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20 novembre 2011 7 20 /11 /novembre /2011 06:34

 

Dans la série Petits crimes de Noël d’Anne Perry chez 10-18, voici un nouvel inédit fort sympathique, Un Noël plein d’espoir.

PERRY-2011-NOELÀ Londres, peu avant Noël 1883. Gracie Phipps est une adolescente de treize ans. Avec ses jeunes frères Spike et Finn, elle habite dans Heanage Street, chez leur grand-mère qui les élève. Brick Lane est un des faubourgs londoniens qui abritent une population miséreuse. Sans doute un peu plus reluisant que Flower Street et Dean Street, quartier regorgeant de voleurs et de prostituées.

Ce soir-là, Gracie croise la petite Minnie Maude Mudway, huit ans. La gamine cherche l’âne Charlie, dont elle pense qu’il s’est égaré. L’oncle Alf, que Minnie Maude aimait beaucoup, vient de mourir et l’animal n’est pas rentré chez la tante Bertha et l’oncle Stan, où elle vit. Gracie ne peut guère aider l’enfant. La nuit suivante, elle reste perturbée par cette curieuse disparition de l’âne Charlie.

Dès le lendemain, Gracie retrouve la rue où habite Minnie Maude. Elle réalise que ce n’est pas seulement l’animal qui a disparu, mais aussi la charrette de chiffonnier de l’oncle Alf. Quant au décès de celui-ci, dû à une chute à Mile End, il ne parait pas très clair. Toutefois, qui irait voler les modestes objets que peut récupérer un chiffonnier ?

Gracie et Minnie Maude interrogent Jimmy Quick, ami de l’oncle Alf exerçant la même profession. Pour lui, le décès d’Alf est juste une question de malchance. Il admet que, ce jour-là, son collègue et lui avaient échangé leurs tournées de ramassage. La mort d’Alf ne lui semblant pas suspecte, il ne pense pas avoir été visé d’une façon ou d’une autre. Gracie est consciente que Jimmy Quick n’est pas d’une parfaite franchise à leur égard.

Un témoin aurait vu une boite en or dans le chargement de l’oncle Alf, mais ce peut être une rumeur. La tante Bertha n’est pas du tout préoccupée par le cas de Charlie et d’Alf. L’oncle Stan ne cache pas sa nervosité. Pour l’instant, Gracie poursuit seule sa petite enquête. Elle est employée par le vieux Mr Wiggins, qui lui conseille de contacter un certain M.Balthasar. Pour lui, l’affaire est sérieuse : Tu as raison d’avoir peur. Je vais voir si je peux apprendre quelque chose. Mais, en attendant, tu ne dois rien dire, et ne plus poser de question… Le cas du coffret en or intrigue M.Balthasar. Gracie revient auprès de Minnie Maude, devant affronter l’hostilité ouverte de l’oncle Stan. Pendant ce temps, Balthasar ne reste pas inactif. De réels dangers guettent les enquêteurs amateurs…

 

Anne Perry est la grande spécialiste des romans historiques, qu’il s’agisse des séries consacrées à Charlotte et Thomas Pitt, à Joseph et Matthew Reavley, à William Monk, ou de grands titres tels Du sang sur la soie. On éprouve aussi une tendresse certaine pour ses courts romans inédits de la série Petits crimes de Noël. Car il ne s’agit pas de contes simplistes, mais de véritables intrigues à suspense.

On le constate une fois encore avec Un Noël plein d’espoir, au récit riche en péripéties énigmatiques et criminelles. C’est évidemment l’occasion de retrouver l’ambiance de Londres à la fin du 19e siècle, ses faubourgs mal famés, sa population pauvre, ses petits métiers, autant que ses malfaiteurs. Le mérite de l’auteure est de nous suggérer ce décor, sans nous imposer de fastidieuses descriptions. C’est bien l’enquête de Gracie (et de M.Balthasar) qui prime. Un très agréable roman de mystère.

 

Dans la même série, ici ma chronique sur deux autres titres ("La révélation de Noël" et "Le secret de Noël").

