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Joseph Harrington : Dernier domicile connu (Série Noire, 1966)

À New York, au cœur des années 1960. Âgé de trente-deux ans, le lieutenant Kerrigan est un policier efficace, quoiqu’un peu trop vif dans certains cas. Suite à l’interpellation d’un conducteur ivre, Frank Kerrigan risque quelques ennuis. Car ce fils d’avocat, soutenu par le témoignage de sa fiancée, est puissant. C’est ainsi que Kerrigan est rétrogradé simple sergent, muté dans les rues peu reluisantes de Staten Island. C’est à peine mieux quand il est affecté au Service Spécial. Il y est assisté par Jane Boardman, jeune stagiaire pas du tout aguerrie. Leur mission consiste à piéger les satyres pervers, Jane servant d’appât. Leurs résultats sont très bons. Peut-être est-ce pour ça qu’on les associe à l’affaire Reddy.

Les frères Reddy sont des caïds de la pègre, en attente de leur procès. Des témoins ayant pu les incriminer ont été éliminés. Le troisième, un certain D.Brown, fut leur comptable. Il ignorait les malversations de ses clients. Depuis neuf mois, de nombreux inspecteurs ont essayé de le retrouver, vainement. Ils n’ont pas ménagé leurs efforts, mais son ancienne adresse est caduque, et les traces administratives et bancaires n’ont rien donné. Il y a peu de chances que Kerrigan et Jane en découvrent plus. Malgré tout, ils se rendent dans l’immeuble où vécut ce Brown, dont personne ne se souvient. Ils retrouvent le précédent gardien des lieux, qui se montre coopératif. Selon lui, Brown était un veuf vivant là avec une fillette de moins de dix ans. La gamine était souffreteuse, timorée, solitaire.

Kerrigan et Jane obtiennent bien une autre adresse, mais ce n’est que le garde-meubles que Brown chargea de son déménagement. Deux sbires des frères Reddy ont, d’ailleurs, suivi la même piste que le duo, quelques temps plus tôt. Chercher un père et sa fille peut s’avérer plus aisé pour Kerrigan et Jane. Même s’il existe plusieurs écoles dans ce quartier new-yorkais, c’est une voie à explorer. Il se confirme que la fillette maladive se nomme Mary Brown, mais les enseignants ne savent ce qu’elle est devenue, plusieurs années s’étant écoulées. De retour au dernier domicile connu, le duo rencontre un voisin. Celui-ci avait réussi à apprivoiser la petite Mary, qui lui fit des confidences. Utiles indices.

Kerrigan et Jane commencent à mieux cerner l’univers familial des Brown. L’épouse étant décédée, il n’est pas idiot de s’adresser aux pompes funèbres, pouvant avoir des archives. La petite Mary étant en mauvaise santé, il faudrait retrouver le médecin traitant, ou ses fiches de patients. Ce n’est pas du côté des Stein, les parents Juifs pratiquants de Mme Brown, qu’ils auront de l’aide. Via les écoles du secteur, Jane pense avoir repéré Brown et Mary. Manquant d’expérience, sa trouvaille n’aboutit qu’à une impasse. Toutefois, il reste au duo d’autres possibilités, en exploitant tout ce qu’ils trouvent autour de la petite Mary. C’est urgent, car le procès des Relly approche…

Joseph Harrington : Dernier domicile connu (Série Noire, 1966)

— Un acte de décès, répondit Kerrigan, c’est une vraie mine de renseignements. Ça vous apprend une foule de chose. Par exemple, le nom et l’adresse du médecin qui a soigné le défunt au cours de sa dernière maladie. Si c’est un médecin de famille, il soigne peut-être encore Brown ou la petite Mary ? À New York, les gens déménagent pour un oui ou pour un non, mais ils aiment bien garder le même médecin. Celui-là connaîtrait peut-être l’adresse actuelle de Brown, et du même coup leur apporterait la solution de tous les problèmes. Autre chose : les entreprises de pompes funèbres ont des registres sur lesquels les gens venus présenter leurs condoléances inscrivent leurs noms. Ça, ça peut être précieux ! Personne ne sait rien de Brown, ni de sa famille, ni de ses origines. Il se peut qu’un frère, une sœur, un oncle ou une tante ait inscrit son nom et son adresse. Et qui saura sans doute où habitent aujourd’hui D.Brown et Mary…

