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9 décembre 2018 7 09 /12 /décembre /2018 05:55

Il est fort possible que bon nombre de lecteurs n’aiment pas assisté à la naissance de Léo Tanguy. Il s’agit d’un cyber-journaliste, un grand rouquin quadragénaire sillonnant principalement l’Ouest de la France dans le Combi VW hérité de ses parents. Son site d’infos sur Internet accueille beaucoup de visiteurs, ses enquêtes portant sur des sujets sensibles. À l’instar de Gabriel Lecouvreur dans la série Le Poulpe, c’est un nouvel auteur qui nous narre ses aventures à chaque roman. Ce qui garantit une variété de sujets exploités, les éléments de base de l’univers de Léo Tanguy restant les mêmes, fidèles à la "bible" élaborée par les initiateurs de cette série de romans.

Justement, les éditons La Gidouille ont l’excellente idée d’en rééditer en un seul volume les trois premiers titres, dus aux créateurs de Léo Tanguy. Dans ce livre, on pourra donc lire “Les jeunes tiennent pas la marée” de Gérard Alle, “Coup de chaud sur la Rance” de Sylvie Rouch (ex-L’immobilier flambe, le SDF brûle) et “Wagon mort” de Denis Flageul (Ex-Un fils à papa chez les zonards). Bienvenue dans le petit monde plein de suspense et de péripéties de Léo Tanguy !

Gérard Alle : Les jeunes tiennent pas la marée

Cette fois, c’est en pays Bigouden qu’il mène l’enquête. Le jeune Erwan Le Sourn a été retrouvé mort sur la plage de Pors Carn. Pierrot, ami bistrotier de Léo, risque de se voir accuser d’avoir servi de l’alcool à Erwan, mineur, bien que ce soit faux. Léo s’informe dans les bars du secteurs, et s’intéresse aux surfeurs fréquentant la Pointe de la Torche. Si Nora et sa mère se montrent aimables, ce n’est pas le cas du jeune Clet, le copain de Nora. Celui-ci a témoigné contre Pierrot. Quant au père d’Erwan, le notaire Le Sourn, il refuse de parler à Léo.

Concernant l’alcoolisme chez les jeunes, la presse accuse les bistrots. C’est trop vite oublier qu’ils se fournissent ici chez Toujourplus ou Interclair, les grandes surfaces locales. Nora admet qu’ils font un mix à base de soda Poplar, auquel ils ajoutent un peu de dope, le kouign. Un Américain bizarre qui rôde dans sa voiture électrique jaune est le fournisseur de la drogue de synthèse. Avec ses manières détestables et son agressivité commerciale, Le Gall, patron de Toujourplus, déplait fortement à Léo. Il s’attaque un peu à lui sur son site Internet. Si Hascoët, de directeur d’Interclair, semble plus régulier, il n’est pas le dernier à magouiller. Léo secoue Clet, qui avoue son faux témoignage contre Pierrot, mais se dit étranger à la mort d’Erwan.

Les enquêtes de Léo Tanguy – Les archives 1 (Ed.La Gidouille, 2018)

Sylvie Rouch : Coup de chaud sur la Rance (L’immobilier flambe, le SDF brûle)

Engagé par une femme énigmatique, Ariane, Léo enquête dans la région de Saint-Malo. Quelques mois plus tôt, une ferme des bords de la Rance a été incendiée. Le sinistre causa la mort d’un SDF non identifié, sans doute un sans-papier. Ardent militant du Front de Libération du Littoral Breton, Yann Jolivet est accusé de cet acte. À quelques jours de son procès, il fait une grève de la faim. Élise, l’épouse de Jolivet, ne nie pas que son mari et leurs amis étaient présents avant l’incendie, mais juste pour dénoncer un projet contraire à la Loi.

Près de la propriété en question, Léo rencontre des voisins : le vieux Suliac et le taciturne Armel Briand. Ce dernier en veut aux trois héritiers qui mirent en vente la maison aujourd’hui brûlée. L’un d’eux, qui n’était pas vendeur, reçoit sans amabilité Léo. Pour se renseigner chez le notaire Sauvignac, l’enquêteur se fait passer pour un client auprès de la négociatrice Rozenn. Elle lui confie que les autorisations de projets immobiliers dépendent d’un officiel, Mabire. Si celui-ci fait respecter strictement les règles de la Loi Littoral, ce n’est pas par idéologie : il favorise ainsi les nantis et leurs propriétés luxueuses. Le temps presse pour démontrer l’innocence de Jolivet. Léo ignore toujours la motivation d’Ariane dans cette affaire.

Denis Flageul : Wagon mort (Un fils à papa chez les zonards)

C’est dans la paisible cité briochine que Léo Tanguy est appelé à mener l’enquête. Plus précisément au port du Légué, longtemps boudé par les habitants de Saint-Brieuc, désormais réhabilité. Jean-Claude Lebec, petit-bourgeois intolérant, n’a jamais cru à la version accidentelle de la mort de son frère Gérard. Selon lui, il ne fréquentait pas les marginaux de La Fabrique, lieu culturel alternatif, aujourd’hui détruit pour les besoins du nouveau port. Il ne se droguait pas comme ce “ramassis d’épaves”, squattant ce bâtiment. Autant qu’une mort suspecte, c’est l’histoire de La Fabrique qui intéresse justement Léo Tanguy. Il accepte de tirer ça au clair.

