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29 octobre 2013 2 29 /10 /octobre /2013 05:55

Chaque année, Anne Perry produit un roman un peu plus court que ses autres ouvrages, dans la série “Petits crimes de Noël”. Il s'agit de contes criminels dans l'Angleterre de la fin du 19e siècle. Plus concis, le format de ces histoires correspond à l'idée du conte. Pour autant, ce ne sont nullement des sujets mièvres que traitent Anne Perry. Au contraire, ses ambiances ne sont pas loin de rappeler souvent celles de Charles Dickens. Si la période de Noël est supposée heureuse, ou moins triste, le mystère plane autour des personnages qu'elle met en scène. Les quatre plus récents romans de la série (hormis celui de 2013) ont été rassemblés dans un seul volume (de 544 pages), “Nouveaux contes de Noël”. Coup d'œil sur les scénarios de ces quatre titres.

"La promesse de Noël" - Le super-intendant Runcorn, de Scotland Yard, profite de la veille de Noël pour profiter d'un peu de solitude, loin des charges de son métier et de la ville. Hélas pour lui, sa paisible retraite sur l'île sauvage d'Anglesey s'avère de courte durée. Jeune soeur du pasteur local, Olivia Costain est retrouvée assassinée au cœur du cimetière. Selon l'opinion publique, ce crime odieux ne peut être l'œuvre d'un insulaire. Pourtant, les preuves semblent indiquer le contraire. À la demande de la belle Mélisande Ewart, qui l'invite au sein de la gentry locale, Runcorn accepte de mener l'enquête...

"La révélation de Noël" - 1895. Susannah Ross, la tante d’Emily Radley et de Charlotte Pitt vit en Irlande depuis longtemps. Elle dut s’écarter de sa famille quand elle épousa un catholique aujourd’hui décédé. Âgée de cinquante ans, Susannah est gravement souffrante. Emily quitte provisoirement son mari, pour rejoindre sa tante. Dans le Connemara, elle est accueillie par l’aimable Père Tyndale qui la conduit jusqu’au village côtier dont il est le prêtre. Après cet exténuant voyage, Emily arrive chez sa tante, qu’elle trouve fort affaiblie. Heureusement, Susannah est bien aidée par Maggie O’Bannion, qui s’occupe de la maison. Emily remarque bientôt que Fergal O’Bannion veille de près sur sa femme Maggie, comme s’il redoutait un danger.

À l’épicerie locale, l’accueil est un peu distant mais poli. Plus tard, elle croise aussi Padraic Yorke. Ce sexagénaire connaît bien le passé de la région. Il lui raconte l’histoire, mêlée de légende, des clans qui furent maîtres des environs. De retour chez sa tante, Emily rencontre les Flaherty, mère et fils. Justement, jadis le clan Flaherty fut ici puissant. La nuit suivante, le tonnerre gronde et les éclairs inquiètent Emily. Au cœur de la tempête, elle aperçoit un navire qui sombre au large du village. Elle ameute la population, qui se porte au secours des naufragés ayant pu survivre. Il n’y a qu’un seul rescapé. Lorsqu’il récupère quelques forces, il dit s’appeler Daniel, mais n’a pas de souvenir du drame...

Anne Perry : Nouveaux contes de Noël (Éditions 10-18, 2013)

"Un Noël plein d’espoir" - 1883. Gracie est une adolescente de treize ans. Avec ses jeunes frères Spike et Finn, elle habite dans Heanage Street, chez leur grand-mère qui les élève. Brick Lane est un des faubourgs londoniens qui abritent une population miséreuse. Sans doute un peu plus reluisant que Flower Street et Dean Street, quartier regorgeant de voleurs et de prostituées. Ce soir-là, Gracie croise la petite Minnie Maude, huit ans. La gamine cherche l’âne Charlie, dont elle pense qu’il s’est égaré. L’oncle Alf, que Minnie Maude aimait beaucoup, vient de mourir et l’animal n’est pas rentré chez la tante Bertha et l’oncle Stan, où elle vit. Gracie ne peut guère aider l’enfant.

Dès le lendemain, elle retrouve la rue où habite Minnie Maude. Ce n’est pas seulement l’animal qui a disparu, mais aussi la charrette de chiffonnier de l’oncle Alf. Quant au décès de celui-ci, dû à une chute à Mile End, il ne parait pas très clair. Qui volerait les modestes objets que peut récupérer un chiffonnier ? Gracie et Minnie Maude interrogent Jimmy Quick, ami de l’oncle Alf exerçant la même profession. Pour lui, le décès d’Alf est juste une question de malchance. Gracie est consciente que Jimmy Quick n’est pas franc. Un témoin aurait vu une boite en or dans le chargement de l’oncle Alf, peut être une rumeur...

"L’odyssée de Noël" - 1865. Lucien Wentworth est un fils de famille oisif âgé d’une trentaine d’années. Depuis qu’il s’est mis à fréquenter les plus décadents milieux du West End, il s’y complaît au point de rompre avec son père. Ce dernier demande à son ami Henry Rathbone de retrouver Lucien. Rathbone rencontre le comptable de la clinique d'Hester Monk, Squeaky Robinson, ancien délinquant, sûrement plus aguerri que lui pour enquêter dans le West End. Squeaky demande à son ami Crow de l’assister. Crow est un médecin clandestin, qui exerce du côté du port de Londres. Le duo débute bientôt ses investigations.

