Le policier Denis Koster enquête sur le cas d’Ambroise Fridelance. Celui-ci est illustrateur pour la collection “Effroi” de l’éditeur Serge Demare, installé rue Mazarine. Il est marié à Régine, qu’il appelle Ginette, handicapée depuis un accident de voiture. Acariâtre, son épouse incite Ambroise à réclamer une augmentation. Demare refuse, prétendant que le contexte de l’édition n’est guère florissant.
Ambroise se documente pour illustrer la couverture du roman “Le tam-tam de l’angoisse”, d’Euloge Zonta. (“Apportez-moi une couverture qui saigne” exige Demare). Il s’aperçoit alors qu’il possède un vieux tabouret valant une fortune. En effet, ce siège design est de Paul Leneuf, collaborateur de Le Corbusier. Les quatre exemplaires sont censés avoir brûlé à l'aéroport de Bamako, lors d'un coup d'état. De fait, il n’en reste qu’un exemplaire, celui d'Ambroise. Qui vaudrait dans les cent mille Euros. Son “amie” journaliste Nora Bellois confirme à Ambroise la valeur de l’objet. Elle le met en contact avec Maurice Macquart, censé être un commissaire-priseur expérimenté et fiable.
Pour Ambroise, la vente aux enchères de ce tabouret unique signifie la fin de ses soucis financiers. Son éditeur est beaucoup plus sceptique. Il lui explique les rouages de ce genre d’opération, une arnaque, dont seul Macquart profitera. “Votre commissaire-priseur, il va se mettre en cheville avec un des gros marchands de meubles sur la place de Paris, qui sera seul a enchérir... Résultat, votre tabouret va partir au prix de base, vingt mille Euros.” Ambroise a bientôt confirmation que Demare a raison. Il tente de récupérer l’objet déposé chez l’expert, mais il devrait s’acquitter d’énormes frais.
Ambroise engage une avocate, Me Rabichon-Loisel, afin de faire valoir ses droits. Ce qui ne résout concrètement rien. Certes, le chantage exercé par Macquart se plaiderait, mais un procès ne serait pas gagné d’avance. Furieux, Ambroise force la porte de l'expert commissaire-priseur, et exige son tabouret. C'est là que la situation finit par s'embraser... Koster et Nora poursuivent ensemble l'enquête, interrogeant dans la banlieue lilloise l'auteur du roman “Le tam-tam de l’angoisse”...
Prix Mystère de la critique 2014 pour “Première station avant l'abattoir” (2013), Trophée 813, Prix Calibre 47, Prix Nice Baie des Anges pour “Monsieur le Commandant” (2011), le talent incontestable de Romain Slocombe est récompensé depuis quelques temps. Ce qui fait plaisir à ceux qui suivent de longue date cet auteur, artiste multi-facettes. La réédition en format poche, et à petit prix, de “Envoyez la fracture” est un bon moyen de se rendre compte de ses qualités.
Ce pourrait être la simple histoire d’un brave type naïf, qu’on essaie de filouter, qui défend maladroitement ses intérêts. En réalité, entre témoignages et scènes directes, la construction de ce roman court est très habile. L’auteur entretient un sympathique suspense. Les mésaventures d’Ambroise sont racontées avec une subtile ironie. Romain Slocombe évoque ici le mobilier design, les douteuses ventes aux enchères, la sorcellerie africaine. Il rend aussi hommage à l’édition populaire (Fleuve Noir, Ditis) et à ses illustrateurs, comme Gourdon. Extrêmement plaisant à lire, un vrai polar souriant.
En 2009, Claire Devers a adapté cette intrigue pour un téléfilm éponyme, avec Laurent Stocker, Clotilde Hesme, Léa Drucker, Michel Aumont, Judith Chemla.
- “Envoyez la fracture” est disponible dès le 13 février 2014 -
Un des quinze meilleurs polars 2013 d'Action-Suspense.
Action-Suspense fut le tout premier à mettre en valeur ce roman.
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