Je n’évoque pas aujourd’hui un roman, mais un faits divers d’une gravité que peu d’officiels
semblent mesurer. Je veux parler du quasi-lynchage d’un innocent à Brest, par une quinzaine de personnes. Les faits sont relatés en détail par Alain Coquil dans le journal Le
Télégramme du 30 novembre, sous le titre : "Le soupçon de pédophilie fatal au retraité"
« Un retraité âgé de 65 ans est décédé lundi [28 novembre] en fin d'après-midi à Brest, lors de son
interpellation par la police. La victime avait été prise à partie par une quinzaine de parents d'élèves qui le soupçonnaient d'être «un pervers».
Ce sexagénaire, ancien employé de DCN, n'avait aucun passé judiciaire. «Il n'était pas défavorablement connu de la police, ni des gendarmes et n'avait aucun
antécédent en matière sexuelle. Et je ne vois pas quelqu'un commencer à avoir ce type de comportement à 65 ans», précisait, hier matin, le commissaire central Daniel Ansellem. La victime, placée
sous curatelle, n'avait semble-t-il qu'un tort: celui de présenter «une allure négligée» souligne le commissaire.
Le vendredi 18 novembre, une jeune maman venue chercher ses enfants à l'école maternelle publique Auguste-Dupouy,
dans le quartier de Kergoat, a quitté des yeux sa petite fille âgée de 3 ans. Cette dernière s'était retrouvée seule, égarée à quelques dizaines de mètres de l'école. L'homme lui a alors pris la
main et s'est dirigé vers l'établissement scolaire. Il a rapidement rendu la petite fille à une jeune femme, proche de la maman. Tout en serait sans doute resté là, sans l'intervention d'une
riveraine, inquiète de voir l'homme «qui ressemblait à un SDF» en compagnie d'une petite fille. Et la rumeur s'est vite propagée qu'un «pervers» rôdait dans le quartier. Bien que n'ayant rien
constaté d'anormal dans le comportement du sexagénaire, la maman, «a suivi les conseils du directeur de l'école», toujours selon la police, et est allée signaler la disparition momentanée de sa
fille et l'intervention du retraité au commissariat de Bellevue, une semaine plus tard. «Elle n'a pas déposé plainte, mais seulement une main courante signalant les faits», précise le patron de
la police brestoise.
16h40, ce lundi. Police Secours reçoit un appel d'une personne se disant «parent d'élève» et expliquant qu'un
«pervers sexuel» vient d'être bloqué dans un hall d'immeuble, près de l'école Dupouy. Un équipage de trois policiers se dirige aussitôt au nº1 de la rue Capitaine-Lelièvre, un immeuble situé à
une centaine de mètres de la maternelle. C'est là que demeurait le sexagénaire. «Sur place», raconte le capitaine Kerdraon, l'un des enquêteurs, «nos collègues ont vu un attroupement d'une
quinzaine de personnes entourant un homme, dans le hall. Il y avait une bousculade. L'homme se défendait. Les policiers ont sorti l'homme. Ils l'ont menotté et fait rentrer dans le fourgon. Il
respirait difficilement. Tout à coup, il s'est effondré et a perdu connaissance. Les policiers lui ont alors enlevé les bracelets et l'ont allongé sur le sol, avant de lui pratiquer un massage
cardiaque». Arrivés entre-temps sur les lieux, les pompiers, puis une équipe du Samu prendront le relais. En vain. À 17h50, le décès était constaté. «La victime est peut-être décédée du stress
provoqué par les événements», avançait, hier matin, le commissaire Ansellem, ajoutant : «La rumeur, ça peut vous tuer un homme. On en a la preuve!». L'autopsie, pratiquée hier après-midi, a
conclu à «un arrêt cardiaque et n'a pas révélé de traces de coups», selon le parquet de Brest, qui écarte toutes suites pénales. Plusieurs auditions de
témoins sont néanmoins prévues dans les heures qui viennent. «L'enquête devra dire pour quelle raison exacte ces gens s'en sont pris à la victime» précise le parquet. (Source).
Pour être complet, ajoutons cet extrait d’article du journal Ouest-France (1er décembre 2011) :
« Pour le procureur, il est «légitime que les gens soient attentifs. Mais il faut rester prudent et serein». S'il
n'avait pas été pris à tort pour un pédophile, puis poursuivi dans la rue, Jean-Claude Basset ne serait sans doute pas décédé. «Il est mort d'un infarctus et de la rumeur», résume tristement
Bertrand Leclerc. Y aura-t-il des suites judiciaires ? «On verra, répond le procureur. Pour le moment, cette question est prématurée. Il y a une différence entre la dénonciation calomnieuse et la
méprise, qui peut se faire de bonne foi.» (Source).
Pas de suites pénales ? Une victime, mais pas de coupables ?
Un homme est mort à cause d’insinuations calomnieuses, tombant sous le coup de la loi. Cette rumeur cultivée par des
personnes malveillantes, s’est-elle répandue sans arrière-pensées ? Des gens ont-ils voulu lui nuire, car son aspect ou sa présence dans le quartier leur déplaisait ? Ces gens l’ont implicitement
tué.
Une quinzaine d’hystériques l’ont attaqué, pris en otage. Faut-il encore parler de parents d’élèves ou de mamans
inquiètes, alors que ces furies ont pourchassé un homme qui ne présentait aucun danger, ni ne manifestait aucune menace ? Elles ont causé sa mort.
Méprisant la présomption d’innocence, prenant ainsi le parti des "mères de familles", des policiers l’ont mis en
état d’arrestation avant toute explication. Pourquoi menotter et embarquer un homme agressé par quinze personnes ? Certes, les policiers doivent réagir vite, mais pas sans preuves.
Le dépôt d’une main courante aurait dû suffire à faire cesser les rumeurs injustifiées. Une immédiate et rapide
enquête de moralité aurait disculpé la victime de ces sales rumeurs. N’y a-t-il pas eu faute ?
Cette affaire est symbolique de la propagande sécuritaire et alarmiste menée en France depuis longtemps. Elle est
exemplaire de la méchanceté viscérale des imbéciles, ces "cerveaux disponibles" abrutis par les médias. Qui peut croire qu’il s’agisse juste d’une "erreur" de la part des témoins ?
Jean-Claude Basset, un brave homme sans malice désigné comme coupable sans raison, est mort à Brest lundi 28
novembre 2011 : le devoir du Parquet de Brest est de ne pas laisser se refermer le dossier, de définir les responsabilités, de faire condamner tous ceux qui ont créé les conditions de ce
décès.
C’est-ce que l’on nomme la Justice.
Un cas similaire dans les Landes ?
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