Les tavernes et salles de spectacles du côte de Haymarket sont sinistres et mal famées. Lucien Wenthworth n’y est pas totalement inconnu. On raconte qu’il est tombé sous le charme fascinant d’une certaine Sadie. Plus que l’alcool ou les drogues, c’est cette femme qui retient Lucien dans ce monde de luxure. Sadie aurait un autre amant, Niccolo, probablement un rival violent pour Lucien. Crow et Squeaky s’enfoncent plus loin dans les endroits glauques du West End, sans en apprendre plus. Henry Rathbone ne peut se résoudre à si peu de résultats. Aussi le trio fait-il une nouvelle tentative pour récupérer Lucien dans ces sombres quartiers. C’est ainsi qu’ils rencontrent la jeune Bessie, une prostituée mineure. Elle les guide au cœur de lieux de plus en plus crasseux. On leur parle d’un nommé Shadwell, inquiétant Homme de l’Ombre. Leur enquête conduit le trio dans un tunnel ensanglanté. Un meurtre y a été commis récemment...

- “Nouveaux contes de Noël” est disponible dès le 7 novembre 2013 - 

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28 octobre 2013 1 28 /10 /octobre /2013 05:55

Swin Ruiz est un ancien étudiant, qui a vécu un temps de larcins et de petites arnaques. Il a coupé les ponts avec sa mère, veuve remariée, et ses nombreuses sœurs. Ce Latino se sent fait pour transgresser les lois. Il était prudent de s'éloigner des campus, où il n'avait guère de vrais amis. À peu près du même âge, Kyle Ribb s'installa au décès de sa mère dans une marginalité insouciante. Ce costaud, usant au besoin de sa force expéditive, se borne longtemps à divers traficotages. Le hasard va réunir Swin et Kyle, effectuant tous les deux une même mission pour le nommé Gregor, de Little Rock. Le garde forestier Pat Bright appartient également au réseau de trafic de drogue dirigé par un certain Frog, que personne ne voit jamais. Bright engage Swin et Kyle comme assistants au parc naturel de Felsenthal, aux confins de l'Arkansas. Outre les tâches quotidiennes sur le site, ils vont continuer ponctuellement à livrer des voitures chargées de drogues dans d'autres États.

À part Wendy Vasgar, “la patronne en rose” de Pat Bright, un policier peu inquiétant du nom de Cooper, et le riche fils de celui qui obtint la place de garde forestier pour Bright, on n'a pas grand chose à craindre dans ce parc. Swin et Kyle se voient attribuer de faux patronymes, juste pour égarer d'éventuels curieux. Parfois, ils s'interrogent à propos du légendaire Frog. Ils ignorent comment, venant de Memphis bien des années plus tôt, Frog prit la succession d'un vieux patron dealer qu'il avait doublé. Pas plus qu'ils ne savent que c'est grâce aux jumeaux Thomas et Tim qu'il développa son activité. Son réseau arrose en drogue tout le Sud-Est des États-Unis. À part Gregor, le principal contact de Swin et Kyle, c'est Elle, une Noire souffrante, vivant comme eux dans un mobile home du coin. Bientôt, Swin tombe amoureux de la jeune infirmière Johnna. Non pas qu'elle soit séduisante mais, à l'inverse du solitaire Kyle, Swin a besoin de cultiver une part de romantisme.

Une des missions du duo tourne mal. Un petit voyou les a pistés jusqu'au parc naturel de Felsenthal. Quand il braque Pat Bright, tous les deux finissent par s'entre-tuer. Pour Swin et Kyle, il s'agit de se débarrasser des cadavres, ce qui est jouable dans un tel parc. Tous deux admettent qu'ils doivent rester réglos : “Si à un moment il faut se barrer, on le fait ensemble” dit Kyle. Faire croire, en particulier à Wendy, que Bright est toujours vivant ne sera pas si compliqué, du moins pendant quelques semaines. Sauf si quelqu'un se montre trop curieux, auquel cas il faudra l'éliminer. Gregor ayant eu des ennuis, le trafic continue sous la direction approximative d'Elle. Kyle estime préférable de confier à Johnna le secret de leurs activités et la mort de Bright. Tous trois ont pris possession du logement de leur défunt supérieur. Menant désormais une vie paisible, Frog observe la situation qui se dégrade dans son réseau...

John Brandon : Little Rock (Éditions du Masque, 2013)

Situé entre la Louisiane, l'Oklahoma et le Missouri, l'Arkansas est une région peu peuplée, moins de trois millions d'habitants. Son slogan, “l'État naturel” définit bien ses paysages, entre basses montagnes, fleuves et plaines. On y compte effectivement plusieurs parcs naturels, tel celui où séjournent nos héros. On imagine volontiers que c'est le secteur idéal pour se mettre au vert. Ce que fit le trafiquant Frog, plusieurs années auparavant, après un début de vie déjà chargé. En parallèle des aventures de Swin et Kyle, il nous raconte en personne les étapes de son existence. Voilà une jolie manière stylistique d'apporter une ponctuation au principal récit. D'autant que Frog semble s'adresser à lui-même, faisant un bilan de son parcours non terminé. Ce n'est pas ni un monstre, ni un caïd mafieux. Juste un type qui, en toute discrétion, fait prospérer son business de trafic de drogue.

