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25 novembre 2010 4 25 /11 /novembre /2010 07:07

 

Après nous avoir fait connaître Maurice Batignol dans Le monde est plein de polissons, Nelly Bridenne nous donne de ses nouvelles, avec Sur un petit air de requiem.

Puisque ce recueil de nouvelles est une sorte de musée vivant, ça mérite une petite visite guidée. Dès l’entrée, la Négritude est évoquée à travers le sort d’un clandestin ayant péri, d’un dealer du Queens qui a sombré, et de ceux qui ont lutté pour les droits des Noirs. Plus loin, on voit aussi que des hooligans nazillons occupent encore les stades. Découvrons ensuite le portrait de ce mafiosi repenti, par obligation mais pas sans amertume, et de cette mule colombienne du trafic de drogue, facilement repérable comme tant d’autres passeurs. Beaux portraits aussi de quelques braqueurs peu brillants, que nous avons ici. BRIDENNE-2Voici maintenant l’espace consacré à la sécurité, que l’on surnomme commissariat. On y croise des personnages colorés, qui ne sont pas tous adeptes de la bavure.

Dans cette exposition que nous visitons, un coin est réservé aux mutants. Il est vrai que certaines vies sont en décalage avec la normalité. Ah ! La salle des embrouilles nous attend. On y retrouve nos amis fachos déjà aperçus dans les stades. Ceux-ci se félicitent d’être aussi efficace quand ils persécutent des homos. La dangereuse mission de deux inspecteurs du travail au cœur des vignes, et la malencontreuse chute d’une dame âgée, complètent cette partie de l’expo. Prenons le temps d’apprécier ici le tableau nous décrivant un religieux, star médiatique du caritatif, qui n’a vraiment rien d’un saint. L’image suivante traite des ravages du temps et de l’alcool, non sans conséquences. On y aperçoit le lieutenant Columbo et l’ombre de sa femme.

La visite se termine par les pièces consacrées aux seniors, le terme de vieux étant prohibé ici comme ailleurs. Pas si âgé, Martin est bien seul devant sa télé. À l’opposé, les Journées du Patrimoine permettent de se remémorer la vie de trois marquises, sous l’œil intéressé d’un certain Bruno. Là, un drôle d’oiseau nous commente la vie en maison de retraite. Pour finir, autre version de cet univers des résidences pour personnes âgées. Ainsi s’achève notre visite, n’oubliez pas le pourboire, s’il vous plait…

Nelly Bridenne fait partie de ces artisans créatifs qui se disent en entamant de nouveaux chantiers : il faut que ce soit de la belle ouvrage, le meilleur résultat possible. Dessinant ses portraits et sculptant ses textes, elle s’inspire autant des maux de la société que des faits divers. Intolérance, agressivité et médiocrité se traduisent souvent dans les actes. Il est bon de les mettre en scène, peut-être en perspective, pour se souvenir que cela n’a rien d’anodin. L’éternel racisme ou la chasse aux gays, la solitude des vieux ou les exploits minables de braqueurs, ce sont là des situations banalisées, à tort. Souvent souriantes, pas forcément au premier degré de lecture, ces nouvelles expriment une tonalité malicieuse, satirique ou enjouée selon les cas. Un très agréable regard sur le monde et ses inévitables travers.

  

On contacte l’auteur sur son site : www.confessionsdunpolisson.fr 

 

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24 novembre 2010 3 24 /11 /novembre /2010 06:55

 

Le roman de Jacques Savoie Cinq secondes, qu’il n’est pas difficile de se procurer en France, a reçu en septembre 2010 le Prix Saint-Pacôme, récompense majeure de la Littérature québécoise. Distinction méritée, pour un suspense de très belle qualité. (aux Éditions Libre Expression)

Jérôme Marceau est enquêteur au Service de Police de la Ville de Montréal, section des homicides. Si ses collègues le surnomment Aileron, c’est que ce policier quadragénaire ne possède qu’un seul bras, le gauche. Sa peau basanée de mulâtre est aussi assez remarquable. Expert en documentation informatique, Marceau connaît à la perfection le métro et le réseau souterrain de Montréal. Sa mère culpabilise toujours à cause de son handicap, causé par un médicament. En l’absence de sa supérieure, Lynda Léveillée, il va diriger le service. Il sera assisté des policiers Corriveau et O’Leary, tandis que l’enquêteure Isabelle Blanchet se chargera de l’informatique. Ils sont bientôt confrontés à une tuerie. Au Palais de Justice, une femme vient d’abattre quatre personnes et a tenté de se suicider. Elle est depuis dans le coma à l’hôpital Saint-Luc, où on espère qu’elle s’en sortira.