L’Américain Joseph Harrington (1903-1980) fut l’auteur d’une trilogie ayant pour héros le policier Frank Kerrigan, publiée dans la Série Noire : Dernier domicile connu (1966), Le voile noir (1967), La dernière sonnette (1970). Si le premier titre est resté dans les mémoires, c’est parce que “Dernier domicile connu” a été transposé au cinéma par José Giovanni, en 1970. Lino Ventura et Marlène Jobert incarnent les principaux personnages, versions françaises de Kerrigan et de Jane. Un duo qui fonctionne bien, et un rôle sur mesure pour Lino Ventura, entre rudesse et sensibilité. Très beau succès public.

Le roman de Joseph Harrington relève de la "procédure policière" absolument classique, et de qualité supérieure. La première subtilité consiste à nous présenter les mésaventures initiales du policier Kerrigan, lieutenant rétrogradé injustement. Le deuxième élément est que sa nouvelle partenaire est une jeune femme. Au milieu des années 1960, même aux États-Unis, on trouvait sûrement peu d’enquêtrices dans la police. Troisième point de cette intrigue : au départ, le mystère est total au sujet du nommé Brown, patronyme d’une grande banalité. En découvrir davantage que leurs collègues ayant planché sur la question durant de longs mois, creusant toutes les pistes, c’est carrément improbable.

D’autant que l’action se passe à New York, mégalopole en mutation permanente. On y déménage souvent, peu d’infos à attendre du voisinage ni des gardiens d’immeubles ; les noms des rues ont pu changer, des témoins éventuels sont décédés entre-temps. Kerrigan et Jane ont toutefois un avantage : “C’est ça qu’il y a d’épatant dans cette mission… On a affaire à des gens bien. Ça nous change !” dit la jeune policière. S’il existe une notion de banditisme dans l’histoire, le duo n’est pas directement confronté à la pègre. L’obstination et le sens du détail, ainsi qu’une certaine complémentarité, leur permettra d’aller au bout de leurs investigations. Un excellent suspense à redécouvrir, ça ne fait aucun doute.

