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27 juin 2016 1 27 /06 /juin /2016 04:55

André est âgé de douze ans en 1978. Il habite dans le canton de Genève, en Suisse. Il est le fils de Jeanne, trente-quatre ans, et de Carlo Pastrella, Sicilien d'origine. Celui-ci n'a pas encore obtenu un permis de séjour définitif, mais doit se contenter d'un permis renouvelé chaque année. Chez les Pastrella, on garde une relation forte avec la famille, en Sicile. Ils déménagent toutes les fois où le père trouve un nouvel emploi. Ce qui ne simplifie ni la scolarité d'André, élève de niveau correct, ni ses relations avec les autres gamins. Est-ce que ça le perturbe ? Pas forcément davantage que les torgnoles dont son père n'est pas avare. L'école, la classe d'Olga Schanz, est juste un mal nécessaire. Imaginatif, André Pastrella se fabrique des imitations en bois d'armes à feu, et sait jouer seul.

Avec Akizumi Miyu, un des élèves, est né un étrange accord entre un Rital et un Japonais. Il est vrai que la mère de son ami est une personne singulière, qui va le faire frissonner. Le seul plaisir collectif d'André, c'est le football. Son père parie sur les matchs italiens. Pour la Coupe du Monde en Argentine, la Squadra Azzura a ses chances. Au pied des HLM où ils vivent, l'équipe de Carlo et de son fils est offensive, mais pas vraiment gagnante. Le problème actuel d'André, ce ne sont ni les tensions internes à sa famille, ni d'éventuels incidents avec Mme Schanz. C'est une bande de cinq ados violents qui ont pris pour cible le petit Rital qu'il est. Ils l'ont déjà roué de coups, mais André sent que la menace devient de plus en plus sérieuse. Avoir peur d'eux, est-ce réellement de la lâcheté ?

Arrive le temps des vacances estivales, ce qui offre à André un répit concernant le Chef et sa bande. Long voyage routier depuis la Suisse jusqu'au ferry qui, de Calabre, permet de rallier la Sicile. Là-bas, se trouve le village où habite toute la famille de Carlo. C'est surtout leur séjour dans une maison des Pastrella du bord de mer qui donne à André un sentiment de liberté. Redevenir un “chasseur-cueilleur” dans la tradition ancestrale ? Selon le vieil Armando : “C'est ça être un homme, créer sa journée, inventer sa vie, et tu recommences tous les matins jusqu'à ta mort. Ne l'oublie pas, c'est la seule manière de garder tes couilles, figliolo, crois-moi.” Ce séjour en Sicile fera très légèrement progresser la sexualité d'André, sujet qui trotte fatalement dans la tête d'un garçon de son âge.

Au retour, il entame sa dernière année en école primaire, avec un nouvel enseignant peut-être plus attentif que Mme Schanz. Tandis que ses parents frôlent le divorce, il se fait un nouveau copain, Étienne. Il est un peu meilleur en tout qu'André, mais sans aucun mépris, donc ils s'accordent bien. Le duo d'amis devient trio avec la belle Schéhérazade, originaire de Tunisie. Si André ne se cherche pas d'autres copains en classe, leurs mères à tous les trois n'ont pas la moindre chance de s'entendre. Hélas, le Chef et sa bande vont reprendre les hostilités, encore plus violentes qu'avant les vacances. Il faudra bien qu'André trouve un moyen de se venger…

Joseph Incardona : Permis C (Éd.BSN Press – coll.Fictio, 2016)

Joseph Incardona a été récompensé en 2015 par le Grand Prix de Littérature Policière, et par le Grand prix du roman noir à Beaune en 2011. Toutefois, ce n'est pas un roman doté d'une stricte intrigue policière qu'il nous présente avec ce nouveau titre. André Pastrella est quelque peu l'alter-ego fictionnel de l'auteur. Il revient ici sur l'enfance du personnage. Donc, sur une époque de sa propre vie, vers l'âge de douze ans. Fils d'une Suissesse et d'un Sicilien, André peut se sentir déraciné, voire apatride. Qu'on soit enfant d'Italien ou pas, c'est une période de la vie où la virilité d'un jeune garçon doit s'exprimer par des faits concrets. Sexuels, un peu. Pugilistiques, surtout. Quand vos ancêtres sont Siciliens, la vengeance fait obligatoirement partie de votre code génétique.

L'action se situe en 1978, lointain temps si différent d'aujourd'hui. Ni meilleur, ni pire, ce n'est pas tant la question. Les problèmes paraissaient peut-être moins insurmontables ; le divorce n'étant pas inéluctable, par exemple. Pour ce môme, le moment est venu de commencer à s'affirmer, de “grandir”. Sans abuser de la nostalgie, c'est avec souplesse et naturel que l'auteur retrace le passage qui conduit, au final, vers l'âge adulte. Que l'on ne s'y trompe pas : cette fluidité narrative doit tout au talent de l'écrivain. Joseph Incardona est un perfectionniste, accordant de l'importance à chaque scène et à chaque sentiment, pour que ses romans expriment le “vivant”. Encore une très belle réussite de cet excellent auteur !

