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Franz Bartelt : La bonne a tout fait (Éd.Baleine, Le Poulpe, 2013)

Les Ardennes, une région pittoresque et sylvestre. Située dans les confins frontaliers, ça n'est pas de la contrée très guillerette, plutôt frisquette. Ce coin-là se résume à des forêts labyrinthiques et une multiplication de virages. Faut apprécier l'isolement, se résoudre à l'excentré, pour s'y accoutumer. Prenons l'exemple de Painrupt, village de soixante-dix-sept âmes, dont cinquante-huit femmes, un cul-de-sac desservi par autobus.

C'est là que vit Versus Bellum, un vieil anar aux allures de lutin décati, dans une maison qui est un véritable capharnaüm. Toutefois, cet ermite des Ardennes n'a jamais renoncé au combat contre “les gros”. Dans une commune voisine, se trouve un de ceux qu'il exècre. Environ un an plus tôt, le riche forestier Alfred Bermont a assassiné son épouse, Versus Bellum en est convaincu. Si son employée de maison Élisabeth, soucieuse de garder sa place, n'avait pas témoigné en sa faveur, “le gros” eût été inculpé. Ça le fait rager, une injustice pareille.

Versus Bellum a adressé plusieurs courriers à Gabriel Lecouvreur, dont il connaît l'esprit d'indépendance et l'opiniâtreté à s'attaquer aux salopards. L'Ardennais a même projeté un scénario pour confondre l'assassin. Puisque Bermont envisage de vendre ses propriétés boisées et tous ses biens, le Poulpe jouerait le rôle d'Amadeo Pozzi, intermédiaire au nom d'un éventuel acheteur. Ainsi, Gabriel pourrait approcher la bonne, la faire parler, dénicher des preuves contre Bermont. Versus Bellum fournit même une belle voiture américaine, pour impressionner le forestier.

À Paris, Gabriel n'est pas chaud pour s'exiler vers le pays du vieil anar, au milieu de nulle part. Son ami bistrotier Gérard souligne qu'en outre, c'est dans le même secteur qu'ont récemment disparu trois femmes, que ça mérite donc peut-être le voyage. Voila comment Gabriel débarque à Painrupt, “tout le monde descend”. Le cas des femmes disparues serait, selon Versus Bellum, des départs volontaires. Au bout du monde, elles ont fini par s'ennuyer et s'en aller. Les babillages du théâtral ancêtre anar ne sont ici compensés que par la bière locale, dont Gabriel ne tarde pas à abuser.

Sous le masque d'Amadeo Pozzi, le Poulpe s'invite chez Alfred Bermont. C'est un veuf du genre lacrymal, n'espèrant que vendre au plus vite les propriétés de sa défunte. Quant au premier contact entre Gabriel et Zabe (Élisabeth), il n'est pas des plus chaleureux. Entre sincérité et fourberie, il va falloir que le Poulpe garde les idées claires...

Franz Bartelt : La bonne a tout fait (Éd.Baleine, Le Poulpe, 2013)

Créé en 1995 par Jean-Bernard Pouy, avec Serge Quadruppani et Patrick Raynal, Gabriel Lecouvreur a été le héros de plus de 280 romans, écrits (presque) à chaque fois par différents auteurs. Le Poulpe se définit comme “un personnage libre, contemporain, curieux, qui va fouiller dans les désordres et les failles du quotidien”. Proche de l'anarchie mais pas justicier, il s'efforce de mettre hors d'état de nuire ceux qui ne méritent guère de pitié. Après quantité de romanciers, c'est Franz Bartelt qui s'approprie cette fois ce héros. Car c'est à cela qu'on reconnaît les meilleurs titres de cette série, quand un auteur ne se contente pas d'en appliquer la “bible”. D'ailleurs, Chéryl, la blonde coiffeuse compagne de Gabriel, ne figure pas dans cette histoire. Et son camarade anti-franquiste Pedro n'y est que brièvement cité. Par contre, la bière coule à flot, ce qui caractérise ces romans.