SAVOIE-2010L’audience au Tribunal s’annonçait pourtant vite réglée. L’accusation de fraudes était abandonnée contre Julie Sanche, seule restait celle de prostitution. L’avocat Denis Brown avait tout arrangé, même l'entrée discrète de l'accusée dans le tribunal. Soudain, la jeune femme de 26 ans s’est emparée d’une arme, abattant en quelques secondes le gardien de sécurité, le juge Rochette, le témoin Gilbert Bois, et l’avocat Brown. Selon les premiers éléments, la tireuse s’appelle plus certainement Brigitte Leclerc. Ce qu’ignorent encore les enquêteurs, c’est que sa jeunesse fut mouvementée. À seize ans, elle fut arrêtée après des braquages. Quand elle sortit de prison, son père lui conseilla d’adopter l’identité de Julie, la défunte sœur de Brigitte. Une manière d’attendre quelques années sa réhabilitation, le Pardon de Justice. Mais Carl Leclerc était un trafiquant chevronné, qui entraîna sa fille Brigitte dans ses arnaques.

Jérôme Marceau doit se montrer prudent car la veuve du juge Rochette, Évelyne Lebel, est elle-même un magistrat influent. Son équipe et lui ne tardent pas à perquisitionner à l’adresse du père de la jeune femme, mort depuis peu. On y trouve un stock d’articles digne d’un entrepôt commercial. La véritable adresse de Brigitte, Marceau va la trouver sur un reçu de livraison de pizza. Pour une supposée puéricultrice virée de son emploi après une drôle d’affaire, voilà un bien bel appartement, propriété de la société Brigitte Julie Inc. Si sa vie a été un ramassis de mensonges et d’escroquerie, encore Jérôme doit-il en démêler les nœuds. Pour son collègue O’Leary, la raison du carnage est simplement liée à la fortune frauduleuse amassée par Brigitte et son père. Marceau est convaincu que le geste de la tireuse a obéi à d’autres motifs. Malgré la tempête qui sévit sur la ville, il poursuit son enquête avec ténacité et clairvoyance…

 

Il se demandait combien de temps il faut pour revoir une vie. Cinq secondes, ça lui paraissait bien court.Dévoiler que le titre répond aux cinq secondes durant lesquelles la tueuse voit défiler les étapes de son existence, ça n’est rien révéler. Car toute la subtilité de ces flash-backs consiste à suggérer ses divers mobiles, à travers le parcours chaotique de Brigitte. S’il s’agit d’une jeune femme déterminée, son caractère profond est plus nuancé.

Bien sûr, le singulier enquêteur est un héros fort attachant, par son humanité comme par son intuition. On prend plaisir à le suivre dans les corridors du Montréal souterrain. Prouver qu’il est capable de mener à bien ce dossier, s’attirer le respect de ses collègues, et comprendre les méandres de l’affaire, tels sont ses buts. Vaste défi, on est de tout cœur avec lui. Précisons aux lecteurs français qu’au Québec, un dépanneur signifie une épicerie, s’incorporer veut dire créer sa société, un condo c’est un appartement dont on est propriétaire, une fournaise est un appareil de chauffage. Ce qui se traduit assez aisément, dans le contexte. Une excellente intrigue, précise et non dénuée d’humour.

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22 novembre 2010 1 22 /11 /novembre /2010 07:21

 

Varenne FakirSDu lundi 22 au dimanche 28 novembre, jouez et gagnez avec Action-Suspense et les Éditions Points.

À gagner, le roman d’Antonin Varenne “Fakirs”.

DIX GAGNANTS seront tirés au sort parmi les bonnes réponses. Chacun recevra un exemplaire de ce livre.

 

Les trois questions :

 

1- Quel est le nom du sheriff héros des

romans de Donald Harstad ?

Carl Houseman - Harry Callahan - Rosco P.Coltrane

 

2- Frédéric Lenormand est l’auteur des nouvelles

enquêtes de quel héros ?

