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L'ami Pascal Polisset évoque une de ses récentes lectures : “Missak”, de Didier Daeninckx (éditions Perrin, août 2009). Action-Suspense lui laisse bien volontiers la parole.
C’est
évident, dans quelques journaux, sur quelques sites, quelques critiques littéraires vont ranger le dernier livre de Didier Daeninckx dans la rubrique qui leur colle au clavier : au
choix : polar, roman noir, voire littérature noire, pire roman policier… D’autres, plus aguerris à la lecture de cet écrivain, viendront, peut être, à écrire qu’il invente ou réinvente un
genre.
Peut être, plus littérairement, plus en amont de l’actuelle nomenclature des parutions, serait-il un auteur qui trempant sa plume dans la veine de l’Histoire lui redonne chair et vie. D’autant que c’est dans les entrailles du monde ouvrier, de ces récits oubliés ou bannis qu’il va chercher sdidieron inspiration et construit son écriture.
Arthur Koestler, Manès Sperber, Upton Sinclair, Anton Ciliga, Victor Serge, Georges Orwell, Panaï Istrati, Paul Nizan, David Rousset ont mis en mots et phrases, en romans, les copeaux de leurs vies hachurées par une histoire occultée mais cela reste la bibliothèque inachevée d’une époque où "Il était minuit dans la siècle".
Ce qui différencie, manifestement, l’écrivain, trop jeune pour avoir été acteur de périodes historiques qu’il traite, de toute la production littéraire actuelle, c’est qu’il renoue un fil cassé entre l’Histoire et l’histoire des hommes et des femmes qui les ont vécues et ce sans aucun respect du silence des convenances et autres lâchetés convenues. Pire, il écrit des romans dont l’exactitude historique confond les mémoires policières, celles d’historiens patentés et quelques autres imbus de certitudes rarement démenties.
Dans son dernier roman, “Missak”, Didier Daeninckx nous conte l’enquête, évidemment improbable – rappel : c’est un roman - d’un jeune journaliste, Louis Dragère, commis par sa rédaction, celle de "l’Humanité", pour rédiger un papier commémorant les victimes dites de "l’Affiche rouge". Le jeune garçon, journaliste à l’Huma, vingt cinq ans au mitant des années cinquante, n’est qu’un enfant du "Parti des fusillés" et s’attelle, sans vergogne, à taper son article. Il s’agira de rédiger un article préparatoire à l’érection d’un monument dédié aux fusillés du "Groupe Manouchian".
Dans un Paris victime des inondations, dans la distorsion entre sa vie et celle de son aimée, bloquée auprès du lit d’une mère malade,… de rencontres en réflexions, le doute, qui l’envahit, s’impose à sa raison. Il lui faudra s’immerger dans l’histoire des communistes, juifs arméniens qui habitent non loin de chez lui, mais aussi en Arménie soviétique.
Il croisera tour à tour Duclos, Aragon, Aznavour, Roland Filiatre, Henri Krazucki, Charles Tillon, Armène Asssadourian, la sœur de Mélinée, l’épouse de Missak, figure emblématique du martyr de ces militants des FTP-MOI, "seuls" et isolés résistants de la toute première heure..
Louis est notre guide, il nous repose de la violence de l’Histoire qu’il traverse. Sa crédulité aimable mais inquiète, une certaine incompréhension sur laquelle il base son enquête, car enquête il existe, nous autorisent, lecteurs, d’être acteurs de la volonté de l’auteur de renouer des liens avec cette histoire, cette Histoire bafouée mais qui demeure totalement essentielle.
Il est d’évidence que quant à classer ce livre, comme certains autres de cet auteur, il faudrait l’appeler d’un genre particulier, mais je n’ai pas trouvé le mot adéquat : peut être un nouveau genre : du Daeninckx ?