? "Les fantômes du Delta" (toujours chez Albin Michel) nous prouve que c'est le cas.

MOLAS-2012Au Nigeria, début des années 2000, le Delta du fleuve Niger est l’endroit le moins accueillant du monde. C’est un vaste champ pétrolifère surexploité, dévasté par les marées noires causées par des plateformes et des pipelines mal entretenus. La manne financière du pétrole ne profite pas aux populations installées là. Elles ne peuvent ni pêcher, ni cultiver dans ces terres polluées. Mouvement de résistance local, le MEND est dirigé par Yaru Aduasanbi et Henry Okah. Le premier s’appuie sur les efficaces guérilleros du second. Bien qu’il s’agisse à l’origine de s’opposer à l’état nigérian qui les traque, le MEND a aussi des objectifs moins avouables. Ils vont bientôt kidnapper une petite fille, Naïs. L’enfant en bas âge fut confiée à l’orphelinat du père David. Ce missionnaire marxiste est un homme qui dérange. Les autorités trouvèrent un prétexte pour faire fermer l’établissement. Pourtant, les années suivantes, il poursuivra ses activités sous d’autres formes.

Benjamin Dufrais et Jacques Rougée appartiennent à Médecins Sans Frontières. Parmi leurs missions, ils interviennent dans l’ex-orphelinat du père David. Sous le contrôle de l’état, on y garde aujourd’hui des enfants fragiles. C’est ainsi qu’ils découvrent le cas de Naïs, mieux suivie médicalement que les autres. Différence génétique, ou mythe de l’enfant-sorcier, en font une sorte d’objet rare. C’est sans doute pour sa grande valeur qu’elle est enlevée, avec les deux médecins de MSF, par le commando d’Henry Okah. Ils sont retenus comme otages au QG du MEND, avant d’effectuer un échange contre une forte somme. En réalité, les médecins doivent être supprimés. L’opération est un échec, quand les forces armées nigérianes affrontent les hommes de Okah. Le duo de MSF est libéré, sauvant en même temps Forman Stona, un faux rebelle infiltré chez les guérilleros. Yaru Aduasanbi est en fuite avec la petite Naïs. Henry Okah est finalement arrêté.

Après quelques mois, Dufrais et Rougée sont de retour au Nigeria, dans le secteur de Damasak. Megan, infirmière divorcée de 32 ans venant de Chicago, a rejoint la mission MSF. Ayant perdu prématurément sa fille, elle va se consacrer à la pédiatrie. Parmi des réfugiés admis au dispensaire, Benjamin Dufrais reconnaît la petite Naïs. Yaru Aduasanbi et elle sont désormais recherchés par plusieurs chasseurs. Représentant la police officielle, Forman Stona n’est pas le pire. Ancien du MEND, l’albinos Umaru Atocha s’est mué en mercenaire pour les retrouver. Il ne craint pas de faire des victimes, telle la prostituée Kéziah qui sera soignée au dispensaire. Ayant négocié sa libération, Henry Okah est également sur la piste de Naïs et Yaru Aduasanbi. Le nouveau poste de Megan la conduit à l’hôpital de Baganako, du côté du lac Tchad. Chacun des poursuivants espère être le premier à repérer Aduasanbi et l’étrange petite fille…

 

Ce pourrait être un roman d’action, un thriller d’aventure. Il apparaît rapidement qu’Aurélien Molas a souhaité construire une histoire plus ambitieuse. Un portrait de cette région africaine, avec ses terribles contradictions. Les personnages sont tous nuancés, exprimant à la fois force et faiblesse. Quant aux ambiances, elles sont restituées avec une belle densité. On se passionne bientôt pour ce récit, dont les péripéties et les points de vue sont multiples. Avec ce deuxième roman, très convaincant, l’auteur confirme ses évidentes qualités.

 

Aurélien Molas a accepté de répondre à quelques-unes de mes questions, afin d’expliquer mieux encore le contexte de “Les fantômes du Delta”, d’approcher le réalisme de cette histoire.

 

Pourquoi choisir d’évoquer l’Afrique, et surtout le Delta du fleuve Niger, dont on n’entend guère parler dans nos infos ?

Molas AurelienAurélien Molas : Les éléments de réponse sont nombreux, je vais donc essayer de les synthétiser au mieux. Je voulais traiter de la médecine humanitaire, et tout particulièrement de Médecins Sans Frontières. Leurs zones d’actions sont aux quatre coins de la planète, mais elles sont tout de même concentrées en Afrique.

