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9 juillet 2014 3 09 /07 /juillet /2014 04:55

Le Tour de France 1957, celui où Jacques Anquetil prit le pouvoir et endossa son premier maillot jaune. Avant que n'arrivent les champions cyclistes de l'époque, passe la caravane publicitaire. “Le Tour de France, c'est une kermesse ambulante. Un soir dans une ville, le lendemain dans une autre, le Tour apporte avec lui la joie et le désordre. Des centaines de voitures, des milliers de gens étrangers à la ville, qui quelques heures plus tard s'en iront, laissant derrière eux en souvenir de leur passage des tonnes de papiers froissés et de bouteilles vides […] Oui, le Tour de France apportait à tous ces gens vingt-quatre heures de folie, une rupture dans leurs traditions, une espèce de liberté de tout faire. Demain, ils reprendraient leurs habitudes un instant brisées. Jusqu'à l'année prochaine.” Partie de Charleroi, l'étape du jour arrive à Metz, avant de rejoindre Colmar le lendemain.

Le car-podium Solocafé, c'est une petite équipe dirigée par la sensuelle madame Micheline et son amant François Ravier. Avec le chauffeur Léon Terroux, l'accordéoniste Dominique Quercy, la jeune artiste Gigi Saint Elme, et le chanteur Bernard Portel. Sexagénaire, Portel a connu une certaine gloire plus de vingt ans auparavant. Marié à Clémence, trente ans, ils ont une fillette de quatre ans, Sylvie. Sans doute Portel est-il un brin ringard, mais il a encore un public nostalgique des vieilles chansons qu'il interprète lors du show du soir, sur le car-podium. Accroc à la drogue, il a connu un long passage à vide, et fut sauvé lorsqu'il rencontra l'amour avec l'infirmière Clémence. Durant ce Tour, il devient miraculeusement l'amant de la romantique Gigi qui n'a que vingt ans. Elle ne lui demande aucune promesse d'avenir, juste trois semaines de bonheur ensemble.

Bernard Portel considère Dominique Quercy comme son meilleur ami. Mais l'accordéoniste masque sa furieuse jalousie envers le vieux chanteur. À l'étape de Metz ce soir-là, armé d'un revolver, Dominique est prêt à éliminer Portel. Alors que le musicien est agressé par un malfaiteur, Portel intervient pour l'aider, gardant sur lui le revolver. Gigi est méfiante envers Dominique, sentant la haine qui habite l'accordéoniste contre Bernard. Au sein de l'équipe Solocafé, l'ambiance est d'ailleurs tendue. Madame Micheline n'apprécie pas que son amant François courtise la jeune Gigi, inutilement. Le chauffeur Léon Terroux observe volontiers le petit cercle qui l'entoure. Nerveux, Dominique Quercy risque d'en venir à se battre avec lui. Car, à l'étape de Colmar, l'accordéoniste ne sait toujours pas comment il va supprimer Bernard Portel. Ce dernier file encore le parfait amour avec Gigi.

Les fâcheries des uns et des autres font ressembler Solocafé à une “caravane-fantôme”, se dit Bernard. “À croire qu'il y a un mauvais sort sur notre équipe” conclut Léon. Le Tour se dirige maintenant vers Besançon, où un coureur italien gagne l'étape, Pierino Baffi. Sans Gigi, dont l'absence est attribuée à une dispute avec Madame Micheline. Mais c'est la mort qui a commencé à rôder autour de Solocafé, causant plusieurs victimes…

Tour de France – Michel Lebrun : La caravane passe (1958)

