Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
19 juillet 2014 6 19 /07 /juillet /2014 04:55

En cet été 2014, sont réédités deux romans écrits par des auteurs contemporains, sur la base de l'œuvre de Conan Doyle. “La liste des 7” de Mark Frost parut en 1995 chez Plon. On peut redécouvrir ce roman en grand format, chez le Cherche-Midi (collection NéO). “La solution à 7 %” de Nicholas Meyer date de 1976. On a pu le trouver chez J'ai Lu. Ce suspense est désormais disponible en format poche chez Archipoche. Du même auteur et dans le même esprit, “Sherlock Holmes et le fantôme de l’Opéra” est aussi en poche. Trois romans apocryphes, mais qui respectent l'univers de Conan Doyle et de Sherlock Holmes. Petit rappel des présentations-éditeurs de ces livres...

Mark Frost : La liste des 7 (Cherche-Midi, 2014)

Qui en veut à Conan Doyle ? En ce jour de Noël 1884, le jeune médecin participe, en tant que spécialiste des forces occultes, à une séance de spiritisme qui tourne mal. Il échappe de justesse à l'assassinat grâce à un mystérieux individu, Jack Sparks. De retour chez lui, Doyle retrouve son appartement incendié, sa voisine russe assassinée. Autant de faits qui dépassent l'entendement de Scotland Yard. C'est finalement Jack Sparks, à qui ces événements semblent très clairs, « élémentaires » même, qui va mettre Doyle sur la piste d'une conspiration qui menace le trône d'Angleterre. Leur seul indice : une liste de sept noms, les sept piliers d'une fraternité secrète aux desseins maléfiques. Mais Doyle peut-il vraiment faire confiance à Sparks, un individu qui sort d'un asile d'aliénés, consomme de la cocaïne et affirme recevoir ses ordres de la reine Victoria ?

Avec son premier roman, se déroulant dans l'atmosphère sombre de l'Angleterre victorienne, celle de Jack L'Éventreur, Mark Frost livre un récit haletant, émaillé de nombreuses allusions à l'œuvre de Conan Doyle.

Mark Frost et Nicholas Meyer, au temps de Sherlock Holmes

Nicholas Meyer : La solution à 7 % (Archipoche, 2014)

Depuis son mariage avec Mary Morstan, le Dr Watson n’a guère l’occasion de voir son vieil ami, l’enquêteur Sherlock Holmes. Un soir, ce dernier s’invite dans son cabinet. Il se dit poursuivi par son ennemi héréditaire, l’odieux professeur Moriarty. Mais l’agitation de Holmes, ses propos incohérents font redouter le pire à Watson : le détective s’est drogué au-delà de toute mesure. Son addiction à la cocaïne a atteint un stade irréversible. Désormais, sa vie semble en danger.

Avec le concours de Mycroft Holmes, son frère, Watson décide d’emmener son ami se faire soigner à Vienne par un éminent spécialiste – et le seul à ce jour – du traitement de la toxicomanie. Un certain Sigmund Freud… Fondé sur « un manuscrit retrouvé du Dr Watson », La Solution à 7 % (adapté au cinéma en 1976, avec Laurence Olivier dans le rôle de Freud) présente la théorie d’un Moriarty inexistant, pur produit du cerveau drogué de Holmes – et cause de sa névrose mélancolique.

N.Meyer : Sherlock Holmes et le fantôme de l’Opéra (Archipoche, 2010)

Le document présenté ici lève le voile sur un épisode peu connu de la vie de Sherlock Holmes : son séjour à Paris, en 1891, alors que toute l’Angleterre le croit mort et enterré. Musicien accompli, le célèbre détective vivote dans la capitale française en donnant des cours sous un nom d’emprunt. Apprenant que le prestigieux orchestre de l’Opéra de Paris recrute un violoniste, il se présente et est engagé. Très vite, il découvre que le Palais Garnier est, depuis plusieurs mois, sous la coupe d’un personnage dictant sa loi aux chanteurs et aux administrateurs.

Le « fantôme de l’Opéra » existe-t-il ? Comment, à défaut, expliquer les accidents à répétition qui viennent endeuiller l’auguste théâtre ? Et les voix que chacun dit entendre résonner dans le labyrinthique édifice ? Chargé de protéger Christiane Daaé, une jeune soprano dont la vie est en danger, Sherlock Holmes va se retrouver aux prises avec l’un des criminels les plus machiavéliques qu’il ait eu à affronter. Une chasse à l’homme qui va l’entraîner, à travers le Paris nocturne et souterrain, dans une course contre la montre… et la police française.