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25 juin 2016 6 25 /06 /juin /2016 04:55

Grand rouquin débonnaire, Léo Tanguy est un journaliste indépendant. Il alimente son site Internet en enquêtant à travers les quatre départements de Bretagne et la Loire-Atlantique. En ce mois de juin, Léo est de passage en Normandie, direction l'Irlande via Cherbourg. Mais, aux confins de la Manche et du Calvados, le Combi bariolé façon hippies de ses parents avec lequel Léo a coutume de se déplacer est victime d'un accident. Quelques séquelles physiques sans gravité pour lui, petits dégâts à réparer pour le Combi. Une poignée de personnes sont intervenues : des "reconstitueurs", avec costumes et véhicules d'époque, préparant les festivités en souvenir du Débarquement. Outre Sébastien et Jean-François, Léo n'est pas sans remarquer la belle infirmière Marie-France, en tenue authentique.

Le garagiste d'Isigny-sur-Mer est formel : c'est une balle qui a crevé un pneu du Combi, provoquant l'accident. Très occupé à réviser les véhicules historiques, il ne peut donner la priorité à Léo. Retardant la suite de son voyage, le journaliste s'installe à l'Hôtel de France avant de s'intéresser aux "reconstitueurs". Il s'agit d'une association de passionnés, qui ne se contentent pas de se travestir en figurants soldats, de brandir des armes neutralisées, ou d'entretenir des engins d'autrefois. Ils transmettent leur réel savoir au public. Frédéric, président de l'association, est aussi maire et dirige l'intercommunalité. On prête à cet ancien mercenaire, cachant mal ses opinions réacs, de plus hautes ambitions politiques. Il a rapidement inspiré de l'antipathie à Léo, qui n'aime guère les chefs aussi directifs.

Elle est bien attirante, l'infirmière d'opérette Marie-France, réellement aide-soignante dans le civil. Mais elle est la compagne d'Alain, chanteur qui connut une brève heure de gloire nationale avec un seul tube. Il reste une célébrité locale, se produisant en spectacle lors des fêtes dédiées au D-Day. Pour l'Isigny Swing Festival, il va faire le show. Léo passe une soirée sympa avec le couple. Il apprend que Marie-France fut, un temps, intime avec le maire-président Frédéric. En tenue de chef de la Résistance, ce dernier est omniprésent, en ville comme au camp des "reconstitueurs" qui se visite en journée. Tout ça est très bon pour le commerce local, d'Isigny-sur-Mer à Grandcamp-Maisy, et pas inutile pour les ambitions politicardes de Frédéric.

Jean-François, un des figurants de l'association, est mortellement blessé par balle du côté de Colombières, à quelques kilomètres. Le temps que Léo et ses amis actuels donnent l'alerte, le cadavre a disparu. Pour Frédéric, pas question de lancer une enquête, c'est "sa" fête qui prime. Remplaçant le défunt Jean-François, Léo se joint aux participants du défilé qui attire les foules. Si les festivités du Débarquement doivent se terminer par le show d'Alain et un feu d'artifice, l'affaire risque de s'achever en règlement de comptes…

Jean-Noël Levavasseur : Balle tragique à Colombières : un mort (Éd. La Gidouille, 2016)

Le vingtième épisode des enquêtes de Léo Tanguy est l'œuvre de Jean-Noël Levavasseur, qui signa déjà un précédent titre de la série, “Irish confit” (2009). C'est dire qu'il connaît bien ce personnage, flegmatique cousin de Gabriel Lecouvreur dit Le Poulpe, célèbre héros créé par J.B.Pouy. Étant réellement journaliste régional, Jean-Noël Levavasseur possède un évident point commun avec Léo Tanguy. Surtout, Isigny-sur-Mer et sa région n'ont pas de secret pour lui. Car il a coécrit deux ouvrages de témoignages sur les bombardements du secteur, en juin 1944.

N'oublions pas que nous sommes là à deux pas d'Omaha Beach, une des grandes plages du Débarquement. Quand vous vous trouvez, à Vierville par exemple, en face de cette étendue de sable, comment ne pas avoir une pensée pour tous ceux qui y sont tombés ? Le Cimetière américain de Colleville-sur-Mer et le Cimetière allemand de La Cambe témoignent du carnage humain. De nos jours, sont organisées des reconstitutions qui permettent au public de "visualiser" le déploiement de forces d'alors. De transmettre aussi l'Histoire, beaucoup de participants étant des érudits. Si, tel Léo Tanguy, on se sent plutôt pacifiste, on peut jeter un regard mitigé sur ces manifestations militaristes, même si on ne peut nier qu'elles sont utiles au tourisme.

Soulignons que le titre de ce roman fait référence à la célèbre "une" de l'hebdo Hara-Kiri qui, dans son numéro du 16 novembre 1970, évoqua avec ironie le décès du Général de Gaulle. On suit avec plaisir Léo, notre brave Breton de Plouguer, égaré en terres bas-normandes, témoin de fêtes commémoratives et de faits criminels. Un très agréable suspense.

Jean-Noël Levavasseur et les quatre autres auteurs de la nouvelle série des enquêtes de Léo Tanguy donnent rendez-vous aux lecteurs le samedi 2 juillet à Saint-Brieuc.