Michel Lebrun (1930-1996) fut un de nos grands romanciers populaires, récompensé entre autres par le Grand prix de Littérature policière 1956 pour “Pleins feux sur Sylvie”. En 1957, il suivit quelques étapes du Tour de France, s'imprégnant de son ambiance. Ce qu'il restitue avec une belle justesse, au gré de plusieurs paragraphes, décrivant en quelques phrases la caravane publicitaire du Tour. Les partenaires de la Grande Boucle n'ont jamais manqué d'inventivité pour séduire le public de ce grand rendez-vous annuel. On croise ici les silhouettes des Frères Jacques et de l'incontournable Yvette Horner. On évoque les véhicules bigarrés de Cinzano, Verigoud, et autres marques, avec pause dégustation de la Bière de Champigneulles, spectacles du soir dans chaque ville. Et toute la fête qui faisait le charme du Tour de France, au temps où on chantait “La fille du Bédouin”…

Toutefois, il ne s'agit pas d'un reportage sur le Tour 1957, seulement de son contexte. Dans cette habile intrigue, Michel Lebrun met en scène des personnages d'une véritable densité. Par exemple, si Bernard Portel est un “has been”, son parcours n'est pas sans rappeler les carrières fluctuantes d'artistes d'alors. Gigi est assurément moins naïve que son âge le laisse supposer. Le gigolo François est à l'image des play-boys de ce temps-là. On découvre progressivement les motivations de l'assassin potentiel, fort maladroit. “La caravane passe”, jamais réédité, est certainement un roman totalement oublié de Michel Lebrun. À tort, car il s'agit d'un de ses titres les plus réussis.

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8 juillet 2014 2 08 /07 /juillet /2014 04:55
Alex Berg : La marionnette (Actes Noirs, 2014)

L'armée allemande est engagée en Afghanistan, pour la sécurisation d'un secteur du pays. Ce jour-là, deux embuscades des talibans visent des convois allemands. Seize morts et vingt blessés, tel est le bilan de ces massacres. Membre des forces spéciales du KSK, la chevronnée Katja Rittmer a survécu de peu. Blessé, son amant baroudeur Christian Franck a dû être mutilé. Agent émérite des services secrets du BND, Éric Mayer se trouvait en Afghanistan quand les guet-apens se sont produits. C'est un ami de Chris et de Katja. Elle lui apprend que c'est avec des armes perfectionnées allemandes que les convois ont été attaqués. Tandis que ses amis sont rapatriés en Allemagne pour y être hospitalisés, Éric Mayer rentre lui aussi à Berlin. Si des matériels allemands sont parvenus en Afghanistan, c'est que la société Larenz est concernée. Elle a en effet des contacts dans ce pays.

Le ministère de la Défense missionne Éric Mayer et son équipe afin d'enquêter au siège des usines Larenz à Hambourg. Patron de cette société, Klaus Bender a déjà engagé le cabinet d'avocat Meisenberg. Il faut gérer au mieux la crise galopante, qui risque de ternir l'image de Larenz. C'est l'avocate Valérie Weymann qui en est chargée par Meisenberg. Un bon choix, pense Bender. La jeune femme se retrouve face à Éric Mayer, qu'elle connaît. Magnus Vieth, ami de Valérie, fait partie des dirigeants de Larenz. Après avoir transmis une clé USB à l'avocate, Magnus trouve la mort dans des circonstances suspectes. On va évoquer officiellement un suicide. Mais Katja Rittmer, alors engagé comme garde du corps de Magnus, est inquiétée par la police. Éric s'arrange pour qu'elle reste en liberté. Valérie accepte d'être l'avocate de Katja, en cas d'accusations plus graves encore.

Sous l'effet du stress post-traumatique, Katja menace Éric. Mais c'est en Afghanistan que va se jouer la suite de la partie. Klaus Bender et une délégation économique s'y rendent peu après, accompagnés d'Éric. Sur place, se trouve l'agent de la CIA Don Martinez, qui n'est pas un inconnu pour l'Allemand. Il protège James Reynolds, sénateur du Michigan, qui supervise l'approvisionnement des troupes américaines là-bas. Il est impliqué dans des malversations, ayant touché son pourcentage sur certains trafics, et peut-être mêlé à la question des armes allemandes. Effectivement, James Reynolds et Bender se rencontrent dès leur arrivée dans le pays. À l'heure où Katja devient vraiment dangereuse, Martinez va intervenir sur le territoire allemand. Valérie Weymann, Éric Mayer et lui collaborent alors, que ça leur plaise ou non…