Partager cet article
Repost0
18 juillet 2014 5 18 /07 /juillet /2014 04:55

Selon les rares infos à son sujet sur Wikipedia, Frédéric Valmain est né le 31 janvier 1931 à Alger, et mort le 9 juin 2003 à Champigny (Val-de-Marne). Il était acteur, scénariste, et écrivain. De son vrai nom Paul Baulat, il commence à tourner de tout petits rôles, avant de rencontrer le succès au théâtre avec “Liberty bar” qui est aussi sa première œuvre théâtrale. [Cette pièce est très souvent attribuée à Frédéric Dard, notamment par Thierry Cazon en 2001, Pierre Assouline en juillet 2008 et par Alexandre Clément en 2012. "Le flamenco des assassins" fut adaptée au cinéma sous le titre de "Johnny Banco", ce roman aurait pu également avoir été écrit par Frédéric Dard.]

Par contre, nul ne semble contester que “La mort dans l'âme” (1958) soit effectivement un roman de Frédéric Valmain. La tonalité est fort éloignée de ce qu'écrivait Frédéric Dard durant ces années-là, même s'il variait son style, à l'évidence. Un jeune héros désinvolte et arriviste navigue entre plusieurs femmes, commettant un crime pour assurer son avenir en profitant des circonstances.

Dans la collection Spécial-Police du Fleuve Noir, Valmain aurait utilisé le pseudo de James Carter. Ce qui est aussi partiellement contesté par ceux qui voient l'ombre de Frédéric Dard partout. J'ai testé plusieurs James Carter, dont “L'âge de déraison” (1977). On est là encore à mille lieues de l'inspiration et de l'écriture de Frédéric Dard. Une bonne petite intrigue avec une narration fluide, pour un suspense agréable comme il s'en est publié beaucoup alors. Grosse différence avec les quatre San-Antonio parus cette année-là.

Pour ma part, sans la moindre polémique, je ne suis pas du tout convaincu que Frédéric Valmain et James Carter aient été des pseudos de F.Dard, ce qu'il a d'ailleurs nié. Donc, ne payons pas au prix fort ces romans anciens, d'un bon niveau mais pas forcément attribuables à Frédéric Dard.

Frédéric Valmain : La mort dans l'âme (1958) + James Carter : L'âge de déraison (1977)

Frédéric Valmain : La mort dans l'âme (Arthème Fayard, 1958)

 

Quartier Latin, à la fin des années 1950, au temps où tout le monde chante “Les feuilles mortes” de Prévert. Sacha Terbieff est un jeune peintre de Saint-Germain-des-Prés, qui ne cache pas son ambition de se faire un nom. Ce trentenaire est en couple depuis une année avec Anna-Maria Pétracci. Italienne de vingt-trois ans, elle suit des cours à la Sorbonne. Elle est moins attachée au succès que son compagnon. Trois toiles de Sacha sont exposées parmi d'autres dans une galerie. Dès le vernissage, se présente une acheteuse. Il s'agit de la comtesse Frieda Wrumberg, belle quadragénaire (avouant trente-cinq ans) aux grand yeux bleus acier, au fin visage triangulaire cerné de cheveux blonds et courts.

La comtesse n'est pas seulement ravissante, elle est surtout riche. Elle demande à Sacha de lui livrer les toiles chez elles, après la durée de l'expo. Au 13 Quai de Boulogne, la demeure de Frieda Wrumberg respire le luxe. Les sculptures qu'elle réalise sont peu au goût de Sacha. Ce qui ne l'empêche pas de sortir ce soir-là avec Frieda et son toutou, le pékinois Jiky. Sacha la laisse mijoter ensuite pendant une semaine, avant qu'ils ne deviennent amants. Jalouse d'Anna-Maria, Frieda propose le mariage à Sacha. Ce qu'il accepte vite, quittant brutalement sa compagne. C'est en Italie que les nouveaux mariés passent leur voyage de noces. Se disant souffrante, Frieda provoque leur retour anticipé. Elle avait envie d'un ravalement de façade, tout simplement.

Ces caprices de Frieda rendent lourde l'ambiance chez elle. Sacha renoue avec Anna-Maria. Postant une lettre d'adieu à Frieda, le peintre part en voiture sur la Côte d'Azur avec sa compagne. Ils ont un accident, provoquant la mort d'Anna-Maria. Comme elle portait au doigt l'alliance de Frieda, Sacha en profite. Se disant que son épouse à entraîné une malédiction sur lui et sa compagne, il s'en débarrasse. Il prépare une fausse version pour M.Spizer, l'homme d'affaires de Frieda, qui organise les funérailles et la succession. Pour les obsèques, arrive de Londres la fille de la défunte, Nadja, vingt-cinq ans...