Si des gens tels que Frog existent certainement, des marginaux à l'image de Swin et Kyle ne sont assurément pas rares aux États-Unis. Ils sont “en rupture” avec une société américaine balisée. Pas trop cyniques, pas du tout ambitieux, du moment que le fric tombe à chacune de leurs missions. On s'intéresse aussi au cas de l'infirmière Johnna ou à celui de Wendy, “la patronne en rose”, deux sacrés personnages. John Brandon nous livre ici des portraits nuancés d'Américains peu ordinaires, dépeints avec un humour subtil. Ça ne manque évidemment ni de péripéties, ni d'une dose de suspense. Par son écriture et sa capacité à nous faire adhérer à cette histoire, un auteur qui possède un vrai talent.

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25 octobre 2013 5 25 /10 /octobre /2013 04:55

Garden Hills est une petite localité de Floride, située non loin de l'autoroute reliant Tampa à Orlando. En cette fin des années 1960, il n'y reste qu'une douzaine de maisons habitées. Cette cité minière a pourtant été florissante, pendant un temps. Des ingénieurs y ayant détecté du phosphate en quantité, Jack O'Boylan acheta les terrains disponibles afin de construire une usine pour traiter le minerai de phosphate extrait du sol. Ce qui attira bon nombre d'ouvriers, pour lesquels Jack O'Boylan fit bâtir une ville, dans le creux des terres déjà exploitées. Celui qui profita le plus de la manne financière, ce fut Mayhugh Aaron, dit Fat Man. Peut-être finit-il à moitié fou, mais il avait négocié sans céder un sacré pactole. Cette fortune profite aujourd'hui à son fils, Fat Man Junior. Il habite la plus riche maison de Garden Hills, sur une butte dominant la ville quasi-morte. Car entre-temps, le phosphate s'épuisant, Jack O'Boylan cessa son industrie ici, et la plupart des ouvriers partirent.

Le fils Fat Man tenta de maintenir un semblant d'activité à Garden Hills, répandant lui-même la rumeur illusoire selon laquelle Jack O'Boylan reviendrait un jour relancer la ville. Fat Man pèse désormais près de trois cent kilos, pour un mètre soixante-cinq. Son régime consiste à boire un substitut alimentaire qui ne le fait pas maigrir, vu qu'il en consomme jusqu'à douze litres par jour. Il végète au milieu de ses milliers de livres achetés au poids, alors qu'il aurait peut-être pu poursuivre un parcours universitaire. Fat Man est assisté par Jester, ancien jockey pesant quarante-cinq kilos, qui conduit sa Buick Sedan aménagée. En réalité, même s'il reste passionné de cheval, la carrière de jockey de Jester fut très brève. Il fut ensuite employé dans un cirque. C'est là qu'il rencontra “Nestradidi, la Noire princesse africaine”, singulière contorsionniste prénommée Lucy. Il s'installa à Garden Hills avec elle, à l'époque où il fut engagé par le père de Fat Man Junior.

Celle qui espère redonner vie à Garden Hills, c'est Dolly Furgeson. Jolie fille préservant sa virginité, elle fut élue Reine du Phosphate à l'âge de seize ans. C'est alors qu'elle partit pour New York. Elle avait pour ambition d'y retrouver Jack O'Boylan puisque tout le monde le connaissait là-bas. Avec ses atouts, Dolly saurait le convaincre de revenir. Durant deux ans, elle ne fut que danseuse go-go, vivotant dans un hôtel. Néanmoins, elle sut tirer de vraies leçons de cette expérience. La Floride est une région qui attire les touristes. Un peu de publicité sur l'autoroute, un télescope payant braqué sur les curiosités de Garden Hills, il y a des projets à mener. Ce qu'elle a expliqué à Fat Man, qui n'y croit pas. Malgré tout, également incité par Jester, il a financé les premières lubies de Dolly. Wes Westrim et sa fille ne sont pas difficiles à convaincre non plus. Pour réussir, il faut viser le sommet, c'est toute l'ambition de Dolly...

Harry Crews : Nu dans le jardin d’Éden (Sonatine Éditions, 2013) – Coup de cœur

En œnologie, comme dans la littérature policière, il existe de bons petits vins gouleyants, des vins de qualité à davantage savourer, et des grands crus qui sont de vrais nectars. De ces derniers, on n'en goûte qu'avec parcimonie, tant ils sont rares. En se demandant si le mot “vin” est suffisant pour caractériser ces boissons exceptionnelles. Telle est l'image que donne ce roman d'Harry Crews qui, écrit en 1969, a mûri dans quelque fût avant de nous parvenir.