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18 novembre 2011 5 18 /11 /novembre /2011 06:35

 

Aujourd’hui, tout le monde a des prétentions littéraires. Dés qu’on a fait le trajet du Mont-Saint-Michel à Saint-Jacques-de-Compostelle en train-couchette de luxe, on veut raconter cette aventure dans un livre. Mieux encore, on lui donne la forme du roman, voire d’un polar aux péripéties rocambolesques. Pour peu que l’auteur se soit trompé de train, débarquant à Saint-Jacques-de-Néhou (département de la Manche), à Saint-Jacques-de-la-Lande (près de Rennes), ou dans la paroisse de Saint-Jacques-du-haut-Forez (département de la Loire), il y en a des choses à raconter !

Un livre de plus parmi la production pléthorique hexagonale. Encore faut-il qu’il intéresse du monde, ce chef d’œuvre du récit fictionnel s‘inspirant d’une expérience originale vécue. C’est là que surgissent maints obstacles. Parce que les vrais éditeurs ont déjà 192.543 tapuscrits en attente d’être réexpédiés à leurs auteurs, accompagnés d’une formule de refus polie et définitive. Parce que notre auteur, génie du voyage mouvementé, va être la proie de faux éditeurs lui faisant miroiter des miracles contre une somme coquette payable d’avance, sans garantie de diffusion du livre.

BRIDENNE-2011Nelly Bridenne, je vous en ai déjà parlé. Souvenez-vous de Le monde est plein de polissons et de Sur un petit air de requiem. Originaire de l’Essonne, elle habite dans le sud-Ouest girondin. Belle région, mais pas tellement francilienne pour qui veut publier. Et Nelly, elle n’est pas du genre à laisser dormir ses textes dans la mémoire de son ordinateur. C’est une adepte du bouge-toi si tu veux avancer. Par exemple, elle publie en ce moment un recueil de poèmes intitulé Rebelle attitude. Je ne suis pas expert pour en vanter les mérites. Néanmoins, c’est pas du texte nostalgico-larmoyant. C’est du verbe qui claque, du message à déclamer, de l’espoir plus fort que le destin. Y a du slam dans l’air, du blues mêlé de rap. Des histoires de délinquants, de racailles, aussi. Ça vibre, ça éclate, ça réveille.

Nelly est le contraire d’une feignasse. Ses bouquins, elle les édite elle-même de A à Z. Pour faire partager à d’autres auteurs sa propre expérience, elle vient de publier Kit de survie dans le milieu (confus) de l’édition. C’est un véritable petit guide pratique de la débrouillardise éditoriale. Sont d’abord évoquées les étapes de l’écriture, histoire de ne pas produire un livre illisible. Puis viennent les pistes en matière d’édition, dont diffusion et dédicaces sont les deux pivots. Nelly cite les témoignages détaillés de plusieurs auteurs qu’elle connaît, et d’un célèbre chroniqueur de polars. Puisque grâce à tout ce qu’elle explique, Nelly parvient à écouler ses livres, pas de raisons que ça ne fonctionne pas pour d’autres.

Comme l’auteur fictif évoqué en préambule, vous pouvez rêver d’un best-seller publié par le plus gros éditeur français, vous imaginer au top des ventes et médiatisé du jour au lendemain. Mmouais, ça peut arriver. Si vos ambitions sont plus modestes et réalistes, renseignez-vous sur Kit de survie dans le milieu (confus) de l’édition (ainsi que Rebelle attitude, Le monde est plein de polissons et Sur un petit air de requiem). On se connecte sur le site de Nelly Bridenne. Et c’est là que l’on commande ses livres.

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17 novembre 2011 4 17 /11 /novembre /2011 06:38

 

Aux éditions Le Cherche Midi, avec Storyteller, James Siegel nous a concocté une passionnante intrigue. Un suspense à ne pas manquer.

Littleton, une petite ville dans le désert de Californie, à deux cent quarante-six kilomètres à l’est de Los Angeles. Tom Valle y est aujourd’hui journaliste. Il fut naguère un de ces reporters dénichant des scoops pour la presse new-yorkaise. Toujours le premier sur des sujets spectaculaires, sauf que la plupart de ses articles étaient truqués. On recensa cinquante-six reportages bidonnés. Enfance trouble marquée par le mensonge, SIEGEL-2011nécessité de reconnaissance, tricher tant que personne ne le remarque, autant de mauvaises raisons à ces tromperies.

