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12 décembre 2013 4 12 /12 /décembre /2013 05:55

Fin des années 1920, les théâtres londoniens attirent les foules. Cette saison, c'est surtout le Woffington qui a la faveur du public avec son spectacle musical qui met en vedette la séduisante Ray Marcable. Avant le départ de celle-ci vers l'Amérique, les spectateurs s'agglutinent pour les ultimes représentations. Ce soir-là, un inconnu est poignardé parmi les gens qui patientaient dans la file d'attente. C'est un homme blond d'à peine trente ans, qu'aucun témoin n'avait vraiment remarqué auparavant. Il avait sur lui un revolver, qui n'a pas servi. On suppose un agresseur masculin. C'est l'inspecteur Grant qui est chargé de l'enquête. Les quelques personnes se trouvant au plus près de la victime n'apportent aucun indice précis. Le policier imagine, au vu du poignard peut-être espagnol, qu'il s'agit d'un “crime latin”, dont le coupable serait un hypothétique Italien.

Grant en profite pour rendre visite au théâtre à Ray Marcable, cette belle artiste dont il est un des nombreux admirateurs. Peu après, la police reçoit un courrier avec de l'argent, destiné à payer l'enterrement du défunt anonyme. Ces billets de banque neufs laissent espérer une piste. C'est forcément un proche de la victime qui leur a adressé la lettre. Un serveur de restaurant français et la cravate du défunt donnent des éléments nouveaux à l'inspecteur. Il peut penser que la victime était un musicien ou un mélomane. L'inconnu n'appartenait pas au gang de Danny Miller, mais ce truand se souvient finalement l'avoir déjà croisé lors de courses hippiques. En effet, la victime serait un bookmaker nommé Albert Sorrell. Sur un champ de courses, Grant glane quelques infos à son sujet après de jockeys et d'autres bookmakers. Sorrell n'était pas de ceux qui ont des ennemis.

Quand l'inspecteur visite le logement vide de la victime, la logeuse Mrs Everett lui apprend qu'Albert Sorrell est censé être parti en Amérique. Sur une photographie, l'homme qui figure avec la victime est son meilleur ami, Gerald (Jerry) Lamont. Mrs Everett ne livre pas au policier la nouvelle adresse de celui-ci. Elle ne tarde pas à rejoindre Jerry Lamont, afin d'organiser sa fuite vers un coin perdu d’Écosse. Ayant suivi une autre piste, les policiers arrivent trop tard chez Lamont pour le coincer. Grant s'interroge autant sur le rôle de Mrs Ratcliffe, témoin dans la file du théâtre, que sur celui de Mrs Everett, à laquelle il accorde encore le bénéfice du doute. C'est à Carninnich, près du Loch Finley, que Grant poursuit son enquête, aidé du policier local Drysdale. Mais c'est bien de retour à Londres que va se dénouer l'affaire...

Josephine Tey : Le monogramme de perles (Éditions 10-18, 2013)

Publié en 1929, “Le monogramme de perles” fut la toute première enquête de l'inspecteur Alan Grant. Il sera le héros de six romans, dont “La fille du temps” récompensé par le Grand prix de Littérature policière en 1969. Tout commence ici par un meurtre mystérieux, nous sommes donc dans un roman d'énigme digne de la meilleure tradition. Toutefois, il existe des différences notables avec d'autres romans du même genre. Ancien combattant de la première guerre mondiale, Alan Grant fait preuve d'une certaine décontraction au fil de ses investigations. Pourtant, c'est d'une succession ininterrompue de rebondissements que se compose son enquête.

Pistes erronées et faux-semblants ne manquent certes pas. On dit que Josephine Tey se passionna pour la pêche à la ligne et les courses de chevaux, ce qu'illustre quelque peu ce scénario. Écossaise d'origine, l'auteure nous offre un voyage fort sympathique sur ses terres. On apprécie également l'ambiance du Londres de l'Entre-deux-guerres, l'animation sur le Strand, la vie théâtrale qui y fut si active. Notons que c'est encore un temps où des policiers se griment parfois (ici en colporteur, par exemple) pour obtenir des renseignements que la population ne confierait pas à des officiels. Sans doute la science est-elle moins performante façon “experts”, mais un détail sur l'assassin (qui s'est légèrement blessé) n'est pas sans importance. Péripéties et hypothèses sont au rendez-vous pour un suspense diablement palpitant, qu'il est bon de redécouvrir.