Ne le nions pas, même si sa thématique reste actuelle, savoir que l'action date de la fin des années 1960 ajoute un arôme qui pimente encore notre dégustation. Bien que située en Floride, c'est dans l'Amérique profonde d'alors que nous plonge l'intrigue. À peine s'agit-il d'une bourgade, tout juste un site exploité puis délaissé par un industriel fantôme. Nul doute que l'auteur s'inspire de toutes les villes de la “ruée vers l'or”.

C'était le deuxième titre de cet écrivain, pourtant on y sent déjà une vraie maturité. Pour dessiner les portraits des personnages, Harry Crews ne se borne pas à un récit linéaire où chacun aurait sa part de vicissitudes. Avec souplesse, il revient sur tel épisode de leur vie, qui va expliquer leur comportement à l'heure où l'espoir renaît à Garden Hills. Ainsi, quand Wes retourne dans son trou (inutile) de foreur, juste pour participer au projet de Dolly, on comprend sa démarche. S'il est pitoyable, surtout quand il ne peut plus se vêtir correctement, Fat Man n'est pas malhonnête, au fond.

À chacun, aussi ridicules soient-ils, l'auteur offre une évidente humanité. Dolly domine la situation, ayant mieux compris le monde après ses tribulations new-yorkaises. La tonalité est ironique, pas d'une cruauté sardonique, car on ressent une certaine tendresse pour ce petit univers. Quelle que soit l'étiquette, noire ou pas, un roman remarquable.

– "Nu dans le jardin d’Éden" est disponible dès le 7 novembre 2013 –

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23 octobre 2013 3 23 /10 /octobre /2013 04:55

C'est dans un coffret à la présentation soignée, que Marc Villard a réuni quatre auteurs de prestige pour Femmes en colère” (Atelier In8). Il contient quatre livrets, présentant des nouvelles de quinze à vingt pages. Des textes où s'expriment le talent incontesté de grands noms du roman noir. En effet, ces quatre-là ont mérité une brassée de Prix littéraires, souvent décidés par des publics de lecteurs. Qu'on en juge :

Didier Daeninck a été récompensé par le Grand prix de Littérature policière et le Prix Paul Vaillant-Couturier pour "Meurtres pour Mémoire", le Trophée 813 pour "Le géant inachevé", le Prix Mystère de la critique pour "Play-back", le Prix Louis Guilloux pour "Zapping", et quelques autres distinctions. Marc Villard a, entres autres, reçu le Prix Michel Lebrun pour "Démons ordinaires".

Dominique Sylvain a reçu le Prix Sang d'Encre pour "Vox", le prix Michel Lebrun pour "Strad", le Grand prix des lectrices de Elle pour "Passage du Désir" et le Prix du meilleur polar français (du magazine Lire) pour "Guerre sale". Marcus Malte a été récompensé par le Prix Polar dans la ville pour "La part des chiens", Le Prix Mystère de la critique pour "Les harmoniques", et une bonne dizaine de Prix pour "Garden of Love" (dont Prix Sang d'Encre, prix Michel Lebrun, Grand prix des lectrices de Elle, Prix des lecteurs Quais du Polar...)

D.Daeninckx, M.Villard, D.Sylvain, M.Malte : Femmes en colère (In8)

Voici quelques mots sur les quatre nouvelles de ce coffret...

Didier Daeninckx : La sueur d'une vie

À Santa-Maria de Cicero, plusieurs femmes pénètrent dans la Nova Caixa, la caisse d’épargne espagnole puis se barricadent dans le bureau du directeur de l’agence régionale. Et là, chacune passe en revue sa vie de misère, bafouée par, entre autres, les placements pourris de la Caisse. La plus jeune des révoltées a soixante-quinze ans et faire sauter son tee-shirt ne lui pose pas problème. L'auteur dénonce les ravages humains que produisent les mécanismes du capitalisme financier, avec suspense et humour.

Marc Villard : Kebab Palace

Cécile survit avec sa fille Lulu dans un mobile home à Ritsheim, une bourgade alsacienne. La neige brouille le paysage et la cité asiatique qui leur fait face. Elles découvrent, à deux pas, le cadavre martyrisé d’une jeune chinoise qui bouleverse l’adolescente. Sa mère, alcoolique au dernier degré, décide de tendre un piège au tueur. C’est peut-être une erreur. Une histoire basée sur une tendre relation mère-fille, qui seule triomphera de la misère et de la désespérance d'une banlieue pourrie, où règnent prostitution, alcoolisme et trafics en tous genres. Cécile et Lulu peinent à renverser leur sort, et même lorsqu'elles veulent se rebeller dans un sursaut volontaire, le destin reste implacable.

Dominique Sylvain : Disparitions

Elsa et Cédric ont pris leur décision en commun : enfanter par procuration. La mère porteuse se nomme Issara et l’enfant vivra. Mais aujourd’hui, Elsa marche dans les rues de Bangkok, le cerveau en feu, en quête de son enfant et peut-être aussi de son amour trahi. Cette soif de vengeance butera sur le réel. Bien différent de ce qu’elle pouvait imaginer. Elsa prête à toute pour retrouver son enfant, le fruit de sa chair né du ventre d'une autre. Rageuse, déterminée, au cœur d'une histoire actuelle, puisque la société s'interroge de la gestion pour autrui.