 Devenu la honte de la profession, il a pu se recaser dans un petit journal californien. Il subit encore les quolibets du shérif Swenson, qui n’ignore rien de son passé. Des articles sur un sinistre accident de la route ou sur la centenaire locale Belinda Washington, tels sont les sujets qu’il couvre désormais.

Bien étrange accident où la voiture a brûlé, et son conducteur est intégralement calciné. On a l’identité de la victime, un Blanc, alors que le médecin estime que le mort est un Noir. Contactant par téléphone la mère du défunt, Tom apprend peu après que cet ancien soldat est de retour chez elle, malade mais bien vivant.

Quant au seul témoin de l’accident, qui n’a rien pu faire, introuvable dans la ville qu’il a indiquée. Curieux aussi qu’il n’y ait aucune trace de freinage sur la route, c’eût été logique. Des éléments qui ne perturbe guère le shérif local. Et encore, Tom ne lui parle pas du message reçu par Belinda Washington, de son fils mort cinquante ans plus tôt. De même, quand Tom est agressé chez lui par un faux plombier, Swenson se montre incrédule. Par chance, le journaliste fait la connaissance de la belle Anna Graham, qui ne semble pas le juger.

John Wren, prédécesseur de Tom, enquêta sur le drame qui endeuilla la région il y a un demi-siècle. Stockées sur microfilm, les archives du journal relatent l’inondation qui causa 892 victimes à Littleton Flats. La seule rescapée fut une gamine, qui crut être sauvée par des robots au service d’extraterrestres. Il y eut un procès, où un jeune ingénieur servit de bouc émissaire. Dans le village dévasté, Tom croise un ex-médecin octogénaire qui se souvient vaguement du drame. Rien de solide pour un reportage, rien qui fasse le lien avec le récent accident. Pourtant, le menaçant pick-up bleu du plombier rôde autour de Tom.

C’est à Santa Monica que le journaliste retrouve le témoin de l’accident de la route. Son collègue John Wren, qui vit maintenant tel un ermite, connaît les mensonges passés de Tom. Néanmoins, si Tom se déplace, il accepte de lui transmettre ses notes sur le drame du barrage. Toujours insuffisant pour que le shérif Swenson prenne le journaliste au sérieux. Suivi par le pick-up bleu, Tom se met en quête d’un hôpital pour anciens combattants. Une piste qui pourrait lui permettre de relier entre eux les points qui dessinent cette étrange affaire…

 

Grâce à ce résumé, on sait tout des mésaventures de Tom Valle ? Non, c’est exactement l’inverse. Car les péripéties sont incessantes dans ce roman, bien plus nombreuses et mystérieuses encore. Car la mauvaise réputation de Tom le poursuivra toujours, aussi sûrement que de fantomatiques ennemis. Car le rôle de certains témoins est encore plus obscur qu’il y parait. Car le quotidien à Littleton et le contexte américain, aussi évoqués dans cette histoire, donnent une évidente force au récit, dans ces Etats-Unis où circulent tant de mensonges. Et c’est enfermé dans une minable chambre d’hôtel que le reporter nous raconte ce qu’il a découvert. Il y a tant de choses incroyables qu’on ne dira pas.

Étant dans la confidence, nous partageons vite les mêmes soupçons sur le secret de Littleton Flats, et nous savons que Tom cherche vraiment à se racheter. C’est une histoire diaboliquement agencée, un suspense où le héros ne peut compter que sur lui-même, sans garantie d’arriver au bout de ses investigations. Une ambiance à laquelle on adhère d’emblée, qui devient bientôt fascinante.

