Olivier Cousin vient de publier chez Liv’Éditions son quatrième roman, un polar historique intitulé "Les enchaînés de Landouzan". Petit résumé de cette intrigue, avant l’interview que l’auteur a accordé à Action-Suspense.
Printemps 1583, en Bretagne. Né dans une modeste famille paysanne, le jeune Jacques Blanc est devenu barbier-chirurgien aux armées royales, avec le titre envié de docteur. Il a repris
le nom de son noble maître à penser, se nommant désormais Jacques de Lottin. Alors qu’il se trouve à Saint-Brieuc, il est appelé par le sénéchal de la région de Lesneven. Jacques de Lottin
effectue le trajet à pied entre les deux villes. Arrivé à Lesneven, les officiels du château lui expliquent la situation. Successivement, trois cadavres ayant la tête brûlée ont été découverts
enchaînés près de la chapelle de Landouzan. Au Noël précédent, déjà, on avait trouvé un corps ainsi mutilé au même endroit. L’autopsie des trois corps révèle de minces indices concernant les
brûlures.
Ici, on raconte encore la légende du dragon de saint Touzan, qui aurait été enchaîné à cet endroit. Si le clergé
impressionne la population avec ces superstitions, Jacques de Lottin ne se laisse pas abuser. Le procureur et le curé de la paroisse ne cachent pas leur hostilité au médecin. Par contre, le
chapelain du château lui offre un soutien, en la personne du jeune moine Thénénan. Jacques remarque que la route bordant la chapelle est assez fréquentée, ce qui suppose que l’assassin agit avec
prudence. Aidés par la chance, Jacques et Thénénan repèrent près de la chapelle un trio de malandrins préparant quelque mauvais coup. Les trois brigands résistent à leur interpellation, blessant
Thénénan, tandis qu’un des bandits est tué. Jacques doit soigner le moine dans un moulin proche, où il tombe sous le charme d’une belle jeune femme. Pendant ce temps, les voleurs rescapés sont
arrêtés. Bien qu’ils ne soient pas des tueurs, le duo est vite jugé et condamné. Leur exécution ne met pas un terme à l’affaire, car il y a bientôt d’autres victimes…
Le sinueux parcours de vie du héros apparaît très crédible. Le contexte est reconstitué avec soin, sans inutile excès d’érudition. À l’aise dans ses descriptions, l’auteur nous offre une
narration fluide, avec de nombreuses et palpitantes péripéties.
L’auteur répond maintenant à quelques questions.
Pour ton quatrième roman, un polar historique situé dans la Bretagne des années 1580, ton héros est Jacques Blanc de Lottin. Présente-nous ce héros?
Olivier Cousin : Un drôle de coco ! Attachant et agaçant à la fois, j’espère. Comme tout un chacun. C’est un fils de fermier de la région de Saint-Brieuc qui devient
barbier-chirurgien parce qu’un jeune seigneur local, impressionné par sa dextérité, décide de le former. Lui-même est un émule d’Ambroise Paré. Grâce à ce maître et sa fréquentation des champs de
bataille, il se spécialise dans les blessures par la poudre et le feu. Il a plusieurs passions : les vilaines blessures, les vers (les asticots qui servent à soigner et, évidemment, les vers
poétiques), sans oublier les femmes… Physique quelconque et sagacité un peu au-dessus de la moyenne. Un chirurgien peut facilement être appelé sur des scènes de crime et lorsque celui-ci possède
ce côté « humaniste qui veut tout savoir », facile de le pousser à enquêter…
On peut imaginer que tu t’es basé sur une solide documentation pour évoquer cette époque assez lointaine ?
O.C. : Pas spécialement dans le but d’écrire ce livre-là. J’ai toujours aimé la Renaissance. Je lis souvent des poètes du 16ème ou des textes qui ont trait à cette période et, au fur et à mesure, j’ai inconsciemment engrangé des informations et des idées qui ont fini par vouloir se mettre ensemble… Jacques de Lottin doit sa naissance à un faisceau de trucs disparates qui me sont passés par la tête à un moment ou à un autre. Mais bien sûr, une fois que l’intrigue est née, j’ai réactivé mes connaissances, comme on dit, et j’ai lu des choses nouvelles sur cette époque raffinée et brutale à la fois.
En ce temps-là, les légendes et croyances diverses sont vivaces ?
O.C. : J’imagine. Aujourd’hui l’irrationnel n’a pas disparu, alors qu’est-ce que ça devait être au 16e siècle ! Quoi qu’il en soit, j’aime beaucoup mêler une légende avérée (ou inventée mais dans le style de celles qu’on connaît) à une fiction. Je l’avais déjà un peu tenté dans "Les Muets de Trécorbier", qui n’a rien d’un polar historique, celui-là. Et puis la Bretagne est si riche en légendes que ça me paraît impossible de ne pas m’y référer, directement ou indirectement quand j’écris une intrigue qui s’y déroule…
C’est aussi une époque ou brigands et malandrins sont nombreux, où il est dangereux de voyager ?
O.C. : Je me demande s’il n’est pas plus dangereux de voyager de nos jours ! Même si je me sers de malfaisants qui attendent leur heure au bord des routes, il faut éviter de tomber dans les clichés faciles du "bandit des grands chemins". Au romancier de trouver mieux.
Ton héros est sensible à la poésie, ce qui le rapproche de toi ?
O.C. : Oui, bien sûr. C’était un de mes défis : inclure pas mal de petites choses sur la poésie – parce que j’aime beaucoup en lire aussi bien qu’en écrire – dans un roman qui soit tout de même une mécanique à suspense la mieux huilée possible. Et puis ça permet de montrer la richesse de la poésie de cette époque ; "Mignonne allons voir si la rose" et "Heureux, qui comme Ulysse…" c’est bien, mais la poésie de la Renaissance ne se réduit pas à Ronsard et Du Bellay, loin s’en faut ! Pour s’en rendre compte, il suffit de relire Papillon de Lasphrise par exemple, qui devient d’ailleurs un personnage du roman.
Il y aura de futures aventures de Jacques de Lottin ?
O.C. : La seconde est assez bien avancée. Une troisième germe déjà, assez loin au fond de ma caboche. Après on verra. Ce qui est certain, c’est que j’ai conçu le personnage avec l’idée de le réutiliser – et ça a été une première pour moi de créer avec cette arrière-pensée. Le personnage m’intéresse et je suis moi-même curieux de découvrir où il peut me conduire. Mais je travaille aussi parallèlement à un roman contemporain.