 

James Carter : L'âge de déraison (Fleuve Noir, 1977)

 

Joseph Picock est professeur dans les environs de New York. Il est marié à Gloria depuis une vingtaine d'années. Cette ancienne strip-teaseuse est devenue une femme d'intérieur exigeante, ce qui ennuie son époux. C'est ainsi qu'un jour, Picock la fait tomber dans les escaliers. Moitié-accident, moitié-crime, le digne époux de Gloria n'est nullement inquiété. Le voilà enfin libre. De son côté, Orso Chérubini est libre, lui aussi. Car il vient de s'évader de prison, se faisant passer pour malade. Chérubini fut le compagnon de Gloria, avant son mariage avec Picock. Il a été emprisonné durant un quart de siècle à Sing-Sing. Comme Gloria n'avait jamais cessé de lui écrire pendant son incarcération, le FBI pense que l'évadé va chercher à la contacter pour faciliter sa fuite.

Jo Picock n'a pas l'intention d'alerter les flics lorsque Chérubini débarque chez lui. Bien au contraire, ça mettra un peu de piment dans la vie de ce lecteur assidu de polars. Il compte protéger Chérubini, le cacher. Touché par cet accueil, l'ex-Ennemi public n°1 lui fait même des confidences sur le pactole qu'il a planqué. Chérubini est plus souffrant qu'il ne le pensait lui-même, au point de trépasser. Picock se demande alors s'il ne serait pas capable de jouer son rôle, afin de retrouver l'endroit où se trouve le butin de Chérubini. Les deux hommes se ressemble plus ou moins. Après tout ce temps, personne ne se souviendra des traits exacts de Chérubini.

Il contacte un certain Willy, qui détient le renseignement recherché. Avocat véreux, Willy l'invite à séjourner quelques jours chez Madame Bijou, patronne d'un bordel de luxe. Sans tarder, Picock tombe sous le charme de la séduisante Yoko. Cette domestique ne semble pas insensible à sa prestance de quinquagénaire. On ne peut guère se fier à Willy. Quand l'avocat va se montrer gourmand, Yoko choisira d'aider Picock. Le couple va bientôt se diriger vers la Californie, en quête du trésor de Chérubini. Il se trouve du côté de San Luis, sur le boulevard du front de mer, dans un vieux fortin puant. Malgré sa maturité, Picock risque de se montrer aussi naïf qu'un enfant de chœur...

Partager cet article
Repost0
17 juillet 2014 4 17 /07 /juillet /2014 04:55

En ces débuts de la décennie 1970, l'espionnage est une activité à plein temps entre l'Est et l'Ouest, ou inversement. La France compterait presque pour quantité négligeable dans le domaine du secret international, de la barbouzerie tous azimut. Sauf si le commissaire San-Antonio et le mastard Bérurier sont missionnés pour résoudre un bintz d'enfer. Le topo, c'est qu'un agent de l'Est a vendu des documents à nos services français. Mais il s'est fait voler son attaché-case à l'aéroport de Catane, avant de se faire buter plus tard. Voici donc San-Antonio et Béru en Sicile, pour récupérer la valoche et ses papelards. Pour ça, ils repèrent un voleur pro local, le nommé Donato. Ils le filochent jusqu'à domicile, lui mettent la pression en kidnappant sa jolie sœur Lila, pas une farouche.

Passons sur des obsèques motorisées, et sur le moment où San-Antonio risque de périr en étant jeté dans la lave de l'Etna. Le commissaire et le goinfre Bérurier sont “invités” à Messine, pas pour pêcher la sardine mais chez un chef de la Mafia. Marchand de cercueils, cet Aldo Cesarini prétend négocier la valise, qu'il ne possède pas. Un temps captif, San-Antonio est libéré par les femmes du mafieux. Il en profite pour sauter successivement l'épouse de Cesarini, sa fille veuve, et sa petite-fille. Cette dernière, Thérésa, le conduit chez son grand-père maternel, un potier, où il pourra se planquer. Le répit sera court pour San-Antonio. Les sbires de l'organisation “Code Z”, dirigée dans le coin par la vieille actrice Linda Benson, cognent et séquestrent bientôt le vaillant commissaire.