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21 juin 2016 2 21 /06 /juin /2016 04:55

Dans l'Algérie actuelle, Kémal Fadil est commissaire de police à Oran. Il habite avec sa mère Léla, en fauteuil roulant depuis l'accident de voiture qui coûta la vie à son père. On vient de découvrir quatre cadavres dans le secteur de Bouisseville, sur la côte. Il s'agit de trois Africains noyés, des Noirs ne vivant pas ici, et du clochard Bakhti, qui fit des séjours en psychiatrie. Kémal Fadil s'arrange pour qu'on lui confie l'enquête, son confrère Mahfoud n'étant guère fiable. Il enquête avec son collègue Moss, compétent en plusieurs domaines, et avec le solide quinquagénaire Jo, ami de sa famille sur qui il peut compter. Les trois Africains sont sûrement des clandestins : outre les proches enclaves de Melilla et de Ceuta, en territoire marocain, les côtes espagnoles ne sont qu'à cent cinquante kilomètres.

La querelle de voisinage entre Algérie et Maroc pourrait compliquer les recherches, même si c'est probablement dans la zone littorale entre Oran et Aïn-El-Turck qu'il faut débusquer les organisateurs du trafic de migrants. La mer étant agitée, il n'y a aura pas de départ dans les jours suivants. Il faut agir au plus tôt, aussi pour ne pas exciter la population algérienne, hostile à ces clandestins d'Afrique passant par le Maghreb. Faouzi Ramdane est un journaliste installé à Marseille, pour avoir trop enquêté sur le régime par le passé. Il vient d'être victime d'un "accident" à Aïn-El-Turck. Version douteuse que ni son ami Jo, ni Kémal ne peuvent croire. On retrouve des enregistrements laissant penser qu'il s'occupait d'une affaire de trafic d'êtres humains, en lien avec la région marseillaise.

À Niamey, un mois plus tôt, le jeune Ali n'a plus de raison de rester au Niger. Comme son ami Timou l'a fait avant lui, il compte rejoindre l'Europe. L'apprentie infirmère Fatou a de bonnes raisons de quitter la maison de son oncle, elle aussi. Ils embarquent dans un taxi collectif avec deux couples et Johnny, un Nigérian. Le périple s'annonce chaotique pour ces "voyageurs". D'autant que, leur chauffeur ayant disparu après une panne, ils avancent vaille que vaille jusqu'à Agadez, en direction du nord du Niger. Grâce au couple tenant une pension où ils ont logé, Ali, Fatou et Johnny embarquent avec des Occidentaux en route vers le sud de l'Algérie. Passer la frontière n'est pas sans risque. Un camion les conduit ensuite à travers le désert, destination Béni Abbès, où ils sont hébergés dans une vieille mosquée. Mais la route est encore bien longue avant d'approcher de la Méditerranée.

Kémal suit une piste prometteuse : un hangar à bateaux du Cap Falcon, servant peut-être aux passeurs. Il s'y rend avec Jo et Léla. Le vieux gardien ne semble pas savoir grand-chose. Ce local verrouillé appartenant au colonel retraité Abdelhak, Kémal doit solliciter sa hiérarchie afin d'obtenir un mandat de perquisition. L'intervention de police sera musclée. Entre une villa squattée de Bouisseville et des activités suspectes à Gardanne, dans la région de Marseille, Kémal progresse bientôt à grands pas. Il n'est pas impossible qu'il tombe même amoureux…

Ahmed Tiab : Le désert ou la mer (Éd.L'Aube noire, 2016)

Après “Le Français de Roseville”, il s'agit du deuxième titre d'une série mettant en scène le policier algérien Kémal Fadil. Parler de roman d'enquête serait trop réducteur, car le rôle du héros ne se limite pas aux investigations. Il porte également un regard sur l'Algérie d'aujourd'hui, et sur l'histoire de ce pays. Les autorités gardent une distance envers leurs voisins du Maghreb. Les révoltes arabes des années 2010 n'ont pas touché le fonctionnement de l’État, peut-être parce que l'Algérie connut d'autres crises depuis la décolonisation, en particulier l'époque des islamistes du FIS. Population résignée à vivoter, si c'est la moins pire des solutions ? Peut-être. Avec son confrère marseillais, Kémal va aussi évoquer une actualité plus inquiétante. Mais, la base de cette intrigue, c'est le trafic d'être humains, l'exploitation des espoirs de migrants qui croient au miracle occidental.

Kémal ne juge pas “tous ces gens qu'aucune misère subie depuis le départ de leurs pays respectifs ne décourage dans la poursuite de leur rêve. C'est triste et admirable à la fois.” En parallèle de l'affaire policière, nous suivons le parcours de Fatou et ses amis depuis le Niger jusqu'en Algérie. C'est une véritable aventure, avec ses péripéties hasardeuses, qui attend les candidats à l'exil. “Les conditions de survie dans le désert imposent le paradoxe de se prémunir de la chaleur le jour, et de la rechercher activement la nuit.” La chaleur n'est pas le seul inconvénient du voyage à travers le désert. Se faire véhiculer par des chauffeurs de taxis ou de poids lourds, gagnant ainsi un petit supplément de salaire, ce n'est pas ça qui pose problème. Ce sont les passeurs vers l'Europe, ceux qui font payer très cher leurs services tout en méprisant ces clandestins, qui sont des criminels.