Marcus Malte : Tamara, suite et fin

Tamara est une Guyanaise née en 1946. Elle hérite d’une maison en métropole et se lance dans l’élevage de cochons. Elle est donc noire, étrangère au village et travaille comme un homme. Elle ne passe pas inaperçue. Certains cerveaux malades ne le supportent pas. Sa seule amie, une gamine, doit se battre pour la fréquenter. Un matin, Tamara décide d’en finir avec l’oppression agricole. Splendide personnalité se dévoile dans la violence, des hommes envers les femmes, et violence de la vengeance, proportionnée.

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22 octobre 2013 2 22 /10 /octobre /2013 06:29

Les Ardennes, une région pittoresque et sylvestre. Située dans les confins frontaliers, ça n'est pas de la contrée très guillerette, plutôt frisquette. Ce coin-là se résume à des forêts labyrinthiques et une multiplication de virages. Faut apprécier l'isolement, se résoudre à l'excentré, pour s'y accoutumer. Prenons l'exemple de Painrupt, village de soixante-dix-sept âmes, dont cinquante-huit femmes, un cul-de-sac desservi par autobus.

C'est là que vit Versus Bellum, un vieil anar aux allures de lutin décati, dans une maison qui est un véritable capharnaüm. Toutefois, cet ermite des Ardennes n'a jamais renoncé au combat contre “les gros”. Dans une commune voisine, se trouve un de ceux qu'il exècre. Environ un an plus tôt, le riche forestier Alfred Bermont a assassiné son épouse, Versus Bellum en est convaincu. Si son employée de maison Élisabeth, soucieuse de garder sa place, n'avait pas témoigné en sa faveur, “le gros” eût été inculpé. Ça le fait rager, une injustice pareille.

Versus Bellum a adressé plusieurs courriers à Gabriel Lecouvreur, dont il connaît l'esprit d'indépendance et l'opiniâtreté à s'attaquer aux salopards. L'Ardennais a même projeté un scénario pour confondre l'assassin. Puisque Bermont envisage de vendre ses propriétés boisées et tous ses biens, le Poulpe jouerait le rôle d'Amadeo Pozzi, intermédiaire au nom d'un éventuel acheteur. Ainsi, Gabriel pourrait approcher la bonne, la faire parler, dénicher des preuves contre Bermont. Versus Bellum fournit même une belle voiture américaine, pour impressionner le forestier.

À Paris, Gabriel n'est pas chaud pour s'exiler vers le pays du vieil anar, au milieu de nulle part. Son ami bistrotier Gérard souligne qu'en outre, c'est dans le même secteur qu'ont récemment disparu trois femmes, que ça mérite donc peut-être le voyage. Voila comment Gabriel débarque à Painrupt, “tout le monde descend”. Le cas des femmes disparues serait, selon Versus Bellum, des départs volontaires. Au bout du monde, elles ont fini par s'ennuyer et s'en aller. Les babillages du théâtral ancêtre anar ne sont ici compensés que par la bière locale, dont Gabriel ne tarde pas à abuser.

Sous le masque d'Amadeo Pozzi, le Poulpe s'invite chez Alfred Bermont. C'est un veuf du genre lacrymal, n'espèrant que vendre au plus vite les propriétés de sa défunte. Quant au premier contact entre Gabriel et Zabe (Élisabeth), il n'est pas des plus chaleureux. Entre sincérité et fourberie, il va falloir que le Poulpe garde les idées claires...

Franz Bartelt : La bonne a tout fait (Éd.Baleine, Le Poulpe, 2013)

Créé en 1995 par Jean-Bernard Pouy, avec Serge Quadruppani et Patrick Raynal, Gabriel Lecouvreur a été le héros de plus de 280 romans, écrits (presque) à chaque fois par différents auteurs. Le Poulpe se définit comme “un personnage libre, contemporain, curieux, qui va fouiller dans les désordres et les failles du quotidien”. Proche de l'anarchie mais pas justicier, il s'efforce de mettre hors d'état de nuire ceux qui ne méritent guère de pitié. Après quantité de romanciers, c'est Franz Bartelt qui s'approprie cette fois ce héros. Car c'est à cela qu'on reconnaît les meilleurs titres de cette série, quand un auteur ne se contente pas d'en appliquer la “bible”. D'ailleurs, Chéryl, la blonde coiffeuse compagne de Gabriel, ne figure pas dans cette histoire. Et son camarade anti-franquiste Pedro n'y est que brièvement cité. Par contre, la bière coule à flot, ce qui caractérise ces romans.

Auteur d'une trentaine d'ouvrages, dont quelques-uns publiés dans la Série Noire, Franz Bartelt est Ardennais. Il peut donc se permettre de décrire avec une aimable ironie cette région où il vit. Si le Poulpe a déjà beaucoup voyagé, y compris aux abords de la Belgique, le voici donc dans un paysage inhabituel, sinueux, ombragé de denses forêts. Intérêt à garder le moral au beau fixe dans ces conditions, d'autant que sa “mission” ne lui plaît qu'à demi (de bière, oui). Ne manquant ni de péripéties, ni de carabine menaçante, le scénario est empreint de beaucoup d'humour avec des réparties de bon aloi, on l'imagine bien. Écriture maîtrisée et belle fantaisie, pour un épisode très réussi du Poulpe.