Alex Berg : La marionnette (Actes Noirs, 2014)

Après le très convaincant “Zone de non-droit” (2013), la romancière allemande Alex Berg nous entraîne dans une nouvelle intrigue internationale impliquant son pays. Il s'agit à la fois d'un roman d'action, car les héros vont être confrontés à maintes épreuves, et autant d'un véritable roman noir. Au-delà des aventures mouvementées racontées ici, ce sont les enjeux politico-économiques qui sont traités avec un réalisme certain. Comme tous les pays occidentaux, l'Allemagne est présente dans de nombreux états à travers le monde, ménageant ses intérêts. Ce que la soldate Katja résume bien : “Tout ce que je veux, c'est que les gens dans ce pays sachent ce qui se passe. Car il y a belle lurette, en Afghanistan et ailleurs dans le monde, que les soldats allemands qui se battent et qui meurent ne le font plus pour permettre à la population de mener une existence décente, mais pour protéger les putains d'intérêts économiques de ce pays...”

L'autre sujet fort, ce sont les syndromes post-traumatiques touchant les militaires. Ce que les Américains vivent après des décennies de guerres, les Allemands n'y échappent pas non plus. Ayant elle-même subi précédemment tortures et maltraitances, l'avocate Valérie est en mesure de comprendre. Ces ex-combattants perturbés sont aussi des proies faciles pour quiconque saura les manipuler. Quand s'annoncent des coups tordus, ou lorsqu'il faut limiter les scandales, les autorités politiques ont toujours leur rôle à jouer… Un suspense riche en péripéties, qui nous présente également un sombre aspect du monde actuel. Ce roman a été sélectionné pour le Grand prix de Littérature policière 2014.

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7 juillet 2014 1 07 /07 /juillet /2014 04:55
Ingrid Desjours : Sa vie dans les yeux d'une poupée (Pocket, 2014)

Barbara Bilessi est une esthéticienne fraîchement diplômée âgée de vingt-quatre ans. Elle habite avec sa mère aveugle, Marthe. Les deux femmes ne s'entendent pas très bien, la mère se montrant mordante avec sa fille. Barbara collectionne les poupées authentiques. Elle vient d'en acquérir une quand, rentrant chez elle ce soir-là, elle est agressée et violée dans un parc. Peu après, Barbara commence à travailler dans un institut de beauté. Elle reste dans le déni de son récent viol. Elle dialogue régulièrement avec la dernière poupée achetée, Sweet Doriane. Barbara se fâche contre l'influence qu'exercerait sur elle cette poupée, et la martyrise. Si elle a un petit ami, ce Raoul Poncet n'est certainement pas le prince charmant. Il se proclame “son mec”, mais ignore bien des choses sur Barbara.

Dans son personnage de Barbie, la jeune femme augmente son salaire en se prostituant. Ce second métier ne nécessite aucune attirance sexuelle, juste d'avoir l'esprit clair vis-à-vis des hommes. Par le bouche à oreille, elle se fait vite une petite clientèle. Dans son déni du viol, Barbara a vécu une grossesse fantôme. La voilà qui accouche par surprise d'un bébé. Un garçon, qu'elle n'a pas l'intention de déclarer officiellement. Fatalement, la mère de Barbara est mêlée à cette situation. C'est Marthe qui surveillera le petit quand, après quelques jours d'arrêt-maladie, l'esthéticienne retourne à l'institut de beauté. Barbara se comporte telle une maman attentive. Par contre, l'arrivée du bébé entraîne des disputes sérieuses avec la jalouse poupée Sweet Doriane.