Double récit où, côté Algérien et chez les migrants, Ahmed Tiab nous fait toucher du doigt des réalités humaines. Il ne s'agit pas d'une approbation, mais du constat d'une situation : sans présent, ni avenir, des gens miséreux que nul ne "fait venir" tentent leur chance, et des trafiquants en profitent pour les exploiter. La part sociologique complète l'enquête de police, en devient le thème central. Un roman noir riche, qui explore de façon nuancée un sujet sensible de notre époque.

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19 juin 2016 7 19 /06 /juin /2016 04:55

Fondé en 1948 par le critique et romancier Maurice-Bernard Endrèbe, le Grand Prix de Littérature Policière est une institution dans l'univers du polar et du roman noir. Il suffit de consulter la liste des lauréats pour admettre que de nombreux auteurs majeurs ont été honorés par ce prix. Il récompense les deux meilleurs romans policiers, français et étrangers, publiés durant l'année. Actuellement, la sélection se fait en juin, par le jury composé de dix personnes. La liste officielle du Grand Prix de Littérature Policière 2016 présente ses 35 titres (15 Français, 20 Étrangers). Les vainqueurs dans les deux catégories seront désignés en septembre 2016.

LES GAGNANTS 2016 DU GRAND PRIX DE LITTERATURE POLICIERE SONT ICI :

Grand Prix de Littérature Policière 2016 – les sélectionnés

Les auteurs et romans français :

Frédéric Andréi : BadLand – Albin Michel, mars 2016

Morgan Audic : Trop de morts au pays des merveilles – Rouergue Noir, 2016

Jacques Bablon : Rouge écarlate – Jigal, janvier 2016

Franck Bouysse : Plateau – La Manufacture de livres, déc. 2015

Luc Chomarat : Un trou dans la toile – Rivages/Noir, mars 2016

Marc Fernandez : Mala Vida – Prélude Ed., octobre 2015

Emmanuel Grand : Les salauds devront payer – Liana Lévi, 2016

Pierric Guittaut : D'ombres et de flammes – Série Noire, mai 2016

Louise Mey : Les ravagées – Fleuve Editions, mai 2016

Alexis Ragougneau : Evangile pour les gueux – Viviane Hamy, janvier 2016

Sébastier Raizer : Sagitarius – Série noire, fév. 2016

Louis Sanders : Auprès de l'assassin – Rivages/Noir, mai 2016

Jean-Marc Souvira : Les sirènes noires - Fleuve Editions, novembre 2015

Elisa Vix : Ubac (Rouergue Noir, janvier 2016) 

Ahmed Tiab : Le Français de Roseville - Ed.L'Aube noire, janvier 2016

( http://www.action-suspense.com/2016/06/ahmed-tiab-le-francais-de-roseville-ed-l-aube-noire-2016.html )

 

 

Les auteurs et romans étrangers :

Jon Bassoff : Corrosion – Gallmeister, 2016

Alex Berg : Ta fille morte – Ed.J.Chambon, janvier 2016

William Boyle : Gravesend – Rivages/Noir, mars 2016

Gordon Ferris : Les justiciers de Glasgow – Seuil, Mars 2016

Castel Freeman : Viens avec moi – Sonatine, janvier 2016

John Harvey : Ténèbres, ténèbres – Rivages/Thrillers, novembre 2015

Joseph Kanon : Berlin 49 – Seuil, février 2016

Un-Su Kim : Les planificateurs – L'Aube noire, févier 2016

Iain Levinson : Ils savent tout de vous – Liana Levi, octobre 2015

Jo Nesbo : Soleil de minuit – Série Noire, mars 2016

Jo Nesbo : Le fils – Série Noire, octobre 2015

Nele Neuhaus : Des vivants et des morts – Actes Noirs, février 2016

Leif G.W.Persson : Celui qui terrasse le dragon – Rivages/Thrillers, 2016

Marisha Pessl : Intérieur nuit – Gallimard, juin 2015

Boris Quercia : Tant de chiens – Asphalte, novembre 2015

Dolores Redondo : Une offrande à la tempête – Mercure noir, mars 2016

Markus Sakey : Un monde meilleur (2 tomes) – Série Noire 2015-2016

Mark Haskell Smith : Ceci n'est pas une histoire d'amour – Rivages, juin 2016

Jan Costin Wagner : Le premier mai tomba la dernière neige – Ed.J.Chambon, octobre 2015

Carlos Zanon : J'ai été Johnny Thunders – Asphalte, mars 2016

- Cliquez sur les titres en caractères bleus pour accéder à mes chroniques sur ces livres -

N'ayant pas lu la totalité de ces 35 titres, je ne peux recommander que les romans chroniqués chez Action-Suspense, dans l'ordre de mes préférences :

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18 juin 2016 6 18 /06 /juin /2016 04:55

Originaire de New York, Maureen Coughlin est âgée de trente ans. Elle s'est installée à La Nouvelle Orléans, où elle termine sa formation d'agent de police. À New York, quelques mois plus tôt, elle a traversé une épreuve violente, ce qui l'a incitée à tourner la page. Diplômée, elle doit faire ses preuves sur le terrain, avant d'être titularisée. Elle est tutorée par le sergent Preacher Boyd, gros bonhomme placide autant que chevronné. Ce qui contraste avec Maureen, sportive musclée mais plutôt maigrichonne. Elle reste en contact avec sa mère Amber, et le compagnon de celle-ci, Nat Waters, retraité du NYPD. Ils ont fêté ensemble sa remise de diplôme, dans le Vieux-Carré de La Nouvelle Orléans. Maureen veut prouver qu'elle a toute sa place dans la police d'ici, largement restructurée depuis le désastre causé par l'ouragan Katrina.