San-Antonio a été contraint de leur avouer que sa mission n'est pas aussi claire que ça. Alors qu'il sert de cible façon stand de tir, un duo de tueur intervient, exécutant la bande de mercenaires de “Code Z”. Ceux-là sont plus ou moins des alliés, puisqu'il s'agit des services secrets ricains. Dont le QG se trouve sur un navire mieux équipé qu'il n'en a l'air. Avec eux, San-Antonio tente une explication de l'imbroglio (un mot rital qui s'impose). Les documents existent sans exister, mais c'est pas le principal, en somme.

Le commissaire en réchappe encore, tandis que les joyeux espions amerloques sont à leur tour dézingués. Il va faire la connaissance d'une belle Suédoise de vingt-cinq ans (pléonasme) nommée Ulla Hopp. Une complice bien utile quand San-Antonio recontacte le voleur Donato. Et puis, nonobstant quelques autres péripéties, il ne faut pas que le commissaire oublie de récupérer son adjoint Bérurier, avant d'aller exposer la situation au Vieux et au ministre de tutelle…

San-Antonio : Si, signore ! (Pocket, 2014)

Un San-Antonio d'il y a tout juste quarante ans. Comme le commissaire est un multi-carte de l'aventure, un varié dans les missions, le voici lancé dans une histoire où une Mata-Hari ne saurait plus qui trahir (c'est une image). Donc, il y a une valoche à retrouver, que tout le monde veut, mais qui n'a aucune importance, vous suivez ? En réalité, ce serait ce qui se passe sur un îlot sicilien qui est inquiétant, paraît-il. L'essentiel, c'est que ça extermine beaucoup autour de San-Antonio. Du cadavre à longueur de chapitres, et pas de temps mort, voyez. Dès que les services secrets passent à l'action, c'est ainsi. Et avec un max de gaudriole sexuelle suggérée, également, car le commissaire ne laisse aucune femme passer à sa portée sans la lutiner à la française. Faut que ça bouge, à tous points de vue.

L'auteur ne manque pas d'ironiser sur les beaux esprits littéraires, microcosme dont il est exclu : “Écrivailleur de calembredaine, c'est pestilentiel, dégradant. Ça rejaillit sur l'espèce entière. Tout le monde en subit les éclaboussures. Le romancier, pour être respecté, faut qu'y soye aussi homme de lettres. Bien tartant, pompeux, verbeux, docte. C'est pourquoi je cantonne dans la bienséance, tu remarqueras. Je me fais oublier le passé. Je me virginise le style en déployant les grands artifices. Pas bête, hein ? P't-être qu'un jour, je serai amnistié. On me laissera mourir dans le rang, en bout de file, en bout de table, mais parmi. Je serai gracié à force d'application. Ils diront : voyez, il avait bon fond, ce Santonio. Il était récupérable. L'âge lui a dessillé les yeux. Il a compris où se trouvait la vérité...” San-Antonio les dépassera en talent pendant encore plus d'un quart de siècle.

Outre “Si, signore !”, sont actuellement réédités “Maman les petits bateaux” et “En avant la moujik”, publiés autour des années 1970. Les occasions de (re)découvrir l'univers de San-Antonio ne manquent pas.

Partager cet article
Repost0
16 juillet 2014 3 16 /07 /juillet /2014 04:55

Ses tribulations conduisent Maqroll el Gaviero (le Gabier) partout à travers le monde, dès que se présente l'opportunité d'une aventure sur mer ou sur terre. Ponctuellement, Mutis croise son ami Maqroll sur l'un ou l'autre continent. Dans son errance perpétuelle, Maqroll est de passage en Californie quand il est victime d'une crise aiguë de malaria. Il s'est réfugié dans un motel tenu par un couple d'amis, avant de contacter Mutis. Celui-ci le fait hospitaliser, heureusement à temps. Soigné, le Gabier va passer sa convalescence dans la famille de Mutis, en Californie. Maqroll n'est jamais à court de récits sur ses expériences vécues çà et là. Cette fois, il raconte comment il fut victime de la fièvre de l'or.

Quand il arrive quelque part dans le nord de l'Amérique latine, Maqroll entend parler de mines d'or abandonnées dans la région. Si d'autres ont renoncé avant lui, c'est pour cause de maladie ou d'instabilité politique. Mais ce n'est pas parce qu'une mine a la réputation d'être maudite qu'elle serait inexploitable. Le Gabier se renseigne auprès de la serveuse Dora Estela, qu'il va surnommer la Conseillère, native de ce secteur de la Cordillère. Les desperados des CAF (Compagnies d'Actions Fédérales) sont moins offensifs en ce moment. Si l'on est un peu patient, la mine de la Bourdonnante donnera de l'or. Ce que confirme le frère de Dora, Eulogio, qui accepte de s'associer à Maqroll pour tenter l'affaire.

