2014 est là... Mais n'oublions pas les excellents polars et romans noirs publiés l'an dernier. Ma sélection des 15 meilleurs polars 2013 est ici !
2014 est là... Mais n'oublions pas les excellents polars et romans noirs publiés l'an dernier. Ma sélection des 15 meilleurs polars 2013 est ici !
2014 arrive, 2014 est là ! On ne peut affirmer qu'une chose : cette nouvelle année sera postérieure à 2013. Lui sera-t-elle encore supérieure, quant à la qualité des polars ? Fort possible, car les premiers titres présentés confirment cette tendance. Attendons-nous à savourer d'excellents romans.
Mais le 1er janvier n'est pas le jour des grands discours, des longs articles, des chroniques détaillées. C'est l'occasion pour moi de remercier celles et ceux, habitués d'Action-Suspense ou visiteurs ponctuels, qui ont l'amabilité de consulter mes suggestions et de laisser parfois une réaction, un commentaire.
Je souhaite à toutes les lectrices, à tous les lecteurs, une belle et heureuse année 2014, jalonnée de multiples romans qui vous apporteront du plaisir.
La pin-up en illustration est l'œuvre de © Vaughan Alden Bass.
Zach Jordan est un policier new-yorkais affecté depuis trois ans au NYPD-Red, unité d'élite de la police new-yorkaise chargée de protéger les VIP. Côté sentiments, il est ami avec Cheryl Robinson, une psy des services de police qui vient de vivre une rupture amoureuse. Le coéquipier de Zach Jordan étant indisponible, on lui adjoint une nouvelle collègue, pour une mission temporaire. Il s'agit de Kylie MacDonald, une blonde aux yeux verts qui fut sa petite amie naguère. Elle est aujourd'hui mariée à un sémillant scénariste et producteur de télévision, Spence Harrington. Celui-ci travaille avec les Studios Silvercup, complexe de production cinématographique installé à New York depuis peu. À la fois, Zach est ravi de retrouver son ancienne copine Kylie, mais il redoute leurs rapports à venir.
Afin de faire concurrence à Los Angeles, le maire de New York a décidé de valoriser encore davantage sa ville. L'évènement, c'est “Hollywood sur Hudson”, un festival de cinéma qui réunit les plus grands noms de la profession, et va attirer le public. Toutes les équipes du NYPD-Red sont mobilisées pour la sécurité du festival. Dès le premier jour, un invité est victime d'un empoisonnement criminel à l'hôtel Regency. Le quinquagénaire Sydney Roth était un producteur de cinéma comptant plus d'ennemis que d'amis, il est vrai. Durant la même matinée, l'acteur Ian Stewart est assassiné sur un tournage au Studio Silvercup. Ce séducteur mûr a été abattu par son épouse comédienne, utilisant une arme chargée de vraies munitions. Erreur d'inattention de l'armurier, innocent mais qu'on arrête.
Ian Stewart, tué pour raison sexuelle ? “Pour eux, l'adultère n'est pas un mobile criminel. C'est juste un mode de vie” relativise Kylie. Arrive la première soirée de gala, au Royal City Hall. L'établissement est l'objet d'une sécurité maximum. Dans sa robe élégante, Kylie observe de l'intérieur, tandis que Zach suit la fête via les caméras de surveillance. Ce qui n'empêchera pas qu'un cocktail molotov soit lancé sur un des prestigieux invités. Grimé en technicien, le coupable a trompé tout le monde, avant de réussir à s'enfuir. Celui qui se surnomme Le Caméléon est plutôt un figurant qu'un acteur.
De son vrai nom Gabriel Benoit, celui qui a planifié cette série de meurtres vit avec son amante Lucy Carter, mais il a agi seul pour ces trois premiers crimes, afin que son scénario reste sans faille. Un imprévu : Mickey Peltz, ex-accessoiriste spécialisé dans les explosifs, a compris que Gabe Benoit est l'auteur des meurtres. Sans doute pas un allié fiable en ces circonstances. Par contre, Peltz pourrait renseigner la police. Aiguillonnés par la capitaine Delia Cates, leur supérieur, Zach et Kylie poursuivent leur enquête tous azimuts. Le mari de Kylie, Spence Harrington, risque de troubler la suite et de se mettre en péril, en se mêlant de cette affaire. Les brigades canines de New York ne seront pas inutiles pour retrouver une piste. Mais déjà, Gabe Benoit a programmé un final explosif...