Avant la mort de Lebec, il y eut un autre décès accidentel suspect, celui d’un nommé Kevin. Léo n’ignore pas qu’un port reste un endroit dangereux, surtout si on n’a pas les idées claires. Serveuse au bar La Descente, Kelly fut la petite amie de Gérard Lebec. Elle admet qu’il avait un côté mystérieux. Les deux types qui surveillent Jean-Claude Lebec agressent Léo, en guise d’avertissement. Consultant des documents sur La Fabrique, Léo note un paradoxe. Il s’agissait d’une expérience en concertation avec la municipalité. Alors, pourquoi avoir soudain expulsé les squatteurs tolérés, avant de tout raser ?…

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6 décembre 2018 4 06 /12 /décembre /2018 05:55

"1894. Cinq ans se sont écoulés depuis le stage de Georges Villeneuve à Paris. Devenu médecin-expert à la morgue de Montréal, il milite pour faire reconnaître l’importance de la médecine légale au Québec. C’est dans ce contexte qu’a lieu une série de meurtres atroces : à différents endroits de la ville, des femmes sont assassinées au cours d’avortements clandestins. Sur les lieux du crime, on retrouve systématiquement une image de l’Immaculée Conception.

Confronté à l’une des affaires les plus ardues de sa carrière, Villeneuve est sur tous les fronts : tout juste nommé assistant-surintendant à l’asile Saint-Jean-de-Dieu, il est accaparé par son travail à la morgue et doit faire face à la pression médiatique croissante. Et c’est bien sûr à ce moment-là que la belle Emma Royal, qu’il n’a pas vue depuis Paris, annonce sa venue à Montréal…"  

Jacques Côté : Et à l’heure de votre mort (Babel Noir, 2018)

Une fois n’est pas coutume, on peut se contenter de reprendre le résumé de la 4e de couverture. On n’en détaillerait pas davantage au sujet de cette intrigue touffue, qui rend hommage à l’engagement de Georges Villeneuve, personnage réel oublié par l’Histoire. Est-ce à dire que l’on se perd dans les méandres du récit ? La documentation affûtée, précise quant à l’ambiance du Québec de la fin du 19e siècle, nous fait-elle perdre le fil de l’aspect criminel ? Non, et c’est même l’atout premier de ce roman. La narration n’est pas simplement souple ou fluide, elle est "naturelle". Nous voilà plongés dans la vie des Québécois d’alors. Avec une bien lente modernisation du pays, due autant aux rivalités entre francophones et anglophones, au poids encore très présent des religions, et à la méfiance des autorités de la ville envers tout ce qui est scientifique.

Si l’on peut parfois reprocher une part de lourdeur à certains "polars historiques", qui accordent plus de pages au contexte décrit qu’à l’aspect enquête, l’expérimenté Jacques Côté ne tombe pas dans ce piège. Il ne s’agit pas d’une biographie de Georges Villeneuve, mais d’une fiction basée sur un personnage qui aurait dû davantage marquer l’Histoire du Québec – et de crimes absolument crédibles en ce temps-là. Il règne ici une noirceur bienvenue : on peut parier que, même les lecteurs appréciant modérément ce type de romans s’inscrivant dans le passé, accepteront de s’immerger (avec un grand plaisir) dans ce livre et seront rapidement captivés. 

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4 décembre 2018 2 04 /12 /décembre /2018 05:55

En Californie, non loin de San Francisco. Clay Edison, trente-quatre ans, est coroner à Berkeley, célèbre pour son université, dans le comté d’Alameda. Célibataire, c’est un ancien sportif. Il est chargé d’enquêter sur la mort de Walter Rennert, soixante-quinze ans, ex-professeur de psychologie à Berkeley, décédé de causes naturelles après être tombé dans l'escalier de son domicile. Telle n’est pas la version de Tatiana Rennert-Delavigne, la fille trentenaire du défunt. Elle prétend qu’on a "poussé" son père. Pourtant, quand Clay Edison examine les traitements médicaux de Rennert, dont l’un fut curieusement prescrit par un urologue, il en conclut que le mélange avec la forte consommation d’alcool du père de Tatania a pu entraîner un malaise fatal. Un dossier que d’autres classeraient rapidement.

Clay, aussi pro soit-il, n’est pas insensible au charme de Tatiana. La jeune femme a un autre argument : le décès parfaitement similaire – il y a quelques années – de Nicholas Linstad, étudiant diplômé de Rennert. Le professeur et son assistant avaient dirigé une étude qui s’est terminée par un meurtre. L’étudiant Julian Triplett, un des sujets choisis pour une étude sur l'impact de l'exposition à des images violentes sur l'apprentissage et le contrôle des impulsions, poignarda mortellement Donna Zhao, une autre étudiante de Berkeley. En 1993, l’affaire causa un scandale qui obligea Rennert à démissionner et à cesser d’explorer le thème qui lui tenait à cœur. Au procès de Julian Triplett, le professeur en psychologie Alex Delaware enfonça les théories de Rennert. Ce dernier a d’ailleurs récemment recontacté son collègue Delaware. 

