Dans la collection Spécial Suspense chez Albin Michel, voici le
nouveau roman de Phillip Margolin : “En fuite”…
Une douzaine d’années plus tôt, Charlie Marsh était un petit escroc. En prison, il
retrouva son copain d’enfance, Freddy le Dingue. Sa protection n’était pas inutile pour l’escroc. Peu avant que Charlie ne soit libéré, Freddy improvisa une prise d’otages à la bibliothèque de la
prison. Afin que son ami ne soit pas abattu par les forces de l’ordre, Charlie accepta de jouer les intermédiaires. C’est ainsi qu’il intervint héroïquement pour préserver les otages. Ce qui, à
sa sortie, lui offrit une belle notoriété. Il publia un best-seller racontant une version enjolivée de sa vie, sous le nom de Gabriel Sun. Se disant habité d’une lumière intérieure qui le rendait
meilleur, il devint une sorte de gourou.
Grâce à des séminaires à travers le pays, en plus des ventes du livre, il gagna
énormément d’argent. Outre son agent et un garde du corps, Moonbeam, une étudiante marginale, l’accompagna quand il fut invité à Portland, dans l’Oregon. Il y rencontra la belle Sally Pope,
épouse d’un jeune sénateur. Charlie et Sally devinrent bientôt amants, le plus discrètement possible. Pourtant, un soir au country-club de Westmont, Charlie fut pris à partie par Arnold Pope Jr,
le mari. Lors de l’altercation, le sénateur fut abattu avec une arme appartenant à Charlie, ou plutôt à son garde du corps. Charlie parvint à prendre la fuite.
Sally Pope fut jugée en tant que complice, soupçonnée par son riche beau-père Arnold Pope Senior d’avoir manigancé le meurtre. Elle fut défendue par l’avocat Frank Jaffe, qui
démontra que plusieurs témoignages étaient fort douteux. Tandis qu’elle obtenait un non-lieu, Charlie Marsh s’était déjà installé au Batanga. Ce pays d’Afrique, qui ne pratique jamais
l’extradition, est dirigé par le sanguinaire Jean-Claude Baptiste. Au fil du temps, la position de Charlie fut de plus en plus précaire. Quand il apparaît évident que le président et son âme
damnée, Nathan Tuazama, savent déjà que Charlie a été l’amant de l’épouse de Baptiste, il doit trouver le moyen de fuit le Batanga.
S’adressant à Martha Brice, patronne du magazine World News, il va monnayer une
interview exclusive. Aidé par un mercenaire et suivi par un journaliste du magazine, il réussit à quitter l’Afrique. Martha Brice se charge de contacter la jeune avocate Amanda Jaffe, fille de
Frank Jaffe. Certes, les 500.000 dollars qui lui promet Martha Brice sont motivants, mais autre chose excite Amanda : “Quel coup d’éclat si elle parvenait à faire innocenter
Marsh comme son père avait fait innocenter Sally Pope !” Elle négocie la reddition de Charlie avec le procureur Burdett, qui s’est déjà occupé du meurtre de Pope, douze ans
auparavant. Celui-ci ne tarde pas à avertir Arnold Pope Sr. Rancunier contre Sally Pope, le vieux milliardaire pense tenir sa vengeance.
S’il faut s’attendre à des mauvais coups du clan Pope, Amanda Jaffe a aussi une équipe
efficace autour d’elle. Kate Ross, en particulier, étudie précisément le dossier. Sans doute le journaliste de World News est-il juste un peu encombrant. Mais, par ailleurs, il existe un vrai
danger pour Charlie. Nathan Tuazama, le second du président Baptiste, est aux Etats-Unis. Il veut récupérer les diamants que Charlie a emporté, destinés à un groupe de rebelles du Batanga, et
supprimer celui qui leur a faussé compagnie. Amanda a la lourde charge de disculper Charlie, face à des adversaires offensifs. Il risque d’y avoir quelques nouveaux crimes dans cette affaire.
Peut-être que la justice américaine ne saura jamais l’exacte vérité des faits sur la mort d’Arnold Pope Jr…
Résumer un suspense de ce romancier est un exercice très agréable. Même en offrant
beaucoup de détails, on en dit peu sur le contenu de l’histoire. En effet, avec son redoutable savoir-faire, Phillip Margolin nous a concocté une intrigue d’une subtile complexité. De l’acte de
bravoure assez relatif de Charlie Marsh, à la confusion qui règne autour de l’assassinat du sénateur, tout est raconté en finesse. D’autant qu’il existe ici deux procès, à douze ans d’intervalle,
dont les protagonistes ont évolué entre-temps. Justement, les personnages mis en scène par l’auteur sont habilement décrits, qu’il s’agisse d’un cruel dictateur africain ou d’un prof de tennis
ayant fait fortune, d’une patronne de presse ou des anciens complices de Freddy le Dingue… Tout ceux qui jouent un rôle, même moindre, dans le dossier criminel et dans le retour de l’accusé, sont
absolument crédibles.
La charmante Amanda Jaffe, jeune avocate et championne de natation, pourrait sembler
presque trop sage au milieu de ces gens concernés par le meurtre. Néanmoins, elle réussit à montrer une certaine audace. Dans cette histoire, on n’abuse pas des scènes de prétoire, au tribunal,
car c’est le contexte de l’affaire qui lui donne plutôt son intérêt. Soulignons enfin la souplesse narrative de Margolin. De Portland à Baptisteville, en passant par New York, il nous entraîne
dans le sillage de ses héros. Aucun doute, ce solide suspense est un régal.
Du même auteur, cliquez pour mes chroniques sur "Sleeping beauty" ou sur "Le cadavre du lac".