Tant pis s'il faut le répéter à chaque fois qu'on évoque un roman signé James Patterson : sa première grande qualité, c’est la fluidité de sa narration. Quelles soient dangereuses, criminelles ou souriantes, les situations sont claires. En ne cherchant pas à exagérément noircir le mystère au risque de l'alourdir, le tempo nous offre ces rebondissements et ce feu d’artifice de péripéties mouvementées qu'attendent les lecteurs.
Nous sommes dans une Amérique actuelle, comme l'indiquent certaines séries télé citées. Outre les héros, les protagonistes sont décrits de façon enjouée. Le “méchant” étant identifié, il ne s'agit pas strictement d'un roman d'enquête. D'un côté, nous suivons les méfaits de ce Caméléon, mettant en place les étapes du scénario qu'il a imaginé. Dans le camp des policiers, c'est à la première personne qu'est racontée l'affaire, par Zach. On n'y ménage pas ses efforts pour dénicher et contrer le redoutable adversaire.
L'univers du cinéma, même à la sauce new-yorkaise, participe à la dédramatisation de l'ambiance. D'autant que la partenaire Kylie est à l'aise dans ces milieux. Coécrit avec Marshall Karp, l'ambition de ce roman est à la fois d'être divertissant et diablement agité. James Patterson est un maître en matière de comédie policière à suspense. On a plaisir à lire ces histoires aux chapitres courts, pleines de vivacité, qu'il exploite à merveille.
- "Tapis rouge" est disponible dès le 2 janvier 2014 -
Ex-citadins, Mina et Jonathan se sont installés depuis une dizaine d'années dans le Berry, “aux confins d'une campagne désertique parce que désertée.” Il ont acquis et rénové une maison située sur l'écluse de Neuilly-en-Dun, à cinquante kilomètres au sud de Bourges. Âgé de trente-sept ans, Jonathan est apiculteur, vend les produits de son potager, et se charge de divers bricolages. Plus jeune d'un an, Mina est guide-conférencière dans un petit château des environs, s'occupe de la maison et de leur fils Romain, dix ans. Ils ont une chienne, Câline. Près de ce canal inutilisé, l'isolement des lieux leur convient fort bien. Mina a un jeune frère, Léonard, qui vit dans la Drôme, lui aussi à l'écart du monde. Mais sans le confort que s'est accordé le couple, sa conception de l'argent étant plus radicale.
Un nouveau voisin vient habiter à quelques centaines de mètres de chez eux. La maison vétuste de l'écluse des Presles sera à son tour à rénover. Vladimir Martin porte le même nom de famille, très courant, que Mina et Jonathan. À peine plus vieux que le couple, il dit avoir fait un héritage, et exprime le besoin d'oublier sa vie passée. Toutefois, Vladimir est beaucoup plus connecté au monde, via Internet, que ses voisins. Il se montre charmant et généreux envers Mina, Jonathan et Romain. Peut-être sa manière de dépenser à outrance est-elle exagérée. Il s'intéresse à la discothèque du couple, l'intégrale du blues depuis les origines. Pendant les travaux chez lui, il s'installe chez les Martin, mais cet insomniaque consacre plus de temps, durant ces nuits, à explorer le décor qu'à sommeiller.
Mina et Jonathan ignorent que Vladimir peut s'avérer autoritaire, dominateur. Lorsqu'il achète en urgence une Volvo rouge identique à celle des voisins. Quand la mûre coiffeuse locale est sexuellement séduite par lui, sans qu'il marque d'émotion. Ou encore dans l'extrême soin autour des travaux de rénovation de sa maison. Par contre, face au rejet de la société de consommation par Léonard, Vladimir se montre offensif. Arguments vifs, que Mina approuve au lieu de défendre son frère. Par ailleurs, Vladimir se rapproche du petit Romain auquel, entre autres cadeaux onéreux, il offre une coûteuse canne à pêche. Au retour de quelques jours de vacances, Jonathan s'aperçoit que le voisin a acheté une chaîne hi-fi et une collection de blues comparable à la sienne. Il y a de quoi s'interroger, se montrer moins aimable avec Vladimir, et même irritable dans son couple...