Policier, Marc Pergolès a été victime avec sa compagne Annabelle d'un accident de voiture. La femme est décédée. Le policier a été amputé d'une jambe. Il est maintenant équipé d'une prothèse. De l'avis de son collègue et ami Ange Gardeni, Marc aurait dû prolonger sa convalescence. Car le caractère de Marc est plus agressif que jamais. Peut-être parce qu'il savait qu'Annabelle lui était infidèle, l'accident prend un autre sens dans sa tête. Il ne se contente pas de jouer au provocateur, mais pratique aussi la roulette russe. Ange est inquiet pour la santé mentale de Marc. Tandis qu'il suggère à son ami de voir un psy, il fait intégrer le policier dans la brigade des mœurs de leur commissariat.

Marc Pergolès va y être bientôt confronté à une affaire qui captive son attention. Le psy qu'il a rencontré est la troisième victime d'une prostituée. Celle-ci attache ses clients, se grime avec une moustache, et torture les hommes venus la voir. Marc, ayant esquissé un profil assez juste de la coupable, estime que cette femme n'en restera pas là. Qu'elle va finir par carrément tuer ses clients. Marc réussit à identifier la prostituée, et se propose de servir d'appât pour l'arrêter. Il imagine la détresse psychologique de la coupable, ce qui n'est pas sans l'émouvoir, lui qui n'éprouve plus guère de sentiments…

“Barbara a besoin d'être aimée. Par son enfant, par sa mère, par un homme. Et cet amour, elle l'obtiendra, même si ce doit être par la force.”

“Barbara a besoin d'être aimée. Par son enfant, par sa mère, par un homme. Et cet amour, elle l'obtiendra, même si ce doit être par la force.”

Moitié-moitié. C'est la forme choisie par l'auteure pour nous raconter cette histoire. D'un côté, il y a Barbara. Un cas psychiatrique, pas la peine de le taire. De l'autre, il y a Marc. Un caractériel suicidaire, inutile de le cacher. Existent donc deux possibilités pour les lecteurs. Soit on les accepte tels qu'ils sont, avec risque d'aggravation de leur état, car une amélioration est improbable pour l'un des cas. Soit on les juge négativement, en tant que personnages dérangés. Car la folie, schizophrénie ou instincts violents, peut constituer une explication, pas une excuse à tout.

Ingrid Desjours maîtrise très bien la construction de l'intrigue. Le déni de grossesse après viol, le petit ami qui ne correspond nullement à la jeune femme, les sautes d'humeur du policier, tout cela est distillé selon un bon dosage. Néanmoins, on pourra regretter une tendance à surcharger certains effets. Débuter un chapitre par “Putain de bordel de merde !”, parce qu'une sixième agression est découverte, c'est excessif. Si les dialogues avec la poupée sont justifiés, quelques passages de ces conversations apparaissent plus artificiels. En somme, la tension est déjà présente, n'en rajoutons pas. Petit défaut qui n'a rien de rédhibitoire, toutefois. En acceptant le jeu psychologique, c'est un roman qui se lit avec un certain entrain.

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6 juillet 2014 7 06 /07 /juillet /2014 20:00

La huitième édition du festival du polar corse et méditerranéen sera sur les rails le 18 juillet en partenariat avec les Chemins de Fer de la Corse. Au départ de Bastia, de passage à Corte, puis à Ajaccio (le 19 juillet) et au CCAS de Porticcio (le 20 juillet), le rendez-vous 2014 des amateurs de littérature policière s'annonce prometteur: deux rencontres en nocturnes sont d'ores et déjà  au programme, à la librairie Album le 18 juillet à Bastia en présence d'Elena Piacentini, d'Anouk Langaney et de nombreux autres auteurs dont Olivier Collard, Okuba Kentaro, Petr'Anto Scolca, Hervé Sard , Antoine Albertini et Jean-Pierre Orsi, et sur la place Foch à Ajaccio le 19. Une petite surprise de 80 pages attend également les lecteurs : un recueil collectif dédié au train de la Corse, rassemblant Elisabeth Milelliri, Eric Patris, Ugo Pandolfi et Jean-Paul Ceccaldi, est publié  par les éditions Ancre Latine en partenariat avec les CFC à l'occasion de cet événement. Tous les renseignements sur le blog officiel du polar en cavale.

