Il y a tant de talents à découvrir au Québec, à travers les romans et la bande-dessinée ! Les Éditions de la Pastèque publient les fleurons de la BD québécoise. Afin de bien montrer la diversité proposée, intéressons-nous à deux auteurs d’inspiration totalement différente.
"Paul à Québec", de Michel Rabagliati.
Dessinateur, Paul est marié à Lucie. Ils ont une petite fille, Rose. Ils vont devoir s’installer dans une maison plus spacieuse, avec le bricolage que ça suppose. Le 24 juin, c’est la Fête Nationale du Québec. En 1999, à l’occasion de ce week-end de la saint Jean-Baptiste, toute la famille de Lucie se réunit chez les parents de celle-ci. Roland et Lisette Beaulieu sont retraités. Le beau-père de Paul a eu des problèmes de santé, qui semblent résolus. Si Roland Beaulieu a fini sa carrière professionnelle comme vice-président d’une grosse compagnie, son parcours de self made man fut d’abord chaotique et industrieux. Avec son épouse Lisette, ils ont eu trois filles (Suzanne, Lucie, Monique), qui leur ont donné cinq petits-enfants, autant de “lapins” à choyer.
Dans la belle-famille de Paul, l’ambiance est souriante, festive. À part ce jeu
incompréhensible, “J’achète”, qui ne cesse de dérouter Paul. Les enfants Beaulieu ont espéré l’indépendance québécoise, mais n’y croient plus guère… Le temps passe. Les
années 2000 débutent. L’informatique et Internet arrivent, casse-tête horripilant et coûteux pour Paul. L’état de santé de Roland Beaulieu se dégrade. Cancer, trois mois à vivre. Homme depuis toujours actif, il supporte mal cette déchéance
annoncée. Lisette ne peut faire face seule. Bientôt, il a besoin de soins palliatifs. La Maison La Chênaie est plus agréable qu’un triste hôpital. Toute la famille se mobilise autour de
Roland…
C’est un témoignage drôle et touchant sur le quotidien d’une famille québécoise que nous présente Michel Rabagliati dans ce sixième album de la vie de Paul, personnage qu’il créa en 1999. Soulignons que quasiment toutes les BD de cet auteur ont obtenu diverses prestigieuses récompenses. "Paul à Québec" a été primé au Festival d'Angoulème. Le graphisme apparaît simplifié, mais ne nous y trompons pas. Les séquences expriment, avec plus ou moins de détails décoratifs, le sens et l’importance des scènes. La mise au point entre le médecin et Roland à son arrivée à la Maison La Chênaie en est un bon exemple. La dame âgée quittant sa maison vendue, tout autant. Il s’agit donc de raconter les joies et les peines, les petits plaisirs et les douleurs d’un groupe de personnes, avec cette véracité qui rejoint nos propres souvenirs. Comment ne pas se sentir proche de cette famille ? Un histoire très attachante.
"Miam-miam fléau", de Marsi.
Que se passe-t-il dans la contrée ? Un monstre dévore toutes les nourritures qu’il trouve sur son passage, détruisant potagers et murs des maisons pour s’approprier tout ce qu’il y a de comestible. Il vient de passer au village Chez Freux. La population a courageusement tenté de résister, vainement. Tous continuent à traquer la bête, qui s’est enfuie dès qu’elle n’eût plus rien à manger. Elle se dirige vers le village de Chez la Mère Crapette. Bien gardé, à l’abri de sa haute muraille, cette bourgade-là est sans doute mieux protégée. Il est vrai que ses réserves de vin, le fameux Château Gros-Lot Double zéro, sont précieuses...
Quel est ce monstre et d’où vient-il ? Les majestueuses Gorges de la Rigôle cachent un
royaume parallèle, peuplé de créatures différentes. Le roi est désespéré, car son goûteur officiel l’a quitté. Peut-être ne mangeait-il pas à sa faim. Certes, nombreux sont les postulants pour le
remplacer. Mais le moral royal reste au plus bas. Sire Pouette et Coco Météore, le
meilleur coursier du royaume, essaient de rattraper le monstrueux goûteur qui assouvit sa boulimie aux dépens des habitants de la contrée. Au village de Chez la Mère Crapette, le peuple est
mobilisé. Aussi, quand ils aperçoivent Pouette et son destrier, ils les confondent avec le monstre. Coco Météore est assez rusé pour les obliger à lui obéir. Ils vont pouvoir rencontrer la Mère
Crapette, afin de mettre au point un plan permettant d’intercepter le goûteur en cavale…
Il s’agit d’une BD humoristique, on l’aura compris. Il convient de noter la belle inventivité de cet album. Confrontant des humains et des êtres venus d’un étrange royaume, l’intrigue est simple et solide. Néanmoins, le scénario est fort bien agencé et les idées sont créatives. On apprécie les scènes-choc, poursuites et mouvements de foule. Le graphisme s’apparente à la traditionnelle “ligne claire”, non sans accorder un certain soin aux détails. Le tempo est vif, l’histoire est souriante, très agréable à lire.