Certains romans ont besoin d'une flopée de protagonistes pour donner leur pleine mesure dans une galerie de portraits, voire de suspects. Pas moins convaincantes, au contraire, des histoires telles que celles-ci offrent une intrigue plus intimiste. Il suffit de quatre personnages, d'un pittoresque cadre rural, d'un été caniculaire au pays de George Sand et d'Alain-Fournier. Lorsque, sur fonds de musiques de blues lancinantes, le Diable s'immisce dans ce paisible univers, l'orage risque de bientôt gronder. Car, l'hypocrisie étant la clé de voûte de la manipulation, on ne nous cache guère les intentions sournoises de Vladimir.
Pour l'essentiel, les “situations à problèmes” proviennent de l'entourage immédiat. C'est là que réside le danger, si un élément vicié se glisse dans les relations de proximité. Face à de nouveaux venus dans un immeuble ou un quartier, rester sans méfiance apparaît comme un signe de faiblesse. Il serait utopique de croire à des rapports humains sans nuages, de nier l'usure même légère des couples, d'imaginer que l'argent n'est pas corrupteur, de compter sur un bonheur éternel. Voilà l'amère expérience que, dans leur décor pourtant enchanteur et harmonieux, vont vivre les Martin.
Pour qu'un suspense psychologique fonctionne, la technique ne suffit pas. Quand l'écriture se veut précise, soignée en restant fluide, décrivant les faits tout en fouillant l'âme des héros, c'est là que l'auteur fait mouche. Olivier Bordaçarre parvient avec subtilité à nous faire partager la sourde oppression intérieure qui gagne Jonathan Martin et ses proches. Un scénario diaboliquement prenant, qui fascine du début à la fin. Un roman remarquable.
- "Dernier désir" est disponible dès le 3 janvier 2014 -
Certains passionnés de polars choisissent le format poche, pour des raisons budgétaires bien faciles à comprendre. Pour eux, voici trois romans disponibles dès le 2 janvier 2014, qu'ils pourront inclure dans leurs collections...
Leighton Gage : "Le sang des maudits" (Points)
Mario Silva est originaire de São Paulo. Avocat de formation, il s’est engagé dans la police fédérale brésilienne il y a trente ans. Son choix s’explique par l’agression mortelle dont furent victimes ses parents. Pour retrouver le malfaiteur tatoué qui se faisait appeler Cobra, il lui aura fallu sept années. La précieuse montre de son père fut le fil conducteur de son enquête parallèle. Face au coupable, la justice de Mario Silva fut immédiate. Plus tard, ce fut le mari de sa sœur qu’on tua dans des circonstances analogues à la mort de ses parents. Cette fois, Mario Silva ne tarda à découvrir le criminel. Devenu adulte, son neveu Hector Costa, le fils de sa sœur, intégra lui aussi la police fédérale. Âgé maintenant d’une trentaine d’années, Hector est “delegado”, adjoint de son oncle inspecteur principal.
Cascatas do Pontal est une ville de 250.000 habitants à l’ouest de l’État de São Paulo. C’est dans un hélico affrété par une grosse société de fertilisants agricoles, que l’évêque Dom Felipe y débarque pour inaugurer une nouvelle église. Le prélat est abattu par un tireur d’élite, dont la police du colonel Ferraz retrouve bientôt l’arme supposée. Le meurtre d’un ecclésiastique est une affaire d’état, qui exige que Mario Silva se rende sur les lieux. Il y est précédé par Hector, qui rencontre l’arrogant chef de la police locale. Le colonel Ferraz accuse implicitement les activistes du Mouvement des Sans-Terre. Ils auraient ainsi vengé le meurtre de leur leader local, Azevedo, et de sa famille. Ici, les propriétaires terriens restent hostiles aux lois de réquisition qui bénéficieraient aux paysans pauvres...