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11 décembre 2013 3 11 /12 /décembre /2013 05:55

En cette fin d'année 2013, deux rééditions bienvenues chez Rivages/Noir...

 

Christian Roux : "Placards"

Une prostituée est étripée dans son appartement. Il y a du sang et des viscères partout quand sa voisine Alice découvre le carnage. Elle remarque un placard. Visiblement, un enfant y a séjourné longtemps. Elle trouve un cahier où il racontait maladroitement sa vie de bâtard caché et maltraité. Alice quitte son immeuble sans prévenir la police. Dans un parc proche, où elle côtoie un homme brun et des enfants qui jouent, elle lit le cahier. Alice et sa jeune sœur Valérie connurent aussi une enfance douloureuse. Pour Alice, le gamin du placard n'est pas loin.

Eustache est policier. Il fait équipe avec Samuel. Eustache a besoin d’écrire, de revenir sur une étape de sa vie. Pendant ses vacances d’enfant, un adulte devint son meilleur ami : souvenirs de fêtes, mais aussi d’une expérience marquante. Eustache et Samuel enquêtent sur le meurtre de la prostituée. Ils ont compris qu’un gosse était caché dans le placard. Les témoignages inutiles du voisinage égoïste ne les aident guère, pas plus que les fichiers sur ce type de crimes. Même le calme Samuel s’interroge. Comme Eustache, il porte un lourd secret lié à l’enfance. Le gamin qui ne voyait jamais le soleil voulait “nager dans le ciel”, écrivait-il. Alice devine où il se cache...

Cette histoire malsaine et sordide a pour but de provoquer le malaise. C’est la rencontre de plusieurs destins, de personnages traumatisés par des enfances perverties, par un passé impossible à effacer. L’auteur veut nous prendre aux tripes, nous heurter, nous bousculer. Il y parvient, car l’écriture et la construction du récit sont originales et percutantes. C’est un sujet dur, qui est traité avec dureté. Ce qui donne un excellent roman, teinté d’une poésie morbide.

Christian Roux : Placards - David Goodis : Cassidy’s girl (Rivages)

David Goodis : "Cassidy’s girl"

En ce début des années 1950, Cassidy végète dans un quartier miteux de Philadelphie. Pourtant, il a connu des époques plus glorieuses dans sa vie. Sportif universitaire, puis héros de la 2e Guerre, il fut pilote de ligne. Jusqu’à ce qu’un accident d’avion dont il n’était pas responsable provoque sa déchéance. Après divers jobs, il est désormais chauffeur d’autocar. Il traîne surtout une réputation justifiée d’ivrogne. C’est chez Lundy, un bar accueillant une clientèle de purs alcooliques, que Cassidy passe son temps à s’enivrer avec ses amis.

Quatre ans plus tôt, c’est dans ce même bistrot qu’il se laissa séduire par la sensuelle Mildred, devenue depuis sa femme. Cassidy est toujours accro à son excitante compagne, qui aime autant que lui les boissons fortes. Malgré l’obsession qu’elle lui inspire, les scènes de ménages se succèdent. D’autant que Mildred aguiche Haney Kenrick, qui a plus de fric que Cassidy. Tout ça finit par une sévère bagarre entre les deux hommes chez Lundy, sans vainqueur.

Cassidy devient l’amant de la jeune Doris, dont l’alcoolisme maladif lui donne envie de la protéger. Elle aussi a traversé de dures épreuves, qui l’ont fait sombrer. Cassidy décide que Doris et lui vont vivre ensemble, qu’il l’aidera à arrêter de se détruire. Ce qui rend plus que sceptique Shealy, un des amis de Cassidy. Sa violente rupture avec Mildred n’empêche pas Cassidy d’envisager l’avenir avec une certaine sérénité. Il a tort, car ses ennuis ne font que commencer...

