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21 février 2010 7 21 /02 /février /2010 07:16
 

On a pu apprécier les précédents romans de Piergiorgio di Cara, ayant pour héros Salvo Riccobono, flic anti-mafia. DansHollywood Palerme(Éd. Métailié, 2010) nous faisons la connaissance d’un autre pilier de la police palermitaine.

Pippo Randazzo est un policier d’une trentaine d’années, appartenant à la Brigade Criminelle de Palerme. Étonnant choix de carrière pour cet inspecteur, disposant d’autres ressources financières. Fils d’un ancien politicien qui s’est enrichi sans se compromettre, Pippo fut étudiant en science politique. “Au fond, je n’avais pas de perspectives […] Je passais des examens parce que c’était ça mon boulot. Puis il y a eu le concours d’inspecteur. Ça, ça me plaisait.” Il cultive une relation complice avec la psychologue Roberta, sans qu’ils soient encore amants. Il se sent bien à Palerme, chez lui. “Pippo aime vraiment sa maison, et depuis qu’un artiste loufoque a décidé d’installer l’inscription gigantesque HOLLYWOOD, elle lui plait encore plus. Au fond, la colline ressemble beaucoup à celle qui domine Los Angeles.” DI CARA-2010À la Criminelle, il dirige une équipe composée de Mauro, Andrea, et du jeune Sip. Ils sont chargés d’élucider le meurtre de Laura Nardi.

Épouse d’un cadre de grosse entreprise, la victime a été assassinée avec une grande violence, à l’heure où elle préparait le dîner. Romeo Nardi, le mari, répond aux questions des policiers. Ce bel homme ne leur semble pas tellement franc. Dès le lendemain, on retrouve dans le métro un petit morceau d’os du crâne de Laura Nardi et le marteau qui a servi d’arme. Selon Pippo, il ne faut pas réfléchir en policier. “Nous cherchons à donner une explication à tout, et nous le faisons en suivant le raisonnement du crime parfait […] C’est-à-dire que nous, nous ne savons pas ce qui se passe dans la tête de l’assassin.” Les téléphones de la famille Nardi sont mis sur écoute. Le mari reçoit une série de curieux appels muets. En le prenant en filature, la police constate qu’il a une maîtresse, responsable d’un club de fitness. Contrairement à ce qu’affirmait Nardi.

La vidéo surveillance du métro ne couvre pas l’endroit où l’on a retrouvé l’arme et l’os. Pippo estime qu’on peut quand même tirer quelque chose des images de la station. Rien de probant n’apparaît, dans un premier temps. Le repas dominical chez ses parents offre une pause à Pippo. Le lundi, il s’adresse à son collègue du service anti-mafia, Salvo Riccobono. Celui-ci le met en contact avec un technicien expert en téléphonie. On identifie l’origine des appels muets, mais la personne, patronne d’une boutique, n’a aucun rapport avec les Nardi. Même en surveillant cette femme et son employée, les policiers ne sont guère avancés. Huit jours après le meurtre, l’enquête piétine. Le supérieur de Pippo le relance, car il aura du mal à faire garder le silence aux journalistes. Grâce au service scientifique, une des photos du métro va peut-être les aider…

Il serait erroné de ne voir dans cette histoire qu’un roman d’enquête. Certes, il s’agit bien d’une affaire criminelle et d’investigations policières. “[Pippo] a l’habitude de considérer une enquête pour meurtre plus ou moins comme un problème mathématique. Tout doit répondre à des règles logiques, la difficulté consistant à trouver le point de vue correct. Une fois cela fait, tout devient d’une simplicité presque banale.” Pourtant, le récit ne concerne pas que la recherche d’un coupable. Par touches nuancées, on nous présente le quotidien du héros, ses origines familiales, sa ville de Palerme, sa relation particulière avec Roberta, des anecdotes sur l’univers du commissariat. Et tous ces petits rituels, collectifs ou personnels, finement observés par l’auteur. C’est cet ensemble d’éléments qui donne au roman sa crédibilité, son ambiance. Le contexte italien et sicilien, incluant les malversations et les questions mafieuses, apparaît en filigrane. C’est “en collègue” que Salvo Riccobono, le flic anti-mafia des autres romans de Piergiorgio di Cara, figure dans une scène. Un roman de belle qualité !
Cliquez ici sur le précédent article consacré à Piergiorgio di Cara.