Cette première enquête de Mario Silva traduite en français est une excellente surprise. On est loin des clichés exotiques du Brésil. L’action se déroule aujourd’hui dans ce pays, ne masquant pas sa réalité sociopolitique. Depuis la prise de fonction du président Lula en janvier 2003, certaines réformes ont été appliquées. Mais l’influence de l’Église catholique, des puissants propriétaires terriens, et des multinationales, reste très importante. C’est une véritable guerre permanente qui oppose les paysans sans terres et les propriétaires. Pourtant, l’État rachetant les terres inutilisées, il n’y a pas de spoliation. Il est probable que la hiérarchie de l’Église catholique prenne le parti des plus riches, comme toujours, ainsi que le suggère l’auteur. Quant à la corruption et aux abus de pouvoir, même la démocratie ne peut guère y mettre fin. Leighton Gage souligne également que le Brésil est un pays où règne une sorte de violence naturelle, sans doute impossible à éradiquer.
Odile Bouhier : "De mal à personne" (10-18)
1920. Le commissaire Kolvair passe quelques jours de vacances chez sa sœur, quand il reçoit un appel téléphonique de la police lyonnaise. L’industriel Firmin Dutard a été assassiné. Riche patron d’une usine d’automobiles, il a été poignardé dans la cour du Grand Hôtel. Rentré à Lyon, Kolvair constate vite qu’on dispose de fort peu d’indices. Le tueur a utilisé “un banal couteau, outil courant chez les paysans et les ouvriers qui préparent leurs casse-croûte”. Le professeur Salacan se trouvant à Cambridge pour un congrès, Kolvair ne peut compter que sur les déductions de son assistant, Jacques Durieux. Il espère aussi l’aide de la belle Bianca Serragio, brune quadragénaire dont il est amoureux, et aliéniste réputée. Le journaliste Armand Letoureur suit cette sanglante affaire, ainsi que prochaine exécution publique à Lyon, par le bourreau Anatole Deibler.
Le commissaire interroge le personnel du Grand Hôtel, qui n’a pas remarqué grand-chose. Sauf la présence d’un gamin à proximité du lieu du crime. Il est possible que les coups fatals aient été portés par un enfant, en effet. Kolvair réalise un portrait du jeune garçon, qu’il compare à une photo prise par Letoureur. Au fichier des mineurs délinquants, on trouve la trace d’un enfant de onze ans, Thibaud, ressemblant fort au portrait. Un suspect qui convient au procureur Pierre Rocher et à l’inspecteur Legone, des Brigades du Tigre. Ce dernier applique sa méthode pour faire avouer le gamin, qui n’a guère un profil de criminel et n’était pas à Lyon au moment des faits. Peu importe, on envoie Thibaud à la colonie pénitentiaire de Mettray, où on le matera comme toutes les fortes têtes. Bianca Serragio, Jacques Durieux et le commissaire Kolvair analysent ensemble le cas de Thibaud, cherchant une alternative plus plausible...
Crime énigmatique, investigations autour d’une affaire mystérieuse, mais l’ensemble est enrichi par ses personnages et par son contexte. Rescapé de la Grande Guerre, Kolvair est un policier atypique. Intime de la séduisante Bianca, il est ouvert aux pistes offertes par les scientifiques. On commence à admettre alors ce type d'indices. L’autre aspect dans ce contexte, c’est l’évolution de la justice envers les mineurs. Si des lois existent pour les protéger, ou pour les juger dignement, on les écoute peu, et les bagnes pour enfants perdureront pendant de longues années.
Thomas H.Cook : "Mémoire assassine" (Points)
Au début des années 1990, Steve Farris est un quadragénaire employé dans un cabinet d’architecture. Petite famille ordinaire, avec son épouse Marie, et leur fils Peter. Steve a longtemps gommé de sa mémoire le drame qui le marqua à l’âge de neuf ans. La séduisante Rebecca prend contact avec lui. En vue d’un livre, elle étudie cinq cas criminels similaires. Il s’agit de pères de famille ayant abattu tous leurs proches. Rebecca possède déjà des documents relatifs au crime qu’a vécu Steve. Celui-ci accepte d’explorer les images de son passé, rencontrant certains soirs Rebecca à l’insu de son épouse. Le carnage inexpliqué se produisit le 19 novembre 1959, au cours de l’après-midi. Étant le seul rescapé de cette affaire, de nombreuses questions viennent à l’esprit de Steve.