Ils ne découvrent d'abord ni or, ni trace des exécutions ayant eu lieu dans cette mine. Jusqu'au jour où ils trouvent une salle ressemblant à des catacombes, avec les squelettes des victimes. Il est préférable de retourner au village de San Miguel, en attendant mieux. Maqroll se renseigne encore : “Je l'ai interrompu pour lui demander si chaque mine, dans cette région, avait obligatoirement une histoire sinistre. À ma grande surprise, il m'a répondu avec le plus grand naturel : Oui patron, chaque mine a ses défunts, c'est comme ça. Un Indien qui vivait ici et qui était un peu sorcier disait qu'il n'y a pas d'or sans défunt, ni de femme sans secret.” Les paysages sont beaux, la terre est fertile, mais les épisodes sanglants sont également nombreux.

Maqroll et Eulogio finissent pas trouver une mine, dont le filon d'or paraît prometteur. Le Gabier baptise l'endroit Amirbar. Ils vont obtenir le permis d'exploitation, et leurs premiers travaux sont pénibles mais très fructueux. C'est là que ça va se gâter pour Eulogio. Il sera remplacé par la belle Antonia, qui ne ménage pas sa peine pour aider Maqroll à extraire le minerai. Les pratiques sexuelles particulières d'Antonia les contentent tous les deux. Mais Maqroll n'est pas homme à se fixer longtemps quelque part. D'autant que le filon d'or ne donnera bientôt pas davantage. La fin de cette aventure ressemblera à une fuite chaotique jusqu'à trouver un navire qui l'emportera loin de là…

Álvaro Mutis : Écoute-moi, Amirbar (Points, 2014)

Écrivain multi-récompensé en Amérique latine et en Europe, Álvaro Mutis (1923-2013) n'était évidemment pas un auteur de polar. Néanmoins, les vagabondages de son héros fétiche, Maqroll el Gaviero, peuvent figurer parmi les lectures des amateurs d'aventures. Publié en France en 1992, aujourd'hui réédité dans la collection Signatures chez Points, “Écoute-moi, Amirbar” constitue un parfait exemple des pérégrinations internationales du curieux personnage qu'est Maqroll le Gabier. Fascinant, même, il faut l'avouer.

À l'origine, il s'agit d'un marin au passeport chypriote, ce qui n'indique pas pour autant d'où il vient. Toutes ses entreprises ne visent pas vraiment à faire fortune, mais à vivre quelque chose d'exceptionnel à chaque fois. On se tromperait en l'imaginant simplement dans la peau d'un baroudeur, car ce diable de Maqroll est aussi un lettré. Au cours de son périple minier, il lit un ouvrage sur les guerres de Vendée, l'histoire des chouans, “toute cette folle épopée qui s'est terminée dans le néant...” Il a aussi son opinion sur quelques grands écrivains français et sur Simenon.

Sans doute est-il inutile de souligner la qualité littéraire du présent roman. Magnifique souplesse narrative : on est à la fois en Californie, où Maqroll raconte cet épisode singulier de sa vie, et dans ce pays de la Cordillère des Andes où se déroulent les faits. Ambiance locale garantie authentique. Dora Estela, Antonia, Doña Claudia, autant de portraits de femmes esquissés avec subtilité. Même si on ne connaît pas l'œuvre d'Álvaro Mutis, voilà un roman passionnant (préfacé par François Maspero).

Partager cet article
Repost0
14 juillet 2014 1 14 /07 /juillet /2014 04:55

Veuf de Suzanne, le policier Mehrlicht élève seul son fils ado. Âgé de cinquante-deux ans, il dirige un service criminel au commissariat parisien du 12e. “Son visage anormalement vert lui donnait un air de batracien, que renforçaient ses deux gros yeux gonflés et noirs. Quelques fils s'échappaient de son crâne en guise de chevelure, et achevaient d'en faire une grenouille à cheveux.” Son équipe se compose de Sophie Latour, bretonne rousse qui préserve son obscure vie privée et de Mickael Dossantos. Sportif connaissant par cœur le Code Pénal, ce dernier fraya naguère avec l'extrême-droite. Ex-amis qui pourraient nuire à son métier, il le sait, d'où sa rectitude actuelle. Mehrlicht se voit attribuer un nouveau stagiaire “beau et con à la fois”, Guillaume Lagnac. Il est ordinaire que Mehrlich tourmente les nouveaux venus. Là, il devrait même se méfier de ce fils d'un haut-fonctionnaire, qui entend lui tracer une belle carrière dans son sillage.