 

Le journalisme d'investigation existe toujours, mais se fait de plus en plus rare. Il a cédé la place au "storytelling", technique de communication appliquée au marketing et à la politique. Il ne s'agit plus de détailler les faits réels, mais de "raconter une histoire". Dans l'actualité, chaque évènement devient ainsi une histoire à épisodes, non pas basée sur des éléments avérés, mais sur des développements narratifs réguliers. Par exemple, suite à un drame quel qu'il soit, on nous parlera ponctuellement de "l'évolution de l'enquête", même si rien de nouveau n'est officiel. Rumeurs, inventions et hypothèses suffisent à alimenter un épisode suivant. Ce qui permet de formater les esprits, de façon négative ou positive. Les médias accablent tel suspect, le rendant de moins en moins sympathique; ou l'on défend la cause de tel autre, n'offrant que des rebondissements en sa faveur. Si ce type de manipulation n'est pas nouveau, c'est désormais un véritable système de désinformation.

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11 novembre 2011 5 11 /11 /novembre /2011 06:51

 

Georges Brassens (1921-1981) évoqua la Mort dans plusieurs de ses chansons. Il l’appelait la Camarde, la Faucheuse. Sans doute n’était-ce pas chez lui une obsession, mais une conscience de la mort. Une fatalité qui accompagne chacun d’entre nous. Dans Georges et la Mort, album paru aux Éditions 12bis, Blaise Guinin illustre cette relation (parfois conflictuelle) avec poésie et humour…

BD-GUININ-2011La Mort n’a pas d’états d’âmes, ne fait preuve d’aucun favoritisme. Elle agit sans distinction d’âge ou de catégorie sociale. On finit toujours par la rencontrer. En 1947 à Paris, la Mort est chargée de s’occuper d’un chanteur sans avenir nommé Georges. Dans le quartier, les commères lui font une mauvaise réputation. Gros dégueulasse, pervers, répugnant, les qualificatifs désobligeants volent bas.

Ce Georges loge impasse Florimont, venelle lugubre, dans un véritable taudis. Cette infâme bicoque serait donc sa dernière demeure. Dans cet univers désargenté, il ne peut compter que sur la Jeanne. Elle l’a hébergé, choyé, nourri. Ce n’est pas son mari Marcel, ivrogne notoire, qui peut améliorer la vie du trio. Gagner de l’argent avec ses chansons, au vu des réactions de producteurs, Georges y croit de moins en moins. Guère d’espoir pour lui de sortir de la dèche intégrale.

Séduite par les chansons de Georges, la Mort n’a plus envie de le supprimer. Ce qui déplait fort au maléfique chat noir rôdant sur les toits et dans les cours du quartier. Pourquoi s’attacher à ce Georges, qui compose de si belles chansons ? Les sarcasmes d’un chat de mauvais augure ne changent pas la décision de la Mort : il vivra le plus longtemps possible.

Hélas, il y a bien trop de cons sur cette terre, qui tardent à reconnaître le talent de Georges. Et puis, l’hiver si rude dans la maison mal chauffée de Jeanne, c’est quand même terriblement difficile à supporter. D’autant qu’ils ont à peine de quoi manger. Dans sa détresse, il croise un flic philanthrope, mais aussi un croque-mort bienveillant. Quand Georges se suicide, la Mort l’en empêche. Le chat noir n’a pas dit son dernier mot, attisant la colère des mégères du secteur, toujours prêtes à nuire à Georges…

 

Ce roman graphique retrace à sa manière une partie de la vie de Georges Brassens. Époque oblige, le dessin est en noir et blanc, rehaussé de teintes qui donnent une impression plus colorée. On aime les clins d’œil aux chansons, dont Les amoureux des bancs publics, Le parapluie, La cane de Jeanne ou Le gorille (avec la vieille dame et le juge). Ainsi que ces femmes hargneuses qui, bien que parfois adultères, condamnent Georges et ses textes orduriers (selon elles). L’histoire ne néglige pas des épisodes plus sombres, bien sûr. La rivalité entre la Mort et le chat constitue un des éléments capitaux du récit. Cette bédé très séduisante (qui mériterait sans doute un Coup de Cœur s’il s’agissait de polar) constitue un bel hommage au regretté Brassens. Dont les chansons nous accompagnent toujours, trente ans après son départ.

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10 novembre 2011 4 10 /11 /novembre /2011 06:42

 

Après La position du tireur couché et Le petit bleu de la côte ouest, Tardi adapte un troisième roman de Jean-Patrick Manchette, Ô dingos, ô châteaux (Futuropolis, 2011).