Chez les Farris, il y avait d’abord le père, William, modeste quincaillier exprimant peu ses sentiments. Avec le recul, on peut se dire qu’il ressentait une sourde amertume, n’ayant pas eu la vie qu’il souhaitait. Après la guerre, il se maria avec Dorothy. Steve se souvient qu’on disait “la pauvre Dottie”, sa mère étant une femme effacée. Jamie, 17 ans, le frère aîné de Steve, était un garçon plutôt frondeur, qui se chamaillait fréquemment avec sa sœur Laura, 16 ans. Leur père semblait avoir une affection particulière pour elle, sans doute parce qu’il retrouvait chez Laura sa propre détermination d’antan. Ce funeste jour, Bill Farris extermina Dorothy, Jamie et Laura. Il attendit durant deux heures le retour de Steve, mais prit finalement la fuite. L’enquêteur Swenson retrouva sa voiture à la frontière du Mexique, ultime trace laissée par Bill Farris...
Un magnifique suspense psychologique. Il faut toute la virtuosité de Thomas H.Cook pour entrelacer passé et présent, pour souligner les détails insignifiants d’autrefois et les scènes du quotidien ordinaire ne prenant un sens qu’en raison du triple crime. L’ambiance chez les Farris apparaît par petites touches, sans laisser augurer un tel drame. Aucune précision n’est évoquée par hasard. Il n’y a pas de monstrueux secret de famille derrière tout cela, juste une dégradation qui s’accélère entre ces gens. La finesse avec laquelle on nous raconte leur vie est absolument fascinante. Quant aux derniers rebondissements, il convient de les savourer avec délectation.
Il se nomme John-Fitzgerald Dumont, mais on l'appelle Fitz. C'est un Parisien pur jus, âgé de trente ans en cette année 2013. Si son frère aîné Howard est un cador de la finance, Fitz a eu d'autres ambitions. C'est-à-dire, faire la fête plusieurs nuits par semaine, draguer des jeunes femmes consentantes, s'alcooliser à outrance, et dealer de la drogue de bonne qualité pour vivre cette vie. Certes, comme avec l'avocate Daniela, il arrive à Fitz d'oublier comment il arrive dans le lit d'une de ses conquêtes. En général, il maîtrise les problèmes, même s'il a déjà été mêlé à deux affaires agitées. Ce qui explique que ses relations avec son ex Jessica, commissaire de police, sont moyennement au beau fixe. Au besoin, il peut compter sur ses amis, l'agent de sécurité Moussah, et la jeune prof de lycée Déborah. Si ses parents veulent une fiancée présentable, cette dernière peut faire illusion.
Ce dimanche-là va s'avérer un brin contrariant. Un client VIP, le député Georges Venard, valeur montante de la République, a besoin d'être livré en drogue. Quand Fitz arrive au domicile de Venard, celui-ci vient de se suicider. Ou d'être trucidé par l'homme qu'il vient de croiser dans l'escalier. Rien qui concerne Fitz, donc il n'est pas utile de s'y attarder. Sauf qu'un visiteur inconnu l'attend dans son appartement, avec l'intention de l'éliminer. Il vaut mieux appeler Moussah à la rescousse. Malgré l'agilité du Noir agent de sécurité, le tueur s'enfuit. Il est fort probable que la menace qui plane soit en rapport avec la mort de Georges Venard, et que ses proches amis soient autant pistés que Fitz. Il se réfugie chez Moussah, à Châtillon, où Déborah rapplique bientôt. Ce ne sont pas les hypothèses qui manquent au trio, même s'ils ne comprennent guère qui veut la peau de Fitz.