Festival 2014 du polar corse et méditerranéen : 18-19-20 juillet
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6 juillet 2014 7 06 /07 /juillet /2014 09:10

C'est début septembre que paraîtra (aux éditions Glyphe) le prochain roman d'Olivier Kourilsky. "Le 7e péché" sera le septième roman de cet auteur.

Pour mettre en appétit ses lecteurs, il nous propose une vidéo alléchante...

(il est conseillé d'élargir l'écran pour apprécier)

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5 juillet 2014 6 05 /07 /juillet /2014 23:10

Comme chaque année, Action-Suspense reste présent avec vous durant toutes les vacances estivales. Parce que vous avez envie de vous informer sur les meilleurs polars du moment, grand format et poche. Parce que vous souhaitez en savoir plus sur certains titres, actuels ou plus anciens. Parce que la passion du polar ne s'interrompt pas pendant l'été, tout simplement. Merci de rester fidèles aux chroniques et aux infos d'Action-Suspense. Avec plus de 2140 articles, vous avez ici de quoi explorer toute la diversité du polar. Et la liste des liens vers les bons blogs et sites vient d'être encore augmentée. Ensemble, nous allons encore découvrir beaucoup de romans, y compris des talents moins connus...

Et surtout, n'hésitez jamais à laisser vos commentaires. Cet espace est aussi fait pour dialoguer entre lectrices ou lecteurs !

Amitiés à toutes et tous.

Les meilleurs polars et de l'info pendant tout l'été 2014 !
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5 juillet 2014 6 05 /07 /juillet /2014 04:55
Jérôme Zolma : 3 morts sinon rien (Éditions Wartberg, 2014)

Lily Verdine est une détective privée parisienne, qui n'a pas totalement renoncé à l'esprit gaucho tendance anar de sa jeunesse. Quand l'avocat maître Illouz, ténor du barreau, lui soumet le cas de Julien Vaudreuil, elle lit attentivement le texte personnel dans lequel ce suspect, incarcéré depuis six mois, expose les faits. Habitant Perpignan, Julien Vaudreuil est âgé de quarante-cinq ans. Guide pour des voyages thématiques, il vit seul. Ce jour-là, il se trouvait dans le train à destination d'Hyères, où il allait voir ses parents. Il remarqua la jolie jeune femme de vingt-quatre ans dans la même voiture. À l'arrivée, il s'aperçut qu'elle était morte entre-temps. Le voilà unique témoin du meurtre par empoisonnement de Sarah Pigani. Une affaire dont la presse ne se fit pas l'écho, note Lily Verdine.

Peu après son retour à Perpignan, Julien Vaudreuil fut mis en état d'arrestation. Deux cas similaires, ayant pour arme un “parapluie bulgare” lanceur de poison, se sont produits à Barcelone et à Stockholm. Or, Julien y était présent à ces moments-là, dans le cadre de son métier de guide. La Justice dispose d'indices, se base sur des présomptions, mais il n'y a pas de véritable mobile accusant Julien. Ce dernier a préféré un cador plutôt qu'un avocat local perpignanais. Misant sur l'innocence de son client, maître Illouz imagine un complot visant Julien, sans en discerner la raison. Lily contacte un flic sympa écarté de cette affaire, Jean-Yves Floch. En désaccord avec sa hiérarchie, ce Breton opiniâtre pense qu'un tel sac de nœuds pourrait bien masquer une obscure machination.