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19 février 2010 5 19 /02 /février /2010 07:09
 

Maurice Batignol est le héros de “Le monde est plein de polissons”, roman d’humour noir de Nelly Bridenne. Maurice Batignol, ce nom ne vous dit rien ? C’est logique. Ce rouquin végétarien, bègue butant sur les B, d’origine belge, ne passe sans doute pas inaperçu, mais on ignore généralement sa profession. Maurice Batignol est tueur à gages, un “saigneur” dans la profession. Ce qui signifie qu’il surine ses victimes avec sa lame, surnommée Alcatraz. Dans son immeuble, la vieille concierge Mme Bignole reste incapable de le saluer par son vrai nom. Faut l’excuser, elle est mi-sourde. Dans la maison d’à côté, Géromine est aussi une dame âgée, mais autrement plus active. BRIDENNE-2010Quand elle n’arrive pas à éliminer des gêneurs, à qui donc qu’elle fait appel ? À Maurice Batignol, le pro de la disparition prématurée, l’expert en coup de poignard fatal, le cador des exécuteurs à l‘arme blanche. Quand sa voisine de palier, la douce Jeanne, est maltraitée par son imbécile de mari, que fait Maurice ? Il la débarrasse radicalement du brutal conjoint. Après les coups de couteau, le coup de foudre est inévitable. C‘est ainsi que Jeanne vit ensuite maritalement avec Maurice, belle histoire d’amour.

Le Grand Charles est un caïd un poil vindicatif, un brin susceptible. Faut avouer qu’il n’a pas eu une enfance facile, entre un beau-père mac et une mère prostituée.Notre trio, c’était le petit con, la pute et le puant. Les Thénardier, en pire.C’est le patron de Maurice, qui décide de ses contrats. Sauf qu’il arrive à Maurice de renoncer pour motif personnel. États d’âme ou déontologie du sicaire, le Grand Charles est compréhensif :Le boss ne refuse rien à Maurice quand il refuse une mission. Il aime chez lui ce côté sensible. Et puis il a recours à d’autres employés moins regardants.Des cibles, Maurice n’en manque pas, usant des méthodes le mieux adaptées à chacune. Exemple, ce chasseur : “Son légionnaire il était gros, il était con, il sentait bon la chevrotine. Il est mort dans son lit, c’est vrai, mais avec trois cartouches dans le buffet.”

Chez les habitants de son immeuble, y en a quelques-uns qui méritent sans nul doute l’intervention de Maurice. Parmi ses victimes, c’est parfois l’horoscope qui guide notre valeureux justicier appointé, faut bien trouver des bases. Maurice n’oublie pas son séjour bienfaisant à Fleury-Mérogis, station incontournable du tourisme pénitentiaire. Sa collègue Maryse, avenante quinquagénaire jouant avec les armes à feu, Maurice l’aime bien. “Nous appartenons tous les deux au club très ouvert de ceux qui ont perdu leurs illusions. Nous avons tous les deux arpenté le boulevard des rêves brisés […] Et survécu à une vie rock’n’roll parsemée de périodes de blues.” Mais si elle tente un coup de Jarnac, notre tueur patenté réplique par un mortel coup de lame, réflexe oblige. Sans doute Maurice est-il un nostalgique de Joe Strummer et The Clash. Néanmoins, il lui arrive de s’essayer au slam, et d’avoir pour client un rappeur voulant supprimer ses concurrents. Il vit (et tue) avec son temps, l’ami Maurice…

C’est un héritier des Tontons Flingueurs, scénarisé par Frédéric Dard et dialogué par Michel Audiard, que nous présente Nelly Bridenne. Un dur au cœur tendre façon Lino Ventura, dans une ambiance musicale plus actuelle punk-rap-slam, voilà Maurice. Avec les casse-burnes de tout acabit, les malfaisants congénitaux, les malsains dérangeants, il n’y a qu’une seule solution, l’élimination. Éjecter les indésirables, vaste programme ! Au contraire d’un monstre froid, il en épargne çà et là quelques-uns, selon ses critères. Quand une suite de nouvelles dédiées à au héros fétiche de l’auteur devient une sorte de “chronique mauricienne”, le résultat s’avère assez jouissif. Le plaisir étant au rendez-vous, ce roman autoédité se commande sur le site

http://www.confessionsdunpolisson.fr/

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17 février 2010 3 17 /02 /février /2010 07:22
 

Nouveau titre de la collection Seuil Thrillers,Le vrai mondede Natsuo Kirino est ce qu’on appelle aujourd’hui unroman choral, à plusieurs voix. Ce qui permet d’approcher au plus près du vécu des personnages, de leurs sentiments face à une situation périlleuse. Par la justesse de sa tonalité et de son ambiance, une histoire très convaincante, vraiment passionnante.