Tout en restant (de plus en plus) proche de Tatiana, qui déménage la maison de son père, Clay se documente sur l’affaire remontant à vingt-cinq ans. Il se refuse toujours à trop vite boucler le rapport sur la chute de Walter Rennert. Mineur à l’époque des faits, Julian Triplett a été libéré de prison environ dix ans plus tôt. Affaiblie, sa mère ne cache pas son hostilité à Clay. Elle affirme ne plus avoir la moindre nouvelle de lui depuis qu’il est sorti de prison. Le policier qui interrogea Triplett à l’époque le trouva globalement délirant, d’une instabilité agressive. Clay apprend de la part de ce flic que Triplett fut dénoncé, livrant l'identité de celui qui donna son nom. Le témoignage de Kara Drummond, la sœur de Triplett, apporterait un alibi à son frère. Personne n’en a tenu compte, vu leur lien de parenté, et on peut logiquement s’interroger sur la validité de cette version.  

Quand la maison de Rennert est "visitée" en l’absence de Tatiana, Clay et elle peuvent se dire que quelqu’un rôde encore, et que ça justifie leurs doutes sur la mort naturelle du professeur. L’opinion du Pr. de psychologie Paul Sandek, dont Clay est l’ami ainsi que de sa fille, pourra peut-être orienter la réflexion du jeune coroner. Homicide ou mort naturelle, la question reste encore posée…

Jonathan et Jesse Kellerman : Exhumation (Seuil, 2018)

— C’est la vérité, insistai-je. Quand je parle avec une personne endeuillée, elle se fiche de savoir à combien d’autres personnes j’ai parlé avant elle, ce jour-là ou n’importe lequel. Et elle a bien raison. Pour elle, c’est la première fois. Elle mérite la même attention et le même respect que toutes les précédentes.
Tatiana faisait rouler son verre vide entre ses paumes comme si elle voulait fabriquer un boudin en pâte à modeler.
— Je sais que vous ne me croyez pas, pour mon père, déclara-t-elle.
Je m’apprêtais à la démentir, mais elle m’interrompit.
— Ça ne fait rien. Moi non plus, je ne me croirais pas. Mais si ce que vous venez de dire est vrai, regardez-moi dans les yeux une minute.

S’agissant d’une histoire où les auteurs père et fils nous invitent à suivre leur héros dans sa profession autant que dans sa vie privée, Jonathan et Jesse Kellerman n’ont aucune intention de révolutionner le genre. L’affaire ne se prêterait pas à des scènes percutantes, à des rebondissements spectaculaires, d’ailleurs. Sans précipitation mais avec obstination, explorant soigneusement détails et hypothèses, Clay Edison mène l’enquête sur un dossier enterré, qui ne fut pas sans conséquences pour les protagonistes d’alors. En parallèle, est évoqué le quotidien du bureau du coroner avec ses collègues, et l’évolution de la relation entre Clay et Tatiana Rennert-Delavigne. Des investigations "tranquilles" ? Certes, mais ça n’interdit pas , en filigrane, un suspense sans tension majeure – mais avec de nombreuses questions à démêler pour approcher de la vérité – celle d’hier et d’aujourd’hui.

Jonathan et Jesse Kellerman ne sont pas par hasard des best-sellers. Auteurs chevronnés, ils maîtrisent la tonalité du récit, et les arcanes de l’intrigue. Avec ce "cold case", nul doute qu’ils séduiront une fois de plus leurs lecteurs.

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2 décembre 2018 7 02 /12 /décembre /2018 05:55

Les deux compères sont amis depuis trente-cinq ans et plus. C’est sous l’égide de Patrick Mosconi qu’est publié en 1983 dans sa collection Sanguine, un volume intitulé “Very Nice” incluant deux romans : “La clé de Seize” de Patrick Raynal et “Spinoza encule Hegel” de Jean-Bernard Pouy. Depuis, les deux romanciers ont poursuivi des carrières parallèles, jamais loin l’un de l’autre. Auteur d’une centaine de romans (dont onze dans la Série Noire) et d’une multiplication de nouvelles et d’écrits en tous genres, Pouy a aussi créé diverses collections (Pierre de Gondol ou la Série Grise). Sans oublier le personnage du Poulpe (Gabriel Lecouvreur) publié dès 1995 aux éditions Baleine.

Prix Mystère de la Critique pour son roman Fenêtre sur femmes en 1989, ex-directeur de la Série Noire chez Gallimard, Patrick Raynal a permis à toute une génération de nouvelles voix du polar de figurer au catalogue de la Série Noire. S’il ne dirige plus de collection, Raynal a toujours un poids certain dans l’édition, qu’on ne s’y trompe pas. On aura compris le point commun de Pouy et Raynal : mettre en valeur la littérature populaire, montrer par toutes leurs initiatives que c’est un genre vivant et en perpétuel renouvellement. Sils vont à la rencontre des lecteurs dans les Festivals et salons du livre, c’est plus sûrement pour valoriser les livres d’autres auteurs que les leurs.

