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22 juillet 2018 7 22 /07 /juillet /2018 04:55

Le commissaire Nazer Baron est policier à Nantes. Alors que son père vient de mourir, une amie juge d’instruction lui demande de revenir sur une affaire probablement bâclée par le magistrat qui s’en est occupé. Infirmier à l’Hôpital nord Laënnec de Saint-Herblain, Léo Bréval est actuellement en prison. Il est accusé d’avoir assassiné sa femme, Adénaïs, trente-et-un ans. Elle a été tuée par strangulation, sûrement avec son propre foulard. Léo Bréval, qui assure le service de nuit à l’hôpital, affirme avoir découvert son corps en rentrant au matin chez eux. Il est vrai qu’il a un peu tardé – environ un quart d’heure – avant d’alerter les secours, estimant qu’il était trop tard pour sauver son épouse. Mais il y a beaucoup trop d’approximations dans le dossier.

Une visite au domicile du couple n’apprend pas grand-chose de plus au commissaire. Il se confirme juste que la victime était dépressive, et que la réaction de Léo peut s’expliquer par un état de sidération. Hubert Arneke, l’adjoint de Baron, interroge la plus proche voisine des Bréval. Laurence Ternier confirme son témoignage, défavorable à Léo, qu’elle considère comme l’assassin d’Adénaïs. La piste professionnelle mérite également d’être explorée. La victime était en arrêt-maladie depuis quelques semaines. Elle était considérée par ses collègues comme réservée, mais pas triste par nature. Toutefois, “un événement était advenu dans la vie d’Adénaïs Bréval, dix ou quinze jours avant sa mort, suffisamment grave pour la plonger dans un état dépressif.” Elle aurait confié à sa collègue Judith : “Les choses ne seront jamais plus comme avant”.

Le commissaire Baron rencontre Léo, afin que celui-ci lui répète sa version des faits. Léo dit qu’il ignorait qu’existait une liaison entre son épouse et Fabian Prentice. Les policiers ne tardent par à interroger ce dernier, chef d’entreprise. S’il admet cette relation, ce ne fut pour lui qu’une aventure d’un soir. Fabian Prentice est marié, sa femme est enceinte, il n’a jamais eu l’intention de remettre en cause sa situation, ni de revoir en privé Adénaïs. Le commissaire Baron peut envisager qu’une tierce personne, encore non identifiée, ait joué un rôle dans cette affaire. La suite de son enquête va le mener jusqu’à La Rochelle. Où il y aura une autre victime, en lien plus ou moins direct avec le cas d’Adénaïs…

Hervé Huguen : Le troisième des deux (Éd.du Palémon, 2018)

C’était ça qui intéressait le commissaire. Adénaïs qui avait la réputation de soigner ses tenues vestimentaires, ne portait pas un vêtement de nuit de flanelle épaisse, uniquement destiné à protéger du froid, mais de satin gris, agrémenté de dentelle et dont le col baillait largement sur la poitrine. On distinguait nettement, au travers du tissu, la marque d’aréoles brunes.
Baron reposa les clichés, songeur. À qui Adénaïs aurait-elle ouvert la porte dans cette tenue ? À qui se serait-elle montrée ainsi, vêtue d’un pyjama au travers duquel on devinait qu’elle était nue dessous ?

Ce roman est le douzième titre de la série ayant pour héros le commissaire Baron, basé à Nantes. S’il arrive que certains crimes le mènent à Vannes (Morbihan), c’est bien dans la région nantaise (jusqu’à Ancenis) que se déroulent ici ses investigations. Baron n’est pas un "flic de choc", il pratique des enquêtes réfléchies, cherchant à comprendre chacun des protagonistes, ne soupçonnant tel ou tel que lorsque des éléments probants se font jour. L’intrigue est énigmatique et réserve quelques surprises. Comme il se doit dans la bonne tradition du genre, s’agissant d’un roman policier de bon aloi.