Dans la banlieue de Tokyo, vivent quatre copines lycéennes d’environ dix-sept ans, de caractères fort différents. Bien qu’appartenant à une famille équilibrée, Toshiko trouve le monde actuel agressif. En ce mois d’août caniculaire, elle suit les cours intensifs de “l’institut de gavage”. Ce jour-là, on lui a volé son vélo, et elle a perdu son portable. Rentrant chez elle, Toshiko apprend que leur voisine a été assassinée. KIRINO-2010Le fils de la victime, que ses copines et elle nomment le Lombric, est le probable coupable. Toshiko a compris que c’est lui le voleur du vélo et du portable, mais n’en dit rien aux policiers. Elle contacte ses amies Yuzan, Kirarin et Terauchi, pour leur raconter ce qui s’est passé. Elles ne sont pas surprises quand le Lombric leur téléphone, grâce au répertoire du portable.

Yuzan est la plus marginale du groupe. Peu féminine, elle se pense lesbienne, et fréquente des amies assez spéciales. À traîner dans des quartiers mal famés, elle a fini par être sévèrement agressée. Son avenir lui apparaît incertain. Ce qui rapproche Yuzan du Lombric, c’est que sa mère est aussi décédée, mais de maladie. Elle lui fournit un vélo et un autre portable, pour qu’il poursuive sa cavale. Ryo, dit le Lombric, ne regrette pas son geste. Élève moyen, il subissait la pression d’une mère croyant bien faire. Le Lombric se voit comme “l’héritier d’un péquenaud et d’une pouffiasse. Et n’était-ce pas elle qui m’avait largué dans un endroit où il n’y a pas la moindre fille. Pourtant, voilà qu’elle me demandait si je tombais des nanas ! Elle me demandait ça parce qu’elle avait conscience que ses méthodes d’éducation étaient un échec.” Sa version de la “normalité” irritait le jeune Ryo. Les conflits étaient permanents, jusqu’au jour fatidique.

La plus allumeuse des quatre copines, c’est Kirarin. Elle participe à une autre bande de filles, les Joyeuses Drilles, qui aguichent les garçons. Seuls ses amours d’adolescente sont au cœur de ses préoccupations. Excitée par le cas du Lombric matricide, elle le rejoint bientôt. Bien qu’il ne soit guère à son goût, elle retient son côté “héros”. Pour dormir, le couple se réfugie dans un Love Hotel. L’esprit du Lombric dérape, il s’imagine en militaire, envisage de retourner chez lui pour tuer son père. “Qui sait, peut-être que je suis un génie, après tout ? Le problème, c’est que personne n’est au courrant […] J’aurais dû dire au monde quel génie j’étais, mais j’ai merdé en oubliant de laisser une lettre dans ma chambre.” Il téléphone à Terauchi, pour qu’elle rédige à sa place son message, son manifeste. Intelligente, la jeune fille a des idées compliquées sur la vie. Elle n’éprouve aucune pitié pour le Lombric, dont la cavale semble vouée à l’échec…

L’auteur fait dire au jeune fuyard : “Les romans sont proches de la vraie vie, c’est comme s’ils montraient le monde après en avoir épluché une couche, une réalité qu’on ne pourrait pas voir autrement. Ce que je veux dire, c’est qu’ils ne sont pas superficiels.” En effet, les portraits de ces adolescentes nous présentent une facette éloignée de cette perfection japonaise tant vantée. Il est naturel que des jeunes cherchent leur voie, leur équilibre, ce que la culture de ce pays n’admet peut-être pas. Ces jeunes filles aident le Lombric pour des raisons différentes, mais toujours par méfiance pour le monde adulte ("Le vrai monde"). Elles vivent une sorte d’expérience qui exprime un besoin de “hors norme”. En les comparant à des funambules sur un fil, leur jeu débute de façon quasi-ludique, mais pourrait finir par une série de brutales chutes.