 

BD-TARDI-MANCHETTEEn France, au début des années 1970. Ancien architecte, Michel Hartog est devenu un puissant homme d’affaires. Au décès de son frère et de son épouse, il a hérité de tous leurs biens financiers. Il a aussi la charge de son neveu, un gamin nommé Peter. Hartog étant très occupé, c’est une nurse qui s’en occupe. Ayant créé une fondation au nom du couple défunt, Michel Hartog n’emploie que du personnel handicapé. En remplacement de l’ancienne nurse, il engage Julie Ballanger pour garder le petit Peter. C’est dans un établissement psychiatrique qu’il a trouvé la jeune femme, ex-délinquante pas encore très stable. À peine Hartog et Julie arrivent-ils dans l’immeuble du financier, qu’ils sont agressés par Fuentès. Cet ancien ami d’Hartog, visiblement alcoolique, lui garde rancune de sa réussite sociale.

Le premier contact avec Peter n’est pas très encourageant pour Julie. Dès le lendemain, Hartog doit partir à l’étranger. Alors qu’ils se promènent au Jardin du Luxembourg, Julie et Peter sont enlevés par des inconnus. Impossible de résister, de s’échapper. Les kidnappeurs les conduisent dans une maisonnette isolée, au fond d’une petite vallée à moins de cent kilomètres de Paris.

L’opération est organisée par un britannique, Thompson. Malgré ses problèmes de santé, il compte mener l’affaire jusqu’au bout, selon le plan de son commanditaire. Ses complices Bibi, Nénesse et Frédo, ne sont sans doute pas la crème des gangsters, mais ce n’est pas un problème pour Thompson. Il fait signer à Julie une lettre où elle s’accuse implicitement du kidnapping, le but étant finalement de supprimer l’enfant et la jeune femme dans un court délai. Thompson aurait mieux fait de s’en charger lui-même, car Julie et l’enfant parviennent bientôt à s’enfuir.

La police et les médias sont alertés, un tel enlèvement ne pouvant être occulté trop longtemps. Bien qu’elle laisse des indices derrière eux, Julie craint moins la police que les tueurs qui sont à leurs trousses. Thompson et ses hommes sont bien informés de ses mouvements, le commanditaire étant en contact avec les autorités policières. Julie n’avance pas sans but. Elle se dirige avec Peter vers une région montagneuse. Elle se souvient d’une photo de la Tour Maure, qui pourrait être le repaire du commanditaire de l’affaire. Probablement ce diable de Fuentès, l’ennemi de Hartog. Afin de semer ses poursuivants, Julie provoque un spectaculaire incident dans un supermarché des environs. Pour autant, Peter et elle sont loin d’être en sécurité…

 

Ce titre (de J.P.Manchette) fut récompensé par le Grand Prix de Littérature policière 1973. À la surprise générale, précise en préface François Guérif, car Manchette n’avait encore produit que trois romans noirs. Le qualificatif œuvre de jeunesse utilisé par le préfacier est impropre, concernant ce violent roman. Car, si le contexte sociopolitique apparaît moins, la cascade de dérapages vers une froide folie meurtrière est impeccablement maîtrisé. Et si le final fut écrit d’un seul jet, nous dit Guérif, c’est bien que tel devait être l’inexorable dénouement.

On est bien d’accord pour affirmer que Tardi, ce Maître de la BD, est au sommet de son art dans cette adaptation. Il n’était pas forcément simple de restituer l’univers du héros de Léo Malet, le détective Nestor Burma. Pas plus qu’il n’était facile d’adapter Vautrin, Céline, Siniac, Pennac ou Daeninckx, comme il l’a également fait par le passé. Scénariser et mettre en image l’œuvre noire de Manchette peut sembler une mission impossible. En particulier pour Ô dingos, ô châteaux, improbable road-story tellement en décalage avec la société policée du début des années 1970, fière de ses R16 et de ses 2CV. Remarquable et complète adaptation d’un roman toujours hors norme.