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P
Vous savez comme moi que la politique nataliste de Vichy avec ses excès parfois n'a pas été remise en cause après la Libération.<br /> Le général De Gaulle parlait des " beaux bébés pour la France " .<br /> Vous avez sans doute lu le roman de Christiane Rochefort " Les Petits enfants du siècle " ( Grasset, 1961 ) qui est une critique d'une politique nataliste exagérée, avec l'histoire d'une famille où les parents font des enfants - il y en aura dix ou plus - surtout pour toucher des allocations familiales.<br /> <br /> https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Petits_Enfants_du_si%C3%A8cle<br /> <br /> Voyons cet article en anglais, étude de ce roman :<br /> <br /> « Christiane Rochefort: Les Petits Enfants du siècle Lecture 2: Les Petits Enfants du siècle: The Story of a Reduction » [archive]<br /> <br /> https://eserve.org.uk/tmc/contem/roch2.htm<br /> <br /> Christiane Rochefort: Les Petits Enfants du siècle<br /> Lecture 2: Les Petits Enfants du siècle: The Story of a Reduction<br /> <br /> [Josyane's Reduction] [Sex and Sexuality] [References]<br /> <br /> Cordialement
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C
Christiane Rochefort fut une auteure très en vue, à une époque, c'est vrai. Sans doute est-ce pour ça (ou parce qu'il y avait décalage avec la période où j'ai commencé à lire beaucoup) que j'ai volontairement fait l'impasse sur son oeuvre. Un peu comme Christine Angot, aujourd'hui.<br /> Amitiés.
P
Bonjour M. Le Nocher, Max,<br /> <br /> Je ne connaissais pas Joseph Harrington, j'ignorais donc que le film français de José Giovanni avec Lino Ventura et Marlène Jobert en était l'adaptation.<br /> J'ai vu ce film il y a très longtemps et je remarque qu'à la même époque Marlène Jobert joua aussi dans " Le Passager de la pluie " ( 1969 ) avec Charles Bronson. Adapté de Sébastien Japrisot ? Je ne sais plus très bien.<br /> <br /> Le mot " voile " dans le deuxième titre me rappelle, à propos d'autre chose, qu'il y a quelques jours j'ai repensé au célèbre film " Le Voile bleu " ( 1942 ) de Jean Stelli avec Gaby Morlay. ( Là j'en parle seulement pour sa disponibilité à regarder et le plaisir de voir ce film, je laisse les éventuelles controverses idéologiques qui ont légitimement été suscitées quant au caractère nataliste et maréchaliste de ce film dans la mouvance de la politique de Vichy qui criminalisa l'avortement. )<br /> Ayant comme vous je suppose vu ce film autrefois et sachant qu'il n'avait été édité qu'en VHS il y a longtemps, j'ai pourtant voulu savoir si à tout hasard il n'existerait pas aujourd'hui en DVD. J'ai cherché sans vraiment penser que ce soit le cas. Pourtant si, il se trouve qu'un DVD vient d'être édité cette année.<br /> <br /> Voir par exemple sur PriceMinister ( on peut acheter ce DVD là ou ailleurs ).<br /> L'éditeur est LCJ, basé à Garches ( 92 Hauts-de-Seine ), maison spécialisée dans les rééditions de films et feuilletons du patrimoine français non édités depuis l'époque des VHS.<br /> <br /> http://www.priceminister.com/offer/buy/1347537452/le-voile-bleu-gaby-morlay-camille-bert.html<br /> <br /> Réalisateur : Jean Stelli<br /> Editeur : Lcj Editions<br /> Parution : 07/02/2017<br /> Nombre de DVD/VHS : 1<br /> Classification : Drame<br /> Acteurs : Gaby Morlay - Elvire Popesco - André Alerme - Denise Grey - Noël Roquevert - Pierre Larquey<br /> Synopsis:<br /> Louise Jarraud est profondément et définitivement marquée par un drame qui a bouleversé sa vie pendant la Première Guerre mondiale. Elle a, en effet, perdu coup sur coup son mari et son fils. Depuis, elle consacre sa vie aux enfants des autres. Devenue gouvernante, passant d'une famille à l'autre, elle a élevé Frédéric, Gérard, Charlotte et Daniel, qu'elle considère presque comme ses enfants. Au terme d'une longue vie de sacrifices dédiée au bonheur des bambins, elle se retrouve femme de ménage chez une vieille dame acariâtre, madame Breuilly...<br /> <br /> Oeuvre<br /> Nationalité de l'oeuvre France<br /> Année de sortie en salles 1942<br /> Public Tous<br /> Couleur NB<br /> Durée de la vidéo 90<br /> Support<br /> Type de support DVD Zone 2<br /> Zone Zone 2<br /> Format d'image 1.33<br /> Format vidéo 4/3<br /> Langues Audio Dolby Digital Français 2.0<br /> <br /> Cordialement
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C
Bonjour Philippe<br /> Je ne me souviens pas avoir vu ce film, peut-être un peu trop "mélo" pour moi. Mais je retiens que Pierre Larquey y jouait, un comédien que j'ai toujours admiré. <br /> Pour "Dernier domicile connu", c'était la période de gloire de Marlène Jobert, depuis "Le passager de la pluie" à "Nous ne vieillirons pas ensemble". Il y eut "L'Astragale" et "Folle à tuer", plus quelques autres grands succès. Je crois que c'est dans son livre "Lino", qu'Odette Ventura avouait ne pas avoir apprécié Marlène Jobert (Jalousie entre femmes ?). Un film très réussi, je pense.<br /> Amitiés.
M
Bonjour Claude,<br /> Lu cette trilogie il y a longtemps, mais j'en garde un excellent souvenir. Dommage qu' Harrington n'est pas persévéré dans cette veine....<br /> Amicalement,<br /> Max
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C
Bonjour Max<br /> Je pense qu'il n'est pas mauvais de remettre à l'honneur des romans comme ceux-là, d'un beau niveau de qualité. <br /> Amitiés.