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11 février 2010 4 11 /02 /février /2010 07:50

C’est un scénario à l’intrigue sinueuse et tendue que nous propose Aurélien Molas, jeune auteur de vingt-quatre ans, dans son romanLa onzième plaie(Albin Michel) qui vient de paraître.

L’unité spéciale anti-pédophilie dirigée par le commissaire Kolbe est en difficulté à cause du procès disculpant “Le monstre de Jarnages”. L’accusé contre-attaque, avec la bénédiction de ceux qui n’ont jamais approuvé l’action du service en question. Adjoint de Kolbe, le capitaine Broissard sera probablement impliqué dans le dossier visant le commissaire. Pour l’heure, il enquête sur la découverte au Havre d’un container rempli de DVD pédophiles, des productions de haute qualité technique. Le lieutenant Léopold Apolline, troisième membre de l’unité spéciale, n’est pas sur la sellette. Mais la hiérarchie lui impose une partenaire, Zoé Hermon, signe de la fin du service anti-pédophilie. Léo étudie attentivement le contenu du DVD, et continue à explorer (sous le pseudo de Sérapion) les sites Internet favorables à la pédophilie. 10-MOLASIl poursuit l’enquête malgré le contexte ignoble, et de sérieux problèmes personnels de santé. Heureusement, le légiste Firsh est un ami de l’unité spéciale, et l’aide à se soigner. Sur Internet, Léo finit par trouver la piste d’une vidéo pédophile intitulée “Neverland”.

La policière Blandine Plothin est chargée d’enquêter sur la mort de deux jeunes filles dans le métro, station Porte des Lilas. Selon le commissaire Rilk, le double suicide apparaît peu douteux. En visionnant les images de la scène, Blandine n’est pas de cet avis. Le légiste Firsh admet qu’on a pu pousser les victimes. Bien que l’affaire soit vite classée, Blandine visite l’appartement d’Amandine, une des filles. Elle y déniche un cahier secret, où la jeune fille exprimait des obsessions morbides. Puis Blandine se rend chez la mère d’Amandine, cité des 4000, à La Courneuve. Un endroit à ne pas fréquenter pour des flics, en cette période où la France connaît de quotidiennes émeutes violentes. Elle trouve la mère d’Amandine, morte dans sa baignoire. L’initiative de la policière est sanctionnée par sa hiérarchie, mais Blandine peut compter sur son collègue et amant Paul Garcia pour poursuivre ensemble les investigations nécessaires.

Malgré les accusations pesant sur Kolbe et lui, le capitaine Broissard ne reste pas inactif. Relançant des indics, il apprend que l’un est décédé, mais obtient le nom d’un suspect : Montoya. Officiellement dirigeant de société, c’est un dangereux mafieux colombien. Zoé, l’équipière imposée à Léo, trouve le lieu de tournage du film “Neverland”. La police prend d’assaut cette maison de Marne-la-Vallée. La cave où se filmaient les orgies pédophiles a été saccagée, mais Léo décèle une trace évocatrice. Revenant à La Courneuve, Blandine et Paul trouvent un indice relatif à une vieille affaire pédophile. Chacun de son côté cherche à en savoir plus. Grâce aux archives d’un ex-journaliste d’investigation, Blandine détecte de nouveaux éléments. Comme Broissard, Léo imagine un rapport entre Uriel Corporation, la société de Montoya, et le réseau diffusant les films pédophiles. Plus les policiers se rapprochent du but, plus le jeu devient dangereux…

Les enquêtes parallèles et séparées de Broissard, de Léo, de Blandine et Paul, leur permettent d’avancer à petits pas. Chacun collecte de minces indices qui, recoupés, aident à comprendre la vérité sur des affaires passées et présentes. Investigations compliquées par les émeutes qui, en toile de fond, agitent le pays. Selon le légiste Firsh, ces émeutes sont un symptôme, non pas celui d’une jeunesse à la dérive ou d’un ras-le-bol collectif, mais la manifestation visible d’une maladie, celle du déclinUn déclin économique, artistique, politique et social. Notre pays est entré dans une phase d’apathie intellectuelle.” Un diagnostic à étudier, en effet. L’abject monde de la pédophilie, illégal et souterrain, réserve de nombreux secrets et des mauvaises surprises. Car le procès qui plane sur l’unité spéciale n’est peut-être pas injustifié. À vouloir infiltrer cet univers de la pornographie malsaine, certaines croisades dépassent certes l’écœurement, mais risquent de ne plus préserver les victimes. Suspense et tension, pour un roman de belle qualité. 