Bill Loehfelm : L'antre du mal (Éd.10-18, 2016) – Coup de cœur –

Suite à une arrestation agitée au sein d'un couple de junkie dans le 6e District, secteur où elle est affectée, Maureen espère que ça n'aura pas des conséquences négatives. Boyd ne manque pas de lui rappeler que, hiérarchie oblige, c'est à la Criminelle de poursuivre cette enquête, pas à une agente comme elle. Maureen doit observer les quartiers où ils opèrent, chercher à s'y intégrer. Par exemple, en ne bousculant pas la Mère Mairesse, vieille figure locale. Ou en restant courtoise avec Norman Wright, petit délinquant qui essaie de forcer la voiture d'un certain Bobby Scales. Autour, Maureen repère une nouvelle fois un trio d'adolescents. Des guetteurs au service des trafics, certainement. Elle finira par les identifier, mais n'est pas aussi rapide à la course que l'un d'eux, Mike-Mike, âgé de treize ans. Son "cousin" Goody, quinze ans, sait se faire discret.

Le troisième gamin a douze ans, il se prénomme Marques. Il est doué avec ses baguettes pour jouer de la musique. Il fait partie de l'orchestre Roots of Music, destiné à l'insertion des jeunes. Un môme récupérable, peut-être. Contrairement à ce jeune plus âgé, affichant une allure à la Bob Marley, qui semble bien être le second de l'introuvable Bobby Scales. C'est quand le voleur Norman Wright est assassiné, que Maureen entre en contact avec Christine Atkinson, capitaine à la Criminelle. Elle va collaborer avec l'enquêtrice sans pour autant oublier qu'elle n'est qu'une "bleue". Côté vie privée, ce n'est pas la stabilité pour Maureen : elle est l'amante de Patrick, cuisinier promis à un bel avenir, mais celui-ci va finalement rompre. Pour tous deux, c'est leurs métiers respectifs qui priment. Maureen se recueille parfois dans une église désaffectée, comme pour effacer son passé new-yorkais.

Lorsque la Plymouth de Bobby Scales est retrouvée incendiée, la policière Atkinson fait de nouveau appel à Maureen. Car, dans le coffre, on a découvert le cadavre d'un des jeunes du trio qu'elle connaît. Étonnant que l'affaire se soit produite dans ce secteur si fréquenté, estiment l'enquêtrice et Maureen. Sans doute la jeune agente de police ne passe-t-elle pas inaperçue, car elle est bientôt menacée par l'émule de Bob Marley. Dont le boss reste dans l'ombre. Preacher Boyd et Maureen obtiennent des infos sur le trio d'ados : seul Marques n'est pas encore un repris de justice fiché. Il est possible que le rôle de la Mère Mairesse ne soit pas si neutre dans tout cela. Même lors de ses heures de repos, Maureen reste impliquée dans le dossier, bien que ça n'entre pas dans ses fonctions. Sa ténacité risque d'obliger Bobby Scales à réagir avec violence…

Bill Loehfelm : L'antre du mal (Éd.10-18, 2016) – Coup de cœur –

Voilà un authentique roman noir à classer parmi les histoires de durs-à-cuire. Au centre, une jeune femme dont le portrait nous est dessiné avec une subtile crédibilité. Son aventure précédente, retracée dans “Face au Mal”, est un sinistre épisode de sa vie, ce qui marque encore sa mémoire. L'essentiel, c'est qu'elle prend un nouveau départ, faisant preuve d'un beau volontarisme.

Le premier aspect que l'on retient, c'est donc son initiation au métier de policière. D'agent de police de base, dans les rues, et non pas – c'est important – d'enquêtrice gradée. Elle doit apprendre à maîtriser ses réactions rageuses, à écouter et à parlementer, à s'insérer dans la population à majorité noire. Son sympathique formateur lui répète assez quelles sont les règles à suivre ! Lui non plus, on n'a pas de mal à l'imaginer, ce gros flic vite essoufflé, néanmoins donnant de bons conseils et sachant jauger la future titulaire. Duo percutant auquel il convient d'ajouter la capitaine Atkinson. Un modèle à imiter pour Maureen. Un personnage d'un professionnalisme froid, mais plus cordiale en privé.