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21 octobre 2013 1 21 /10 /octobre /2013 04:55

Varsovie, juin 2005. Magistrat âgé d'environ trente-cinq ans, Teodore Szacki a déjà les cheveux blancs. Il est marié depuis dix ans à Weronika, conseillère juridique employée à l'hôtel de ville, et passionnée de football. Ils ont une fille de sept ans, Hela. Teodore Szacki n'est, en tant que procureur, qu'un des modestes rouages de la justice polonaise. Avec son ami policier Oleg, ils se complètent fort bien. Les dossiers à traiter ne manquent pas, dont beaucoup sont en attente de CSS, classement sans suite. Il parvient parfois à en relancer un, tel le viol et le meurtre d'une ado disparue, dont le cadavre fut enterrée dans une cour d'école. Avec un commissaire obstiné, ils retrouveront la vérité, même si la mort de cette jeune fille peut avoir été volontaire. Dans un autre cas, face à une meurtrière ayant tué son mari non sans raison, le procureur Szacki ne retiendra qu'un crime accidentel.

Le docteur Cesary Rudzki a organisé durant le week-end un exercice thérapeutique pour quatre de ses patients, louant des locaux à l'église de la Vierge Marie de Czestochowa. Le dimanche matin, le cadavre d'Henryk Telak est découvert, tué d'un coup de broche à rôtir dans l'œil. Une affaire à sensation, sur laquelle la belle journaliste Monika voudrait obtenir des détails. Bien que mari fidèle, Szacki s'avoue intérieurement désirer une relation intime avec la jeune femme. Selon le premier rapport d'Oleg, le psy Rudzki ferait un bon suspect. Szacki interroge d'abord les patients, la prof Hanna, la comptable Barbara, et Ebi Kaim. Il rencontre le lendemain chez lui le docteur Rudzki. Celui-ci explique la méthode utilisée pour cette thérapie, des jeux de rôles très intenses. Henryk Telak était le cas principal, ce week-end, admet le psy. Car l'ambiance familiale de la victime est assez mortifère.

Jadwiga Telak, l'épouse de la victime, confirme les douloureuses réalités de leur famille. Le fils de quatorze ans, malade en sursis, est également interrogé. Le dictaphone d'Henryk Telak n'a pas disparu, c'est le curé de l'église qui le rend au procureur. Telak y enregistra entre autres un message d'adieu. Vu qu'il avait ensuite préparé ses bagages, le suicide ne correspond pas, d'autant moins avec une telle arme. Consulté, le docteur Wrobel pense que la thérapie de son confrère place les patients dans un état comparable à l'hypnose. Ce qui ne signifie pas que ça en fasse des tueurs. Le procureur Szacki va s'apercevoir que les chiffres fétiches de Telak ressemblent fort à une date précise. Que se passa-t-il le dix-sept septembre 1987 vers 22 heures ? Dans l'ombre, Igor et un notable anonyme suivent les investigations de Szacki, veillant à ce qu'il ne réveille pas un passé compromettant, prêts à le menacer si besoin était...

Zygmunt Miloszewski : Les impliqués (Éditions Mirobole, 2013)

On ne peut pas dire que les auteurs polonais envahissent les collections françaises de polars. C'est donc avec un réel intérêt qu'on découvre ce premier roman de Zygmunt Miloszewski traduit chez nous. Dire qu'il s'agit d'une enquête sur une affaire de meurtre serait trop vite résumer ce livre. Certes, après avoir exploré diverses pistes, le procureur Szacki va réunir les protagonistes sur le lieu du crime, dans la grande tradition. C'est là que l'assassin passe aux aveux, naturellement, sauf nouvelle surprise.

Toutefois, bien que l'énigme soit le moteur de cette intrigue, on trouve ici bien d'autres aspects passionnants. D'abord, à travers la personnalité du procureur. Il sait que sa fonction est sans prestige, exigeant pourtant un discernement humaniste. Outre qu'il a d'autres dossiers en cours, on le voit troublé à la fois par cette curieuse thérapie qui entraîna un meurtre, et aussi par sa relation avec une journaliste. Dans un cas criminel, le doute habite toute personne sensée, ce qu'il est assurément. Le portrait nuancé de ce magistrat enquêteur s'avère très réussi.

Ce qui distingue un roman noir, c'est évidemment son contexte. Nous sommes ici dans la Pologne postcommuniste, une quinzaine d'années (seulement) après l'avènement de la démocratie. À travers le métier de Weronika, l'épouse du héros, on constate que certaines lourdeurs administratives restent très présentes. Le procureur gagne correctement sa vie, mais semble attentif à ne pas gaspiller d'argent, le luxe étant encore rare. S'il aime les jeux vidéos actuels, Szacki ne renie pas la Pologne de sa jeunesse.