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10 février 2010 3 10 /02 /février /2010 07:16

 

Dans son nouveau roman,Bien connu des services de police(Série Noire), Dominique Manotti dresse un sombre portrait d’une police gangrenée par des flics ripoux et par la politique sécuritaire. D’abord, un petit résumé de l’intrigue.

Dans la banlieue nord de Paris, la ville de Panteuil constitue un secteur sensible en matière de délinquance et de criminalité. Solidaire des efforts du ministère de l’Intérieur pour une meilleure sécurité, la commissaire Le Muir est bien décidée à trouver des solutions. MANOTTI-2010.JPGIl faut commencer par les squats, générateurs de tous les trafics. Elle peut compter sur son chauffeur, le brigadier major Pasquini, dont les relations dans les milieux mi-truands, mi-fachos sont bien utiles. Au sein du commissariat de Panteuil, les policiers partisans de la méthode forte sont légion, pour servir les objectifs de Le Muir.

Le plus excité d’entre eux est Paturel, chef d’une brigade de la BAC. Avec son équipe, il rançonne un groupe de prostituées réfugiées dans un parking, proxénétisme ignoré de sa hiérarchie. Ivan fait partie des collègues de Paturel, mais sans partager leur enthousiasme. Deux problèmes le tracassent. Son ami africain Balou, qui vit de divers bizness, exige qu’Ivan l’aide à obtenir de faux-papiers, en échange des services qu’il lui a rendus. Par ailleurs, il y a ce procès dont le jugement sera bientôt prononcé. Bien que ce ne soit pas l’exacte vérité, Ivan y apparaît comme victime, mais il a déjà décidé de quitter la police sitôt après. Si possible en évitant d’aider l’insistant Balou.

Deux jeunes policiers viennent d’arriver au commissariat de Panteuil. La blonde Isabelle Lefèvre, Adjoint De Sécurité, doit calmer les ardeurs sexuelles de certains collègues. Elle est affectée à une brigade de Police-Secours. Suite à un banal vol de portable, un contrôle d’identité dérape, causant une fusillade entre flics, entraînant l’arrestation massive de femmes du quartier. Il est préférable de ne pas trop faire d’écho à ratage exemplaire. Sébastien Doche, l’autre nouveau, a intégré le Bureau des plaintes. Entre cynisme et fausse compassion, le vieux brigadier en poste gère les situations en fonction de critères discutables. Les cas insolubles, qui n’améliorent pas les chiffres de la sécurité, il les écarte.

L’honnête Doche entreprend une enquête sur les vols de voitures de luxe. Il ne tarde pas à repérer le garage Vertu, curieusement fréquenté par Pasquini, le chauffeur de la commissaire, qui y rencontre des types à l’allure suspecte. Noria Ghozali appartient aux R.G. Avec le soutien de Macquart, un ancien du service encore influent, elle espère faire tomber l’ambitieuse Le Muir. Le proxénétisme version Paturel et l’appartenance de Pasquini à l’extrême-droite ne suffisent pas. Quant un incendie ravage un squat peuplé de Maliens, causant quinze morts, Noria sent que Le Muir n’est pas étrangère à ce sinistre. Entre le témoignage d’un travelo violenté par Paturel et la piste du garage Vertu, elle possède déjà quelques éléments. À condition que l’IGS ne se laisse pas berner par une version préparée de l’équipe Paturel. Et que la Justice ne soit pas manipulée concernant l’incendie du squat. Pour l’heure, Le Muir est très appréciée du Ministère…