C’est un continent que j’apprends à connaître, ma sœur et sa famille y vivent depuis sept ans déjà. C’est mon beau-frère qui travaille beaucoup au Nigeria qui a éveillé ma curiosité. Ce pays semblait contenir à lui seul une diversité thématique extraordinaire : guerre économique, disparité sociale, heurts ethniques et religieux, désastres écolos etc. Comme l’écrivait Caryl Ferey à propos de l’Afrique du Sud : c’était le cadre idéal pour un roman noir !

J’ai commencé mes recherches à tâtons, inquiet à l’idée de m’emparer d’un sujet qui à bien des niveaux m’était étranger. Je me suis penché sur l’histoire du Nigeria, de la colonisation anglaise jusqu’à nos jours. Puis peu à peu, au fur et à mesure des rencontres, des recherches, j’ai entrevu la nécessité d’inscrire mon récit dans ce pays.

Tu évoques les médias à juste titre. La presse française évoque trop rarement la véritable catastrophe écologique que vivent les habitants du delta du Niger. L’Erika en comparaison c’est une goutte de fuel dans une piscine olympique !

Ce qui se passe au Nigeria aujourd’hui est, à mes yeux, une sorte de condensé de tous les maux qui gangrènent le monde actuel. Je ne dénonce pas, j’énonce, avec le souhait que le lecteur fasse lui-même la comparaison avec ce qu’il voit au JT de 20 heures.

Le dernier point, sans lequel ma réponse serait incomplète, est strictement littéraire. J’avais le désir profond de dépeindre des paysages, d’inscrire une intrigue dans un cadre spectaculaire et beau. Sans me comparer à eux, je souhaitais approcher à ma manière le pouvoir d’évocation de Steinbeck ou encore de Conrad dans Au cœur des ténèbres. Je voulais retranscrire un sentiment d’immensité et la notion d’immuable qui nous saisit à la gorge face à une nature sauvage, encore vierge. Il y a dans Les fantômes du Delta une forme de panthéisme étrange que l’on peut retrouver dans les écrits de Melville (magnifié chez lui à un point si intimidant que je cache Moby Dick avant d’écrire une ligne et que je l’ouvre et le relis à nouveau dès que j’ai bouclé le manuscrit),et c’est précisément ce qui me manque dans la littérature contemporaine.

 

Grâce à son pétrole, le Nigeria devrait pourtant être un pays puissant, riche, ce qui bénéficierait à tous, non ?

Le Nigeria est un pays extrêmement puissant ! Mais la corruption et la surpopulation (160 millions d’habitants tout de même ; un sixième de la population du continent sur à peine un trentième de sa surface) en font un pays pauvre, avec une disparité sociale et économique effrayante. Des buildings de Lagos dignes de l’île de Manhattan aux plaines désertiques du Nord où il n’y a rien, l’écart est hallucinant. Mais à bien y regarder, ce pays est comme une loupe géante : si l’échelle est moins graduée, la France, l’Europe, ne sont-elles pas confrontées au même problème ? C’est certes exagéré et caricatural, mais dans l’idée, il y a une vraie confiscation des biens et du pouvoir.

 

Tu t’inspires des guérilleros du MEND, mouvement existant. Tu montres quelque peu qu’ils ne défendent pas seulement les intérêts des populations locales ?

J’ai une certaine fascination pour les mouvements révolutionnaires, peut-être parce que ma génération n’a jamais eu à se battre (j’entends prendre les armes) pour défendre des idéaux ou des libertés bafouées. Peut-être parce que je suis un peu lâche et que je sais qu’avec un AK 47 dans les mains je serai aussi démuni qu’une poule avec un cure-dent.

J’ai longtemps eu une vision romantique du guérillero, du révolutionnaire perdu dans le grand nulle part de ses convictions, traqué, affamé, mais vaillant et intègre dans son combat. Che Guevara a contribué à inscrire cette vision du guérillero martyr dans l’inconscient collectif.