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9 novembre 2011 3 09 /11 /novembre /2011 07:11

 

Chez Actes Noirs, le nouveau suspense de Camilla Läckberg est différent de ses titres habituels. Cyanure s’affiche tel un hommage au roman d’énigme…

Le jeune policier Martin Molin regrette d’avoir accepté l’invitation de Lisette, sa petite amie. Peu avant Noël, il va participer à une réunion de famille sur une île de la côte suédoise. Ancienne colonie de vacances rénovée, la maison d’hôtes tenue par Börje et Kerstin s’avère accueillante, chaleureuse. L’ambiance l’est un peu moins au sein de la riche famille de Lisette, les Liljecrona.

LACKBERG-2011-hsDans son fauteuil roulant, le grand-père Ruben reste un patriarche autoritaire. Il rabroue ses deux fils, auxquels il a laissé la direction conjointe de ses sociétés. Il se montre aussi sévère avec ses petits-enfants, Bernard et Miranda, dont les affaires ne sont pas aussi florissantes que prévu. Il s’intéresse à peine à sa petite-fille Lisette, mais épargne le fragile frère de celle-ci, Matte. Ruben exprime son courroux : Vous avez détourné, dépensé et dilapidé ce que je vous ai donné. Et maintenant, je vous dit : ça suffit ! L’instant d’après, Ruben meurt, empoisonné au cyanure.

Pour Martin Molin, impossible de lancer une enquête habituelle. À cause de la météo, l’île est complètement isolée. Les réseaux téléphoniques ne fonctionnent pas. À part placer le cadavre en chambre froide, le policier ne peut qu’interroger séparément les personnes présentes.

Le fils aîné de la victime est le premier à répondre, puis c’est au tour de la belle Miranda. Il ne peut continuer, l’ambiance étant déjà lourde ce soir-là. D’ailleurs, Matte et son cousin Bernard commencent à se disputer. À cause de la tempête, la nuit n’apporte guère de vrai repos. Au matin, le climat est encore pesant dans le groupe. Interrogé, le second fils de Ruben admet qu’il s’entend mal avec son aîné pour diriger l’empire créé par leur père. C’est même nettement plus grave car, afin d’assouvir sa passion du jeu, il a détourné une grosse somme, bien difficile à rembourser.

Le cynique Bernard est moins affecté par la mort du grand-père que son cousin Matte, qui était proche de Ruben. Une violente altercation éclate entre les deux jeunes gens, obligeant le policier à intervenir. Martin leur tourna le dos et se dirigea vers la cuisine pour se faire un café. Il en avait par-dessus la tête de la famille Liljecrona. Son enquête improvisée n’est pourtant pas terminée. Matte est la cible des accusations de la plupart des autres, en particulier de Bernard. Tandis que l’orage gronde fortement à l’extérieur, un autre meurtre est commis. On a très certainement utilisé le revolver du grand-père, mais l’arme est introuvable. Le policier glane quelques indices pouvant désigner un suspect, pourtant ils ne lui paraissent pas vraiment significatifs…

 

C’est un délicieux court roman d’énigme que nous présente ici Camilla Läckerg, une des reines du polar nordique. La mort qui rôde sur une île coupée du monde extérieur, voilà un thème classique depuis les Dix petits nègres d’Agatha Christie, souvent imitée. Histoires traditionnelles, dont les lecteurs acceptent le postulat d’isolement, ainsi que la tournure quasi théâtrale.

Si le défunt Ruben fut un admirateur de Sherlock Holmes, l’enquêteur se sent plutôt empêtré dans une tragédie familiale qui l’agace. Tous visaient évidemment l’héritage, mais Martin évite de porter ses soupçons sur tel ou tel. Des intermèdes nous révèlent les réactions des uns, les petits ou grands secrets des autres. Récit parfaitement dosé, qui progresse sous la tempête persistante bloquant les invités. On peut penser que si l’auteure ne différence pas un revolver d’un pistolet, cela fait aussi partie du jeu. Car il s’agit bien d’une comédie à suspense, fort agréable à lire.