Goodis décrit des protagonistes de la fatalité et de la médiocrité, non sans savoir-faire : “Leurs corps, intoxiqués, affaiblis par l’alcool, n’étaient plus que des masses de substances animales, privées de pensées et d’émotions, qui avançaient, avançaient toujours dans cet espoir de survivre à cet horrible voyage qu’était la traversée de la rue.” Entre alcoolisme, serein espoir dans l’avenir, et fausse accusation, Cassidy subit les aléas d’un destin chaotique. A-t-on envie de s’apitoyer sur son sort ? Pas sûr, d’où l’ambiguïté des romans de Goodis – leur force, diront ses admirateurs. La part de dérision reste rare dans le récit : “Tu n’es pas le seul, dit Shealy. On aime tous ça, nous les paumés, les épaves. On en arrive tous à prendre du plaisir quand on descend la pente, pour arriver en bas, au fond, là où c’est doux, dans la boue.” Bel exemple du roman noir traditionnel.

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10 décembre 2013 2 10 /12 /décembre /2013 05:55

Été 1995, à l'hôpital gériatrique d'Ambrex, dans région lyonnaise. Depuis quelques années, Marie-Berthe Paquet gère cet établissement ressemblant à un mouroir. Si l'on y manque un peu de personnel durant la saison estivale, la directrice n'y peut rien. Le jeune Valentin Ledoux y a été encore engagé cet été, pour un poste de gardien. Il y retrouve la belle infirmière Bérengère Bravot, qui apparaît si sûre d'elle. Valentin est plus proche, et même plus intime avec Zita Béjahoui. Cette jeune femme de ménage préfère rester ici durant les vacances, plutôt que de suivre sa famille au bled. Zita est plus amoureuse de Valentin qu'elle ne veut le montrer.

René Bernardeau est chargé de la morgue de l'hôpital, ce qui nécessite un certain savoir-faire. Il est l'amant de Marie-Berthe, leurs relations sexuelles obéissant à un petit cérémonial. Naguère, la directrice fut brièvement la maîtresse de l'agent d'entretien Étienne Chabert. Celui-ci reste fasciné par Marie-Berthe, sans avouer qu'il est assez jaloux de René. Cet été-là, Chabert retrouve un peu par hasard Ghislaine Burgelin, avec laquelle il partagea une expérience de vie. Tout ce petit monde de l'hôpital d'Ambrex se trouve confronté à une situation inattendue et perturbante.

Quand la vieille Mme Potonier se jette par la fenêtre, il ne fait guère de doute qu'il s'agisse d'un suicide. Quelques signes montraient qu'elle n'avait plus toute sa tête. Et on ne peut pas surveiller les patients en permanence. Malgré les dégâts, René lui redonne un visage correct. Peu après, c'est Mme Strudman qui se défenestre à son tour. Elle était la voisine de chambre de la première défunte. Avec cette chaleur, il fallait pourtant bien laisser la fenêtre ouverte. Quand Mme Picolet est la troisième victime de cette série, Marie-Berthe a de quoi s'inquiéter. Mais elle se sent capable de résoudre les problèmes.

Bien qu'elle ait fait poser des grillages aux fenêtres, et qu'une enquête de police ne semble pas indispensable, il vaut mieux que la directrice s'installe sur place, dans le logement de fonction qu'elle n'occupait jamais. René pourrait suspecter Chabert d'avoir provoqué ces décès, car il devine la jalousie d'Étienne. La directrice s'arrange pour exploiter la médiatisation de cette série de morts. L'aide bénévole de Ghislaine Burgelin n'est pas inutile, quel que soit le but de celle-ci. Étienne ressasse des réminiscences qu'il s'était efforcé d'oublier. Quand l'infirmière Bérengère découvre les confidences écrites d'une des défuntes, plutôt silencieuse de son vivant, c'est un élément capital...

Françoise Rey : Ultime retouche (Tabou Éditions, 2013)

En 1989, Françoise Rey connut un énorme succès avec “La femme de papier”, un roman érotique littéraire. Pour qu'elle soit cataloguée, il n'en phallus pas plus (jeu de mot de bon aloi, non ?). Elle a écrit depuis une bonne vingtaine de livres, dont un en collaboration avec Patrick Raynal. Françoise Rey n'a jamais cherché à décoller l'étiquette apposée sur son œuvre. Toutefois, si le sexe y est décomplexé, il n'est sale et sordide que pour les plus puritains, puisqu'il en reste. Un certain “libertinage” qui s'est développé depuis vingt ans, esbroufe d'une bourgeoisie friquée prétendument décoincée, est moins respectable que les romans de Françoise Rey. Car ces fictions suggestives ont le mérite d'être de bon niveau.