Perry Mason - le Juge Ti - Sherlock Holmes

 

3- Lola Jost et Ingrid Diesel sont les héroïnes

de romans de quel auteur ?

Dominique Sylvain - Brigitte Aubert - Dominique Manotti

Prix polar Points 2010 

Adressez vos réponses et vos coordonnées* ici :

action.suspense@yahoo.fr

 

Pour vous aider, consultez le site de l’éditeur :

www.lecerclepoints.com

 

(*) Si vous avez participé à un précédent jeu, indiquez quand même vos coordonnées. Par confidentialité, ces informations sont supprimées à la fin de chaque jeu.

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20 novembre 2010 6 20 /11 /novembre /2010 07:30

 

L’avocat et auteur Dominique Inchauspé invite les lecteurs à la signature de son livre "L'erreur judiciaire" paru aux PUF. Rendez-vous le 2 décembre à la librairie Litec de la place Dauphine à Paris, derrière le Palais de justice, de 17h30 à 19h.

Voici la présentation de cet ouvrage :

« L’erreur judiciaire est, au pénal, une tragédie épouvantable. Elle déshonore tous les personnels qui y concourent : les juges qui ont commis l’irréparable les avocats incapables de la prévenir les enquêteurs désignant un innocent à l’opprobre de la justice. FINCHAUSPE-2010ondé sur l’étude de dizaines de décisions anglo-saxonnes et sur l’accès direct aux dossiers d’instruction français, cet ouvrage tente de comprendre les mécanismes d’une telle catastrophe par une comparaison entre les erreurs judiciaires des pays d’outre-Manche et d’outre-Atlantique et celles, réelles ou supposées, de la France. Les premières (par exemple, pour la Grande-Bretagne, les Birmingham Six; pour les États-Unis, Randall Adams; pour le Canada, Donald Marshall Jr, etc.) prouvent que la conception même de la procédure porte une responsabilité terrible dans les désastres judiciaires. L’étude des affaires françaises définitives (Seznec, Deshays, Dils, Omar Raddad, Outreau) et l’évocation de celles qui surviennent maintenant (Marc Machin, Dany Leprince) montrent ce que la vérité a d’insaisissable. Ce livre illustre aussi – et surtout – l’incroyable faiblesse humaine, celle des juges, des avocats, des enquêteurs et – on le découvre – celle des accusés. » (592 pages)

 

J’ai déjà eu l’occasion de souligner les qualités de romancier de Dominique Inchauspé, à propos de "Chaos Kanak" (Albin Michel, 2006)

Basque d'origine, Louis Cherbacho est avocat à Paris. Il est contacté par Nathaly Argan, vivant en Nouvelle-Calédonie. Il doit se rendre d’urgence à Nouméa, afin de régler un contentieux entre sa cliente et son associé, Vercholant. Plus âgé qu’elle, celui-ci est sans doute son amant. Sur place, l’avocat s’aperçoit que Nathaly a falsifié les cessions de parts de leur société. Surtout, il découvre le cadavre de Vercholant dans une glacière. En colère, Cherbacho veut quitter l’île au plus vite. Tandis que sa cliente est accusée de meurtre, l’avocat est aussi interrogé pour non-dénonciation de crime. Face à un policier accusateur, Cherbacho risque la détention. Mais la procédure d’enquête fut irrégulière. Ce qu’il exploite pour obtenir sa libération. L’avocat contre-attaque. La presse locale s'en fait l’écho. Pascal Lafoa est le chef du PKCC, des militants kanaks indépendantistes radicaux. Son rôle dans la mort de Vercholant reste obscur. Lafoa est l’autre amant de Nathaly. L’avocat est invité par le PKCC. Sur le plan politique, les Kanaks vont passer à l’action...

Quand un avocat pénaliste se débat en milieu hostile, ça donne de épidantes aventures judiciaires, plus souriantes que tragiques. Avec ardeur et astuce, il déjoue les accusations, tente de désamorcer une situation qui dérape. Derrière l’humour, Dominique Inchauspé souligne l’indispensable respect du Droit. C’est ce qui permet de s’opposer aux abus de pouvoir et de dénouer les crises, dans la légalité. Excellent roman.

