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Claude Kayat : Le café de Madame Ben Djamil (Éd.Léo Scheer)

 

Publié aux Éditions Léo Scheer en avril 2012, Le café de Madame Ben Djamil de Claude Kayat s’affiche comme une histoire criminelle parodique. Par son thème sociétal, ce roman court devrait séduire les lecteurs de purs polars.

Saint-Hubert est une charmante petite commune du sud de la France, proprette et ensoleillée. C’est là que vivent Hassen Ben Djamil, son épouse Fatima, leur fils Ali et leurs autres enfants. Tunisiens d’origine, ils viennent d’obtenir la nationalité française. Hassen est éboueur, consciencieux dans son métier. KAYAT-2012Il y a par ailleurs peu d’étrangers ici, Saint-Hubert observant de stricts quotas. Néanmoins, depuis dix jours quatre d’entre eux ont été assassinés : un mécano, un nettoyeur, un maçon, un boucher. La cinquième victime n’est autre que Moustapha, le collègue éboueur d’Hassen. Des meurtres en série qui ne perturbent guère le commissaire Victor Ronchart, qu’une maladie du sommeil handicape quelque peu. Cette fois, Hassen a terriblement peur d’être le suivant sur la liste. Ça le rend tellement malade, qu’il ne veut plus sortir de chez lui tant que l’assassin est en liberté.

Ses voisins Sophie et Olivier insistent pour qu’il reprenne son poste. En effet, les mauvaises odeurs ont vite gagné les rues de Saint-Hubert. La mairie n’a pas de solution efficace à proposer pour résoudre le problème. Quelques excités, dont le frère d’Olivier, voudraient obliger Hassen à s’occuper de nouveau des poubelles. La puanteur indignait plus les Hubertiens que les meurtres eux-mêmes.

Hassen et Fatima seraient prêts à retourner en Tunisie. Bien que mal traité au lycée, leur fils Ali ne tient pas du tout à quitter la ville, ni son amie Sylvie. Un prof de philo communiste et son ami curé observent les réactions de la population. Dans un sermon, le prêtre souligne que c’est le tueur qu’il faut arrêter au lieu d’accabler Hassen et sa famille. Fatima argumente pour inciter son mari à reprendre son métier. Le meurtre d’un Sénégalais remet immédiatement tout en question.

Les odeurs devenant intenables et infectieuses, à cause des rats et des mouches, le médecin et le pharmacien locaux ne sont pas mécontent de la tournure des évènements. Toute le reste de la population montre une violente hostilité contre Hassen et les siens. La mairie a tenté, sans succès, de recruter un remplaçant afin de se charger des ordures. Toujours aucune enquête sérieuse pour déterminer qui est l’assassin des étrangers. La manif organisée par Ali, Sylvie et une poignée d’amis se heurte à un violent groupuscule facho. Fatima et Hassen préparent les valises pour fuir cette mauvaise ambiance. De son côté, le tueur lui-même est extrêmement incommodé par les odeurs nauséabondes tenaces. Même si on lui offre l’assassin sur un plateau, le commissaire Rochart roupille toujours…

 

On pourrait voir dans ce roman une aimable comédie policière, racontée sur un ton plaisant. Une histoire qui rappelle ce vieux sketch de Fernand Raynaud Le douanier et l’étranger, le bon citoyen (pas un imbécile, puisqu’il est douanier) accusant l’autre de venir manger le pain des Français, alors que c’est l’unique boulanger du village. Le propos de cet humoriste populaire était plus subtil qu’il n’y paraissait.

L’éboueur de Saint-Hubert devrait risquer sa vie pour vider nos poubelles. Aucun Français d’origine ne tient à faire ce boulot. Surtout, c’est une situation qui révèle évidemment les égoïsmes de chacun. Le danger d’épidémie est plaidé par les uns, qui ne pensent qu’à leur santé personnelle, tandis que des réactions beaucoup plus virulentes agitent la petite ville. Transposons le cas dans notre vie quotidienne, ça nous aidera à y réfléchir. C’est, au-delà de l’étiquette polar, ce que nous invite à faire Claude Kayat. Car, si l’auteur utilise la forme du roman policier, c’est une facette de notre société qu’il évoque avec intelligence. Quant aux motivations exposées par l’assassin, elles sont également puantes.

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P
Bonjour M. Le Nocher,<br /> <br /> Ce n'est pas à propos de ce roman, très intéressant, que j'écris, mais en parlant des éditions Leo Scheer, aviez-vous vu l'an dernier le livre d'Alexandre Mathis " Les Fantômes de M. Bill - le fer<br /> et le feu " paru en mai 2011 ?<br /> <br /> http://www.leoscheer.com/spip.php?article2256<br /> <br /> Il revenait à Pigalle sur les traces de cette vieille affaire de 1958-1960, Georges Rapin, fils de bonne famille de grands bourgeois parisiens, habitant au 207 boulevard Saint-Germain, qui voulait<br /> s'encanailler, être un dur, un mauvais garçon, un truand en se perdant dans la faune interlope de Pigalle.<br /> Charles Villeneuve avait évoqué ce cas dans son émission le Glaive et la balance sur M6 vers 1990.<br /> Ou Alphonse Boudard dans son livre sur les grands criminels ( avec la bande à Bonnot, Landru, Petiot et Pierrot le fou ) paru au Pré aux Clercs en 1989.<br /> <br /> Jean-Pierre Deloux aussi s'était intéréssé à monsieur Bill.<br /> <br /> http://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_Rapin<br /> <br /> http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Pierre_Deloux<br /> <br /> http://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_Mathis<br /> <br /> Cordialement
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C
<br /> <br /> Bonjour Philippe<br /> <br /> <br /> Le cas de M.Bill est symptomatique de la marginalisation glissant vers la criminalité, en effet. Son histoire se rapproche quelque peu du roman que je chroniquerai<br /> demain samedi. Dans les jours à venir, je vais évoquer un livre traitant de cas meurtriers particuliers.<br /> <br /> <br /> Puisqu'est cité ici le regretté Jean-Pierre Deloux, qu'il me soit permis (bien que ne l'ayant pas connu personnellement) de rendre hommage à quelqu'un qui oeuvra<br /> avec passion pour la Littérature policière.<br /> <br /> <br /> Amitiés.<br /> <br /> <br /> <br />