Le pays apparaît toujours marqué par l'héritage d'époques passées. “Corrige-moi si je me trompe, mais est-ce qu'en 1989, tu as vu exploser une espèce de bombe "K" qui aurait vaporisé d'un seul coup tous les putains d'apparatchiks rouges, toutes les crapules à la solde des soviétiques, (...) toute cette racaille totalitaire ?” demande l'historien Karol Wenzel à Szacki. Et puis, on nous invite à parcourir les décors de la capitale polonaise, métropole que nous connaissons peu. Voilà un suspense noir qui ne possède que des atouts très favorables.

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19 octobre 2013 6 19 /10 /octobre /2013 04:55

New York, 1963. Âgé de vingt ans, Russell Newhouse est étudiant en Lettres au Brooklyn Collège. Bien qu'il soit peu assidu, son prof Eugene Del Vecchio le sait brillant. Jeune Juif séduisant, Russell multiplie les conquêtes, tel un Casanova. Sa dernière amante en date, Celeste, est une fougueuse Irlandaise. Curé, flic, et pompier, les frères de la demoiselle ne vont pas tarder à cogner sévèrement Russell, trop désinvolte avec leur sœur. Secrétaire dans une association de Juifs polonais, le jeune homme fait par hasard la connaissance de Shushan Cats. Ce dernier demande à Russell d'organiser les obsèques de sa mère, qui va être inhumée au cimetière Beth David. Et de lui tenir compagnie durant la traditionnelle semaine de deuil. Russell va croiser certains amis de Sushan, Ainsi que sa sœur Esther Cats (dite Terri), qui est psy et reste insensible au charme de Russell, plus jeune qu'elle.

Shushan Cats est un mafieux respecté. Ancien des Marines, pendant la guerre de Corée, il se reconvertit d'abord comme boxeur, avant d'intégrer les mafias de sa ville natale. C'est en reprenant aux ritals le marché au poisson de Fulton qu'il s'enrichit très vite. Depuis, il a confié à son fidèle adjoint Justo la gestion de ce bizness en plein essor. Italiens, Chinois, Noirs, tous les chefs mafiosi de New York seront d'ailleurs aux obsèques de Mme Cats. Ce qui n'en fait pas des amis, car ils restent rivaux dans les activités illégales. Si Shushan n'a pas de diplôme universitaire, c'est un homme très cultivé. Même le prof Del Vecchio a vite sympathisé avec lui, pour cette raison. Le jeune Russell comprendra mieux en découvrant, plus tard, la riche bibliothèque du caïd. Pour venger son protégé de la famille de Celeste, Shushan menace le frère prêtre. Les Irlandais non plus ne lui font aucunement peur.

Hostile à la ségrégation raciale, ayant eu des intérêts à Cuba avant Fidel Castro, Shushan appréciait John F.Kennedy, mais est déçu par sa politique. Russell compte retourner à ses études et au sexe, après cet épisode de sa vie. Quand le FBI puis les flics du NYPD qu'il a déjà croisés se présentent chez lui, ça n'a rien d'une visite de politesse. Shushan Cats a brusquement disparu. Il y avait des traces de sang dans la voiture où on le vit embarquer. Russell est interrogé par Dolores Grady, l'assistante du procureur. Certes, un tas de photos montrent Shushan et Russell ensemble, mais il plaide n'être qu'un étudiant sans lien réel avec le caïd. Fritz von Zeppelin, l'avocat de Shushan, écarte Russell de ce guêpier. Il lui apprend que le mafieux l'a désigné officiellement comme son héritier. Ce que va confirmer bientôt Justo. Il est prudent de s'installer dans l'appartement de Shushan, car les mauvais coups sont à craindre contre le dauphin encore mal aguerri...

Hesh Kestin : Mon parrain de Brooklyn (Éd.Seuil Policiers, 2013)

Durant la première moitié du 20e siècle, la mafia italienne s'empara de toutes les activités illégales aux États-Unis, en particulier à New York. Après guerre, se concentrant sur le jeu, les trafics et les placements, les mafieux laissèrent des espaces à d'autres caïds, Noirs ou Juifs. Le racket autour du principal marché au poisson alimentant New York, où la population était très friande de produits de la mer, peut sembler anecdotique. Expliqué par Justo, l'adjoint de Shushan, on comprend combien c'était juteux. En outre, les Juifs venus auparavant en Amérique cherchaient juste à s'intégrer, à s'y faire une place. Ces années-charnières, surtout la décennie 1960, permettent à une nouvelle génération de jouer avec les lois. Les mafias du crime organisé participent à l'économie. Rackets et trafics, “ce ne sont que des commerces. Tu sais ce qu'il y aurait à la place ? Le crime désorganisé” dit Shushan à son jeune protégé. Toutefois, ce caïd possède quand même sa “morale”.

À travers l'initiation du héros aux pratiques mafieuses de l'époque, c'est une reconstitution du New York d'alors que nous dessine l'auteur. Il ne s'en tient pas aux pittoresques images rétro, qu'on se rassure. Car l'intrigue est savamment dosée. Par exemple, Russell va en découvrir davantage sur son père, ex-agent viré de la police, qui l'éleva seul. Et peut-être que le farfelu texan, apparu après les obsèques de Mme Cats, aura un jour son heure de gloire. Les mystères de Shushan, la pègre avec ses secrets, et l'apprentissage de Russell, tout ça nous est raconté avec un certain humour. Distillé avec une subtilité nuancée, plutôt que désopilant. La manière dont l'adipeux avocat explique les dangers de la “succession” en serait une bonne illustration. Loin d'être une énième histoire de mafiosi, ce roman plus original s'avère franchement très agréable à lire.