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21 juillet 2018 6 21 /07 /juillet /2018 04:55
Cinéma : "Une pluie sans fin"sur les écrans le 25 juillet 2018
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20 juillet 2018 5 20 /07 /juillet /2018 04:55

En 2010 aux États-Unis, Carl Schwartz vit une retraite paisible avec Emmi, sa compagne depuis soixante ans. Le début de son existence fut plus compliqué. En 1938, Carl est âgé de douze ans. Il habite Ratisbonne (Allemagne) avec sa sœur Ida et leurs parents, Erwin et Gretel. Pour eux, il est temps de fuir le pays, la famille bénéficiant de passeports pour Shanghai. Lors du voyage en train via l’Italie, ils sont interceptés mais réussissent – grâce à une générosité miraculeuse – à gagner le port de Gênes. Tandis que sa femme et ses enfants embarquent sur le navire prévu, Erwin Schwartz reste volontairement à quai. Il pense devoir retourner chez lui en Allemagne, imaginant que les autorités nazies ne s’en prendront pas à lui.

Pour le petit Carl, cette croisière est riche en nouveautés. Ayant pour obligation de rester à bord du navire, les Juifs et assimilés ne pourront profiter des escales, ni à Port-Saïd (en Égypte sous protectorat britannique), ni à Bombay, ni ailleurs. Carl se fait des amis, y compris parmi des personnes âgées. Ils arrivent finalement à Shanghai, où vit déjà une colonie d’Européens. Carl, sa sœur Ida et sa mère Gretel vont devoir s’adapter à des codes fort éloignés de ceux auxquels ils étaient habitués.

De son côté en Allemagne, la jeune Erna n’est pas des plus sérieuses. Craignant qu’elle devienne prostituée, ses parents l’envoient chez sa tante Marga à Munich. Erna s’aperçoit bientôt que celle-ci exerce de curieuses activités. Profitant de la crédulité de clientes aisées, la tante Marga se fait passer pour une voyante, organise des séances de spiritisme totalement bidonnées. Quand l’occasion s’en présente, elle est également avorteuse. En ces temps incertains, il existe une grosse demande. Marga ne s’interroge pas longtemps, dès qu’il est question d’argent. Pour pouvoir épouser un soldat, sa protégée Trudi doit ruser en faisant semblant d’être enceinte avant d’adopter un bébé orphelin. Erna observe ce petit monde malsain. Elle non plus ne sait pas de quoi sera fait le futur…

Andrea Maria Schenkel : Le bracelet (Actes Sud, 2018)

Il ne s’agit pas d’une intrigue polar. C’est une saga "à travers l’Histoire". La montée du nazisme fut diversement perçue par la population allemande. Juif converti au christianisme, bon citoyen, le père de Carl se croit à l’abri des persécutions, alors que le pouvoir hitlérien impose sa loi sans nuances. À l’opposé, la tante Marga sait que le chaos de la guerre qui arrive est propice à toutes sortes de combines lucratives.

Suivre son destin. Pour Carl encore enfant, le voyage salvateur jusqu’à Shanghai, c’est la liberté et la découverte. Il ne figurera pas parmi les victimes exterminées dans les camps nazis, mais aura la chance de profiter d’une vie heureuse. Quant à Erna, l’influence de sa tante jouera sur son avenir, quel qu’il soit. Évitant un cours d’histoire sur le nazisme et ses conséquences, Andrea Maria Schenkel évoque le sort d’êtres humains. Un roman touchant, positif, qui se lit avec plaisir et émotion. 

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18 juillet 2018 3 18 /07 /juillet /2018 04:55

À Ratisbonne, en Bavière, à une centaine de kilomètres au nord de Munich. Âgée d’une trentaine d’années, Sybille Aurich se réveille dans une chambre d’hôpital. Le Dr Muhlhaus lui explique qu’elle a été agressée et qu’elle est restée dans le coma durant deux mois. Les premières pensées de Sybille vont vers son mari Johannes et, surtout, leur fils Lukas, sept ans, dont elle pense qu’il a été kidnappé. Selon le médecin, elle n’a pas de fils. S’apercevant qu’elle est prisonnière dans cette chambre, Sybille assomme le Dr Muhlhaus et parvient à s’enfuir. La pièce où elle fut enfermée se trouve curieusement dans une cave d’un hôpital de la ville. Dans la rue, une automobiliste complaisante – une dame mûre prénommée Rosie – accepte de la prendre en voiture et de la ramener chez elle.