Mais lorsqu’on se plonge dans les biographies des grands meneurs révolutionnaires, on se rend compte qu’ils ont fini par être pervertis, corrompus ou lobotomisés par le pouvoir. Pol Pot était un grand penseur, certains de ces aphorismes sont brillants, mais il est devenu le monstre sanguinaire que nous connaissons. Fidel Castro a abandonné une carrière bourgeoise d’avocat pour s’enterrer et crever la dalle dans la Sierra Maestra aux côtés des paysans, mais ensuite ? Qu’est devenu Cuba après son arrivée au pouvoir ? Même Kadhafi auto-proclamé guide révolutionnaire a voulu défendre une idée du socialisme en Libye !

Dans "Les Fantômes du delta", mes personnages sont tiraillés entre les idéaux derrière lesquels ils brandissent leurs kalachnikovs et la réalité égotique de leurs intérêts personnels (parfois les deux se rejoignent). C’est ce point d’hésitation et de tentation qui m’intéresse, d’autant que ces hommes ont tout sacrifié pour un combat qui leur semble juste. Ils se disent : «Si j’abandonne maintenant, que vais-je devenir et que deviendront ceux que j’ai entraînés avec moi ? Mais si je continue et que j’échoue, quel aura été le sens de ma vie ? Les sacrifices que j’ai faits ont-ils un sens ?». En quelque sorte, ils ont franchi un point de non-retour. De fait, ils doivent lutter intérieurement et spirituellement entre une pensée collective, moteur de leur combat, et une pensée individualiste propre à chacun de nous.

 

Tu survoles les rivalités ethniques et religieuses du pays. Est-ce une des plaies de l’Afrique, selon toi ?

Je pense que la vraie plaie de l’Afrique est que ce continent est sous la coupe de puissances occidentales qui n’ont aucun intérêt à le voir prospérer. L’Afrique est un gisement, une ressource incroyable pour le monde de demain. Cela étant dit, mon regard est faussé, puisque je suis un français, blanc, vivant à Paris, qui écrit ces mots. Même si j’ai mené des recherches poussées, ma vision est déformée. Ce que je crois en revanche, c’est qu’elle fait écho, dans une certaine mesure, à un certains nombres d’ouvrages rédigés par des essayistes Africains.

Les rivalités ethniques et religieuses sont un véritable fléau, il est vrai. De notre point de vue occidental, elles rappellent les tristes heures de la Saint-Barthélemy et d’autres évènements dans un passé plus proche.

Au Nigeria l’opposition entre musulmans et chrétiens est un combat qui dure depuis des années et qui ressurgit, comme récemment, sous la forme de massacres. Mais lorsqu’on creuse un peu, on se rend compte qu’il existe des raisons plus cachées, bassement économiques (en l’occurrence, au Nigeria, la possession de terres pour les paysans), et je ne trancherai pas sur la question, mais j’ai l’impression que la religion sert tout de même de prétexte. Peut-être que je me trompe profondément, mais lorsqu’on établit un parallélisme avec les guerres de religion conduites par les monarques européens, on se rend vite compte que, certes la foi les galvanisait, mais le pognon, le pillage et la bénédiction papale aidaient à les faire sortir des donjons pour chevaucher jusqu’à Jérusalem !

 

MOLAS-2Les humanitaires peuvent-il vraiment jouer un rôle actif au Nigeria, alors que comme le disent certains de tes personnages, ce pays est totalement pourri ?

L’important pour les médecins humanitaires que j’ai rencontrés ce n’est pas le résultat, c’est le fait de ne pas abandonner. C’est ce qui m’a intéressé, ce sont des personnages tragiques qui ont eux-mêmes choisi leur «supplice». Mais il y a tout de même une différence notable : il ne s’agit pas de remplir un vase percé pour l’éternité, il y a des résultats concrets, une progression lente, très éloignée du sensationnalisme qui peut plaire aux médias. Sauver une personne sur mille, bien évidemment ça peut sembler dérisoire, mais sauver une personne plutôt qu’aucune, pour moi, ça fait toute la différence.

C’est ce qui m’a plu en bossant avec eux, en les interrogeant, ils sont lucides, presque cyniques, et pourtant ils croient dans la nécessité de ce combat, conjointement au développement des infrastructures et de l’industrie. L’équation gagnante, à mon avis, consiste à pallier à l’urgence humanitaire tout en dynamisant l’économie d’un pays, mais ce point précis est de la responsabilité des états et de leurs dirigeants. A en croire certains détracteurs de l’humanitaire, il faut privilégier le redressement de l’économie et encourager la croissance plutôt que de gaspiller de l’argent et de l’énergie en répondant à une nécessité médicale. C’est absurde, l’un n’empêche pas l’autre, la seule question que cela pose est : quelle est la priorité immédiate et financière ? On en revient toujours au pognon.