Sans doute s’agit-il d’une fiction, dans laquelle peu de policiers admettront se reconnaître. Néanmoins, cette “ambiance commissariat”, ce microcosme décrit par Dominique Manotti est plus que plausible. On trouve ici beaucoup de flics ripoux, d’autres pas, un policier tourmenté, une opiniâtre enquêtrice des RG. “Sur le terrain, on n’a jamais fait la police avec les Droits de l’Homme” dit-on pour motiver les forces de l’ordre. La guerre contre délinquants et criminels n’exclut pas, pourtant, le respect des règles, ni celui des présumés innocents. Adepte de la “comédie sécuritaire” au bénéfice des politiciens, l’arriviste commissaire fait dégénérer une situation précaire et tendue en prétendant nettoyer Panteuil. Possible reflet de la réalité, non ? Notons que l’auteur n’édulcore pas le quotidien violent des banlieues, entre petits trafics juteux, squats insalubres, mortelles brutalités conjugales. Un roman militant, visant les noires facettes d’une police qui n’est pas irréprochable, parfois trop proche des ambitions politiques de nos dirigeants. Illustration par l’exemple, autant que matière à réflexion pour les lecteurs.

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9 février 2010 2 09 /02 /février /2010 07:22
 

Le Livre de Poche réédite “Sleeping Beauty” de Phillip Margolin, un suspense machiavélique, comme on les aime.

Excellente joueuse de football féminin, Ashley est une adolescente habitant Portland, dans l’Oregon. Elle vit un premier drame quand, une nuit, sa meilleure amie et son propre père sont assassinés chez elle. Ashley échappe au tueur. Pour qu’elle cesse de culpabiliser, sa mère Terri la fait entrer à l’Oregon Academy. En plus des études, Ashley pourra se perfectionner en foot. Terri et Ashley y rencontrent Casey van Meter, la directrice issue d’une riche famille, et l’écrivain Joshua Maxfield qui fut l’auteur d’un best-seller.

MARGOLIN-2010.JPGUn double crime a pour décor le hangar à bateaux de l’Academy : Terri est assassinée, Casey van Meter sombre dans le coma après avoir été violemment frappée. Ashley a vu le coupable, un couteau sanglant à la main : c’est Joshua Maxfield, qui est en fuite. Le manuscrit de son futur roman l’accable. Il y est question de meurtres monstrueux. La famille van Meter se montre protectrice avec Ashley, désormais seule. Bientôt arrêté, Joshua Maxfield nie tout. Il profite de l’audience préliminaire au tribunal pour disparaître. Peu après, c’est évidemment lui qui tente d’assassiner Ashley. Malgré les conseils de son avocat Jerry, la jeune fille quitte le pays. En Europe, elle sera en sécurité.

Cinq ans plus tard, Ashley doit rentrer à Portland. Jerry lui apprend que Casey, toujours dans le coma, est sa vraie mère. Miles van Meter, frère de Casey, et Randy Coleman, son ex-mari, s’opposent pour devenir tuteur légal de celle-ci – dont la fortune s’élève à 40 millions. Tous deux veulent la “débrancher”, Ashley est contre. Quand Ashley est agressée, Coleman et Maxfield sont arrêtés en flagrant délit. Coleman affirme avoir défendu Ashley. On s’interroge sur ce dernier au procès de Maxfield. Sortie du coma, Casey a retrouvé ses facultés : elle désigne le criminel. Les doutes d’Ashley lui permettront de finalement désigner le vrai coupable…

La construction du récit s’avère particulièrement habile. La narration fluide est entraînante, et les rebondissements captivants. Bien sûr, on devine que la vérité est brouillée par des faux-semblants dans cette affaire pas si limpide. L’incertitude quant au rôle de chacun fait la force de l’histoire. Les portraits nuancés des divers protagonistes sont très réussis, pas trop manichéens. Peut-être Casey se rétablit-elle un peu vite, mais on admet son caractère volontaire. L’auteur nous livre aussi quelques réflexions sur le métier d’écrivain, de la création à la promotion. Un suspense réellement passionnant.

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8 février 2010 1 08 /02 /février /2010 07:16
 

Selon les épisodes et les auteurs, Le Poulpe traverse parfois des aventures agitées jusqu’à en être assez délirantes. Marin Ledun choisit de nous présenter un Gabriel moins dépressif, très offensif, dansUn singe en Isère(Éd.Baleine). Une très bonne version poulpesque, solide et sérieuse, parmi les meilleures de la série.