 

Actuellement, le site Lejournalinutile diffuse à raison d'un chapitre par semaine, le premier livre de Dominique Inchauspé, paru il y a 15 ans. "Une saison immuable" fut la première aventure (en Afrique noire) de l’avocat Louis Cherbacho. A découvrir ici :

 http://www.lejournalinutile.com/we-love-it/lire/une-saison-immuable/article/une-saison-immuable-chapitre-10

 

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19 novembre 2010 5 19 /11 /novembre /2010 07:13

 

S’il faut classifier les livres, Satan Lake de Joanne et Gerry Dryansky (chez Actes Sud) n’est pas un polar. Néanmoins, s’agissant d’une affaire criminelle, il s’adresse tout autant aux amateurs du genre…

L’été 1984 marqua une étape capitale de sa vie. Angie se remémore les faits, et en imagine la partie dont elle ne fut pas témoin. New-yorkaise, Angie est alors une brunette de treize ans. Ses parents ont divorcé. Sa mère est une nympho, prête à toute expérience sexuelle. Ayant la garde d’Angie, son père est un quadra attiré par les jeunes femmes. Cet été-là, il envoie sa fille séjourner à Whitman. Une gentille petite ville dans le nord de l'État [de New York], du genre qui ne fait jamais parler d’elle. Rien qui traîne. Vos voisins vous dénoncent si vous ne triez pas vos déchet. À part ça, tout le monde est ami avec tout le monde. Employée chez Vinnie’s Pizza, Angie sympathise peu avec le pizzaïolo coréen, mais davantage avec le jeune livreur à vélo, Ross. Âgé de douze ans, Ross s’occupe affectueusement de sa mère, Irlandaise d’origine, atteinte depuis plusieurs années d’une maladie incurable.

DRYANSKY-2010Un meurtre suscite durant quelques jours la curiosité de la population locale. Le tueur a laissé sur place une vidéo de son crime. Le policier Will Stone, le père de Ross, et son adjoint Fred Canish sont bientôt appelés pour un nouveau meurtre. Là encore, la victime avait eu une relation sexuelle juste avant, et la vidéo de l’assassinat est sur les lieux. De quoi commencer à inquiéter les habitants. D’autant que la maire de Whitman ne croit guère que Will Stone soit capable de trouver le coupable. Et que Maury Wescott, animateur de la radio du coin, ironise volontiers sur l’affaire. Entre le cas de son épouse et la paranoïa de la policière Corinne Chandler, Will Stone essaie de n’oublier ni l’enquête, ni son fils Ross. L’adolescent n’a pas manqué d’organiser des surprises pour l’anniversaire d’Angie, ce qui les rapproche encore. Will Stone garde du temps pour rendre visite à son frère Charles, interné depuis longtemps en hôpital psychiatrique.

La froide bibliothécaire locale est abattue dans un motel tandis qu’elle jouait à la maîtresse sado-maso avec un homme. Aucun doute, l’assassin est le même. La police ne tarde pas à arrêter Thurston, le vendeur de vélos, probablement le seul véritable ami de Ross. Depuis quelques temps, Thurston tentait publiquement de séduire la victime. Supposément plus qualifiés, deux policiers de l’État de New York vont se charger de dossier. Pourtant, le cas de Mr Little, qui s’occupe de la chorale, va vite relancer l’affaire. Will Stone et Fred Canish n’ont aucun doute, c’est l’œuvre du même tueur à la vidéo. Quant aux mœurs de la victime, elles sont aisées à déterminer. Tout cela disculpe Thuston qui, en cette occasion, s’est rapproché de la policière Corinne Chandler. Tandis que Ross rencontre pour la première fois son oncle Charles, Angie se rend en bus à New York pour retrouver son père. Elle revient à Whitman, plus désorientée que jamais par ses parents.

Cette série de meurtres est consécutive à une cause originelle. Sur toutes les cartes et pour toutes les personnes étrangères à cette région, l’endroit se nomme Winthrop Lake, mais dans cette partie de l’État, les gens l’appelle communément Satan Lake. En dépit de multiples théories sur la question, nul ne pourrait dire précisément pourquoi. Sur les rives de Satan Lake, se situe sans doute une des principales clés de ces meurtres…