En ce sens, ma crainte lorsque j’ai réfléchi à ce roman était d’avoir à composer avec l’image du Saint-Juste, celui qui renvoie aux autres leurs défaillances et leurs égoïsmes, un homme qui ne se nourrit que de bons sentiments. La réalité est tout autre.

Le portrait de l’humanitaire véhiculé par les médias n’est que pure foutaise marketing. Ce ne sont pas des individus dotés d’une conscience supérieure, ni prêt à se sacrifier pour l’avenir de la planète. Ce sont des hommes qui ont choisi de s’engager sur cette voie et qui font leur job, leur labeur quotidien, patient après patient.

 

Entre maladies infectieuses et malnutrition, les enfants semblent les victimes perpétuelles de l’Afrique, ce qui apparaît aussi dans ce récit ?

Les enfants sont les plus fragiles, les plus exposés. Jusqu’à huit ou dix ans, ils sont à un moment charnière : vont-ils survivre ? Lesquels d’entre eux vont gagner le droit de devenir adolescent, puis, avec encore de la chance, adulte ? C’est cette réalité que je voulais laisser transpirer en arrière-plan du récit. Je crois, naïvement sans doute, que chacun d’entre nous a une minuscule part de responsabilité dans ce qu’il lègue aux générations futures. Cet héritage, bien entendu, nous ne le voyons que sous sa forme collective et à l’échelle d’une société, mais c’est pourtant à l’échelle individuelle que se joue beaucoup de choses.

 

Un personnage comme le père David, prêtre marxiste, ça existe encore ?

J’en ai rencontré un. D’origine basque espagnole, ce prêtre marxiste, âgé à présent, portait un regard d’une extrême lucidité, à la fois sévère et bienveillant, sur le monde d’aujourd’hui. C’est lui qui m’a conseillé de lire les écrits de Jean Cardonnel, mort en 2009, qui fut un représentant célèbre du mouvement dominicain d’extrême gauche. Jean Cardonnel a rédigé des textes intéressants sur le thème «Evangiles et Révolution».

Bien sûr, de tels « personnages » se font rares et leur engagement date d’une époque où il avait encore un sens. Mais je souhaitais traiter cette question de la foi et du combat politique, je trouvais que le père David avait tout pour devenir une figure héroïque. En le creusant et en l’apprivoisant, je me suis rendu compte que c’était un homme de conviction mais que le doute le tenaillait et lui faisait entrevoir à la fois l’étendue du combat qu’il reste à mener et la beauté sauvage du monde qui l’entoure.

En un sens, j’ai essayé de bâtir et de faire vivre un personnage à l’opposé des héros de Georges Bernanos, il n’est pas autocentré sur son parcours mystique, il ne lutte pas avec lui-même pour réaffirmer sa foi et la croix qu’il porte n’est pas mortifère, bien au contraire, puisque cette croix est une fillette qui s’éveille au monde.

Molas AurelienA mesure que j’écrivais, je me suis rendu compte que ce personnage n’était pas un illuminé, un béat, mais juste un homme qui saisit avec effroi qu’à l’automne de sa vie il a peut-être fait les mauvais choix.

 

Laquelle choisirais-tu si tu devais coller une étiquette à cette histoire : thriller, roman d’aventure, ou autres ?

Ah les étiquettes… Difficile de répondre tant je suis hostile à cette idée, d’autant plus ces derniers temps où l’étiquette sur un livre fait naître des batailles d’Hernani aussi stériles qu’illégitimes. Mon éditeur te dira : c’est un thriller, et si l’on parle de la structure narrative, effectivement ça s’en approche. Roman d’aventures et roman noir, peut-être, si l’on s’attarde sur les péripéties et la psychologie des personnages.

Mais le terme qui me semble le plus exact, puisque c’était mon ambition de départ, est «fresque». Je ne saurais affirmer si j’y suis parvenu, mais mon intention et mon envie se situaient là, dans ce courant littéraire qui conjugue la notion de durée dans le temps, la structure chorale et une multiplicité des points de vue, le va-et-vient permanent entre le micro et le macro et l’ampleur des thèmes abordés.

 

Merci de tes réponses.