Lily s'avoue séduite par ce veuf élevant deux enfants. Le flic Floch pourra actionner des leviers l'aidant pour son enquête. Victor, voisin retraité de Lily, lui donnera un petit coup de main, lui aussi. La détective rend visite à la famille de Sarah Pigani, à Hyères, dont le frère apparaît plutôt surexcité. Puis elle se dirige vers Perpignan, espérant interroger un témoin propriétaire d'une casse-auto, Roland Vila. S'introduisant avec hardiesse sur le chantier, Lily découvre que l'homme a été assassiné. Un meurtre qui, plus tard, lui vaudra quelques ennuis, même si la version officielle évoque un crime de truand. Lily reste en contact avec Jean-Yves Floch, avant d'aller voir Julien Vaudreuil aux Baumettes, puis de chercher des éléments à Barcelone. Où la famille modeste de Pilar Esteban ne peut l'aider.

La jeune victime barcelonaise était employée par un journal économique. N'obtenant pas les documents souhaités, l'intrépide Lily Verdine se laisse enfermer dans les locaux afin de copier un rapport de Pilar Esteban. De retour à Paris, il se confirme qu'elle ne peut mener incognito son enquête, ce dont Floch l'avait avertie. Lui-même prend des précautions. Elle finit par se demander si elle doit faire confiance à ce policier…

Jérôme Zolma : 3 morts sinon rien (Éditions Wartberg, 2014)

Si l'on n'a pas eu la chance de suivre les précédentes aventures de Lily Verdine (Mistral cinglant, Croisière jaune, Adios Viracocha, Lily en eaux troubles – disponibles chez Jigal), il n'est pas trop tard pour faire sa connaissance grâce à ce titre. Qu'elle soit une détective femme n'est pas la seule originalité de ces suspenses. S'il lui arrive de tomber amoureuse de partenaires d'enquêtes, comme ici, la percutante Lily est surtout une solitaire. Elle n'a pas renié ses opinions d'antan : son caractère reste rebelle face aux magouilles, qui sont monnaie courante dans notre monde. Il n'est pas exclu que ce soit le cas cette fois aussi.

Jérôme Zolma, dont il faut aussi lire l'excellent “Amères thunes”, fait partie de ces auteurs sachant concocter des intrigues plus tortueuses qu'il y paraît. Roman d'enquête riche en péripéties, certes, mais il faut compter avec une construction habile pouvant réserver des surprises. N'ignorant pas que la fluidité de la narration est capitale, Zolma n'utilise pas de moyens dilatoires pour égarer ses lecteurs. Ce sont les faits tels qu'ils sont vécus par Lily Verdine qu'il nous raconte. Non sans quelques sourires, on le verra par exemple quand elle se laisse enfermer dans les bureaux d'un journal catalan. Ou quand elle tente une intimité contrariée avec le flic Floch. Un solide polar, comme on les aime.

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3 juillet 2014 4 03 /07 /juillet /2014 04:55

L'hebdomadaire VSD et le magazine Alibi proposent en cet été 2014 un hors-série, intitulé “Les cahiers du polar”. Il est présenté comme premier numéro d'une nouvelle publication. On peut souhaiter qu'il y en ait d'autres à venir, en effet. Le thème exploité ici, ce sont les faits-divers, ce qui explique le sous-titre “Crime à la Une”. D'ailleurs, on débute par un peu d'archéologie criminelle, d'historique de la propagation médiatique des faits-divers. Réalité des enquêtes journalistiques ou fiction, Dominique Kalifa résume les rapprochements : “Le roman de police, lui, est à la recherche d'un personnage spécifique, investigateur par profession ou par inclination, mais extérieur au drame et exclusivement chargé de mener une enquête. Damant le pion au policier et au détective, le reporter s'y impose peu à peu comme l'incarnation de l'investigateur.”