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15 octobre 2013 2 15 /10 /octobre /2013 04:55

Est-il indispensable de présenter Jack Taylor, le détective privé déglingué de Galway ? Sa jambe abîmée traînante, son oreille appareillée d'un sonotone, ses mélanges de Jameson, de bière et de médicaments, son addiction à la cigarette, son habitude forcenée d'aller au devant des pires ennuis. En outre, Jack compte aujourd'hui plus d'amis morts que vivants. Stewart, l'ex-taulard qui a vécu de sévères expériences avant d'adopter le zen, lui reste fidèle. Ridge Ni Iomaire, la policière homosexuelle qui a fait un mariage de convenances afin de préserver sa carrière, est la moins hostile des flics. Pour le reste, à part quelques barmen et serveuses de pubs, plus vraiment de gens fiables autour de Jack. Il a vécu un bonheur fugace avec une Américaine, la belle Laura. Lucide sur son propre cas, il a le droit de se demander si ce coup de chance peut durer.

Le père Malachy a été agressé, il est dans le coma. Peu après, un trisomique adulte est victime du même genre d'attaque, par trois ou quatre jeunes. Mais c'est une autre affaire, sans rapport, que le père Gabriel soumet à Jack. Trésorier d'un mouvement catholique, le père Loyola s'est évanoui dans la nature avec tout l'argent de l'association. La froideur distinguée de Gabriel ne risque pas d'inspirer confiance à Jack. L’ecclésiastique paie bien, et on ne peut pas toujours cracher sur le pognon. Aucun indice sur la disparition de Loyola jusqu'à ce que Jack contacte sœur Maeve, qui n'apprécie guère Gabriel non plus. C'est en rusant avec la gouvernante du père Loyola, lors d'une visite à son presbytère, que Jack va finalement dénicher la bonne piste. Ce qui satisfait le père Gabriel, lequel ajoute un bonus lorsque le problème en question semble réglé.

Jack, Stewart et Ridge ont chacun reçu une stèle funéraire miniature. Loin d'être naïfs, ils savent qu'une menace plane dès lors sur eux. Les agresseurs du père Malachy forment un gang qui s'est donné pour mission le nettoyage de Galway. Le jeune chef Bine, la gothique Bethany, les larbins Sean et Jimmy, projettent d'éliminer les pauvres, les handicapés, tout ce qui fait tache à leurs yeux. L'alcoolique Jack Taylor fait partie de leurs cibles. S'ils le kidnappent et le mutilent, ils le laissent en vie. Ridge, qui a eu des tracas à cause d'eux, trouve refuge chez Stewart, tandis que Jack récupère à l'hôpital. Il pense que Bethany est le pivot de la bande, mais ignore que Bine mijote une idée monstrueuse. Avant d'affronter le gang, Jack met les choses au point avec le père Gabriel. Le truand Kosta, qui lui doit un service, fournit une arme puissante à Jack. Peut-être que, face aux embrouilles auxquelles il s'expose, la protection du pieux médaillon de Medjugorje qu'on lui a offert sera utile...

Ken Bruen : Sur ta tombe (Éd.Fayard, 2013)

Qu'est-ce qu'on aime chez Jack Taylor, dont voici la neuvième aventure ? Question piège, sans véritable réponse. Chez lui, alcoolisme rime avec humanisme, narration cynique avec humeur nostalgique, amitié avec rareté, et bonheur rime avec erreur. Pour lui qui subit à chaque fois de terribles chocs avec séquelles, il faut une sacrée dose de fatalisme assumé afin d'endurer une telle vie. Et ce n'est pas la foi qui le sauvera, car l’Église d'Irlande abrite trop de brebis galeuses, flirte trop souvent avec le Diable. Entre déluge pluvieux et froid verglaçant, dans ce nouvel épisode, même la météo accable le brave Jack. Oui, malgré sa perpétuelle poisse, bravoure (au sens du courage et de l'honnêteté) est probablement le meilleur qualificatif à son sujet. La transgression est une vertu, dans son cas.

L'intrigue concoctée par Ken Bruen apparaît particulièrement réussie, les affaires traitées étant d'une belle noirceur. Plus que jamais, sa tonalité “humour amer” rend attachant Jack Taylor. Comme toujours, on s'amuse à relever maintes allusions culturelles. Quentin Tarantino est largement à l'honneur. Sans oublier les romanciers, de James Lee Burke à Tom Piccirilli, en passant par Megan Abbott (ce que l'on ne peut qu'approuver). On sait que ce sont les livres qui aident Jack à surmonter bien des ennuis. Même la policière Ridge commence à lire des polars dans cet opus. Un authentique roman noir démontrant, s'il en était besoin, que Ken Bruen reste un des maîtres du genre.

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