Merci à toi !

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14 mars 2012 3 14 /03 /mars /2012 16:19

RETOUR

Action-Suspense reprend ses activités dès jeudi 15 mars. Avec au programme, une chronique de roman + l’interview de l’auteur, puis reviendront chaque jour les articles et infos sur la diversité du polar.

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9 mars 2012 5 09 /03 /mars /2012 08:31

...

rideau

Non, la fermeture définitive d’Action-Suspense n’est pas à l’ordre du jour. Parfois, j’ai envie de baisser le rideau. Bien longtemps que je chronique des polars, dont plus de quatre années à animer cet espace d’infos et de partage. C’est un bonheur, sans la moindre trace de lassitude. J’ai souvent avoué être un privilégié de la lecture. Dans ce cas-là, on n’a pas le droit de se plaindre. Je ne me plains donc pas, puisque seul le plaisir guide mes choix de lectures. Explorer le polar dans sa diversité, thème inépuisable. Par contre, j'ai quelquefois besoin d'une brève pause dans le rythme quasi-quotidien des articles. Le rideau va se relever très vite...

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8 mars 2012 4 08 /03 /mars /2012 06:23

 

 

Redécouvrons le tout premier titre de Tonino Benacquista : Épinglé comme une pin-up dans un placard de G.I., datant de 1985.

BENACQUISTA-1985Natif d’Italie, Canasta a vécu jusqu’à l’âge de dix-huit ans avec son père dans un paisible coin de Toscane. Puis, il a eu envie de voyager. Il a d’abord vécu à Paris. Pourtant, c’est l’Amérique qui l’attirait depuis toujours. Il s’est envolé pour Las Vegas. Après des débuts hasardeux, Canasta est devenu journaliste. C’est là qu’il reçoit un jour une curieuse proposition d’un certain John Winston John. Pour dix mille dollars, il s’agirait de créer un scandale autour du maire sortant d’Atlantic City. Canasta préfère y réfléchir. Quand il est passé à tabac par des basketteurs mécontents de ses articles, il finit par prendre l’avion pour la côte Est. Sans doute la mission demandée par Winston John n’est-elle pas sans risque, aussi prendra-t-il le temps de jauger la situation.

Dès son arrivée à l’aéroport d’Atlantic City, Canasta croise un croupier qui lui offre un bon plan pour gagner au casino. Le soir même, il tente le coup. Il gagne sept mille dollars, non sans attirer l’attention des joueurs. Dès le lendemain, le voilà célèbre grâce à un article paru à la une du journal Today. On le présente comme un pro du jeu, un homme qui ne perd jamais. Canasta demande vainement des explications au journal. Il est convaincu qu’il y a une sombre embrouille derrière cet intérêt soudain pour lui, qui est si peu joueur. Le cas de Canasta ne passionne guère le flic de service auquel il s’adresse. Un nouvel article accentue encore la réputation de Canasta, qu’on dit prêt à affronter tout adversaire valable. Il est invité par le riche Spencer à une nuit de poker avec quelques amis de son rang.

Bien qu’il se souvienne de son père et s’investisse dans son rôle de Canasta-le-pro-du-jeu, bien qu’un peu aidé par la donneuse de cartes Mlle Evans, il finit la nuit complètement ratissé. Ce qui n’empêche pas le journal de proclamer qu’il a une fois de plus vaincu ses partenaires. Frisant la dèche, il rencontre le Japonais Nakamura. Ce bonhomme, qui le suit comme son ombre, va utilement l’aider quand Canasta est défié par des joueurs de billard. L’affaire est encore relayée faussement par le journal local. Canasta finit par retrouver John Winston John. Il s’en méfie, car la franchise n’est toujours pas la qualité première de celui-ci. Avec l’aide de Nakamura, du nommé Foxy et de miss Doigts de Fée, Canasta peut espérer une issue victorieuse…

 

Publié en 1985, c’est le premier roman de Tonino Benacquista, qu’il a écrit à l’âge de vingt-deux ans. Il faut souligner qu’il possède déjà une magnifique maîtrise. Il se sert à merveille du mythe américain. La cellule familiale ? Oui, c’est vrai, le monde entier vous l’envie (…) Avec un peu d’expérience, j’ai réussi à comprendre que celui qui est persuadé que le seul Paris au monde se trouve au Texas, c’est le père. Celle qui joue au squash avec des lunettes de soleil, c’est la mère. Et ceux qui s’étonnent que l’arc-en-ciel est un spectacle gratuit, ce sont les enfants. Les jeux d’argent et la fascination des grosses limousines font partie de cette image. Encore que le héros soit plutôt obsédé par les Rolls Royce blanches.