Cette fois, c’est à Grenoble que Gabriel Lecouvreur est appelé par de vieux amis. Non pas pour soutenir les éco-citoyens qui campent dans les arbres du Parc Paul Mistral. Ceux-ci s’opposent depuis plusieurs années au chantier, déjà avancé, d’un futur stade de football au centre de Grenoble. Quelques décisions de justice leur ont été favorables, mais la municipalité n’est pas loin d’envoyer les forces de l’ordre contre ces militants. Un meurtre vient d’être commis aux abords de ce chantier controversé. Alors qu’elle cherchait son amie disparue Mathilde, SDF comme elle, Judith a été violée et tuée. Les enquêteurs ont arrêté José, ami de cœur de la jeune femme. Ils ont trouvé quelques affaires appartenant à Judith dans l’appartement de José, ce qui suffit à les convaincre de sa culpabilité.

LEDUN-2010-1.jpgPour Alain, le père du suspect, et leur copain Michel, Gabriel cherche des indices de l’innocence de José. Le refuge de la victime a été saccagé. Le Poulpe apprend que Judith était amoureuse de Mathilde, et non de son soupirant. À première analyse, rien de probant en faveur de José. Pourtant, Gabriel ne renonce pas à sa promesse : ­“Refaire le boulot, fouiller, fouiller jusqu’à ce que José sorte de taule, et qu’Alain cesse de pleurer.” Il interroge l’étudiant Jean-Baptiste, qui soutien les éco-citoyens, puis le jeune ouvrier Simon, employé sur le chantier. Tous deux amis de José, ils manquent de franchise dans leurs réponses. Gabriel s’introduit dans le bureau du chef de chantier, dérobant un document important. Mais celui-ci, un colosse nommé Vincent, l’intercepte. Gabriel parvient à fuir.

L’étudiant Jean-Baptiste semble être le maillon faible de l’affaire. Gabriel le prend en filature jusqu’à la Fac. C’est ainsi que Le Poulpe se laisse charmer par la belle Sophie. Ayant vu Vincent en contact avec Jean-Baptiste, Gabriel intervient juste à temps pour sauver l’étudiant d’une fatale overdose. C’est bien Vincent qui a voulu le supprimer. La colère lui donnant des ailes, Gabriel tente une visite nocturne sur le chantier du stade. Le colosse s’interpose avec violence. Suite au pugilat, Le Poulpe est déjà heureux de s’en sortir vivant.

Le “nettoyage” annoncé du parc Paul Mistral, sur ordre de la mairie, entraîne une manifestation militante. Gabriel préfère s’intéresser au jeune ouvrier Simon. Dans l’appart vide de celui, il repère des traces de Mathilde, l’amie disparue de Judith. Aux archives des services de l’urbanisme, Le Poulpe consulte le dossier concernant le futur stade. Les embrouilles autour de sa construction comportent un début de réponse. Si Mathilde et Simon sont encore en vie, s’il existe une possibilité de disculper José, Le Poulpe doit maintenant agir au plus tôt…

Comme il ne se tracasse pas au sujet de sa relation avec la blonde Chéryl, ici totalement absente, Le Poulpe garde les idées claires lors de son enquête de terrain. Investigations mouvementées, durant lesquelles il reçoit d’inévitables mauvais coups. Autant de chocs lui donnant l’énergie nécessaire pour résoudre l’affaire. Le Poulpe reste fidèle à ses principes, même s’il n’est guère amateur de manifs : “Personne ne le convaincra jamais de marcher au pas (…) On a la liberté qu’on peut et la fierté déplacée qui va avec. Ce qui n’empêche pas Gabriel de porter un respect sans borne à ceux qui s’y collent, parce que merde, tous ces gens prêts à sacrifier le repas dominical ou une journée de travail sont des héros, au même titre que ceux qui se lèvent le matin pour aller au turbin.” Il admet aussi que les anars évoluent : “Après tout, les temps changent. Même les anarchistes mangent bio et trient leurs déchets.”
Cliquez ici sur "Marin Ledun répond au Portrait chinois"

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7 février 2010 7 07 /02 /février /2010 07:18
 

Dans son précédent roman,Sansalina(Éd. Après la Lune, 2008), Nicolas Jaillet nous présentait des héros aussi durs que touchants, évoluant dans un climat âpre et violent. Il conserve une belle maturité d’écriture, mais change de registre avec cette intrigue romanesque située dans un contexte historique raffiné. Petit résumé des aventures de cetteIntruse(Hachette, 2010).

