Inutile de préciser que le Prix du Quai des Orfèvres n’a pas toujours offert aux lecteurs un choix convaincant. Toutefois, celui de 2004, “Les sarments d’Hippocrate” de Sylvie M.Jema fit partie de ces bons suspenses qui se lisent avec grand plaisir. Retour sur une intrigue criminelle en milieu hospitalier, qui mérite l’intérêt.
À 57 ans, le professeur Desseauve est le patron du service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital, dans une ville de Normandie. Depuis deux mois, il reçoit des lettres anonymes. Le lieutenant de police Stéphane Brandoni est chargée de l’affaire. Stéphane est la sœur de Cécile, interne dans ce service. Peu après, Cécile trouve le cadavre de Bénédicte, secrétaire et maîtresse de Desseauve. On hésite entre meurtre, suicide, et mort naturelle. Le légiste choisit cette dernière explication, tout en émettant un doute. Desseauve admet que Bénédicte était enceinte de lui. Krügel, le mari, en est informé. Il accepte très mal la situation.
C’est encore Cécile Brandoni qui découvre le corps du professeur, tué dans son propre bureau. Deux personnes s’étaient disputées peu avant avec lui, dont l’époux de la secrétaire. Peu d’indices pour Stéphane Brandoni et son collègue Pujol, qui inculpent leur suspect idéal : Krügel. Mécontent, l’auteur des lettres anonymes vient se dénoncer à la police. Mais la libération logique de Krügel est suspendue. Il se savait trahi par sa femme adorée. Celle-ci était allergique aux anxiolytiques. Il lui en fit absorber par ruse, causant sa mort sans prendre de risque. L’assassin du médecin, lui, explique ses actes par une vengeance justifiée. Marc Tobati, du même service, est assassiné. C’est de nouveau Cécile qui le trouve. Heureusement, son compagnon Salvador est là pour aider moralement Cécile. Stéphane est écartée de l’enquête, mais son ami Pujol reste en contact. Celui qui s’est dénoncé va retourner en psychiatrie. Mme Desseauve, épouse du professeur, s’aperçoit que sa fille Clara et elle-même partagent le même jeune amant…
L’auteur respecte les règles de l’art dans ce solide roman de forme classique. Grâce à un très bon rythme et plusieurs rebondissements, on suit cette histoire avec grand plaisir. On notera la précision des détails sur le service hospitalier, ainsi que l’hypocrisie bourgeoise liée à certains milieux. Ambiance et portraits sont fort réussis, avec une dose d’humour. Les plus perspicaces identifieront le principal assassin, sans que cela nuise à l’intérêt du récit. Voilà un roman policier dans la meilleure tradition.
Sylvie M.Jema a publié depuis “Pouzzolane et fleur de thé” (Fayard, 2008), ainsi présenté : « Saint-Cyprien les Roches, un village d'Auvergne profonde et meurtrière. Au clocher, la Marie-Bernadette sonne le glas des morts violentes. Le médecin n'en délivre pas moins les permis d’inhumer, et le curé prononce les absoutes... Une Anglaise dévouée à la défense des animaux agresse ses voisins. Un ancien légionnaire fouille dans l'histoire des familles. La bonne du curé sent le soufre... Qui a dit que l'on s'ennuyait à la campagne ? En rupture de vie parisienne et de hiérarchie, une jeune policière retrouve son amie d'enfance, gendarme. Pourront-elles exhumer les secrets enfouis dans ce terroir âpre dont Alexandre Vialatte disait justement qu'il exhale une odeur de bure et de mystère ? »