En toile de fond, c’est un portrait de l’Amérique vers la fin du 20e siècle qui est présenté. Une société au fonctionnement idéalisé, qui masque bien des hypocrisies. Le cas de l’oncle Charles (interné faute d’autre solution) ou le comportement de la policière Chandler (complexée se disant harcelée) n’en sont que deux exemples. Bien sûr, ce sont les ados Angie et Ross qui se trouvent au centre du récit. Ils vivent un épisode initiatique de leur vie. Face aux épreuves traversées, une prise de conscience se produit. Angie et ses parents égoïstes, Ross et l’agonie de sa mère, Will Stone et sa vie sans ambition : on pourrait y voir une réflexion sur la solitude. Ce que confirme finalement l’épilogue, peut-être un peu moraliste, mais qui ne gâche en rien l’ensemble du roman. Car, outre les thèmes abordés, il convient de souligner la qualité du scénario. Cette histoire est diablement bien construite, suggérant ou éludant habilement certains détails pour y revenir par la suite. Utilisant la maladresse supposée de la narratrice, les auteurs installent un captivant suspense autour du sort de chaque protagoniste. Une intrigue vraiment passionnante.

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18 novembre 2010 4 18 /11 /novembre /2010 07:23

 

Paru en 2008, le roman de François Caradec "Le doigt coupé de la rue du Bison" est réédité chez Le Livre de Poche en décembre 2010...

À l’angle de deux rues, le bistrot Le Boyard est le centre de ce quartier de Paris, quelques années après la fin de la guerre. Un jour, le chien du patron ramène le doigt coupé d’une femme. On alerte la police. Parmi les habitués, nombreuses sont les supputations sur l’amputation. On se demande si la victime est morte ou si, éventualité à la mode, elle a été découpée par des extra-terrestres. Ancien collabo ivrogne au langage très personnel, le policier Maurice n’a guère d’hypothèse à formuler. Son chef, Georges Pauquet, est le modeste commissaire du quartier. Au Ministère, où il est convoqué, on prend l’affaire au sérieux, on pense à la piste des sectes. Pauquet s’informe donc sur les sectes. Il s’interroge aussi sur la disparition de Mme Margaut, une voisine du Boyard.

M. Cherel et ses amis cultivent l’esprit anar. Dans le groupe, il y a Jean Jacquy, Le Grec, qui renseigne Pauquet sur d’improbables lucifériens. Les sectes sataniques ne sont pas rares, mais c’est de la mise en scène pour gogos. CARADEC-pocheÉsotérisme, petites religions, spiritisme, jouent sur la crédulité. Il y a aussi Paul, étudiant en médecine expert dans l’œuvre de Sade. Il y a encore Erik, avec sa chienne d’aveugle, et ses secrètes activités. Il y a enfin l’orphelin Pierre Levey, étudiant à l’École des Chartes. Il est obsédé par d’étranges rêves, qu’il estime prémonitoires, peut-être causés par le fait qu’il ignore tout de la mort de sa mère. Il fait du dédoublement onirique. C’est le neveu de Mme Margaut. Pierre est celui que cette affaire de doigt coupé intrigue le plus.

Mme Margaut n’a pas disparu. Elle est en voyage. Elle a rejoint son fils marin, Jean, en escale. Ce n’est pas n’importe qui, Mme Margaut. Dans cette guerre encore récente, elle fit preuve de caractère. Son réseau reste actif. Consultant un psychiatre pour l’enquête, Pauquet croise Pierre. Celui-ci renseigne le policier sur les sectes templières, qu’il étudie. Perquisitionnant chez sa tante, Pauquet a trouvé des documents sur l’affaire du doigt, d’autres sur 1944. Mais rien ne fait progresser les lentes investigations du commissaire. Peut-être les confidences de la chienne d’aveugle d’Erik lui seraient-elles utiles ?

N’imaginons pas une description nostalgique du Paris d’antan, dans ce bel exercice de style. C’est tout juste le décor d’un autre temps. Ici, une histoire peut en cacher une autre, plus sombre que la première. Mais probablement retient-on avant tout une évidente finesse d’écriture et la subtilité des jeux de mots : un cas de concierge, la copulation active, un prénom qui remonte au néolithique (Pierre), "est-ce ta minette qui sort de l’estaminet" ou "nous n’avons pas avancé d’un pouce dans notre enquête sur le doigt coupé." Peut-être y a-t-il aussi des allusions Oulipiennes plus personnelles. Soulignons autant le jeu sur la forme narrative (témoin impersonnel, conférence, dialogue, confession…) Et tout cela au sein d’une intrigue à suspense très réussie.