En 1985 tous deux avec Daniel Pennac, écrivent leur premier roman en commun : La vie duraille”. Publié sous le pseudo de J.B.Nacray, c’est le n°1968 de la collection Spécial Police du Fleuve Noir, un numéro fort symbolique (et ironique). Pouy et Raynal vont par la suite écrire à quatre mains d’autres romans, tel le réjouissant “La farce du destin” (Les Contrebandiers, 2004). S’ils ne manquent pas d’expérience dans cet exercice de style, et s’ils aiment se donner des contraintes en écriture, les deux amis se sont lancés un défi un peu fou avec “Lord Gwynplaine. Car il s’agit ici d’imaginer une version actuelle d’un monument de la littérature française : Le comte de Monte-Cristo, la plus magistrale et la plus palpitante histoire de vengeance.

Jean-Bernard Pouy et Patrick Raynal : Lord Gwynplaine (Albin Michel, 2018)

Dans cette version actuelle, toute aussi riche en aventures, pour ne citer qu’eux, Dantès est devenu Erwan Le Dantec, pilote d’avion pour une société en relation avec l’Afrique, et l’abbé Faria s’appelle Vargas, ancien comptable des narcotrafiquants colombiens, ayant détourné des sommes faramineuses – et s’étant fait beaucoup d’ennemis. Sans avoir été jugé alors qu’il eût pu réfuter sans mal les accusations, Erwan Le Dantec est envoyé très discrètement dans une sorte de pénitencier au cœur de la jungle de Guyane. Vargas va lui offrir une chance de s’en sortir après des années à végéter dans cette prison. Un hélico, ça se manie aisément pour un pilote d’avion comme Le Dantec. Celui-ci va devoir se cacher en Amérique du Sud pendant quelques années encore, le temps de peaufiner son retour et de se trouver des allié(e)s. Entre-temps, la fiancée du captif (dont on lui a fait croire qu’il était mort) s’est mariée par ailleurs. C’est sous les traits de Lord Gwynplaine” qu’Erwan Le Dantec – assisté de Maria-Luisa et de Brendan Kane – reviendra hanter ceux qui l’ont trahi, non sans avoir renoué avec d’anciens amis et avec son père.

Jean-Bernard Pouy et Patrick Raynal : Lord Gwynplaine (Albin Michel, 2018)

Les époques changent, mais pas les motivations de ceux qui visent le pouvoir et l’argent. La vilenie reste un puissant moteur pour les arrivistes, les cyniques. Il convient donc de les affronter avec les mêmes armes. Arriver au sommet ayant en grande partie endormi la vigilance de ces adversaires, sûrs de leur position sociale, ils ne voient pas le piège qui se referme méthodiquement sur eux… Pas ennemis de la tonalité sarcastique, Pouy et Raynal ne se contentent pas de "revisiter" l’original, ils y apportent leur touche personnelle… Un roman fertile en incessantes péripéties, alliant noirceur et regard sociétal. Très excitant !

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28 novembre 2018 3 28 /11 /novembre /2018 05:55

Émile Loubet est commissaire de police au Puy-en-Velay. Veuf et ayant perdu son fils unique tragiquement, il a adopté le jeune Renji, aujourd’hui étudiant. “Émile est un homme simple, bon, qui combat la méchanceté et le crime en raisonnant plus qu’en faisant des coups médiatiques”. Ce jour de décembre, le bouvier Balto réussit à alerter le voisin agent de police : il se passe quelque chose d’anormal chez son maître. En effet, l’ancien juge Danton est bientôt retrouvé mort dans son lit, décapité. L’équipe de Loubet passe à l’action : le retraité assassiné jouissait d’une très bonne réputation, rien qui explique cette fin dramatique. Son chien Balto est le premier à regretter un si bon maître. Selon l’autopsie, il est mort (peut-être de peur) deux heures avant d’être ficelé et décapité. Toutefois, il avait récemment reçu une lettre menaçante.

À l’occasion d’une émission de télé sur Planète-Justice, le juge Danton avait ressorti un dossier qu’il traita voilà quarante ans, alors qu’il était en poste en Charente. L’affaire se passait au lieu-dit Tartifume, sur l’île d’Oléron. Alors qu’il jouait à cache-cache avec des copains et une copine de son âge, d’une douzaine d’années, Stéphane Gardinier disparut soudainement. On ne le retrouva jamais. On dispose toujours des témoignages de ses camarades de jeu, et l’un des enquêteurs de l’époque – M.Rémy – se souvient bien des circonstances de cette histoire. Sébastien Danton, fils du défunt, habitant Oléron, se déplace jusqu’au Puy-en-Velay. Certes, il y a eu une mésentente entre lui et son père quelques temps plus tôt, mais rien qui justifie un meurtre. D’ailleurs, il a un alibi solide.