Avant tout, “Ultime retouche” est un suspense psychologique. La première scène montre une des bases de l'histoire. La deuxième introduit l'idée de mort peut-être criminelle. La suite est construite telle une galerie de portraits. Dans un univers plutôt clos comme celui décrit, il est vrai que se croisent les protagonistes en ordre dispersé. Si ces personnages ont fatalement un point commun, c'est leur intériorité secrète. Dans nos vies, avons-nous la moindre raison de livrer nos blessures aux autres ? Non, vu l'individualisme ambiant, sans doute gardons-nous de plus en plus ces petites douleurs si personnelles. L'érotisme pointe ici et là dans ce scénario, aussi vaut-il mieux le réserver aux adultes. Néanmoins, on retient principalement la psychologie de l'intrigue, très très proche du polar.

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9 décembre 2013 1 09 /12 /décembre /2013 05:55
Le Salon du Roman Populaire d'Elven 2013, en images

Il existe des évènements autour du livre d'une notoriété incontestée. D'autres poursuivent plus modestement leur chemin depuis de nombreuses années déjà. À quelques kilomètres de Vannes, dans le Morbihan, se trouve la commune d'Elven. Les voyageurs curieux visitent sa forteresse de l'Argoët, connue sous le nom de Tours d'Elven. En musique traditionnelle bretonne, le Bagad d'Elven est aussi fort réputé. On y vient aussi en décembre pour son Salon du Roman Populaire.

Le Salon du Roman Populaire d'Elven 2013, en images

En 2013, la 14e édition s'est tenue le week-end dernier. On a pu y croiser des auteurs de polars et de divers genres romanesques. Comme Philippe Ward, des éditions Rivière Blanche, et sa coauteure Sylvie Miller, ainsi que Xavier Mauméjean, auteur de romans fantastiques, et des spécialistes des littératures populaires. Il était facile de converser avec l'épicurien Jean-Pierre Alaux (auteur des séries "Le sang de la vigne" chez Fayard, et "Séraphin Cantarel" chez 10-18), avec Firmin Le Bourhis (désormais publié aux éditions du Palémon), avec Marylinn Maurage (auteure de "Migrateur" et de "La femme à la tête de chien", des romans pleins de fantaisie et de mordant). Le lauréat du Prix du roman populaire 2013 est Frédéric Couderc, qui a encouragé les scolaires à écrire sans complexe, non sans rappeler l'exemple du prisonnier Mandela qui lisait et écrivait, malgré les interdictions.

Le Salon du Roman Populaire d'Elven 2013, en images
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8 décembre 2013 7 08 /12 /décembre /2013 05:55

En guise d'hommage à Nelson Mandela, au long combat qui fut le sien, à la capacité qu'il eut de fonder une nouvelle nation, retour sur un roman plutôt marquant de Georges-Jean Arnaud. En 1977, Mandela est approximativement au milieu de sa peine de prison. Il ne figure pas dans cette histoire. Le régime d'apartheid va durer. Ce dont ne doutent pas ses partisans : “Depuis trois siècles qu'ils sont dans ce pays, ils en ont vu d'autres, et ils sont toujours là. Leur foi en eux-mêmes, c'est du béton armé. Ils se feraient plutôt hacher sur place que de céder un pouce de leurs prérogatives et, d'ailleurs, ils ont assez de réalisme pour consolider leur position. Faites-leur confiance : dans dix ans, ils seront encore les maîtres.” Ce n'est qu'en 1991 que sera aboli l'apartheid, quatorze ans après.