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17 novembre 2010 3 17 /11 /novembre /2010 06:58

 

Voici une chronique plutôt destinée aux lecteurs du Québec. En effet, il est difficile de se procurer en France le premier roman de Louise Penny, En plein cœur (Flammarion Québec, 2010).

Loin des routes principales, Three Pines est un paisible village campagnard dans les Cantons-de-l’Est. Quand le corps de Jane Neal est retrouvé dans les bois ce matin-là, la police est bientôt sur les lieux. Âgée de 76 ans, cette enseignante retraitée a éduqué bon nombre d’habitants de la bourgade. Selon les premières constatations, il pourrait s’agir d’un accident de chasse. Pilotée par une jeune recrue, l’agente Yvette Nichol, l’inspecteur-chef Armand Gamache rejoint sur les lieux son équipe de la Sûreté du Québec. Son adjoint Beauvoir confirme que la vieille dame a pu être transpercée par une flèche, mais on n’a rien découvert autour. Ben Hadley est le témoin qui a trouvé le corps. Il est très marqué, car Jane Neal était une amie de sa mère, Timmer Hadley, décédée de maladie voilà quelques semaines. L’ancienne enseignante ne semblait pas compter d’ennemis.

PENNY-1Épouse du peintre Peter Morrow, elle-même artiste, Clara est sans doute la plus choquée parmi les habitants. Elle partageait avec Jane Neal une amitié telle mère et fille. Son mari a des difficultés à la réconforter. Le cercle des proches de la victime réagit diversement. Poétesse réputée, Ruth Zardo ne masque pas son caractère vif. Olivier Brûlé, qui tient le bistrot local, et son compagnon Gabriel sont peinés, mais ne le montrent pas trop. Ex-psychologue à Montréal, la bouquiniste Myrna est la seule Noire de Three Pines. Armand Gamache rencontre l’héritière de Jane Neal, la fière Yolande, agent immobilier. Pas de tendresse à attendre de cette femme, qui interdit à la police de pénétrer chez sa tante. Du vivant de celle-ci, personne n’entrait chez elle, d’ailleurs. Sans être vraiment à suspecter, le mari et le fils de Yolande sont connus pour leurs actes délictueux.

À Three Pines, il y a un club de tir à l’arc, dont le siège se situe dans l’ancienne école du village. Curieuse coïncidence, peut-être. Mais ici, beaucoup de gens pratiquent la chasse à l’arc, avec du matériel plus ou moins récent. Ayant réuni la population, Armand Gamache ne tarde pas à le vérifier. La policière Isabelle Lacoste a retrouvé une pièce de la flèche mortelle. Par contre, Gamache n’est pas très satisfait de la jeune Yvette Nichol, brouillonne et trop peu investie dans l’enquête. Est-ce qu’un trio de jeunes perturbateurs du village aurait un rapport avec la mort de Jane Neal ? Fort incertain. Le testament de la défunte parait incontestable, laissant quasiment tout à sa sèche nièce Yolande. Le policier Gamache a repéré un vieil affût et un sentier d’animaux, peut-être en lien avec le crime. Matthew Croft, son épouse et leur fils adolescent sont des pratiquants confirmés du tir à l’arc. Ce qui fait finalement d’eux les principaux suspects…

PENNY-1-UK-Canada

 

Écrit par une Québécoise anglophone, ce roman d’enquête joue essentiellement sur les ambiances et la psychologie des protagonistes. C’est ce qui explique un tempo narratif plutôt lent, mais riche en précisions. Axée sur le décor villageois, l’histoire rappelle un peu certaines affaires de l’inspecteur Barnaby, le héros créé par Caroline Graham. Notable différence, toutefois : Louise Penny souligne moins les hypocrisies inhérentes à une communauté comme celle-là. Elle décrit plutôt l’aveuglement du groupe, qui ne soupçonne jamais un des siens. Grâce à l’harmonie qui règne dans la bourgade, anglo- et francophones, ruraux et ex-citadins, hétéros et homos, se côtoient sans problème. Pourtant, cet équilibre n’est pas exempt de zones d’ombre. Policier expérimenté et ouvert, Armand Gamache trouve progressivement sa place dans cette bulle paradisiaque. Au risque d’être provisoirement suspendu de ses fonctions, à cause de son empathie pour la population. Pendant ce temps, son équipe n’est pas inactive. Il faut donc accepter le doux rythme campagnard automnal pour pleinement apprécier cette belle intrigue. Ce roman a été récompensé par plusieurs Prix littéraires au Canada, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. Disponible au Québec, on espère qu’il sera prochainement diffusé en France.

www.flammarion.qc.ca

Cet article est dédié à l’ami Richard. Merci encore.