Quand l'adresse de Moussah est repérée par leurs adversaires, il est prudent que les trois amis se cachent dans une chambre d'hôtel. Grâce au hacker Bob, qui joue quelque peu les anges gardiens pour Fitz, ce dernier fait le portrait-robot de l'inconnu vu dans l'escalier de Venard. Grâce à une manipulation scandaleusement illégale, on parviendra à identifier cet homme. Jérôme Sultan, un ponte d'un grand groupe industriel, semble bien n'avoir rien à se reprocher. Par contre, suite à ladite manipulation, Fitz est recherché par les flics. Il assomme même l'adjoint de Jessica, venu fouiller son appartement. Être traqué, ça ne peut pas durer plus longtemps. Aussi Fitz décide-t-il de glaner suffisamment d'infos, en partie via le hacker Bob, afin de contre-attaquer. Son ennemi n'est pas un amateur, il va donc falloir ruser et bluffer pour s'en sortir...
Cette troisième aventure de Fitz peut aisément se lire sans avoir suivi les précédentes, car on cerne vite l'univers du personnage central. À la base, c'est un de ces frimeurs hantant les nuits festives, des semi-oisifs dealant sans en faire un gros bizness : “Mais je n'étais pas un citoyen lambda. Je m'approvisionnais une fois tous les deux mois auprès de narcotrafiquants russes, afin de fournir en cocaïne la jeunesse dorée parisienne.” Que des embrouilles lui tombent ponctuellement sur le nez apparaît assez légitime. Entraîné dans une virevoltante course-poursuite n'autorisant que peu de sommeil, il acquiert bientôt la sympathie du lecteur. La narration ne peut se faire que par le héros, pour la vivacité du récit, et pour transmettre les inévitables questionnements de celui-ci.
Le scénario se veut à l'image de notre époque immédiate. Entre portables et divers appareils informatiques, la technologie numérique est fort sollicitée. Encore qu'une bonne vieille cabine téléphonique permette d'être moins vite “tracé” par l'adversaire, on le verra. On frise parfois un peu la description GPS Paris-proche-banlieue, mais ce défaut reste limité. Les tribulations de Fitz, Moussah et Déborah, sont mouvementées à souhaits, baignant dans un certain mystère quant aux motifs réels de cette traque. Il est important de glisser une dose d'humour dans ces situations tendues : “Je me retrouvai rapidement devant une forteresse de béton, aussi lisse et laide qu'une chanson de Christophe Maé.” Cette histoire répond parfaitement à la définition du roman d'action et de suspense. Ce qui ne manquera pas de séduire les amateurs de polars trépidants.
- "Mais je fais quoi du corps ?" est disponible dès le 3 janvier 2014 -
Puisque c'est le jour, voici une intrigue qui se déroule pour l'essentiel durant la période de Noël...
Âgé de vingt-neuf ans, le parisien Jacques Morin est chef-steward depuis quatre ans chez Air France. Voilà quelques mois qu'il est affecté aux vols vers les États-Unis. Un jour, dans un bar des Champs-Élysées, une femme lui a proposé de transporter une valise avec un double-fonds, cachant des sachets censés contenir trois kilos d'essences de parfums. Ayant besoin d'argent, Morin a accepté. Il a été arrêté dès son arrivée à New York. L'agent du FBI Jef Strafford comprend qu'il n'est qu'un messager, d'autant que Morin n'a pas de casier judiciaire. Le chef-steward accepte d'aider Strafford à coincer le nommé Luigi, à qui il va remettre la valise avec la drogue.
La Mafia n'ignore pas le rôle de Morin dans cette affaire. C'est ainsi que le Français se retrouve bientôt emprisonné dans un pénitencier. On sait que c'est un indic, aussi est-il l'objet de brimades permanentes. Venant des gardiens, mais surtout de Gros Sam et P'tit Louis, chargés par la Mafia de lui en faire baver. Un incident lui permet d'échapper à un sort fatal, avant qu'il soit libéré grâce à Strafford. En décembre, Morin est de retour en France, peu avant Noël. Il ressasse le conseil du père Hobson, aumônier du pénitencier : “Quittez la France, émigrez en Australie, refaites votre vie sous une autre identité.” Son appartement a été reloué. La mannequin Sonia Volovniev, qui l'a entraîné dans ce trafic, n'habite plus à son adresse passée.