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8 novembre 2011 2 08 /11 /novembre /2011 06:55

 

Chez Albin Michel, Le testament des abeilles de Natacha Calestrémé nous plonge dans une affaire criminelle particulièrement insolite et meurtrière…

Quadragénaire d’origine basque, depuis vingt ans dans la police, le major Yoann Clivel dirige une équipe de la P.J. parisienne. Une vocation probablement née à la suite du décès suspect de son père. CALESTREME-2011Dans cette affaire jamais éclaircie, il était le seul à posséder un indice crucial. Aujourd’hui Yoann, Christian Berckman, le jeune Marc Honfleur, et la brigadier Jane Velin, sont confrontés à une étrange série de meurtre. Un enquête qui sera fatalement confiée à la Crim’ et non à leur service, mais que Yoann suit de très près. Au risque d’entrer en conflit avec son ancien meilleur ami, haut responsable de la Crim’. Le juge d’instruction va se montrer compréhensif, couvrant des discrètes investigations de Yoann.

La série débute par un triple meurtre, un père de famille sorti nu de sa douche ayant tué son épouse et leur fille, avant de se suicider. Aucun mobile sérieux n’apparaît pour expliquer cet acte de folie. Puis, dans un immeuble de la rue du Moulin-Vert, on dénombre treize victimes. Dont une femme qui s’est défenestrée et un reporter enquêtant sur des dossiers sensibles. C’est ensuite dans une tour du 13e arrondissement que vingt-huit personnes meurent de façon énigmatique. Officieusement, Yoann collecte quelques indices, telles les professions similaires de plusieurs victimes. Un lotus symbolique gravé sur un mur ou tagué sur un autre, à proximité des lieux des crimes, mérite d’être aussi retenu. Il ne faut pas exclure la piste du bioterrorisme, ni celle du chamanisme ou des magnétiseurs.

En effet, depuis quelques années, circule sur les forums d’Internet une prophétie bien difficile à interpréter. Sans doute fait-elle référence à la mort des abeilles, et on a quelques informations sur son auteur, mais ça reste confus. Yoann doit un peu ruser afin de sympathiser avec le magnétiseur Deronne. Celui-ci, qui a bien connu l’auteur de la prophétie, peut certainement offrir d’autres hypothèses au policier. Pour interpréter ce message, il faut sûrement se souvenir que c’est l’ingérence des humains dans la nature qui cause toute catastrophe. Yoann est vite attiré par Alisha, la fille de Deronne, mère du petit Nathan. Alisha étudie les abeilles et, à l’image de son père, fait preuve d’un grand respect pour la nature.

Pendant ce temps, le Dr Lentoine est consulté via Internet par une personne se faisant appeler Eliaz. Ce patient souffre d’un eczéma, avec de violentes crises. Il est incertain d’en définir l’origine, l’agoraphobie sévère et le délire paranoïaque d’Eliaz n’exprimant que les effets de son mal. Néanmoins, le Dr Lentoine réalise peu à peu la dangerosité du patient. De son côté, des OGM au fils disparu de l’auteur de la prophétie, Yoann explore toutes les pistes possibles. L’étonnante maturité du petit Nathan, le fils d’Alisha, lui semble fort troublante…

 

L’être humain tire sa force de la nature, son énergie vitale dépend donc de son environnement. Voilà des décennies que nous détruisons, au risque d’entraîner le déclin de l’humanité. Ce raisonnement peut-il aboutir à des actes criminels, s’appuyant une sorte de testament non pas absurde mais interprétable ? Peut-on s’identifier aux abeilles tueuses qui se défendent pour survivre ?

C’est un roman au suspense sinueux que nous présente Natacha Calestrémé, par ailleurs journaliste, s’étant informée auprès de scientifiques sur ces questions. Un thème actuel, très bien servi par une forme policière classique. Enquête parallèle, et rivalité entre PJ et Brigade Criminelle, ajoutent un peu de piment. L’ombre d’un malade mystérieux, probablement insoignable, tout autant. La fluidité narrative d’une intrigue plutôt solide, et les arguments en faveur du respect de la nature, se complètent avec harmonie. Une histoire à découvrir…

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6 novembre 2011 7 06 /11 /novembre /2011 06:55

 

J’aurai l’occasion de chroniquer prochainement le roman de François Darnaudet Au château d’alcool (Coll.Rivière Blanche, Éd.Black Coat Press). L’ami Pascal Polisset ayant été plus rapide à le lire, je lui cède volontiers la place pour qu’il nous fasse part à sa manière de ses impressions sur cette histoire :

 

DARNAUDET-2011«  Bon, ben, çà , c’est fait !”.

