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William Katz : Nuits sanglantes (Presses de la cité, 2014)

Vers 1988, Anne Seibert est une publicitaire free-lance âgée de trente-trois ans. Divorcée d'un mari violent désormais interné, elle s'est installée depuis trois mois à New Rochelle, dans l’État de New York. Anne est insomniaque, et les conseils du spécialiste qui la suit n'y peuvent pas grand-chose. Quand elle se lève au milieu de la nuit, il n'est pas rare qu'elle voit rentrer son voisin, Mark Chaney. Grand, robuste, âgé de trente-six ans, arborant une Rolex et conduisant sa Jaguar, c'est un homme qui respire la réussite et la séduction. Il dirige avec son ami Emil Welder une florissante société de conseil financier. Son habitude de rentrer à plus de trois heures du matin est due à ses voyages d'affaires, semble-t-il. À son amie Carol, Anne avoue qu'elle se sent attirée par son charmant voisin.

Au contraire, Mark Chaney est gagné par la paranoïa. Il imagine que, si Anne est debout à l'observer chaque nuit, c'est qu'elle le surveille. Qu'elle est chargée de mener une enquête sur lui. Qu'elle représente donc un danger contre lequel il doit réagir. Sous son allure si classieuse, Mark Chaney est un assassin. Souvent, la nuit, il ramène ses victimes dans le coffre de sa Jaguar. Il les descend dans sa cave verrouillée, ultra-sécurisée, les place dans un congélateur. Ses cibles ne sont pas choisies au hasard. Il s'agit de personnes qui ont autrefois causé du tort à Emil Welder et à lui-même. Adolescents au lycée de Bell Grove, suite à des dénonciations, on les traita comme des malfaisants. Ils passèrent quatre ans dans une institution, ce qui justifie l'implacable vengeance de Mark Chaney.

Anne dort mieux depuis les prémices de cette relation avec son voisin. Il l'a invitée un soir chez lui, l'autorisant à visiter entièrement sa belle maison. Ce qui excite plus encore la paranoïa de Mark, lequel songe à provoquer un faux suicide de la jeune femme. Trop de risque d'amener la police dans leur quartier, se raisonne-t-il. Pourtant, leurs maisons sont déjà surveillées à leur insu. Car, suite aux soupçons du FBI sur les activités financières de Mark, l'équipe du policier Angelo Garibaldi s'intéresse à eux. Y compris au cas d'Anne, qui pourrait être la complice de Mark Chaney.

Après une sortie en couple pour une balade dans la région, Anne doit partir en mission à Detroit. Mark en profite pour faire une visite clandestine chez elle, remarquant son appareil photo et une arme à feu. De Philadelphie, où il a retrouvé son ancien proviseur, en passant par Washington, où habite la psy qui traita le cas des deux ados, jusqu'aux environs du campus d'Amherst, le voisin d'Anne poursuit son périple criminel. Quelque peu jalouse de ces voyages mal expliqués, la jeune femme ne réalise pas la dangerosité de la situation…

William Katz : Nuits sanglantes (Presses de la cité, 2014)

Ce qui est épatant dans un tel suspense, c'est que nous avons sous les yeux l'intégralité des faits. Ce faisant, William Katz respecte la loi n°2 édictée par S.S.Van Dine dans ses “Vingt règles pour l'écriture de romans policiers” : «L'auteur n'a pas le droit d'avoir recours, vis-à-vis du lecteur, à des ruses et des procédés autres que ceux utilisés par le criminel à l'égard du détective.» Certes, les policiers ne jouent qu'un rôle accessoire, mais le lecteur n'est aucunement trompé par l'auteur.

L'assassin, maladivement intrigué par les insomnies de sa voisine, son complice, la série de meurtres et les cadavres ramenés dans le coffre de voiture, tout est raconté. Et pourtant, l'intrigue fonctionne à merveille. Face à ce cruel voisin, William Katz évite même la facilité artificielle de charger l'ambiance. Si «Le véritable roman policier ne doit pas comporter d'intrigue amoureuse» disait aussi Van Dine, l'auteur détourne cette idée. Anne est une victime potentielle, oui, mais rien ne vient vraiment l'effrayer. C'est dire que, loin d'être glauque, on nous présente l'histoire avec une belle subtilité. Dans la tradition, un suspense impeccable, tout simplement.