Le commissaire Loubet s’étant bêtement blessé, son fils adoptif Renji arrive à la rescousse. D’ailleurs, ce dernier – lecteur de Sherlock Holmes – est un amateur d’affaires énigmatiques. Loubet a pris des contacts du côté des Charentes Maritimes, conscient que c’est là-bas qu’il trouvera les réponses au crime du Puy-en-Velay. Accompagnés de Balto qu’ils ont volontiers pris en charge, Renji et Loubet vont rencontrer à La Rochelle et dans sa région les enquêteurs ayant suivi le dossier (ou sorti des archives depuis peu). On s’aperçoit qu’un des copains de Stéphane Gardinier cita alors un prénom, sans que quiconque y attache de l’importance. Il s’agissait de Bruno, le frère du disparu. Par la suite, ce dernier s’engagea dans la Légion Étrangère. Il vit désormais à Angoulême.

Grâce à l’ancien inspecteur Rémy, Loubet collecte de nouveaux éléments. Il va falloir de nouveau interroger les enfants d’alors, quarante ans plus tard. Le commissaire se rend aussi sur les lieux de la disparition du gamin, un secteur marécageux, et recueille les souvenirs de la mère du petit Stéphane. Mais l’émission de Planète-Justice a déclenché des envies de vengeance chez un des protagonistes de l’époque. Même l’ancien policier Rémy a été menacé, et le criminel armé rôde toujours entre les Charentes et Oléron…

Gilles Calamand : Le chagrin de Balto (Éd.De Borée, 2018)

Une voiture faisait rugir son moteur et le conducteur fit un démarrage en trombe, tandis que Balto courrait derrière en aboyant. Rémy se précipita vers sa femme.
— Je n’ai rien, le rassura-t-elle. J’ai voulu faire sortir le chien. Au moment où j’ouvrais la porte, un homme est arrivé dans le jardin. Je m’approchais de lui pour lui demander ce qu’il voulait. Je croyais que c’était ce musicien que tu avais invité ce soir pour l’apéritif. Il a sorti une sorte d’épée de sous son manteau. J’ai crié, j’ai glissé dans la neige, et le chien a mordu les fesses de l’homme qui s’est enfuit. J’espère que le chien reviendra !
— Qu’est-ce qui se passe, intervint Renji qui sommeillait près du feu et sortit à ce moment-là.
Le chien revenait en remuant la queue.
— Brave chien, fit Loubet. Te voilà devenu chien policier, désormais. Nous venons d’échapper à un meurtre, mon brave Renji.
— Mais pourquoi ?
— Parce que je pense que notre intrusion dans l’intimité de la famille Gardinier a inquiété quelqu’un. L’assassin du juge, par exemple. L’épée en est la preuve.

D’emblée, l’auteur nous prévient que ce n’est pas une intrigue percutante ou violente qu’il va exploiter. Il nous invite à suivre le tranquille commissaire Émile Loubet au fil de ses investigations et de sa vie privée, d’Auvergne en Saintonge. Nul besoin de péripéties-choc, ni de scènes spectaculaires. Sans précipitation, l’affable policier réexamine les pièces d’un vieux dossier qui ne trouva pas son dénouement – plus de traces de l’enfant disparu, ni de son assassin. Une affaire classée, un "cold case" comme on dit de nos jours. Sous l’œil bienveillant du chien Balto, son confrère de La Rochelle (le commissaire Murat) et le policier retraité Rémy aideront Loubet à démêler les mystères vieux de quatre décennies. Un simple jeu de cache-cache qui aurait mal tourné, sans que les camarades de Stéphane s’en aperçoivent ? L’explication semble un peu courte au policier, qui n’exclut aucune hypothèse – sans les formuler prématurément.

Le roman d’enquête est une belle tradition du polar, une de ses bases. Gilles Calamand nous en donne l’illustration dans ce roman très agréable à lire. Il n’oublie pas de nous faire sourire, grâce au bouvier Balto.

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27 novembre 2018 2 27 /11 /novembre /2018 05:55

En 1792, la Révolution française vit de nombreuses turbulences. Les pays européens voisins ne sont pas mécontents de cet affaiblissement du royaume. L’année précédente, la fuite de Louis 16, rattrapé avec ses proches à Varennes, l’a fragilisé. S’il reste à la tête du pays, c’est maintenant aux Tuileries qu’il est contraint de résider. Dans ce contexte, le roi et la plupart des députés ont été favorables à une guerre contre l’Autriche. On compte sur des généraux émérites tels que La Fayette pour rapidement montrer la force de la France, dont l’armée dispose alors d'environ 120 000 soldats volontaires. Mais les dissensions entre élus et camps politiques compliquent rapidement la situation. Dans l’Est et dans les Ardennes, les troupes sont indisciplinées et les ordres contradictoires.