Plutôt qu’un perdant, Canasta est un type neutre, sans talent particulier, un peu trouillard, pas totalement naïf quand même. Il avance au gré des évènements, entre chance et manipulation. Il savoure sa notoriété : Intense bonheur. La désinvolture me grise. J’y prends goût car c’est un réflexe nouveau. Je voulais vivre l’aventure, je vis la folie. La folie ne serait-elle pas l’aventure à son point de non-retour ?

Ce modeste Italien à la conquête de l’Amérique est un authentique personnage de roman noir. Qui peut à tout moment basculer, être abattu, pas seulement prendre bon nombre de coups. Toutefois, on discerne une tonalité narrative amusée, ainsi que le suggère le titre du roman. Pour un coup d’essai, cette histoire est déjà un coup de maître. Patrick Mosconi ne s’y trompa pas, donnant sa chance à Tonino Benacquista dans la collection Spécial-Police du Fleuve Noir. Il semble que Épinglé comme une pin-up dans un placard de G.I. n’ait jamais été réédité. On se demande vraiment pourquoi, tellement c’est excellent.

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7 mars 2012 3 07 /03 /mars /2012 06:41

 

Après Les villas rouges (Éd.Seuil) récompensé par le Prix Calibre 47, voici encore un titre d’Anne Secret à découvrir : Moskova.

SECRET-12Vers 1990, l’Europe vit un épisode historique : le Mur de Berlin est tombé, ce qui laisse place à la réunification de l’Allemagne. Si certains affairistes nouent vite des relations commerciales, d’autres ex-Allemands de l’Est doivent se faire oublier quelques temps. C’est dans ce contexte qu’un nommé Dieter Roth, quadragénaire de Lubeck, débarque à Roissy. En réalité, Anton a dérobé ces papiers pour quitter Berlin. Ce serait bien compliqué pour lui aujourd’hui de réclamer la nationalité française, bien qu’il soit né à Boulogne-Billancourt. Mais le parcours de quelquun ayant choisi de vivre à l’Est ne peut pas être simple. Il a estimé qu’il était temps de fuir l’Allemagne et le souvenir de sa compagne Théa. À son arrivée, il contacte son frère Ivan. Celui-ci lui donne une somme d’argent. Il lui indique un logement vacant rue Bonnet, celui d’un certain Max qui est absent pour plusieurs mois.

Dans le 18e arrondissement, le quartier de la Moskova est l’objet d’un vaste projet immobilier. Félix est à la tête d’un groupe de locataires ayant créé un comité de défense, incluant Odile, la plus vieille habitante du quartier. Se présentant comme traducteur, avec son air d’intellectuel germanique, Anton ne tarde pas à être adopté par les autres. Parmi eux, se trouve Héloïse, jeune bibliothécaire qui loge chez Odile. Pour tuer le temps, sous prétexte de traductions, Anton passe de longues heures à la bibliothèque. Il n’est pas insensible au charme d’Héloïse, peu bavarde même quand ils boivent un verre ensemble dans un bistrot. Les ombres menaçantes de son passé semblent s’être éloignées d’Anton. Sa situation restant précaire, il a besoin de papiers d’identité. Un certain Klaus peut lui en fournir des faux, au prix fort. Quartier de la Moskova, tous restent mobilisés contre le projet…

 

Il existe des histoires qui n’ont nulle nécessité d’être développées sur plusieurs centaines de pages. Qui ont plutôt besoin d’un récit intimiste, impressionniste peut-être. Il force son accent allemand. L’un des types lui balance une injure, mais la carrure d’Anton, pourtant peu belliqueux, le dissuade d’insister. Ici, trois lignes suffisent pour clore un début d’altercation. C’est assez typique de l’écriture d’Anne Secret, semble-t-il. Car il en est de même pour les portraits, les décors. Ce qui n’empêche pas qu’on se sente proche de ce solitaire qu’est Anton, ou de la discrète Héloïse. Et que ce quartier quelque peu désuet, transformé depuis, nous paraisse fort attachant. Sans doute les Parisiens en ignorent-ils l’origine, et les raison de ce nom russe, ce que l’auteure nous explique. Pour le reste, inutile de s’appesantir sur l’époque, puisque la fin du Mur de Berlin figure dans tous les manuels historiques. Il s’agit donc d’un court roman, ou novella. C’est le meilleur format pour ce genre d’intrigue, qu’Anne Secret maîtrise avec une belle élégance stylistique.