Toutefois, ce polar ne se résume assurément pas à sa part criminelle. C'est, probablement avant tout, un magnifique hommage à cette ville complexe qu'est La Nouvelle Orléans. Entre le sinueux Mississippi et le lac Pontchartrain, la géographie s'y exprime de façon différente d'ailleurs : “Aucun témoin n'indiquerait que le suspect s'était enfui vers l'est ou vers l'ouest. Sur les canaux de la police, les opérateurs radio recouraient aux points cardinaux, mais pour tous les autres, rien n'était au nord ou au sud. C'était lakeside, côté lac, ou riverside, côté fleuve. Rien n'était à l'est ou à l'ouest. C'était uptown ou downtown.” Du Superdome, temple du football américain et de l'équipe des Saints, au Vieux-Carré, vestige touristique de la colonisation française, La Nouvelle Orléans possède une identité – qui échappe au reste des habitants des États-Unis.

Ce n'est pas dans les lieux assez connus que Maureen débute en tant qu'agent de police, mais dans des quartiers populaires. Dont l'auteur parvient à nous faire sentir l'ambiance. Avec ses maisons shotgun, ici ses parcs et ses ruelles, là ces lieux (tel le Charity Hospital) pas tous réhabilités après Katrina. Ou encore ces gargotes, vendant des plats cajuns ou mexicains. Même si tout est gangrené par les trafics et la violence, on veut encore croire au "thou shalt not kill" (Tu ne tueras point) biblique. Cette ville singulière et attachante, Maureen va elle aussi tomber sous son charme.

Un roman noir remarquable, à ne surtout pas manquer.

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16 juin 2016 4 16 /06 /juin /2016 04:55

À Porto, Mário França se définit comme “le plus grand détective du monde”. Ce qui paraît très exagéré à l'inspecteur-chef Consciência de la PJ, se pensant lui-même bon enquêteur. Il est vrai que, si Mário França et son équipe “d'assistants” ne paient pas de mine, ils savent se montrer efficaces. Lors d'une cérémonie à l'église de Lapa en présence d'officiels locaux et d'une délégation venue du Brésil et d'Uruguay, le détective vient d'être témoin d'une affaire doublement énigmatique. D'abord, l'urne contenant la relique du cœur du roi Dom Pedro IV a disparu. En parallèle, l'architecte Jorge Vinagre – l'organiste de l'église – est décédé subitement, en apparence de mort naturelle. S'il n'a pas encore de client pour ces deux affaires, Mário França s'informe sur l'histoire du Portugal au 19e siècle, afin de situer la portée de la disparition du cœur royal.

Peu après, trois clients engagent le détective, chacun lui signant un gros chèque. La Confrérie de Lapa et la délégation sud-américaine veulent retrouver la relique. Quant à la petite-amie de l'architecte-organiste, Sofia Almagre, elle soupçonne un meurtre. Après la mise en action de son équipe, Mário França assiste à une soirée mondaine chez les Falcão, famille du roi du textile. Un moyen d'approcher la haute-société. Dès le lendemain, le détective se retrouve “dans une voiture de la Judiciaire, escorté voire harcelé par un gradé qui a une tête de tortue, un sans-grade qui mastique un chewing-gum, et une Procureure du ministère public avec un corps qui pousse au crime et des yeux de chatte castrée.” Le policier Consciência et la procureure Gabriela Seisdedos sont confrontés au décès suspect de Kid Tranquilo, champion de poker.

En fait, ce jeune homme n'est autre qu'Hélio Vilas, fils du roi de l'industrie du liège. S'il gagnait beaucoup, il claquait surtout énormément d'argent. Comme pour Jorge Vinagre, l'autopsie reste incertaine sur la cause de sa mort. À part régler un conflit avec le gang de Valbom, des petits voyous, Mário França doit admettre qu'il ne progresse guère. Certes, la police opère une descente au club "Le Petit Enfer" de DJ Case, fils de la famille Falcão et l'associé du défunt Kid Tranquilo. Mais les investigations du détective vont le mener de Saint-Jacques-de-Compostelle (Espagne) jusqu'à Montevideo (Uruguay), sur la piste d'un trafiquant de reliques rarissimes. Devenu l'amant de Gabriela Seisdedos, Mário França interroge aussi Vera, la petite-amie du champion de poker, ou le comte d'Amial, industriel dont le titre de noblesse n'est que relatif.

Ayant empêché un suicide du haut du pont Dom Luis, le détective commence bientôt à y voir plus clair dans les petits et grands secrets des protagonistes. C'est au tribunal de la Relação, où le policier Consciência accuse des coupables erronés, que le détective va publiquement désigner les véritables responsables des crimes…

Miguel Miranda : La disparition du cœur des symboles (L'Aube Noire, 2016)

Force est de reconnaître que Mário França a plutôt l'air d'un fouineur dilettante que d'un détective expérimenté. Avec lui, on flâne dans Porto, de l'église de Lapa jusqu'au Mur des Morutiers, sur la rive du Douro. On s'accorde une pause au café Astória, face à la Place de la Liberté. On s'invite dans les propriétés viticoles produisant le fameux vin, ou chez les industriels de la région. On voyagera même de Galice en Amérique Latine. Au gré de ses pérégrinations, le "privé" n'est pas sans collecter moult informations, sans imaginer des hypothèses pas si farfelues. Et même si son équipe de déclassés ne semble pas brillante, il s'agit d'assistants jouant chacun un rôle fort utile. Quant au pigeon Gandolino, amateur de chips aux crevettes, il déjoue l'espionnage informatique qui viserait Mário França.