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W
Salut Claude,<br /> Je connais bien New Rochelle,créée par des Français protestants fuyant les persécutions contre les Huguenots, et le choix de cette ville indique bien un travail fouillé de l'auteur parce que c'est bien une des villes très bobo du comté très bobo et friqué du Westchester au nord de la ville de NY où se sont installés de nombreux sièges de grosses entreprises suite aux attentats. Plus bobo,il y a Scarsdale et sa grosse communauté juive,souvent cité comme White Plains,dans les romans de lawrence Block.
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C
J'ai eu la curiosité de consulter les statistiques ethniques du Connecticut : près de 70% de Blancs, 15% d'Hispaniques, le reste en divers. D'une certaine façon, ça indique le statut social de la population. Je présume que les épouses des hommes d'affaires y sont &quot;décoratrices d'intérieur&quot; ou &quot;antiquaire&quot;, voire &quot;agentes immobilières&quot; ou &quot;comptable de la paroisse&quot;, l'essentiel n'étant pas d'avoir une clientèle mais un rang dans la société... à l'image des &quot;desperate housewives&quot;, en effet. <br /> Amitiés.
W
Exact Claude,un peu au nord de New Rochelle,des villes comme Greenwich ont une population très friquée,les maris se rendant à leur bureau à Manhattan par le train pendant que leurs femmes créent des versions locales de &quot;desperate housewives&quot;.
C
Salut W.<br /> Merci pour cette visite guidée des beaux quartiers new-yorkais. Je me suis laissé dire que quelques-uns, dans ces milieux friqués, avaient migré vers le Connecticut, assez urbanisé aussi, ce qui leur permet de garder un pied à New York... Amitiés.
M
Bonjour Claude,<br /> De William Katz, je garde un excellent souvenir (25 ou 30 ans après sa lecture) d'un suspense très fort, &quot;Fêtes fatales&quot;, paru aux Presses de la cité dans la collection Panique (dans laquelle ne parurent que des bouquins remarquables) sur un thème classique (une femme découvre qu'elle ne sait rien de son mari).<br /> Cordialement,<br /> Max
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C
Bonjour Max<br /> &quot;Fête fatale&quot; et &quot;Violation de domicile&quot; ont été publiés à cette époque, en effet. Des suspenses très réussis. Je pense que ce 3e titre était resté dans les tiroirs. Or, il est très bien aussi. Amitiés.
P
Bonjour M. Le Nocher,<br /> <br /> C'est aujourd'hui le 11 septembre, ayons une pensée pour les événements tragiques que nous savons et les victimes directes ou collatérales, y compris les victimes des dérives de la lutte antiterroriste. Déjà 13 ans et je m'en souviens comme si c'était hier. Je le dis sans craindre que tout le monde dise la même chose, ce qui sera le cas je l'espère.<br /> Savez-vous que Maïté Bernard ( vous aviez rapporté la croiser dans des salons et festivals divers ), auteur de romans adultes et jeunesse dont des polars - Oncle Paul avait chroniqué en 2012 le tome 1 des aventures d'Ava, dotée de la faculté de voir les morts et de communiquer avec eux - était née un autre 11 septembre célèbre, le 11 septembre 1973 ? <br /> Le jour du coup d'Etat du général Pinochet au Chili, renversant et conduisant au suicide le Président Salvador Allende, avec lequel on pouvait certes avoir des désaccords sans pour autant cautionner son sort.<br /> Isabel Allende - le lien de parenté, là, ne me revient pas - est écrivain.<br /> Vous aviez dans une autre discussion relevé l'assonance de vos noms, s'expliquant par le fait que l'aïeul de Pinochet était un Français, un Breton de Lamballe installé au Chili, alors colonie espagnole, au 18ème siècle.<br /> <br /> Cordialement
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C