Palais de la Hofburg, à Vienne, en mars 1815. À l’initiative du comte de Waldaw et de son fils, le vicomte Frédéric, une réunion diplomatique rassemble les maîtres de l’Europe. Le tsar Alexandre 1er, Lord Wellington, le prince Metternich, et Talleyrand doivent signer le traité de paix post-napoléonien. Rien n’est encore décidé. Au même moment, Fanny est entrée clandestinement dans le château. Cette jeune corsetière vient y voir son amant Frédéric, qui prétend être un des valets du comte de Waldaw. À cause d’un malentendu, le tsar Alexandre croit qu’elle fait partie des invités. C’est ainsi qu'elle ouvre le bal avec lui. La valse du couple retient l’attention de toutes les personnalités présentes. JAILLET-2010.JPGFrédéric est catastrophé : “Fanny ne se rendait pas compte. Elle voyait sans doute la vie comme un rêve, à l’instant présent, avec tous ces beaux messieurs, toutes ces belles dames qui l’admiraient. Mais les belles dames crevaient de jalousie, et les hommes attendris la feraient pendre, s’ils savaient qu’elle avait usurpé son rang.” Le père de Frédéric, le comte de Waldaw, désapprouve sa liaison avec une corsetière, mais il n’a pas encore reconnu la jeune femme, divinement vêtue.

Le comte charge ses hommes de mains, les barons Erbis et Serbi, d’enquêter sur l’identité de cette invitée-surprise. Ayant avoué à Fanny qu’il est vicomte et non valet, Frédéric répand la rumeur qu’elle appartient à une famille de haut rang. Au dîner qui suit, “elle était la reine de la soirée. Une auréole de mystère l’entourait; tout le monde voulait l’approcher, comme s’il suffisait de respirer la même atmosphère qu’elle pour emporter un peu de son secret.” Tandis que Frédéric retrouve son amie d’enfance Elsa Krümm, devenue courtisane, Fanny affiche toute la dignité possible lors du dîner. L’ex-impératrice Marie-Louise, épouse de Napoléon, est fort intriguée par l’inconnue, mais pas hostile. Le comte de Waldaw finit par identifier la jeune femme, qu’il estime être “une petite rien-du-tout”. Pour la piéger, il organise un jeu, les invités devant deviner qui est la jeune femme. Hypothèses et questions perfides sont lancées. Mais Frédéric veille et l’intelligente Fanny sait rester évasive. Elle sent que l’impératrice Marie-Louise peut s’avérer une alliée. Pleine d’imagination, Fanny livre une version inventée de sa vie à son auditoire. Néanmoins, le comte projette toujours de la dénoncer.

Talleyrand s’amuse à enquêter sur Fanny, avec les barons Serbi et Erbis. Pour Frédéric, la jeune femme et lui doivent fuir au plus tôt. Courtisée à la fois par le tsar Alexandre et par Wellington, Fanny essaie de ruser avec chacun. Il lui faut résister au tsar, que Frédéric a l’imprudence de provoquer en duel. Quand le comte menace Fanny de la faire torturer par ses barons, elle le révèle une information secrète qui intéresse en priorité Talleyrand. Frédéric et Fanny vont devoir se montrer habiles pour se sortir d’une situation semblant inextricable…

Futée et débrouillarde, la jeune intruse ne manque pas de talent pour cacher ses origines modestes. Elle n’en est pas moins exposée à de multiples péripéties à risques. S’opposant à son malveillant père, le jeune vicomte Frédéric a bien des difficultés à maîtriser les évènements. Soulignons l’attitude complice de l’ex-impératrice Marie-Louise et le tempérament malicieux de Talleyrand, l’ensemble des portraits apparaissant plutôt crédibles. Un roman s’adressant à un public jeunesse, ainsi qu’aux lecteurs de tous âges. Sur fond de romantisme et d’Histoire, l’auteur nous présente un récit fluide et mouvementé, riche en suspense.
Cliquez sur ma chronique de "Sansalina", précédent titre de Nicolas Jaillet

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