À son domicile, Johannes Aurich affirme ne pas la reconnaître, et ne pas avoir d’enfant. Les photos du couple montrent plutôt une autre Sybille, encore qu’elle ne soit sûre de rien. Johannes ayant prévenu la police, deux flics arrivent bien vite. Ces inspecteurs Grohe et Wittschorek, ils ne croient pas non plus qu’elle soit la vraie Sybille Aurich. Ensemble, ils retournent à l’hôpital. C’est un autre Dr Muhlhaus qui les reçoit, certifiant n’avoir jamais eu affaire à Sybille. Celle-ci fausse compagnie aux deux policiers. À qui s’adresser, sinon à Rosie, qui la rejoint vite et l’amène chez elle. Quand Sybille lui raconte ses mésaventures, aussi incroyables soient-elles, Rosie lui fait confiance. Toutes deux rendent visite à la belle-mère de Sybille, en résidence médicalisée, mais rien de probant n’apparaît.

Un certain Christian Rössler propose son aide à Sybille, lui conseillant de se méfier de Rosie. La jeune femme contacte sa meilleure amie, Elke. Cette dernière ne la reconnaît pas non plus, bien que Sybille évoque des détails qu’elles sont seules à avoir vécu. Alors qu’elle sort de chez Elke, Rössler la prévient que la police l’attend dehors. On pourrait imaginer que c’est Rosie qui les a alertés, car le policier Wittschorek est en pleine conversation avec elle. Fuir, encore fuir. D’après Rössler, Sybille serait victime d’une expérience, mais il ne sait préciser à quelles fins. Elle se demande pourquoi Munich – où elle a habité voilà quelques années – lui revient ponctuellement en mémoire. Mais la principale obsession de la jeune femme, c’est de retrouver son fils Lukas…

Arno Strobel : Souvenirs effacés (L’Archipel, 2018)

Ce n’est évidemment pas le premier thriller utilisant le thème de la mémoire viciée, des souvenirs flous ou tronqués, de l’exactitude fort incertaine des images que le personnage principal garde en tête. Ce type de suspense possède ses ingrédients, ses codes, ce qui permet de sans cesse relancer le mystère. L’essentiel, c’est que ces éléments servent l’intrigue. Sur ce point, “Souvenirs effacés” d’Arno Strobel s’avère efficace, percutant. On partage le désarroi de Sybille, l’héroïne, qui reste déterminée à comprendre ce qui lui arrive. Finalement, Rosemarie Wengler (Rosie) lui volerait presque le premier rôle, par son originalité. Un polar dans les meilleures règles du genre, énigmatique à souhaits… On ne demande qu’à se laisser séduire.

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16 juillet 2018 1 16 /07 /juillet /2018 04:55

Au village de Carsely, dans les Cotswolds, la pétulante quinquagénaire Agatha Raisin a enfin convolé avec l’objet de tous ses fantasmes, son voisin James Lacey. Mais ce n’est pas la réussite attendue. La première ombre au tableau est apparue deux semaines après leur retour de voyage de noces à Vienne et à Prague. À Carsely, chacun continua à habiter son propre cottage, gardant son espace privé. Vu qu’Agatha Raisin est une médiocre cuisinière et commet de bourdes en lavant le linge, James n’y voyait guère d’inconvénients. Mais, au-delà des problèmes quotidiens, c’est la jalousie qui accentua la catastrophe au sein de leur couple. Car James semblait toujours fricoter avec la belle Mélissa Sheppard, qui avait été sa maîtresse avant leur mariage. Insupportable pour Agatha Raisin. 