C’est sur ce lapidaire commentaire intérieur que Dugommier posa sur son bureau, envahi de piles de livres, le dernier roman de François Darnaudet.

L’aigre et lente sonnette du piano, où mitonnait une langue de bœuf charcutière, venait juste de l’appeler : ting… tong… ting… tong.

Il lui faillait passer à ce moment précis où la sauce doit être acidifiée d’une cuillère à soupe de câpres et d’une dizaine de cornichons coupés en rondelles de cinq millimètres. Encore trois à cinq minutes et le mets sera mis à table…

Dugommier, en garnissant chaque assiette, se dit qu’on a beau se targuer de qualités cuisinières, reste toujours ce moment où chaque convive hume, goûte, mâche, regarde ailleurs avant que d’un souffle, d’un regard complice, d’une mâche silencieuse, le verdict tombe. C’est le moment qu’il choisit, fier et tout de même inquiet, pour servir sa botte secrète : un Cahors, Le «Clos Siguier» 2007. »

La cuisine c’est comme l’écriture ; c’est -quand même- quand le plat est apprécié qu’on peut prétendre écrire une, voire des recettes.. C’est au pied du piano, qu’on estime le gâte-sauce… Non ?

J’ai lu en quelques heures, mais aussi en quelques jours le roman de François Darnaudet.

Le narrateur, critique de cinéma (horreur, malheur me chante l’Orchestre du Splendide…) et, qui plus est, écrivain se trouve embarqué dans l’écriture de la fin d’un scénario. Une bande d’écrivains non spécialisés dans le genre (Horreur, non ! Polar, oui !…), mais amis d’icelui, mettent sur sa table d’écriture, un pactole dont il a besoin. Julien Gras s’y colle en même temps qu’il va mener une enquête sur un film d’horreur qui.. a tué ses rares spectateurs… La suite à lire…

Oui, j’ai lu d’une traite ce roman, j’ai aimé (de nouveau) l’écriture de l’auteur : pas de fioritures, la cadence de chapitres courts et cinglants, un humour à la fois potache et cultivé. Il invite le lecteur à se promener dans l’univers d’un Paris zarbi..qu’il peint de quelques traits…

Oui, j’ai aimé ce narrateur à la fois paumé et terriblement sûr de lui, prêt à aller jusqu’au bout de ses amours et vérités..

Oui, j’ai aimé l’habile histoire bien qu’elle souffre d’un défaut : elle méritait d’être moins maligne, plus aboutie, plus radicale.

L’auteur, je le pense, a eu peur de sa création artistique. Il s’est mis sous les fourches caudines de références amicales (trop de noms compliqués – des alias inutiles - qui cachent mal des clins d’œils affectueux…).

Maintenant et j’en reviens à la métaphore culinaire, suis-je bien autorisé à critiquer ce roman ? Ne suis-je pas, après tout, qu’un convive particulier, attablé chez l’auteur ?

De toute façon, j’ai vécu ce roman comme un moment unique de belle lecture à laquelle je vous invite, quitte à vous demander de croiser votre avis et le mien.

Pascal Dugommier Polisset. »

 

Par ailleurs, Pascal Polisset a déjà évoqué ici le livre de Didier Daeninckx "Missak" ainsi que deux romans de Patrick Mosconi.

On peut aussi lire ma chronique sur "Les ignobles du bordelais", un épisode du Poulpe écrit par François Darnaudet.

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Toutes mes chroniques, résumés et commentaires, sont des créations issues de lectures intégrales des romans analysés ici, choisis librement, sans influence des éditeurs. Le seul but est de partager nos plaisirs entre lecteurs.

Spécial Roland Sadaune

Roland Sadaune est romancier, peintre de talent, et un ami fidèle.

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