Masquée par la formule “développement séparé”, la ségrégation raciale s'exerce depuis l'époque des Boers, des premiers Afrikaners radicaux, mais deviendra institutionnelle dès 1948. Les lois interdisent à peu près tout aux “coloured people”. Dans ce roman, on voit que les bus réservés aux Noirs ne sont pas si nombreux, que les taxis pour Blancs leurs sont interdits, que seuls les restaurants d'hôtels internationaux tolèrent des clients Noirs, qu'il leur est compliqué d'obtenir des documents administratifs. Quant aux relations intimes entres races, c'est strictement sanctionné. Un des personnages en a fait l'amère expérience. À la moindre entorse aux lois, on exile les Noirs dans ces bantoustans hostiles et ils perdent illico la nationalité sud-africaine. Au mieux, on les laisse végéter dans des townships insalubres : “─ L'eau commence à manquer, et nous n'avons pas assez de camions-citernes pour les ravitailler.

─ Pas de camions-citernes, la belle blague. Les ouvriers ont dû manifester ou faire grève, et on les prive de flotte. C'est le coup classique. Le village est installé sur une couche de rochers. Pas la moindre source. Pour l'alimenter, une canalisation de trois pouces seulement. Reliée à un bassin de retenue qui a sec dès le printemps. Que voulez-vous faire sans eau ? […] Il y a des dizaines de villages de ce genre. Je me demande si on est pas plus heureux à Soweto. Au moins là-bas, les gars retrouvent une certaine solidarité.”

En effet, Soweto fut le plus emblématique (car le plus peuplé) de ces ghettos créés par l'apartheid. Bien documenté, y compris sur les mouvements de résistance autour de l'ANC, G.J.Arnaud nous permet ici de toucher du doigt la réalité de cette époque. Plus qu'une histoire d'espionnage à la James Bond, c'est un livre alliant aventure et témoignage. Nul doute qu'il fit réfléchir quelques-uns de ses lecteurs, en un temps où la France (vendant des armes aux Blancs d'Afrique du Sud) ne condamnait absolument pas l'apartheid...

G.J.Arnaud : Peur blanche pour le Commander (Fleuve Noir, 1977)

Serge Kovask, dit Le Commander, n'est pas un agent secret de la CIA. Il est chargé de missions de renseignements pour le sénateur américain Holden. Kovask est assisté de la mûre Cesca Pepini, dite La Mamma, lors de ses enquêtes de terrain. Il s'agit généralement de jauger l'implication des États-Unis dans des situations internationales sensibles. En 1977, Jimmy Carter vient d'être élu président. Le diplomate Henry Kissinger veut croire que les Blancs d'Afrique du Sud sont disposés, comme leurs voisins de Rhodésie, à faire de gros efforts pour instaurer la justice raciale et sociale envers les Noirs. Ce pays mérite-t-il le soutien économique, politique, voire militaire, des États-Unis ? C'est ce que Kovask et Cesca Pepini doivent vérifier au cours de leur séjour en Afrique du Sud.

À Johannesburg, le Commander rencontre un secrétaire d'ambassade désireux de l'aider clandestinement. C'est ainsi que Kovask entre en contact avec Corbieu, un Français qui a connu de sévères déboires dans ce pays. Employé à la gare de triage, il a constaté que du matériel militaire arrivait en grande quantité depuis quelques temps. Pas seulement des armes, mais aussi des blindés et autres matériels lourds, en provenance de France. Cet arsenal très coûteux est livré à des propriétaires privés, Afrikaners blancs. Preuve qu'ils ne céderont rien aux Noirs, qu'ils sont prêts à écraser de nouveaux troubles, tels que le pays en a récemment connus.

Alors que Corbieu s'est fait repérer par les autorités, Kovask ne peut guère compter sur le secrétaire d'ambassade. Libéré, Corbieu conduit le Commander dans une ferme qu'il possède, près du désert du Kalahari. Le Français est un sympathisant actif de l'UWS, une branche de l'ANC. Avec leurs voisins maquisards Namibiens du SWAPO, l'UWS cherche à contrer les milices sud-africaines afrikaners. De visu, Kovask va constater que des groupes armés Blancs s'entraînent intensivement avec les blindés importés, sous la direction d'ex-nazis. Ni Corbieu, ni l'activiste noir Wezalko, ne transigeront vis-à-vis de leurs ennemis.