Lorsque James disparaît, la police soupçonne en priorité son épouse Agatha. Il est vrai que du sang a été décelé chez lui, ainsi que dans sa voiture abandonnée vide. Toutefois, elle n’est pas inculpée. Son ami célibataire Charles Fraith et Mrs Bloxby, la femme du pasteur, soutiennent le moral d’Agatha. Trois semaines plus tard, toujours aucune nouvelle de James. C’est alors que Charles et Agatha découvrent le cadavre de Mélissa Sheppard. À n’en pas douter, il s’agit bien d’un meurtre – que l’on pourrait attribuer à James. Agatha et Charles s’intéressent plutôt à la vie de la défunte qui – quelque peu mythomane – se comportait avec ses proches telle une héroïne de feuilleton-télé ; ainsi qu’aux anciens maris de Mélissa, John Dewey et Luke Sheppard.

John, le premier époux, avait vite compris le caractère romanesque de la jeune femme. Depuis leur séparation, il est resté sans nouvelle compagne. Luke Sheppard s’est remarié avec Megan, une trentenaire jouant volontiers les Lolita. Son union avec Mélissa n’était sûrement pas destinée à durer, il l’admet. Aucun des deux ex n’avait de véritable raison de la supprimer. Agatha essaie de soutirer des infos sur l’enquête policière auprès de son ami le jeune inspecteur anglo-asiatique Bill Wong. Pendant ce temps, James – qui n’est pas mort – a trouvé un endroit calme loin d’Agatha pour se requinquer.

La sœur de Mélissa émet un opinion tranchée sur elle : “On lui a diagnostiqué une psychose. Mensonges compulsifs, incapacité à distinguer le bien du mal. Un de ses grands plaisirs, c’était de prendre le contrôle des hommes et de les manipuler. Un vrai caméléon… Et elle ne se sentait jamais responsable de quoi que ce soit. La connaissant, je n’en reviens pas qu’elle ait pris la peine de rédiger un testament – elle était du genre à se croire immortelle. Vous devez me trouver très dure, je m’en doute, mais elle était impossible à aimer...C’est horrible de penser qu’on a un meurtrier en cavale, mais ma sœur pouvait rendre les gens complètement dingues, elle disait des choses atroces.” Serait-ce la cause de sa mort ? Agatha Raisin n’a pas dit son dernier mot…

M.C.Beaton : L’enfer de l’amour (Albin Michel, 2018) – Agatha Raisin 11

Alors qu’ils traversaient le village, Agatha remarqua les regards curieux et les mouvements de rideaux aux fenêtres. C’est moi la victime, pas James, se justifia-t-elle en son for intérieur. J’ai été trahie et abandonnée. Aussitôt, le souvenir de la tumeur de James la remplit de tristesse.
Comme elle, Mélissa habitait un cottage au toit de chaume, mais le jardinet qui donnait sur la rue était bien mieux entretenu que le sien. Une profusion de roses de toutes les teintes débordait par-dessus la palissade peinte en blanc. La porte aussi était blanche, mais Agatha nota que le heurtoir en laiton n’avait pas été astiqué. Bizarre, songea-t-elle. Mélissa se vantait toujours d’être une fée du logis.

Il n’y a pas de hasard : si cette série de romans connaît un beau succès (en France comme en Grande-Bretagne et ailleurs), c’est qu’il s’agit d’excellentes comédies policières. Agatha Raisin s’inscrit dans la longue tradition des détectives amateurs se mêlant d’affaire qui ne les concernent pas toujours directement. Volontaire, fouineuse, exaspérante par certains côtés, touchante dans d’autres cas, la quinquagénaire Agatha Raisin entraîne les lecteurs dans des situations drôlatiques et mouvementées. On est séduit par l’ambiance énigmatique "à l’Anglaise" dans le décor des Cotswolds, avec le petit village de Carsely et sa rare population. Non seulement, on adhère aux tribulations d’Agatha Raisin, mais on attend ses prochaines aventures avec impatience. C’est un signe qui ne trompe pas. Le polar et l’humour ne sont pas contradictoire, la preuve !