Auteur d'une trentaine d'ouvrages, dont quelques-uns publiés dans la Série Noire, Franz Bartelt est Ardennais. Il peut donc se permettre de décrire avec une aimable ironie cette région où il vit. Si le Poulpe a déjà beaucoup voyagé, y compris aux abords de la Belgique, le voici donc dans un paysage inhabituel, sinueux, ombragé de denses forêts. Intérêt à garder le moral au beau fixe dans ces conditions, d'autant que sa “mission” ne lui plaît qu'à demi (de bière, oui). Ne manquant ni de péripéties, ni de carabine menaçante, le scénario est empreint de beaucoup d'humour avec des réparties de bon aloi, on l'imagine bien. Écriture maîtrisée et belle fantaisie, pour un épisode très réussi du Poulpe.

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R
Bonjour Claude,<br /> <br /> Je serais très heureux de retrouver un bouquin de Franz Bartelt dans la série &quot;Le Poulpe&quot;<br /> pour 2 raisons <br /> J'ai lu de lui, &quot;Les bottes rouges &quot; et &quot;Massacre en Ardenne&quot; dont je garde un très bon souvenir<br /> et aussi pour retrouver l'atmosphère de mon pays &quot; Les Ardennes Belges&quot; (.....le pluriel est essentiel vu du côté Belge .)<br /> Je vais donc me l'offrir incessament;<br /> Amitiés et Merci<br /> <br /> Robert PONDANT<br /> Belgique
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C
Bonjour Robert<br /> J'avais moi aussi une raison particulière d'apprécier ce Poulpe. <br /> Si certains Maigret m'ont moins convaincu, je garde un bon souvenir de &quot;Maigret chez les Flamands&quot; qui se passe à Givet, exactement dans le même secteur frontalier des Ardennes... <br /> Je crois qu'en effet, les Français de là-bas disent plutôt l'Ardenne, tandis que leurs voisins Belges parlent des Ardennes. J'éprouve beaucoup de tendresse pour ces nuances linguistiques. Clin d'œil amical à tous les Wallons qui &quot;dînent&quot; à midi et qui &quot;soupent&quot; en soirée, s'ils utilisent encore ces verbes en ce sens. <br /> Amitiés.
M
Bonsoir Claude,<br /> Le seul Bartelt que j'ai lu, &quot;Le jardin du bossu&quot;, ne m'avait pas enthousiasmé...<br /> 280 &quot;Poulpes&quot; ?! J'ai dû en lire à peine une vingtaine, aucun ne m'a déçu, sinon le GJ Arnaud qui nous avait habitué à beaucoup mieux ! <br /> Amicalement,<br /> Max
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C
Bonjour Max<br /> Oui, &quot;Le jardin du bossu&quot; fut un des grands succès de Bartelt. Il faudrait que je le relise car ça doit remonter à près de dix ans, et j'ai quelque peu oublié ce titre.<br /> &quot;Le Poulpe&quot; version GJ Arnaud n'était pas mauvais, mais pas dans la lignée précise de ce qu'on aime dans son œuvre, d'où une possible déception. Je suis loin d'avoir lu tous les Poulpe, mais c'est un rendez-vous ponctuel qui n'est généralement pas déplaisant.<br /> Amitiés.
J
Bonjour Claude,<br /> Effectivement, non seulement Bartelt a accepté de se glisser dans l'univers du Poulpe mais c'est surtout le Poulpe qui se trouve plongé dans l'univers du romancier...<br /> Et ça donne, comme tu le dis, un opus réussi de la série. Ca pourrait presque pousser à se servir une Orval.<br /> Amitiés.
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C
Bonjour Jérôme<br /> Ah, ces diables de moines producteurs de bières d'abbayes ! <br /> Franchement, c'est une histoire très agréable à lire, dont la qualité d'écriture constitue un bel atout, il faut le dire. Avec des paysages à l'opposé du &quot;polar urbain&quot;, aucun doute. <br /> Amitiés.