D'un point de vue &quot;évènementiel&quot;, ces raisonnements d'historiens sont plutôt justes. Il est vrai que l'industrialisation du 19e a fait passer la France et le monde d'un &quot;avant&quot; seigneurial et rural, à un &quot;après&quot; avec ses classes sociales marquées. Dans le quart Est de la France, on a industrialisé tôt, moins vite ailleurs. Donc, les états d'esprit des populations n'évoluent pas de façon identique partout, ni au rythme des dates. Quand, durant l'Entre-deux-guerres, on a proposé l'électricité aux habitants, beaucoup ont refusé (et pas seulement parce que c'était payant). Par contre, on racontait dans ma famille paternelle, qu'un de nos aïeux avait été le premier à accepter pour sa ferme. La maison (côté maternel) où j'ai passé ma prime enfance, datant des années 1920 aussi, était très bien équipée pour ce temps-là.<br /> La chute du Mur de Berlin sonnait, sinon la fin du 20e, du moins la fin des idéologies politiques traditionnelles. Et, dans nos scrutins, la fin des électorats bien déterminés. Mitterrand a été le dernier élu national qui ait pu &quot;situer&quot; ses électeurs. Depuis les années 90 de Chirac, ce n'est plus le cas. Tel parti proclamant aujourd'hui que son électorat est composé en majorité de telle classe sociale, c'est mensonger. <br /> Amitiés.
P
Je serai bref ici, mais comme vous parlez de la question de déterminer quand a commencé le 21ème siècle, cela me rappelle que j'ai lu de la part de certains historiens l'idée avancée que le 19ème siècle aurait été l'un des siècles les plus longs de l'Histoire. Alors que théoriquement chaque siècle a la même durée. Mais donc des historiens soutiennent que le 19ème siècle aurait commencé non pas en 1801 mais en 1789 avec la Révolution Française, et fini non pas avec l'année 1900 mais en 1914 avec le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Soit un siècle de 125 ans !<br /> Inversement, mais dans le même ordre d'idées, le 20ème siècle aurait été l'un des plus courts de l'Histoire, commençant donc en 1914 et s'achevant en 1989 avec la chute du mur de Berlin : un siècle de 75 ans !<br /> A chacun de se faire ses réflexions sur ces idées audacieuses esquissées par des historiens.<br /> J'avoue à titre personnel ne pas être hostile à cette façon de voir.<br /> <br /> Cordialement
C
Bonjour Philippe<br /> <br /> Le 11-septembre, je rentrais chez moi en voiture, comme toujours branché sur France Info. Dans un premier temps, de quoi causaient donc ces journalistes ? Attentat à New York, World Trade Center ? Je me souvenais que, quelques années plus tôt, un attentat dans les sous-sols de ces immeubles, dans la station du métro. Était-ce un sujet historique qui était traité à la radio ? Non, avions et tours, je ne comprenais pas vraiment. Dès mon arrivée, j'ai allumé la télé. Tours en feu, des « choses » tombant de ces immeubles. Explications confuses, plus claires quand même, des journalistes. Je me trompe peut-être, mais j'ai l'impression qu'on a diffusé dès la soirée le portrait de « Mohamed Attah ». A cette image-là, je n'ai jamais cru. Par contre, les pompiers et tout le reste, hélas… Oui, nous gardons ces instants (vus et revus) en tête. Tiens, je me souviens aussi de Jean-Marie Messier, puissant homme d'affaire à l'époque, communiquant bien vite qu'il était en vie. <br /> Le 21e siècle a-t-il débuté ce jour-là, du moins sur les questions guerrières ? Oui, car les Islamistes étaient considérés par les Américains comme des gens limite farfelus, poseurs de bombe mais mal entraînés. Je crois que c'est dans « Retour vers le futur » qu'on en voit un exemple, sur un parking, dans un combi VW. D'ailleurs, Ben Laden avait été un allié des États-Unis, et inversement. L'Histoire, ce sont des victimes oubliées, même si l'on parle souvent des faits. <br /> Amitiés.