Victor Dauterive est un jeune officier de Gendarmerie parrainé par La Fayette. Il a déjà effectué plusieurs missions pour son mentor, jalousé pour ses opinions modérées. À la Révolution pure et dure, La Fayette (créateur de la Garde Nationale) préfère un régime de monarchie constitutionnelle allant vers plus de démocratie sociale et politique. Cette fois, c’est à Victor Dauterive qu’il demande d’escorter et de protéger le convoi transportant la paye de l’Armée, une fortune de 500.000 Livres. Le secret de ce transfert semble éventé, car des escarmouches se produisent en chemin. Alors que Victor et ses hommes font halte dans une auberge de Mars-la-Tour, des émeutiers s’attaquent au convoi. Nul doute qu’ils soient bien renseignés. Non seulement, il existe des complicités – venant sûrement des sphères du pouvoir – mais la troupe des gueux ne s’était pas formée spontanément.

Victor identifie bientôt le meneur de la bande, un nommé Jourdier – personnage frayant avec les adversaires de La Fayette, agissant également sur le terrain pour déstabiliser le pays. Si la bande qu’il a monté est vite arrêtée, Jourdier et ses deux complices sont en fuite avec le trésor. En chaise de poste, Victor et ses fidèles sont sur leurs traces, de Gravelotte jusqu’à Valenciennes et Lille – où règne alors une anarchie sanglante, le peuple s’estimant trahi par ses généraux. Gardant un tiers du butin, Jourdier lâche ses comparses avant de disparaître à Paris. Victor Dauterive a fait son rapport à La Fayette, alors basé dans les Ardennes, qui le charge de définir qui est au cœur du complot le visant. C’est à Paris, aux Tuileries autour du Roi, que Victor peut espérer trouver des réponses.

Victor s’installe près de Paris, chez son amie Olympe de Gouges. S’ils ne peuvent nier une attirance mutuelle, les priorités révolutionnaires entravent leur relation. Pour la féministe Olympe, la cause des citoyennes est loin d’être gagnée. Les contradictions des combats politiques et les rivalités avec des responsables culturels, tel Collot d’Herbois, la placent en porte-à-faux en ces moments où la Révolution est viciée par les enjeux du pouvoir. Même s’il connaît une des proches de la famille royale, Victor aura beaucoup de mal à approcher Louis 16, voire l’un ou l’autre de ses conseillers. D’autant que la population parisienne assiège les Tuileries. C’est pourtant dans la sphère du roi que se trouve un manipulateur, un traître. Si Jourdier est un exécutant efficace toujours à l’œuvre, d’autres au-dessus de lui disposent d’un pouvoir de décision mettant en péril les socles de la Révolution…

Jean-Christophe Portes : L’espion des Tuileries (City Éd., 2018)

Tout en étant respectueux des faits historiques, Jean-Christophe Portes revisite la période si agitée de ce contexte révolutionnaire. Ayant rompu avec un père aristocrate intransigeant, artiste dans l’âme (il est très doué pour le dessin), Victor Dauterive est le témoin de son temps. Il ne peut être question de fonctions ordinaires pour ce jeune officier de Gendarmerie, mais – bien de disposant de la confiance du vaillant La Fayette – Victor subit davantage les événements qu’il n’en décide. Depuis près de trois ans, toute l’organisation du royaume est bousculée, y compris par des alliances improbables. Victor n’appartient pas aux cercles qui cherchent à imposer leur version actuelle. Loin des arcanes du pouvoir, il en suppose les rouages – sans peser sur le déroulement du processus, mais restant fidèle à La Fayette dont la popularité décline fortement. 

Victor protège autant qu’il le peut le petit Joseph, essayant de lui offrir des bases d’éducation, et de ne pas trop l’exposer aux aléas tourmentés de ses missions. Encore que, dans un tel chaos, l’enfant risque autant que Victor. À travers le portrait et les actions d’Olympe de Gouges, l’auteur dessine la complexité du combat – contre l’esclavagisme et en faveur des femmes – menée par celle-ci. Avec Jean-Christophe Portes, nous baignons dans cette France au présent aussi incertain que l’avenir. On suit les tribulations de son modeste héros, devenant avec lui témoins des troubles et des calculs d’alors. Une belle manière d’explorer une époque majeure de notre Histoire. 

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25 novembre 2018 7 25 /11 /novembre /2018 05:55

Expert en Littérature fantastique, Jean-Pierre Croquet a sélectionné douze nouvelles sur le thème de l’hiver et de Noël, des histoires où la mort (parfois le crime) côtoie les humains dans des ambiances plus sinistres que ne le suppose cette période de joie et de bonheur pour chacun. Les douze auteurs sont plus ou moins connus, mais tous d’une valeur certaine : Charles Dickens (Le voile noir), Erckmann-Chatrian (La montre du doyen) Thomas Hardy (Sous le regard du berger), Sheridan Le Fanu (Le défunt sonneur de cloches), Robert Louis Stevenson (Markheim), Arthur Conan Doyle (L’escarboucle bleue), William Wymark Jacobs (Jerry Bundler), Edith Nesbit (L’ombre), Saki (Les loups de Cernogradz), Gaston Leroux (Le Noël du petit Vincent-Vincent), Hugh Walpole (Le Tarnhelm), Ethel Lina White (Figures de cire).