Mehrlicht est un habitué de l'hôpital Saint-Antoine, où son ami Jacques est traité dans le service cancérologie. En ce 1er novembre, un autre patient vient d'y être empoisonné. Un vieux monsieur aurait “vu la Faucheuse, toute vêtue blanc, comme un ange. C'était l'Ange de la Mort, dans sa robe blanche.” La meurtrière serait donc une brune en noir, infiltrée parmi les visiteurs, puis déguisée en infirmière. On découvre que le poison est un cocktail d'aconit et d'amanite vireuse, produits peu courants. En voulant protéger le vieux témoin, Dossantos frôle la mort face à la tueuse qui rôde à l'hôpital. Mehrlicht connaissant bien ses classiques en matière d'empoisonneuses, il trouve celle-ci atypique. Ça se confirme quand une famille est assassinée par la même personne, près des Champs-Élysées. La baby-sitter employée depuis deux ans est sûrement la coupable. Elle s'appellerait Morgane Grandier. Sauf qu'il n'existe personne de ce nom.

Si le commissaire Matiblout et le service de Mehrlicht gardent cette double enquête, c'est grâce à l'intervention de papa Lagnac. Bonne aubaine pour la carrière de son fils. On voit paraître sur Internet des articles bien informés sur ces affaires, titrant “La France a peur”. S'agissant de cas d'empoisonnements, ça risque de créer la panique dans le public. Le portrait de la suspecte est diffusé dans les médias. Ce qui ne l'empêche pas de défier la police, se montrant devant une caméra de l'Arc-de-Triomphe. On recense d'autres crimes à lui attribuer, celui du couple Beaufert et de la famille Charpeau, dix victimes au total. Pendant ce temps, un ministre spécule sur des ouvrages de bibliophiles fort rares. Son vendeur à face de rat n'aime pas ces transactions. Il va falloir qu'à contre-cœur Mehrlicht, ses adjoints et son stagiaire, s'expatrient dans un bled perdu du Limousin pour retrouver éventuellement la trace de la Némésis, pour faire cesser sa vendetta karmique...

Nicolas Lebel : Le jour des morts (Marabout, 2014) – Coup de cœur –

Après “L'heure des fous” (2013), voici le deuxième roman de Nicolas Lebel. Son premier titre était une sympathique comédie policière, plutôt réussie. Ici, l'auteur s'avère encore plus convaincant. Peut-être d'abord, parce qu'il ne cherche pas à imiter ces suspenses aux chapitres courts, censés être plus rythmés. Il obtient un tempo tout aussi vif en alternant les scènes, offrant une construction homogène au récit. Ce procédé traditionnel a fait ses preuves, et tout indique que Nicolas Lebel souhaite s'inscrire dans la forme classique des meilleurs polars. C'est ainsi que nous suivons donc l'enquête, mais aussi une part plus privée de la vie de Mehrlicht, Latour, Dossantos, Matiblout et Lagnac-fils.

Si le mystère criminel plane, la tonalité est globalement souriante, parfois mordante dans l'humour. Le plus bel exemple est sans doute ce reportage-télé sur la pluie, un moment d'anthologie qui témoigne de l'inanité de certaines infos. Mehrlicht reste caractériel, pour le plus grand plaisir des lecteurs. Il sait se montrer humain, avec son ami cancéreux ou en face de l'aubergiste Mado. Notons encore qu'il s'asseoit sur la loi Evin, assumant de prendre cette liberté. Chevronné, Mehrlicht ne cache pas son aversion envers les jeunes cadors diplômés mais inexpérimentés et sourds à ses conseils. Voilà une solide intrigue à la narration fluide et enjouée, capable de nous captiver passionnément.

On chronique aussi ce roman chez l'Oncle Paul, chez Pierre, chez Emotions (Gruznamur), chez Jacques Teissier, chez Du bruit dans les oreilles, chez Foumette, chez Passion Thrillers.

