Durant la décennie 1970-80, Georges-Jean Arnaud fut un des romanciers les plus inspirés de la collection Spécial-Police du Fleuve Noir. Les quatre exemples choisis ici reprennent sous forme de fiction des sujets de société de l’époque. Kidnapping d’un enfant de famille aisée, marginaux dans la mouvance hippie, trafic de chiens et disparitions mal expliquées de personnes âgées, enlèvements de bébés par des femmes en mal d’enfants. Grâce à son remarquable savoir-faire, G.J.Arnaud ne se contente pas d’imiter la réalité, nous présentant des suspenses intenses.
Au nom du père (1973) : Dans la région de Montpellier, la famille Cardèche est puissante depuis plusieurs générations. Ils autant craints que détestés. Leurs distilleries ont employé beaucoup de monde, pas toujours dans les meilleures conditions. C’est Raoul, l’aîné, qui a été désigné par le vieux Cardèche pour diriger l’entreprise après sa mort. Marié à Marielle, ex-secrétaire de l’entreprise, il est le père du petit Daniel. Jacques, qui jalouse quelque peu son frère Raoul, est un play-boy noceur n’ayant sans doute pas la même rigueur que lui. Irène, mère des fils Cardèche, reste un pilier représentant l’esprit familial. Elle entend peser sur certaines décisions importantes. L’oncle Marcel, frère d’Irène, est un ivrogne vivant depuis longtemps aux crochets des Cardèche.
Quand le petit Daniel est kidnappé, son père Raoul entend bien trouver l’argent pour l’énorme rançon qu’on lui réclame. Céder aux ravisseurs, Jacques n’est pas vraiment d’accord mais il obéit aux consignes de son aîné pour réunir la somme. Les réticences de Jacques s’expliquent : il ne croit pas que Daniel soit réellement le fils de Raoul. Sa mère Irène est d’accord avec lui. Ce qui est un bon prétexte pour ne pas verser la rançon, et prévenir la police. Dans ce cas, la vie de l’enfant sera évidemment en danger. Jacques doit trouver des preuves de la bâtardise de son neveu. Tandis qu’il mène sa petite enquête, Marielle a compris son intention. Elle aussi va rechercher son ancien amant, d’avant son mariage, tout en se posant des questions sur l’identité des ravisseurs…
L’Œil du serpent (1974) : Pascal et Sabine forment un couple de jeunes gens, qui roulent vers Toulon. Lui est une sorte de hippie, voyageant depuis plusieurs années. Elle, fille de bonne famille, a choisi de l’accompagner quelques jours plus tôt. À Toulon, ils comptent loger dans l’appartement de la mère de Pascal, celle-ci passant ses hivers à Nice. Sur l’autoroute, le couple s’aperçoit qu’il est suivi. Ils tentent de semer leur poursuivant, un mystérieux conducteur à l’œil de serpent. Quand l’homme les retrouve, ils s’en sortent de justesse en montant dans un train. Arrivés à Toulon, ils se réfugient dans l’appartement maternel. Néanmoins, les attaques très menaçantes continuent.
Qui est donc leur adversaire ? Carucci, l’Italien à moitié fou que Pascal rencontra il y a quelques mois ? Le propriétaire de la Mercedes volée par le couple, dont-ils ont jeté des documents peut-être importants ? Le cercle magique que Pascal traça autrefois sur la terrasse, quand il était ado, peut-il vraiment les protéger ? Certes, ce cercle a prouvé son efficacité par le passé. Le voisin et le beau-père de Pascal décédèrent après qu’il l’eût utilisé. Contre leur énigmatique ennemi, c’est moins certain. Blanche Sardel, la voisine sur laquelle fantasma naguère Pascal, peut s’avérer une alliée. À condition de lui forcer la main, ce que Sabine n’hésite pas à faire. Toutefois, le plan élaboré contre leur adversaire est probablement imparfait, et la jeune fille risque de lâcher Pascal…
Chiens écorchés (1974) : Castella trafique depuis longtemps toutes sortes de produits. Un type vil, ignorant toute morale, toujours sur des bonnes affaires. Son trafic du moment concerne les chiens. Ceux qui sont tant soit peu racés seront revendus à des maîtres payant bien, les autres étant destinés à des laboratoires pour la vivisection. Comme c’est illégal, mais que les labos en ont besoin, ils paient de belles sommes. Pour sa nouvelle tournée dans l’arrière-pays provençal, Castella est accompagné d’un jeune marginal, Rouan. Ce dernier n’approuve pas forcément les méthodes de Castella, mais il le suit.
À Valberg, les deux complices ne vont pas se contenter d’acheter des chiens chez les Chabran, des fermiers avares. Ils ont un sérieux problème à résoudre. Quasi-sénile, le vieux père Chabran leur coûte de l’argent, alors qu’il leur est impossible de vendre des biens tant qu’il aura la signature. L’idée, ce serait de faire croire que le vieillard s’est perdu en allant aux champignons, genre de faits divers assez courrant. Moyennant finances, Castella pourrait les aider à égarer leur aïeul. La jeune Sandrine a la garde des chiens de la snob Mme Morand. Ils ont disparu, elle les recherche dans le secteur, jusque chez les Chabran. Si l’opération se passe bien pour éloigner le vieux de la ferme, Castella craint que Sandrine ait été témoin de l’affaire. Il envoie Rouan se renseigner, mais ça ne fera que compliquer ses plans, et ça risque de finir par une spectaculaire course-poursuite…
Je ne vivrai plus jamais seule (1976) : Le projet imaginé par Lorraine Lemery est d’une simplicité efficace. Elle a quelque peu changé son apparence, se faisant appeler Claire. Elle porte un coussin gonflable sur le ventre, pour paraître enceinte. Si elle est devenue l’amie de Pauline, également enceinte, c’est qu’elle envisage de voler l’enfant à naître. Cette nouvelle amie si gentille prénommée Claire, Pauline estime qu’elle est d’une aide bénéfique. Quelques attitudes de Lorraine/Claire pourraient sans doute inquiéter la jeune femme, mais elle n’y porte pas attention. Michel, le mari de Pauline, est bien plus curieux au sujet des secrets de cette étrange amie de son épouse. Fouineur, vaguement indic des flics, Michel n’est pas un homme tellement sympathique, à vrai dire.
Son plan autour de Pauline semblant voué à l’échec, Lorraine tente autre chose. Elle se rapproche d’un second couple, Sophie et Francis Cartier. Se présentant sous le nom d’Alice Martin, elle a simplifié le scénario afin de moins risquer d’être démasquée. Le but reste identique, enlever l’enfant des Cartier à sa naissance. Pour Lorraine, la réussite est impérative. En effet, elle a annoncé par courrier à son mari employé à l’étranger qu’elle attendait un bébé. Faustine, l’employée de maison de Lorraine, s’attend elle aussi à cette future naissance. Mais, toute à son obsession, la jeune femme commet de plus en plus de petites erreurs, négligeant des détails importants. Tandis que l’état mental de Lorraine dégénère, quelqu’un vient encore compliquer la situation…