C'est avec beaucoup d'humour, teinté de malice et de dérision, que Miguel Miranda nous raconte les aventures de son héros dans ce délicieux roman d'enquête. Un excellent suspense, auquel s'ajoutent ça et là de beaux moments de poésie. Y compris dans les cauchemars du détective : “C'est pour cela que je déteste la nuit. Les sons enflent, le bureau semble habité par des faunes, des êtres ailés, par d'autres qui rampent – des âmes en peine, une légion démoniaque convoquée par l'obscurité… C'est un être vivant, j'en suis sûr. J'habite ses entrailles, comme Jonas habite celles d'une baleine.” Fidèle à la meilleure tradition, c'est en présence des suspects réunis que la vérité sera faite. Un vrai régal !

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15 juin 2016 3 15 /06 /juin /2016 04:55

Vernais est une station balnéaire ordinaire, petite ville côtière peu touchée par le crime. Le commissaire Roger Vignes, marié mais ignorant son épouse, approche allègrement de la retraite. Le lieutenant Stanislas Delorme est son principal adjoint. Célibataire, il vit avec sa chienne Lucky, et s'en trouve très bien. Mariée à un homme d'affaire au bizness pas très clair, Margot Farges découvre le cadavre d'un quinquagénaire inconnu dans sa piscine. Ce n'est pas son mari Franck, absent, qui lui viendra en aide. La police enquête, ne tardant pas à identifier la victime. Il s'agit de Serge Kinderf, qui vivait en marginal depuis que des évènements douloureux l'aient fortement perturbé.

Le corps est reconnu par ses deux fils, Stéphan et Walter. Si Stéphan, le plus jeune, a été marqué par leurs problèmes familiaux, ce n'est guère le cas de son aîné. Walter est employé dans une agence de communication, mais se veut surtout écrivain en devenir. Dans la lignée d'un Thomas Pynchon ou d'un Malcolm Lowry, si possible. S'ennuyant dans son boulot, Walter ne laisse pas indifférente sa collègue Aude, même s'il garde sa réserve envers elle. On retrouve bientôt un second cadavre anonyme. Le légiste remarque une inscription en cyrillique sur son corps. Peu importe que ça signifie “L'absence est fatale”, l'essentiel est que cet homme appartient sûrement à une mafia russe.

Vignes, Delorme et leurs collègues enquêtent au domicile d'un nommé Jean Quibert. La maison de ce type, qu'on dit quelque peu dérangé, est un véritable dépotoir. Entre odeurs infectes et immondices variés, on trouve d'abord deux cadavres. Parmi les autres traces, il y aura aussi un crâne d'enfants et des ossements. Quibert n'est pas en état d'être interrogé, pour l'heure. Grâce à Margot, Stanislas Delorme s'intéresse au cas de Franck Farges, dont le passif apparaît chargé. Dans le même temps, le mari de Margot connaît de sérieux problèmes. Il est enlevé, séquestré et torturé par des Russes, auxquels il a des comptes à rendre. Franck Farges ne maîtrise vraiment rien de la situation en cours.

Trentenaire, Félicien Faderne est un scientifique, employé par la société Blakol. S'il a été kidnappé par une jeune blonde armée, c'est pour assurer sa protection, semble-t-il. Car ses travaux de recherche sont loin d'être anodins. Félicien l'ignorait, mais Blakol est une officine œuvrant pour l'intérêt national. Sous les ordres d'un énigmatique Horb, la blonde Anne doit s'occuper de lui, le temps que certaines menaces soient écartées. Non sans devoir mettre KO des adversaires, elle récupère l'ordinateur de Félicien afin qu'il continue sur son projet...

Gilles Vidal : Le sang des morts (Coll.Hélios Noir, Éd.ActuSF, 2016)

Excellente initiative que de rééditer en format poche ce remuant roman d'aventure, où les policiers ne sont pas au bout de leurs peines. Une affaire où il sera question de chirurgie esthétique, d'une collection de fioles de sang, d'une femme qui a tenté un retour incognito. Et où même la chienne Lucky sera blessée, avant que son maître n'élimine le malfaisant qui lui a fait du mal. Walter Kinderf et son cadet, Félicien et Anne auront leur rôle à jouer, bien entendu. Quant au principal criminel, bien qu'il utilise plusieurs pseudonymes, il sera pourchassé avec succès. On aura compris que c'est un foisonnement de péripéties, un festival de rebondissements, que nous offre l'auteur. Gilles Vidal est un narrateur hors pair, qui se délecte à nous raconter en détail les tracas rencontrés par les protagonistes.

Si la tonalité se veut légère, fluide et même assez enjouée, ne nous y trompons pas : l'intrigue est diablement solide, parfaitement mesurée dans sa construction. Avec ses scènes courtes illuminant le récit, le feu d'artifice est sous contrôle. Le chassé-croisé des personnages n'empêche nullement qu'ils nous soient présentés avec précision. Si Stan Delorme, flic peut-être moins désabusé qu'il l'affiche, est un des pivots du roman, tous en sont héros autant que lui. Ce qui constitue un des beaux atouts de l'histoire, qu'on aurait tort de confondre avec un polar basique où se croisent bons et méchants. Gilles Vidal nous captive et fait sourire, nous entraînant dans un affaire palpitante.