Morin renoue avec son ex-petite amie, Claire. Avec son aide, il trouve l'adresse actuelle de Sonia. Quand Morin est en face d'elle, il est prêt à se venger en la frappant avec un chandelier. Il finit par exiger de l'argent et des papiers d'identité pour fuir la France. Sonia s'adresse au chef du trafic de drogue, le photographe Max Reinhardt. Celui-ci fait semblant d'accepter le chantage, où Sonia servira d'intermédiaire avec Morin. Peu après, Reinhardt massacre la jeune femme à l'aide du chandelier portant les empreintes de l'ex-steward. Ce dernier est bientôt piégé sur les lieux du crime, car le photographe a alerté la police. Le chevronné commissaire principal Thiébaut et son adjoint Lambert, de la Brigade criminelle du Quai des Orfèvres, sont chargés de l'affaire...
Né en 1930, Claude Joste débuta aux éditions Fleuve Noir en écrivant plusieurs romans pour la collection Feu. En 1967, il publie son premier titre en Spécial-Police, “Le chandelier de Noël”. C'est la naissance du commissaire Jérôme Thiébaut, expérimenté et fumeur de pipe comme il se doit, pour des enquêtes traditionnelles. On y explore divers décors et milieux sociaux à la manière des “Cinq dernières minutes”, au risque d'intrigues assez mollassonnes. Jusqu'en 1987 (“Les clarines de Neuilly”), Claude Joste sera très productif, dans les romans policiers, l'espionnage, et en collaboration sous d'autres pseudonymes.
Ce premier polar de Claude Joste est certainement un de ses plus convaincants. Par sa construction d'abord, puisque nous suivons les déboires du héros, aux États-Unis puis en France. Par son ambiance et son contexte aussi, qui apparaissent plutôt conformes à cette décennie 1960. Un suspense, non pas exceptionnel, mais vraiment palpitant.
Voici une petite sélection de romans policiers
d'hier et d'aujourd'hui, sur la thématique de Noël...
Georges Simenon : Un Noël de Maigret
Agatha Christie : Le Noël d'Hercule Poirot
Pierre Véry : L'assassinat du Père Noël
Anne Perry : Contes de Noël (10-18)
G.J.Arnaud : Noël au chaud (Fleuve Noir)
Kjetil Try : Noël sanglant (Série Noire)
Ngaio Marsh : Le cercueil de Noël (10-18)
Colin Thibert : Noël au balcon (Série Noire)
Manning Long : Noël à l'arsenic (Le Masque)
Kate Sedley : Le Noël des masques (10-18)
R.D.Wingfield : Joyeux Noël, Frost ! (L'Aube)
Claude Joste : Le chandelier de Noël (Fleuve Noir)
Jean-Christian Viluber : Noël noir (Sanguine)
Laurent Cabrol : Le crime de Noël (De Borée)
Marian Babson : Noël sans trêve (Le Masque)
Raphaël Majan : Noël au commissariat (P.O.L.)
François Cérésa : Petit papa Noël (Pascal Galodé)
Donald Harstad : Quatre jours avant Noël (Points)
Gilles del Pappas : Joyeux Noël, Constantin (Après la Lune)
Jean-Luc Tafforeau : Corinne n'aimait pas Noël (Fleuve Noir)
Pierre Véry : La révolte des Pères Noël (Le Masque)
Deborah Crombie : Noël sanglant à Notting Hill (Le Livre de Poche)
Charles Exbrayat : Joyeux Noël, Tony ! (Le Masque)
Aramon : L'ange à Noël (Le Masque)
Alexis Aubenque : Un Noël à River Falls (Calmann-Levy)
Giova Selly : Trois cloches pour un joyeux Noël (Fleuve Noir)
Sarah Cohen-Scali : Ombres noires pour Noël rouge (Rageot)
Georgette Heyer : Noël tragique à Lexham Manor (Le Masque)
Jean Bruce : Noël pour un espion (Un Mystère, Presses de la Cité)
J.B.Livingstone / Christian Jacq : Les trois crimes de Noël (Ed. GdV)
Mary & Carol Higgins-Clark : Trois jours avant Noël (Livre de Poche)
Plusieurs centaines de mes chroniques sur le polar sont chez ABC Polar (mon blog annexe) http://abcpolar.over-blog.com/
Mes chroniques polars sont toujours chez Rayon Polar http://www.rayonpolar.com/
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Claude Le Nocher, by R.Sadaune