C’est une très agréable comédie policière que nous propose Sylvie Callet, avec son nouveau roman “Un petit jaune” (Les Presses du midi, 2009). Une intrigue à la fois souriante, entraînante et, surtout, fort bien écrite.
Intermiteux du spectacle plus que comédien, homme d’âge mûr usant encore de son charme, Jo vivote paisiblement à Toulon.
Il loge dans une maisonnette sur la propriété d’une amie. Celle-ci, Florence Thomasson (dite Flo), est lieutenant de police. Jo est un habitué du bar de son ami Bèbe, un troquet “quasi invisible,
encoigné dans l’angle d’une rue malodorante.” Ancien taulard, se contentant d’une rare clientèle, Bèbe cherche lui aussi la tranquillité. Ce soir-là, Jo a rendez-vous dans ce
bistrot avec la jeune Tristane, croyant en ses chances de la séduire. Quand elle commence à déballer ses confessions, Jo comprend que c’est une chieuse. Il s’en fiche de ce David, son petit ami,
minable dealer que Tristane surnomme D.Joyce. Il n’est pas plus intéressé par la parano de la jeune femme, accusant son père et sa belle-mère de vouloir l’éliminer. Ne tardant pas à planter là
cette gamine un peu paumée, Jo va se coucher avec deux somnifères.
Le lendemain matin, on découvre le cadavre poignardé de Tristane sur une plage. Flo enquête sur le meurtre, semblant disposer de peu d’éléments. C’est par le journal que Jo apprend que David est fortement suspecté. Jo pourrait l’être aussi, car la victime a laissé une flopée de messages hurlants sur son répondeur. Il est urgent de planquer la cassette. Au bar, Bèbe émet des doutes sur l’innocence de son ami, Jo étant un des derniers a avoir vu Tristane vivante. Ni l’un, ni l’autre ne croient en la culpabilité de David, version trop idéale. Jo se promet d’être le premier à retrouver le jeune dealer. Bien qu’Ahmed et sa bande fassent barrage, il parvient à rencontrer David dans la cave où il se cache. Celui-ci nie avoir tué. Il raconte sa dispute en fin de soirée avec Tristane. Plus tard, il a aperçu l’assassin avant de trouver le corps. Impossible pour lui d’aller voir les flics. Justement, la police cerne les lieux et arrête David. Jo file discrètement.
À l’insu de Flo, Jo continue ses investigations. Il a bien connu la belle-mère de Tristane, qui a épousé Michel Le Vève, cuisinier de renom. Jo suggère à Flo qu’ils feraient de bons suspects. L’autre piste, c’est le job de Tristane chez “SexHôtel”, téléphone rose et autres services. Avec l’aide de son amie prostituée Marvella, Jo obtient l’adresse de cette société. Rien de bien scabreux, semble-t-il. Mais une copine de Tristane lui offre des renseignements sur un pervers qui harcelait la victime…
Un peu flemmard, un peu désabusé, Jo est un héros réellement sympathique. “Elle tourne en rond en se regardant le nombril, la société. Et on voudrait que je lui sois utile ! A-t-elle jamais levé l’ombre d’un petit doigt pour moi ? Looser tu es, looser tu resteras, voilà l’unique message qu’elle m’a délivré, la société.” Néanmoins, le voici lancé dans une affaire criminelle pas si simple. Détective amateur, s’imaginant Humphrey Bogart ou Columbo, il peut sortir son flingue (factice) pour bousculer ses adversaires, façon flic cow-boy. Brave homme, Jo n’est pas exempt d’états d’âmes, non plus…
Tout en gardant une tonalité souriante et légère, ainsi qu‘un tempo adéquat, Sylvie Callet apporte un grand soin à la
manière narrative. “Je sortis sur ma terrasse où un mistral frisquet faisait tanguer les nuages, et me mis à faire des vocalises en montant progressivement dans les aigus, histoire de me pénétrer
de mon personnage (…) — Oh ! Jo, tu t’entraînes pour le rôle de la Castafiore ? me demanda la fliquette avant de grimper, allègre, dans son Babybel mobile.” Un petit polar convaincant, qui se lit
avec grand plaisir.
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