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14 juin 2016 2 14 /06 /juin /2016 04:55

Âgé de quarante-sept ans, Jim Thane vivait en Californie avec sa femme Libby, plus jeune que lui. S'il fut un brillant cadre dirigeant dans des sociétés de haut-niveau, il a traversé une période glauque. La drogue, les jeux d'argent et les putes l'ont fait sombrer. Libby ne l'a pas laissé tomber, bien que leur enfant soit décédé accidentellement. Depuis deux ans, Jim pratique l'abstinence sous le contrôle d'un ex-policier. Grâce à son ami Tad Billups, qui représente un groupe d'investisseurs, Jim a enfin une nouvelle chance. Tad lui confie un poste de directeur intérimaire, sur la côte ouest de la Floride. Il s'agit de redresser, dans les plus brefs délais, une société développant un nouveau logiciel informatique. Un défi qui paraît presque perdu d'avance, trop de millions ayant été dilapidés pour peu de résultats.

En ce mois d'août, Libby a préparé leur installation en Floride. Pour sa désintoxication, Jim est contraint de s'adresser à un psy local. Au sein de l'entreprise, rares sont les employés fiables, hormis la comptable Joan, la réceptionniste Amanda et le programmeur Darryl. Le logiciel n'est que très approximatif : son potentiel n'est pas nul, mais sa rentabilité est loin d'être flagrante. Jim pense que la "reconnaissance faciale" via l'informatique, ça pourrait intéresser des banques. Dans un premier temps, le ratage de la démonstration compromet cette opportunité. Un policier du FBI, de Tampa, continue à enquêter sur la disparition soudaine de Charles Adams, ancien directeur de la société. Jim ne lui avoue pas qu'il vient d'en découvrir la raison probable : un énorme détournement d'argent.

En effet, plus de trois millions de dollars ont été versés à un fournisseur fantôme. Il fallait pour ça l'aval du directeur. Jim utilise une ruse afin de dénicher l'adresse supposée dudit fournisseur, à Sanibel Island. Dans le grenier de cette maison vide, des millions en billets de banque, pactole qu'un gang vient récupérer sous les yeux de Jim. Son épouse Libby estime qu'il doit s'en tenir à ce qu'a demandé Tad Billups, protéger les intérêts de celui-ci, et gérer la fin de la société s'il ne peut faire mieux. Même s'il faut licencier, à commencer par le prétentieux directeur des ventes, des contrats sont miraculeusement signés pour le logiciel. Y compris avec la banque où la démonstration fut loupée. Jim finit par profiter de l'embellie sans se poser de questions, même si ces ventes lui semblent artificielles.

Jim s'est rapproché d'Amanda, la réceptionniste. D'origine russe, la jeune femme lui confie son parcours, aussi chaotique mais plus violent que celui de Jim. L'agent du FBI est sur la piste de l'insaisissable mafieux russe Ghol Gedrosian, qui paraît désormais poursuivre ses activités délictueuses en Floride. Jim affirme ne rien savoir au sujet de cet homme, ce qui est inexact. Car il connaît, du moins partiellement, "l'influence" du Russe. Des révélations inattendues vont bientôt changer la situation pour Jim. Fermer les yeux devient impossible pour lui. Dans un premier temps, il trouve refuge à Fort Myers Beach, chez Amanda. Mais le danger est omniprésent, et Jim ne peut convaincre sans preuve l'agent du FBI…

Matthew Klein : Sans retour (Série Noire, 2016)

Ce roman se décompose en deux parties. La première décrit le redressement économique d'une entreprise, selon la méthode américaine devenue universelle : pas de sentiment ! Jim Thane étant un ex-junkie et alcoolo, accro au jeu et aux prostituées, l'objectif devient hasardeux. Heureusement qu'il est soutenu moralement par son épouse. On a un aperçu du rôle des investisseurs à capital-risque, et du fonctionnement de certaines "start-up" qui ne sont que des gouffres financiers. Activités illusoires, mais l'essentiel pour les employés est d'afficher un beau statut social et de bénéficier des budgets, tant que l'argent coule à flots. Les sommes dépensées en "recherche et développement" sont-elles toujours justifiées ? Ça n'existe pas qu'aux États-Unis, ces sociétés quasiment factices.

Dans la seconde partie, l'histoire vire au polar schizophrénique. En dire davantage serait trop en dévoiler. Néanmoins, un certain nombre d'éléments apparus précédemment dans le récit offrent un lien avec cette progression de l'intrigue. Si le héros glisse vers la perte de contrôle, postulat bien connu du roman noir, le dénouement restera plus obscur que la moyenne. Ce qui importe peu, puisque tout est dans "l'aventure" à laquelle il vient d'être confronté. Au réalisme sociétal non dénué d'ironie, succède donc un roman d'action : un suspense à double facette riche en péripéties, que l'auteur maîtrise et rend captivant.

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