De son côté, Cesca Pepini est chargée d'approcher un financier français opérant en Afrique du Sud, Gérard de Laurens. La Mamma s'intéresse au cas d'une des employées de l'hôtel international où elle séjourne, Rebecca. Contrainte de coucher avec un notable bantou, cette jeune Noire cultivée de Soweto est l'amante de Gérard de Laurens. Elle espère qu'il l'aidera à quitter ce pays si inhospitalier. À contre-cœur, la Mamma doit manipuler quelque peu la jeune femme. Si Cesca Pepini reste néanmoins la meilleure alliée de Rebecca, cette dernière risque fort de se mettre en danger. Jouant à la milliardaire américaine, la Mamma essaie de percer les combines de Gérard de Laurens...

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7 décembre 2013 6 07 /12 /décembre /2013 20:44
Édouard Molinaro est décédé, il avait filmé quelques polars

Né à Bordeaux en 1928, le cinéaste Édouard Molinaro est décédé le 7 décembre 2013. Durant la première partie de sa carrière, il réalisa plusieurs films adaptés de romans policiers ou d'espionnages. Des œuvres d'auteurs non négligeables...

"Le dos au mur" (1958) : "Délivrez-nous du mal", de Frédéric Dard

"Des femmes disparaissent" (1959) : roman éponyme de Gilles-Morris Dumoulin

"Un témoin dans la ville" (1959) : roman de Boileau-Narcejac

"La mort de Belle" (1961) : d'après Georges Simenon

"Les ennemis" (1962) : "Un certain code", de Fred Noro

"Arsène Lupin contre Arsène Lupin" (1961) : d'après le personnage de M.Leblanc

"Une ravissante idiote (1964) : roman éponyme de Charles Exbrayat

"Peau d'espion" (1967) : roman de Jacques Robert

Il convient aussi de citer un film historique remarquable, projet qui fut largement soutenu par son interprète principal, Jacques Brel :

"Mon oncle Benjamin" (1969) : roman éponyme de Claude Tillier

Édouard Molinaro est décédé, il avait filmé quelques polars
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7 décembre 2013 6 07 /12 /décembre /2013 05:55

Les éditions Ex Nihilo et la Société des Amis de Régis Messac (1893-1945) poursuivent les rééditions de l'œuvre de cet intellectuel très actif durant l'Entre-deux-guerres. Enseignant, Régis Messac fit de nombreuses critiques littéraires sur les romans policiers et de science-fiction. On lui doit une thèse “Le «detective Novel» et l'influence de la pensée scientifique”, publiée en 1929 et rééditée récemment par Les Belles Lettres, récompensée en 2012 par le Prix Maurice Renault de l’association 813. Ce fut un écrivain éclectique ("Valcrétin", "Quinzinzinzili","Le miroir flexible", "La cité des asphyxiés", "A bas le latin !"). Deux nouvelles rééditions d'ouvrages de Régis Messac sont commentées dans ce n°23 de la revue trimestrielle "Quinzinzinzili".

Pendant toute la décennie 1930, Régis Messac fut un des principaux contributeurs de la revue "Les Primaires". Outre les articles culturels, il écrivit soixante-quinze éditoriaux politiques. On sait que ces années-là représentent une période troublée. La tonalité y est pacifiste et sociale, appelant à “l'unité des hommes des champs, des usines, des bureaux, des écoles, à se dresser contre les tyrannies, les oppresseurs, le confusionnisme.” Un populisme sectaire entretenant la confusion, qui elle-même créé davantage d'intolérance, voilà qui n'est pas si loin de situations de notre époque.

La SDN d'alors est impuissante devant la montée des ultra-nationalismes. 1936, l'espoir du peuple et de Messac, pour des réformes concrètes. Mais c'est aussi la Guerre d'Espagne : “Il n'est pas possible, écrit-il, que le monde s'abandonne à ses pires instincts ; il n'est pas possible que l'esprit de barbarie triomphe.” Hélas, on connaît le résultat dramatique. En 1938, les accords de Munich ne peuvent rassurer personne. Régis Messac reste impartial et droit, plaidant encore et toujours pour cette paix de plus en plus incertaine. “La crise”, un ouvrage qui témoigne de son temps.