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6 mars 2012 2 06 /03 /mars /2012 06:38

 

Dans la collection Vendredi 13 des Éditions La Branche, Givre noir est l’œuvre d’un romancier chevronné, Pierre Pelot.

On imagine une grande maison bourgeoise, où règne pourtant un certain laisser-aller. Par exemple, un réseau de train électrique encombre quelque peu le salon. Le septuagénaire Stany, propriétaire des lieux, y déambule vêtu d’une épaisse robe de chambre, trop chaude pour cette soirée d’été caniculaire. PELOT-2012-1Casquette sur la tête, aussi. Il est riche, possède des usines, ce bonhomme fantasque à l’air mou. C’est un passionné de paléontologie et des serpents, en plus des trains électriques et des casquettes. Il est marié à Mado, une veuve plus jeune et dynamique que lui. Un second mariage, quelques que soient leurs différences. Âgée de vingt ans, Nell, nièce de Mado, vit avec eux. Très excitante en petite culotte, avec un maillot sportif trop évasé, une tenue minimum par cette chaleur estivale. Nell est contrariée. Car son petit ami Arnaud, ouvrier dans un garage, l’a laissée tomber.

Mado est de retour à la maison avec un invité. Ce Dustin Georges était autrefois un ami du fils suicidé de Mado. Ils se sont retrouvés par hasard. Ce soir, il y a eu une bagarre dans le bar où ils se trouvaient. Dustin a la mâchoire assez abîmée, mais reste séduisant aux yeux de Mado. Il n’y a qu’à l’héberger dans la vétuste chambre d’amis, puisqu’il n’a pas de voiture pour se déplacer. Stany observe cet invité, amusé mais pas vraiment dupe. Fut-il jadis un ami de Mathieu, le défunt fils de Mado ? Employé dans une entreprise industrielle, selon ses dires, Dustin manque sérieusement d’éducation. Un type plutôt jeune, un peu rustre, comme les aime assurément Mado. Dès le lendemain matin, Dustin et Nell semblent avoir fraternisé. Sans doute ont-ils comparé leurs malheurs réciproques cette nuit-là. Des malheurs et des drames, il s’en produira d’autres entre ces quatre-là.

À Épinal, le journaliste Gerbois suit une affaire concernant quelques étudiants de l’École de l’Image. Habitué du bar du Commerce, il connaît bien Mitidjène. Un peu moins les autres : la possessive Ladidi, le frimeur Jean Maurice Maurice, Marani et la belle Veline. Depuis son arrivée à l’École de l’Image, cette dernière cultive une part de mystère. Que Mitidjène soit amoureux de Veline depuis qu’il l’a vue, ce n’est pas un secret, même si ça perturbe peut-être leur groupe. Des coups de feu ont été tirés au Commerce en cette soirée pluvieuse. Il ne suffit probablement pas d’interroger Mitidjène pour comprendre l’origine de l’altercation sanglante. Il faut aussi se souvenir de l’élection de Miss Image, d’une photo. Ainsi que d’une autre affaire, plus ancienne…

 

Pierre PELOTEst-il réellement indispensable d’ajouter une opinion ? Dans chaque petit groupe, couve un possible drame. En elle-même, l’intrigue n’est pas donc compliquée. Les projets de Mado sont entravés par une petite garce aux dents pointues. Tension sourde et hypocrisie entraînent une issue criminelle. Le talent de cet auteur confirmé qu’est Pierre Pelot consiste à triturer le sujet, à y placer des méandres poussant à s’interroger. Cette histoire a été publiée dans une première version, transformée en un noir roman énigmatique. On suppose qu’il a peaufiné les portraits, rendant plus incertains ces personnages. Cette part fantomatique est d’ailleurs un atout favorable que l’on trouve dans beaucoup de ses livres. La tonalité du récit semble naturelle, familière, malgré ses faces cachées et son lien indéfini entre deux époques. Pierre Pelot montre une fois encore qu’il est un fascinant conteur.

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