Partager cet article
Repost0
14 juillet 2014 1 14 /07 /juillet /2014 04:30
un 14 juillet 2014 en fleurs et sous le soleil

Lundi 14 juillet 2014 : Dans mon jardin,

les hortensias sont au rendez-vous de la Fête Nationale.

un 14 juillet 2014 en fleurs et sous le soleil
Partager cet article
Repost0
12 juillet 2014 6 12 /07 /juillet /2014 04:55

Sami est natif de Creutzwald, riante commune de Lorraine frontalière avec l'Allemagne, à côté de Forbach. Quand il part prendre des cours de théâtre à Paris, son père marocain, honnête travailleur, n'est pas du tout convaincu. Sami obtient plus de soutien de sa mère. Tel Rastignac, le voici certain de sa place dans l'univers parisien. À part Fabrice, dépressif venu de Béthune plutôt attachant, Sami ne se fait guère de relations dans le théâtre. Les préjugés attribués aux beurs, entre rap et trafic de drogue, le desservent. De la figuration mal payée, un vague job dans l'immobilier, rien d'excitant. Si, pendant leurs cours, il a cru intéresser la belle Vanessa, c'est raté. Par contre, le père de la demoiselle suggère une piste à Sami : c'est le moment opportun pour les affaires immobilières au Maroc.

Pourquoi ne pas se lancer dans ce bizness, en effet ? Avec son ami Fabrice, Sami retourne à Creutzwald pour y retrouver son copain black Souleymane Diouf. Ce littéraire diplômé est actuellement éboueur. Avec le fichier clients qu'il a piqué à l'agent immobilier qui l'a employé, Sami envisage un projet au Maroc associant Fabrice et Souleymane. Ce n'est ni la dette que Viktor a envers lui, ni les espoirs de gains au casino, qui financeront le projet de Sami. Par contre, le jeu clandestin lui donne des idées. Et voilà les trois complices qui débarquent de l'avion à Agadir : “N'oubliez pas, les poteaux, on n'est pas des touristes, on est des investisseurs.” La chance semble leur sourire, car le commerçant Omar a une belle propriété d'un proche à vendre. Sami ne tarde pas à attirer un acquéreur.

En l'occurrence, Blanche Delavigne est employée d'un agent immobilier français. Elle finit par ignorer sa méfiance initiale. Elle a tort, car cette affaire est bien une arnaque. Un ex-baroudeur nommé le Légionnaire se mêle au jeu, paraissant dangereux. Omar plaide sa bonne foi avec conviction, invoque une erreur. Peu après, Sami réalise que le Légionnaire et le commerçant sont de mèche. Blanche reste la principale victime, risquant de perdre prochainement son emploi. Sami imagine “le coup du bras cassé” afin d'entuber Omar, et de récupérer la somme engagée par Blanche.

Même si ça fonctionne, la jeune femme et le trio d'amis sont encore sous la menace du Légionnaire. Il est prudent qu'ils se mettent au vert. Ils découvrent un village quasiment déserté, appartenant au vieux Mohammed. Il vit avec sa fille Khadija, ex-étudiante à Casablanca, qui s'ennuie sévèrement dans ce bled. Souleymane tombe vite amoureux de la belle Khadija. Il y aurait un superbe projet immobilier à monter ici, en réhabilitant les maisons vides. Mohammed n'y est pas vraiment hostile, mais sous conditions. Si l'Émir Draman pouvait les aider question finances, ce serait l'idéal…

Hafid Aboulahayane : 31 février (Éd.Plon, 2014)

Certes, il s'agit d'une comédie et non d'un pur polar, mais quand les arnaques fusent dans une histoire, les amateurs d'intrigues agitées apprécient tout autant. Sachant qu'un film réalisé par l'auteur (qu'on surnomme Hafidgood) est en préparation autour de ce scénario, commençons par nous amuser grâce au livre.

Notre jeune héros franco-marocain est un sacré débrouillard de nature. Si chacune de ses initiatives entraîne un sac d'embrouilles, il parvient à désemberlificoter le problème. Il n'est pas spécialement doué pour l'immobilier, mais ses aptitudes de comédien le servent. Avec les femmes, de Vanessa à Blanche, il est aussi assez moyen pour la séduction. Fabrice le dépressif et Souleymane le contemplatif complètent parfaitement la bande.

Tout en souriant, ce roman apporte aussi un regard sur le monde actuel. Le cas des fils de ceux qui quittèrent le Maghreb pour tenter de s'insérer en France. Les cours de théâtre un peu snob et le dilletantisme de certains apprentis comédiens. Un regard sur le Maroc de notre époque, et sur l'envahissement immobilier avec ses dérapages. Sans oublier un détour par la Lorraine naguère industrielle, dont les habitants travaillent de l'autre côté de la frontière. Soyons clair, tout ça baigne dans la bonne humeur. Voilà un roman très sympathique, à découvrir.