Pour enfants ou pour adultes, les contes traditionnels ne sont jamais dénués d’une part de noirceur, de cruauté. Sans être forcément horrifiques ou sanglants, les climats y sont malsains. S’ils ont été longtemps portés par l’oralité, ce sont des écrivains tels que le grand Charles Dickens qui ont fait entrer ces textes en littérature. L’écrit souligne la force, l’étrangeté macabre (et l’humour, quelquefois) de ces contes. Jean-Pierre Croquet relate dans sa passionnante préface l’historique du genre. En fin de volume, il évoque dans des notices la douzaine d’auteurs choisis – dont quelques-uns hélas oubliés de nos jours. À l’opposé de notre matérialisme cartésien d’aujourd’hui, ces récits réveillent les peurs diffuses qui, autrefois, se transmettaient chez nos aïeux – même si nul n’ignorait qu’il s’agissait de fiction.

Si le conte horrifique de Noël, avec ses spectres et ses morts, “traduit la noirceur des nuits les plus longues de l’année, traversées de vents hurleurs que les ombres projetées par les flammes dans l’âtre rendent plus inquiétantes encore”, c’est surtout l’occasion de retrouver une tradition littéraire de fort belle qualité.

J.P. Croquet : Crimes et fantômes de Noël (L’Archipel, 2018)

Quelques exemples de l’excellente sélection opérée ici par J.P.Croquet…

Le voile noir (Charles Dickens, 1836) Dans la région de Londres, un froid hiver autour de 1800. Ce jeune médecin sans clientèle reçoit ce soir-là la visite d’une femme de haute taille, masquée d’un voile noir. Elle affirme qu’un homme va mourir le lendemain matin, mais apparaît très confuse sur la possibilité de le sauver. Le médecin est prêt à consulter immédiatement ce patient semblant au seuil de la mort, mais il devra attendre l’heure indiquée par la mystérieuse visiteuse pour se rendre à l’adresse en question – une maison modeste et isolée de la banlieue londonienne. Encore arrive-t-il un peu trop tôt, et doit-il patienter jusqu’à ce la femme de la veille se montre, et lui explique la situation…

Le Noël du petit Vincent-Vincent (Gaston Leroux, 1924) Un ancien Parisien raconte à des amis la tragique histoire d’un couple de voisins, au temps où il habitait la Butte Montmartre. D’un âge avancé et d’un milieu aisé, les Vincent eurent tardivement un fils qu’ils prénommèrent Vincent. Rien n’était trop beau pour cet enfant, que leur voisin aimait beaucoup. La soirée de Noël s’annonçait des plus festives : le couple sortit pour participer aux réjouissances populaires, puis à la messe de minuit. De retour chez eux, ils soupèrent avec le petit Vincent. Celui-ci, un peu déçu, fut recouché : il devrait attendre le lendemain matin pour découvrir ses cadeaux. Mais la suite de cette soirée s’avéra dramatique, car la mort rôdait chez les Vincent…

L’ombre (Edith Nesbit, 1905) Après un bal de Noël au manoir, trois jeunes filles sont réunies dans leur chambre, se racontant des histoires de fantômes. Elles n’y croient guère, ces récits n’étant destinés qu’à faire frémir. Mlle Eastwich, la stricte gouvernante, se joint à elles : elle a vécu une expérience étrange, inexplicable. Mabel et son mari étaient ses seuls amis. Ils venaient d’emménager dans une maison neuve. Le jeune époux ressentit très bientôt comme une malédiction planant sur cette demeure. Mlle Eastwich fut invitée à séjourner ponctuellement chez eux, afin de rassurer son amie enceinte. Elle ne tarda pas à éprouver les mêmes craintes obsessionnelles que le mari de Mabel. C’est dans un placard que semblait se cacher une ombre, prenant des formes effrayantes – jusqu’à se liquéfier. Pas un simple effet de l’imagination de Mlle Eastwich et de l’époux, et il ne suffisait sans doute pas de quitter la maison pour que cesse cette menace…

Jerry Bundler (William Wymark Jacobs, 1897) À Torchester, quelques voyageurs réunis dans une auberge se divertissent en buvant fort autour d’histoires de fantômes, en cette soirée de fin décembre. Seule la dernière pourrait davantage impressionner les personnes présentes. Voilà plusieurs années, un malfaiteur fut pourchassé et cerné dans l’auberge par la police, où il se suicida dans sa chambre. Un témoignage affirme qu’il joue depuis au fantôme dans cet établissement, même s’il ne présente pas vraiment de danger pour les clients. Hirst, un des présents, pratiquant volontiers le théâtre, s’en amuse et fait le pari d’effrayer les autres en se grimant tel Jerry Bundler. Un jeu qui inquiète le convive qui a raconté cette histoire-là. Peu après, dans l’auberge mal éclairée, il semble bien que le vrai Jerry Bundler fantomatique se manifeste. Chacun des autres hésite à regagner seul sa propre chambre. Simple effet d’une hallucination collective ? Quoi qu’il en soit, il peut être dangereux de vouloir singer les fantômes…  