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14 juillet 2018 6 14 /07 /juillet /2018 04:55

En ces années 1950, le juge Bernomdunchien est en poste à Valognes, dans le département de la Manche. En parallèle de son métier, c’est un passionné d’histoire locale. Il s’intéresse en particulier à celle de la famille Giron, entourée d’une part de légendes et de crimes, qui vivait au 15e siècle au manoir de Réville, qui existe toujours. Même si cette époque est lointaine, il y a encore des documents sur les Giron… À la mi-août, le juge doit faire passer son travail en premier : un cadavre a été signalé aux îles Saint-Marcouf, qui dépendent juridiquement de Valognes. Maillard, un vieux pêcheur alcoolique, attend les autorités sur place. Chargé de l’affaire, le juge se rend sans enthousiasme sur ces îles.

Maillard a perdu la trace de "son" cadavre. Et, dans la brume qui les environne, il n’est pas facile de situer le corps. Dès le lendemain, on met en œuvre de gros moyens pour le chercher, en vain. La marée l’aurait-elle emporté, ou s’agissait-il d’une hallucination due à l’abus d’alcool de la part de Maillard. Le vieux pêcheur peut aussi bien être suspecté car, l’endroit étant peu fréquenté, on peut y supprimer quelqu’un – ou le tuer par accident – avant de donner l’alerte. Éventualité improbable, le vieux Maillard n’ayant pas mauvaise réputation, mais que les magistrats ne peuvent pas écarter. À moins que le crime se soit produit dans un des ports de la région, et qu’on ait transporté le corps sur les îles?

Puisque l’enquête s’enlise, le juge Bernomdunchien s’accorde un peu de vacances. Pour se consacrer à ses recherches sur la famille Giron. C’est au manoir de Réville qu’il espère dénicher du nouveau. La demeure est habitée par une dame, Mme d’Espéchelle, qui n’en est pas la propriétaire mais bénéficie d’un contrat de location pas ordinaire, aux limites de la régularité. Se faire passer pour jardinier, voilà l’astuce qu’a trouvé le juge afin de procéder à des fouilles sur la propriété du manoir de Réville. C’est ainsi qu’il tombe enfin sur le "cadavre des îles". Cette fois, la justice peut passer à l’action. Le juge interroge la dame du manoir, qui semble complètement dépassée par tout cela.

L’autopsie de l’inconnu confirme qu’il a été tué par arme blanche, sans doute pas un poignard courant. Grâce au témoignage d’un prisonnier allemand, ayant fait partie de la garnison résidant durant la guerre au manoir, les investigations vont rapidement progresser désormais. Car cette demeure dissimule depuis des siècles un lieu secret. Dont l’assassin, qui connaissait tous les recoins du manoir, s’est servi…

Maurice-Ch. Renard : L’inconnu des îles (Le Masque) – Grand Prix du roman d’aventure 1954

Maurice-Ch. Renard (1888-1973) était natif de Caen. On ne s’étonnera donc pas qu’il ait utilisé le décor normand pour ce livre, récompensé par le Grand Prix du roman d’aventure 1954. Il y présente des personnages caractéristiques de ce temps-là, quelques années après la fin de la guerre – qui reste alors dans les esprits, bien sûr. Entre le crime du 20e siècle et ceux remontant au 15e siècle, l’intrigue s’avère complexe – habilement construite et fort plaisante à suivre. Le mystère est omniprésent, non dénué de petites touches d’humour ou de sourires. Moins original, plus traditionnel que “Vous qui n’avez jamais été tués” d’Olivier Séchan et Igor B.Maslowski, ce roman de Maurice-Ch. Renard n’est peut-être pas un "polar de référence", mais il mérite qu’on s’en souvienne et qu’on le relise, à l’occasion.