Autre réédition publiée chez Ex Nihilo, commentée dans ce numéro, la fin de la revue "Les Primaires". Fin 1939, la guerre a éclaté, les lois imposent la censure, leur n°113 paraît avec difficulté. Pourtant, Messac et Roger Bonnissel, le directeur, vont tenter un impossible n°114. Il a été reconstitué par la Société des Amis de Régis Messac, pour un tirage limité destiné aux passionnés. Au sommaire de Quinzinzinzili n°23, retour aussi sur la polémique qui, en 1936, suivit la publication de "A bas le latin !", livre iconoclaste alors que Régis Messac était lui-même de formation latiniste. Un autre article de ce n°23 compare deux romans, "Ravage" de René Barjavel étant étrangement similaire à "La grande panne" de Théo Varlet. Hommage également à René Thévenin (1877-1967), un auteur qui fut assez populaire, dont certains romans sont aujourd'hui réédités. Et, bien sûr, diverses autres rubriques habituelles de la revue Quinzinzinzili.

Deux adresses à retenir : Société des Amis de Régis Messac, 71 rue de Tolbiac, Paris 13e – Éditions Ex Nihilo, 42bis rue Poliveau, Paris 5e.

Le n°23 de la revue Quinzinzinzili est disponible

Par ailleurs, on apprend qu'un éditeur étranger réédite depuis fin novembre 2013 la version pirate de “Le «detective Novel» et l'influence de la pensée scientifique”. Il semble bien que, depuis une première réédition datant de 1975, ledit éditeur plaide l'avoir acheté au catalogue de l'éditeur Honoré Champion, qui publia l'ouvrage en 1929. Pour autant, il n'en est nullement propriétaire, puisque Régis Messac avait des descendants, devenus ses ayants droits. Même si l'on est pas juriste international, ni spécialiste du droit d'auteur, on peut supposer que, au minimum, une autorisation des ayants droits soit indispensable dans ce cas.

La famille Messac, l'association autour de leur aïeul, et l'éditeur habilité par eux restent seuls à pouvoir exploiter ce livre. “Quoi qu'il en soit, ce sont les Belles Lettres qui sont aujourd'hui détenteurs des droits. Caroline Noirot, directrice des Belles Lettres, que j'ai rencontrée la semaine dernière à ce propos, fera bien sûr le nécessaire pour préserver nos intérêts communs” répond Olivier Messac, face à ce nouveau piratage.

Une thèse telle que “Le «detective Novel» et l'influence de la pensée scientifique” ne peut se lire sans annotations explicatives, sans repères bibliographiques, sans index précis. La préface signée de l'universitaire Claude Amoz situe admirablement l'ouvrage. La postface de François Guérif replace le parcours, y compris affectif, autour de ce livre. L'édition publiée chez Les Belles Lettres apparaît évidemment comme la plus exacte (et la plus complète), dans l'esprit de Régis Messac. C'est bien ce livre-là, qui a été récompensé en 2012 par le Prix Maurice Renault de l’association 813, et non un ersatz helvétique, au mépris de la notion de droits d'auteur, de droits d'exploitation. Une pratique qui devient de plus en plus coutumière dans notre époque déréglementée. Toutefois, boulevard Raspail, tout près des Belles Lettres, se trouve un célèbre avocat spécialisé dans l'édition et la défense des auteurs...

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6 décembre 2013 5 06 /12 /décembre /2013 05:55

Au début du 20e siècle, le général Porfirio Díaz règne sur le Mexique depuis plus de trente ans. Son régime politique autoritaire assure une prospérité économique, dont seuls les plus riches profitent. C'est en particulier le cas des certains propriétaires terriens, dont les domaines couvrent d'immenses hectares. Les péons qui travaillent là pour un salaire de misère n'ont rien à réclamer, à peine un logement pour leur famille. Dans la fidélité de ces paysans, il ne faut voir que de la soumission.

Le pouvoir dictatorial impose sa loi, grâce à des troupes régulières, mais surtout par la violence de la Guardia Rural. Ces “rurales” sans pitié sont craints à travers toutes les régions du Mexique. Néanmoins, la colère commence à gronder parmi les plus pauvres citoyens, qui se qualifient de “muchachos”.