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16 novembre 2010 2 16 /11 /novembre /2010 06:53

 

Percutant, le nouveau roman noir de Michel Leydier ! Publié chez Pascal Galodé Éditeurs, Sex shot nous livre les plus répugnantes facettes du porno…

Parmi la population parisienne actuelle la moins glorieuse, il y a Max. Le bizness de Max, ce sont les films X. Il se vend quantité de films pornographiques, en France et dans le monde entier. Ceux de Max sont très particuliers. Ça pourrait ressembler à des histoires sado-masochistes ordinaires, extrêmes jeux de rôles entre adultes consentants. Quand on les visionne en entier, on comprend qu’ils dépassent le simple SM. Sur les tournages, le rôle du Maître est tenu par le pervers Reiner. Celui de sa complice est joué par Zinette. Âgée d’une vingtaine d’années, Zinette est une droguée à un stade déjà avancé. Une véritable junkie perdue, dont Max doit supporter les crises. Les tournages s’enchaînent. LEYDIER-2010Il y a tellement de fric à gagner. Chauffeur de taxi homo, Dorval est chargé de recruter des prostituées pour ces films. Leur comparse Wolianoff sert d’intermédiaire, caution du sérieux de l’organisation. Après les tournages, interviennent les cousins italiens Dox et Luigi. Tout un système efficace, qui bénéficie à Max et à celui qui commercialiste les DVD, l’Antiquaire.

En fréquentant les sex-shops de la rue Saint-Denis, François découvre que sa jeune sœur Zinette participe à ces films. Déjà fragilisé par l’état de santé de sa compagne, François se promet de sauver Zinette. Il ne peut pas compter sur leur frère, qui s’est éloigné d’eux. Seul, il va mener son enquête. Il commence par interroger le patron du sex-shop où il a visionné le film. François ne peut pas laisser de témoin derrière lui. De son côté, Dorval a rencontré une prostituée idéale pour les films. Anita, c’est le genre mère de famille. Il a bon espoir qu’elle accepte. À trop fréquenter le même quartier où plusieurs prostituées ont disparu ces derniers temps, Dorval est bientôt repéré par un proxénète. Sûr qu’il a causé la mort de sa protégée Samantha, le mac supprime le recruteur de Max.

Le policier Alain Blanche n’est concerné que par ce second meurtre. Il ne peut s’empêcher de le relier avec l’autre crime, commis à peu de distance. La mort du patron de sex-shop, c’est le domaine de Dubosq. Ce flic des Mœurs est un ancien collègue de promotion, dont Blanche n’apprécie ni le caractère, ni les méthodes. Il soutire quelques adresses à Dubosq, et tente de se faire passer pour un client amateur de films extrêmes. Aucun interlocuteur n’admet en vendre. Une bourde qui ne sera pas sans conséquences. Très mécontent, Dubosq interdit à Alain Blanche de s’occuper de son secteur. Tandis que Max incite Zinette à tourner encore quelques films avant de toucher le pactole, François poursuit son enquête mortelle. Localisant le comparse Wolianoff, les policiers tiennent sans doute une piste capitale. Pour la prostituée Anita, tourner ce film est un espoir…

Noir, très noir. Glauque, forcément sale. Prostitution ou sex-shops ne sont que la façade banalisée de la pornographie. Le marché du sexe obéit sûrement autant à des initiatives comme celles de Max, qu’à des réseaux organisés. Petit monde d’épaves, où même les pires moyens de croire s’enrichir ne rebutent personne. La violence est fatalement une des clés de cet univers. Auteur expérimenté de nouvelles et de romans, Michel Leydier confronte ses personnages à de sombres situations avec un réalisme convaincant. Dans les scènes les plus dures, on perçoit la volonté de l’auteur de ne pas en rajouter. Si nous sommes témoins de leur écœurement, ni François le justicier, ni aucun des flics ne sont des héros purement positifs. L’empathie n’est sans doute pas le but. Les moments plus légers sont rares. Leydier secoue ses lecteurs avec une histoire-choc, forte et brutale, au suspense très prenant.

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