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12 juillet 2018 4 12 /07 /juillet /2018 04:55

Bornéry est une sous-préfecture rurale, non loin de la rivière la Sorgue. Vincent Géraud y est provisoirement le rédacteur en chef d’un petit hebdo local. Parmi les contributeurs, on trouve un vieil auteur de romans-feuilletons, M.Delille. Sa spécialité, ce sont des histoires mortifères appartenant au genre Fantastique, le surnaturel avec des fantômes, des revenants, des jeteurs de sorts, des cas de maisons hantées ou de communication avec l’au-delà. Il prétend se baser sur d’anciens faits réels. Vincent est plutôt sceptique sur ce type de romans, mais ça plaît à un certain lectorat. Pas de raison de censurer la publication : le nouveau titre de M.Delille, “Le manoir de la mort”, sera donc publié par épisode dans son journal.

Par ailleurs, Vincent fait la connaissance d’une touriste excitante, alors qu’elle se baigne nue, Marina. Avec son copain Jean-Jacques, elle fait du camping sauvage dans la région. Ces deux-là sont fauchés, des marginaux de la mouvance hippie de l’époque. Jean-Jacques est sujet à des hallucinations. La nuit, il délire, imaginant spectres et fantômes. Il croit rencontrer une sorcière nommée Clarisse. Or, c’est justement le prénom de celle qui hante la demeure du “Manoir de la mort” et persécute ses habitants. Pourtant, Jean-Jacques n’est pas censé connaître cette histoire en cours de publication… Vincent fait la connaissance d’Agnès, la petite-fille de M.Delille, jolie jeune fille aussi attirante que d’un comportement déconcertant.

Tandis que Jean-Jacques a de nouveau rencontré la sorcière Clarisse, Marina tombe malade. Vincent la fait hospitaliser à la clinique locale. Elle est victime d’une sorte d’empoisonnement. Jean-Jacques ne va pas mieux dans sa tête. Grâce à Agnès, Vincent a lu l’intégralité du “Manoir de la mort”. Il reste trop cartésien pour penser que la sorcière Clarisse, si néfaste et destructrice dans le roman-feuilleton, serait de retour à Bornéry. Bien sûr, il y a les vieilles légendes maléfiques de la région. Certes, c’est troublant même pour un esprit lucide comme celui de Vincent. Mais il existe certainement une autre cause expliquant le parallèle entre la fiction (“Le manoir de la mort”) et les faits se déroulant actuellement à Bornéry…

Dominique Arly : Le manuscrit maudit (Fleuve Noir Angoisse, 1973)

Un rideau d’aulnes, après le virage. Je stoppe à proximité de la rive. Triste spectacle : de l’eau noirâtre qui charrie de l’écume glauque, des dépôts d’une mousse grumeleuse s’accrochent aux cailloux, aux herbes du bord. Je prends quelques photos, me remets au volant, roule vers l’amont. Quelques clichés encore.
Je découvre plus haut les bâtiments riverains de la porcherie et de la laverie, responsables de la pollution. Je ne les photographie pas : si je les dénonçais publiquement, il est probable que La Gazette aurait des ennuis. Et moi aussi. Déplorer le pitoyable état de la Sorgue, ce sera déjà beaucoup.

Rappelons que la collection Angoisse fut publiée chez Fleuve Noir de 1954 à 1974. Paru en 1973, “Le manuscrit maudit” est (sauf erreur) le 18e titre que Dominique Arly (1915-2009) écrivit pour ladite collection. Cet auteur fut plus productif pour la collection Spécial-Police du Fleuve Noir, avec quarante-sept titres à son actif de 1966 à 1980. La tonalité des récits est claire, factuelle, chaque histoire étant teintée d’un érotisme léger. “Le manuscrit maudit” n’est pas destiné à effrayer, a exagérément stresser les lecteurs. Au contraire, le narrateur (Vincent, le rédacteur en chef) conserve une certaine réserve sur l’apparition de la sorcière Clarisse : Jean-Jacques n’est pas un témoin parfaitement fiable. Un roman solide, d’une lecture très agréable, plus polar que surnaturel, par un des piliers du Fleuve Noir de cette époque.