Un portrait du chroniqueur judiciaire Paul Lefèbvre, un autre de Jacques Pradel, un sujet sur les émissions de télé consacrées au faits-divers (tels Faites entrer l'accusé, Enquêtes criminelles, Présumé innocent…), un autre sur l'évolution du spectacle télévisé du crime depuis bientôt soixante ans : oui, la médiatisation du sordide ou de l'énigmatique est un bon moyen de faire de l'audience. Le journaliste macédonien Vlado Taneski l'avait fort bien compris, donnant une multitude de détails sur une série de meurtres. Il était le mieux placé, en effet, puisque c'était lui, l'assassin. Mais il y a aussi des victimes. Telle Sophie Toscan du Plantier, assassinée en décembre 1996 en Irlande, une affaire qui n'a toujours pas abouti. Telle Karine Duchochois, une des “innocentées” de l'affaire d'Outreau, devenue journaliste spécialisée dans le domaine judiciaire. Elle n'a pas manqué de courage.

Les cahiers du polar : Crime à la Une

Dans l'ombre des ténors du barreau, les avocates pénalistes commencent à se forger la place qu'elles méritent dans les dossiers judiciaires importants. D'autres magistrats ont choisi de développer des blogs, manière de montrer en dehors des prétoires la complexité des humains et des cas traités par la justice. Pour évoquer l'actualité criminelle, le reporter peut s'adresser au service d'information du ministère de l'Intérieur, même si ce n'est pas sa seule source, en général. Par contre, la multiplication de prétendus experts squattant les plateaux des émissions de télévision à chaque affaire spectaculaire laisse sceptique. Si quelques-uns sont fiables, beaucoup ne sont invités que pour exposer de fumeuses théories afin de se mettre eux-mêmes en valeur. Ils participent au “storytelling”, à faire peur aux gens comme jadis Roger Gicquel, en exploitant de vrais crimes.

Un article sur les films et un autre sur les séries-télé s'inspirant souvent, dans les deux cas, de faits réels (le romancier George Pelecanos y contribue, d'ailleurs). Un sujet sur les vrais policiers qui se mettent à écrire des fictions, depuis Hugues Pagan jusqu'à Jean-Marc Souvira. Voilà qui nous relie (enfin) au polar, à la fiction. Une galerie-photo nous présente en images des auteurs : Franck Thilliez, Sam Millar, R.J.Ellory, David Peace, Alexandra Schwartzbrod, Denis Lehane, Donato Carrisi, Maj Sjöwall, Cathy Unsworth, Kent Anderson, Qiu Xiaolong, Edmon Baudouin. Un sujet est dédié à la romancière Hannelore Cayre, publiée aux éditions Métailié. Notons aussi une page concernant Hafed Benotman et Anne Perry, qui ont pour point commun d'avoir eu des ennuis avec la Justice. Plusieurs autres “pages spéciales” s'intéressent à des sujets ciblés, citant quelques ouvrages (avec un extrait de “L'homme qui a vu l'homme” de Marin Ledun).

Un bel article souligne que des auteurs littéraires ont voulu s'approcher du réel, au risque d'un procès avec les intéressés. Parfois, avec un grand talent, comme Truman Capote. On lira avec plaisir la conception de Pierre Lemaitre sur le réalisme : “Il ne faut pas confondre le réel et l'exactitude. Chacun a sa réalité, sa vérité. L'exactitude, c'est deux et deux font quatre, c'est indiscutable. Mais quatre euros pour moi, quatre pour vous ou quatre pour un SDF, ce n'est pas la même chose… Du coup, j'ai envie de vous répondre que l'exactitude, je m'en fiche. Dans mon roman “Cadres noirs”, j'ai interverti le réquisitoire du procureur avec la plaidoirie de l'avocate. Même si je sais que ça ne se passe pas comme ça dans la réalité, je fais ce que je veux. Pour créer l'effet que je souhaitais, pour la dramaturgie de mon texte.” On nous propose au final une nouvelle inédite de Bernard Werber, “Meurtre dans la brume”.

Espérons donc que ce hors-série “Les cahiers du polar”, disponible tout l'été, ne sera pas un numéro unique. Il s'adresse autant aux amateurs de faits-divers qu'aux passionnés de polars.

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