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23 novembre 2018 5 23 /11 /novembre /2018 05:55

Commissaire de police, Aglaée Boulu est en poste à Grenoble. Elle est chargée d’une enquête dans la région de Villard-de-Lans. Patron d’une grosse scierie et chasseur ayant une réputation de paillard, Anselme Delmare a été découvert mort par son jeune ouvrier Fabien Dourgues. Scène macabre : le corps de la victime a été scié en deux dans l’usine inoccupée ce dimanche-là. Pour Aglaée Boulu, le plus simple consiste à s’installer dans une auberge des environs, où elle sait que les clients sont choyés. Ayant recueilli Choupa, le chien de la victime, la policière annonce le meurtre à Suzie Delmare, désormais veuve du patron de la scierie. Celle-ci ne paraît pas choquée ni émue par ce décès sanglant. Elle prendra bien vite la relève afin que se poursuive l’activité de son mari. Mais la situation de l’entreprise était loin d’être aussi saine qu’il semblait, Delmare étant endetté. 

Le forestier Simon Campan ayant eu voilà peu un différend commercial avec la victime, il pourrait faire un bon suspect – encore que ce soit improbable. C’est plutôt Marc Vauché qui peut tirer parti de la mort de Delmare. Marié à une amie de Suzie Delmare, il avait prêté une forte somme au défunt, et couvrira la dette en récupérant la scierie. La veuve va tenter le maximum afin que ça ne se produise pas, mais ce sera compliqué. Sans doute le jeune et ambitieux Fabien Dourgues est-il son amant. Toutefois, ce dernier ne pense pas que ce soit par la force qu’ils trouveront une solution. À l’auberge, la commissaire a plus ou moins sympathisé avec le comte Danjou, un aristo local connaissant la région et l’état d’esprit d’ici. C’est alors que Francesco Falcone, commandant de police corse et ami intime d’Aglaée Boulu, fait son retour dans la vie de la policière.

Existe-t-il un rapport entre la mort – supposée accidentelle – d’Eugénie Catel, gardienne de troupeau âgée de quatre-vingt-douze ans mais toujours vaillante – et le meurtre d’Anselme Delmare ? Deux morts violentes en moins d’un mois dans ce secteur, c’est assez troublant. En fait, la population a déjà désigné son coupable : François Rébac, instituteur au village, très apprécié des enfants, qui a le défaut d’être d’origine citadine. On n’hésite pas à manifester face au maire et à la commissaire pour l’affirmer. Rumeurs et commérages, plus qu’éléments concrets, à vrai dire. C’est encore le jeune Fabien qui va découvrir la deuxième victime : le forestier Simon Campan a été agressé sur son tracteur alors qu’il travaillait dans son champ, avant d’être assassiné. À l’évidence, il s’agit du même coupable. Ça ressemble davantage à une série de vengeances qu’à autre chose.

Tandis que Suzie Delmare s’évertue à garder la scierie – même s’il ne provoque rien, Fabien espère bien que ça lui sera profitable, la commissaire Aglaée Boulu (avec le chien Choupa) et Francesco Falcone poursuivent toutes les pistes crédibles. Les témoignages ne sont que relatifs, et il faut éviter que les habitants s’excitent davantage. C’est plus sûrement un épisode du passé qui justifie ces crimes…

Jérôme Sublon : Corps rouge dans le Vercors (Éd.du Caïman, 2018)

L’homme se mit lui aussi à se mouvoir. Il leva son morceau de bois au ralenti, comme on le fait d’une masse pour cogner un coin planté sur une bûche que l’on veut fendre. Le choc produisit un son mat. Le crâne de Simon s’enfonça dans les brins de blé fauchés. Ce deuxième coup l’avait tétanisé mais il avait conservé sa lucidité. Il assista inerte à la suite. Il vit son agresseur s’accroupir, poser son bâton, leurs regards se croisèrent un temps qui lui semblait sans fin. L‘homme prit Simon par les bras et le traîna à la lisière du champ, là où attendait le matériel qui devait faire suite à la moisson…

La littérature policière inclut diverses formes, sociétales ou énigmes pures, mais le roman d’enquête traditionnel est toujours une de ses valeurs sûres. C’est ce que choisit Jérôme Sublon pour nous raconter cette affaire. Après les deux tomes de “Nozze nere” (Éd.du Caïman) dans le décor corse, c’est dans les montagnes du Vercors qu’il situe cette nouvelle affaire. Même dans une France qui s’est beaucoup urbanisée, ces communes rurales ne changent pas tant. "Vox populi" a tôt fait de choisir un responsable, de préférence quand il vient d’ailleurs. Et les sourdes rancœurs peuvent rester vives. Éternel facteur humain ! Aglaée Boulu se montre plutôt flegmatique, observant sans juger, ne précipitant pas des conclusions qui seraient erronées. La narration soigneusement détaillée n’en est pas moins fluide, dans un climat sans lourdeur inutile. On suit donc avec grand plaisir les investigations de cette sympathique policière.

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