Indien rebelle, Juan Mendez s'est autoproclamé Général, créant une armée qui avance au cri de “Terra y Libertad”. Redistribution des terres et liberté pour le peuple, bien que ces notions restent floues dans l'esprit des rebelles, le principe est fédérateur. Entouré du Colonel, du Professeur, de Celso et d'une poignées de fidèles constituant son état-major, le Général progresse à travers la région, ses troupes grossissant.

Prendre d'assaut des ranchs, des “fincas”, dont ces propriétaires “finqueros” ont déjà fui avec leurs proches, ce n'est guère difficile. Sur leur trajet, les “muchachos” vont en trouver quelques-uns, de ces domaines abandonnés par les maîtres. À part évoquer la Révolution, les rebelles n'ont rien à apporter de concret aux modestes péons. Alors, autant détruire ces “fincas” au passage.

Le pouvoir a envoyé des troupes afin de contrer l'essor de cette armée. “Mais ce qui faisait de Général un grand capitaine bien supérieur au chef des “rurales”, c'était le don qu'il avait de se mettre à la place de son adversaire et de penser comme lui.” La stratégie n'est pas inutile dans cette contrée où il est malaisé de combattre. Des le premier affrontement, qui vire au massacre, l'armée des rebelles s'empare d'un joli butin. Armes et mitrailleuses ne sont par forcément nécessaires aux “muchachos” habitués au corps à corps frontaux, mais c'est la marque de leur victoire. Si le petit peuple n'est pas vraiment libéré, la vengeance des propriétaires restant à craindre, au moins fait-on la tête dans les patios des domaines. Une fraternisation avec les péons, à la lueur de feux de joie brûlant les biens des maîtres.

Tandis que les rebelles envisages de s'emparer d'une petite ville, Achlumal, rusant pour laisser croire qu'ils en convoitent une autre, les troupes fédérales assurent leur présence. Quand des “muchachos” tombent entre les mains d'un général officiel tel que Don Petronio Bringas, ils n'ont droit qu'à un procès expéditif. Plutôt qu'exécutés, ils sont torturés à mort par des fermiers revanchards. Certes, la rébellion s'étend par groupes armés, dans tout le pays.

La détermination, le Général indien et ses hommes l'ont toujours. “Nous n'avons pas besoin d'uniformes. Et pour aller au combat, nous n'avons pas besoin non plus de drapeaux et autres torchons comme ceux que vous brandissez pour vous donner du courage.” Pourtant, sans se résigner, il leur faudra bien un jour se poser quelque part...

B.Traven : L'Armée des pauvres (Le Cherche Midi Éditeur, 2013)

Quand on évoque B.Traven, on pense immédiatement à son plus grand succès, “Le trésor de la Sierra Madre”, porté à l'écran par John Huston. Même si des renseignements ont été collectés sur lui depuis son décès en 1969, cet auteur cultiva une aura de mystère autour de sa vie. Installé au Mexique dès le milieu des années 1920, il évoqua largement son pays d'adoption dans son œuvre, écrite en langue allemande, et pour l'essentiel méconnue en France. Excellente initiative que de proposer aux lecteurs cet ouvrage hors norme.

Épopée sociale et éloge de la révolte, cette histoire s'inspirant de la Révolution mexicaine ne se cherche pas à restituer des faits précis. Il s'agit bien d'un roman, construit comme tel, avec ses tumultueuses péripéties. C'est tout le contexte d'une dictature, dont il est question ici. La cynique duplicité de ceux qui servent un régime dont ils n'ignorent pas les excès, qui assouvissent leurs propre cruauté. Des propriétaires terriens, assez lâches pour se mettre à l'abri, qui ne méritent sûrement pas leur fortune. Des rebelles, suffisamment malins pour résister le plus longtemps possible, qui n'ont pas grand chose à offrir, sinon un peu d'espoir. Être pauvre mais libre vaut mieux qu'être asservi, même si l'utopie peut coûter la vie. Montrant qu'il s'agit d'un monde régi par la force, par une extrême dureté, B.Traven n'accable finalement personne. À chacun de tirer ses propres leçons. Un excellent inédit à ne pas manquer !

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