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11 juillet 2018 3 11 /07 /juillet /2018 04:55

Jefferson Cty, aux États-Unis. Lester M.Carradine est un écrivain de best-sellers. Il est marié à Arabel. Ils ont deux grands enfants. Ce soir-là, il reçoit un message annonçant qu’il va être tué sans tarder. Ce qui entraîne une série de cauchemars. Mais c’est au matin que Lester s’aperçoit qu’il est mort, qu’il est devenu un fantôme. Pensant à juste titre que le décès est suspect, le docteur refuse d’accorder le permis d’inhumer. On évoque un éventuel suicide, mais Lester n’avait aucune envie de se supprimer. À l’autopsie, on se rend compte qu’il a été empoisonné. C’est l’inspecteur Howery qui est chargé de l’enquête. Lester étant une personnalité, le consciencieux policier va tout mettre en œuvre pour trouver le coupable.

La liste des ennemis de l’écrivain est longue, tous appartenant au monde littéraire, dans lequel ils ont peu brillé contrairement à lui. En tête, viendrait sans nul doute Dwight Larrimore. S’il se présente comme poète, c’est plus sûrement un escroc. Il était en conflit avec Lester pour une sombre histoire de chèque. Ensuite, Dinah Voltayre figure en bonne place parmi les suspects. Extravertie, elle ne possède pas le moindre talent selon Lester. L’éditeur de ce dernier publie quand même un de ses livres. Mais Dinah et Lester restent en froid par la suite. Il y a encore Hugo van Kesten, sexagénaire marié à Paula, qui écrit des romans d’espionnage. Il se produit un pataquès avec son épouse, qui attise sa haine contre Lester – pourtant responsable de rien.

D’autres écrivains à soupçonner, il y en aurait encore plusieurs. Être un fantôme présente des avantages : Lester suit de près le policier Howery dans son enquête. Il ne faudrait pas oublier Danton Shipka parmi les coupables potentiels. C’est un journaliste malhonnête, qui joue au maître-chanteur, extorquant de belles sommes à Lester. Danton Shipka envisage même de devenir le gendre de l’écrivain. Alors qu’Howery piétine quelque peu, Dinah Voltayre se dénonce spectaculairement. Des aveux qui entraînent son arrestation. Même s’il y a fort à parier qu’elle ne fait ça que pour promouvoir son nouveau livre. Le fantôme de Lester s’interroge sur ses divers ennemis, cherchant celui qui avait le plus de facilité à l’empoisonner. Bientôt, l’assassin sera contraint d’avouer son crime…  

Olivier Séchan – Igor B.Maslowski : Vous qui n’avez jamais été tués (Le Masque) – Grand Prix du roman d’aventures 1951 –

Je repartis avec Howery et l’accompagnai à son bureau. La condition de fantôme – je le précise tout de suite – n’a rien de particulièrement intéressant pour ce qui est des facilités de communication. À part la faculté de traverser les portes sans les ouvrir, il n’y a rien de changé par rapport aux vivants. On ne peut marcher que de son pas naturel et, si l’on veut aller plus vite, il faut utiliser comme le commun des mortels l’auto, l’autobus ou le métro.
Je me fis donc ramener dans l’auto de la police et, en cours de route, bénéficiai des premières réflexions qu’il confia à son assistant qui conduisait la voiture.

Le Grand Prix du roman d’aventures était un Prix-maison, auto-attribué par les éditions Le Masque. Dans ce cas précis, cette récompense ne fut nullement usurpée. Car “Vous qui n’avez jamais été tués” bénéficie d’une véritable originalité, et d’un bel humour. Notons qu’il ne s’agit pas de dérouler simplement une liste de suspect : leurs rapports avec Lester sont détaillés, et riches en péripéties. Tout cela avec une fluidité narrative exemplaire – jamais de lourdeurs dans les bons romans d’alors. Les auteurs sont Igor B.Maslowski (1914-1999) et Olivier Séchan (1911-2006), père du chanteur Renaud, auteur émérite de suspenses policiers et de romans-jeunesse. Ce livre doit figurer parmi les meilleures références de l’histoire du polar.

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