Partager cet article
Repost0
10 juillet 2014 4 10 /07 /juillet /2014 04:55

Dans le Montana, Eden Creek est un comté isolé où jadis se réfugièrent des indiens Nez-Percés pourchassés par les Américains. C'est là que vit le jeune Elias Greenhill, au sein d'une population métissée. Orphelin, Elias a été élevé par Mama et Papa Tulssa, un couple d'Indiens ayant hérité de la ferme des parents du garçon. Il fréquente peu de gens, à part ses proches. Sans doute devrait-il cultiver ses amours avec sa voisine, la belle Elisa. Mais Elias est un solitaire, heureux dans la nature et dans les livres. Le décès de Papa Tulssa va rapidement entraîner celui de sa mère adoptive.

Avant de mourir, Mama Tulssa confie son secret à Elias. Charles et Estelle de Montvert, ses vrais parents, étaient des Français originaires du Limousin. Ils ne sont jamais revenus d'un ultime voyage dans leur pays, où ils devaient régler leurs affaires. Élevé dans l'esprit des Indiens, le jeune homme n'a pas d'attaches avec ses géniteurs. Néanmoins, le besoin d'en découvrir davantage sur eux se fait sentir. Elias vend ses biens dans le Montana, puis il prend plusieurs avions vers la France. C'est en train qu'il débarque dans la Haute-Vienne, pour se rendre au village de La Croix du Loup.

Le loup faisant partie de la mythologie indienne, Elias n'est pas trop désorienté, même si le décor est ici moins montagneux que chez lui. Il fait bientôt la connaissance de John Gray et de son chien Help, un Écossais qui exploite un gîte dans sa ferme. Celui-ci peut le renseigner sur la famille de Montvert, qui possédait un château non loin de là. Il y avait le père, Gilles de Montvert, qui trouva la mort dans un accident de chasse face à un sanglier. Il eut trois enfants : Charles, une sœur de deux ans sa cadette, et Philippe, dernier venu. Tous étant décédés, le château a été racheté voilà une douzaine d'années.

Une vive tension régnait entre les héritiers de Gilles de Montvert. Ce qui explique le fait que Philippe ait fait construire sa propre maison face au domaine, sur leur propriété. Et que Charles ait choisi de s'expatrier aux États-Unis, dans un village perdu du Montana. John Gray relate que, en effet, la compagne de Charles de Montvert revint quelques années plus tard, pour s'occuper de tout liquider. Mais personne ne vit trace de Charles lui-même. Elias se demande s'il n'a pas commis une erreur en faisant le voyage jusqu'ici. Et la nuit, dans ses cauchemars, apparaît l'image du loup.

Si l'Écossais, passionné de chevaux comme Elias, peut aider le jeune homme, il a lui aussi son histoire personnelle. John Gray accueille sa fille Suzanne, qui ne semble pas vraiment heureuse d'être là. Elias pourrait tomber amoureux de la jeune femme. Les circonstances ne s'y prêtent probablement pas. Sa priorité, ce sont plus sûrement quelques gestes symboliques à la mémoire de sa défunte famille…

Franck Bouysse : Pur sang (Éd.Écorce, 2014)

Plusieurs notions sont évoquées dans ce roman. On peut placer en premier la rencontre des terroirs. D'une vallée du Montana au paysages du Limousin, la nature garde toujours sa beauté pour le jeune héros. Vient ensuite l'universalité du loup et des mythes liés à cet animal, à sa dangerosité supposée alors qu'il attaque peu l'homme. S'intercale dans le récit, la fuite des Indiens qui autrefois fondèrent Eden Creek. Peut-être pas un paradis mais un espace de tranquillité. Enfin, le parcours de chacun constitue l'élément moteur de cette histoire. Celui des Montvert comme celui de John Gray, pas moins insolite.

Cette quête d'identité nous est racontée avec une souplesse narrative agréable. Qualité essentielle, quand on veut amalgamer les quelques notions citées ci-dessus. Par exemple, l'auteur retrace des époques passées, sans utiliser une chronologie datée trop précise. Ce serait alourdir le sujet, en effet. Dans la nouvelle collection Territori des Éditions Écorce, petit éditeur exigeant, voilà un suspense humaniste qu'on a plaisir à lire.

Partager cet article
Repost0

Action-Suspense Contact

  • : Le blog de Claude LE NOCHER
  • : Chaque jour des infos sur la Littérature Policière dans toute sa diversité : polar, suspense, thriller, romans noirs et d'enquête, auteurs français et étrangers. Abonnez-vous, c'est gratuit !
  • Contact

Toutes mes chroniques

Plusieurs centaines de mes chroniques sur le polar sont chez ABC Polar (mon blog annexe) http://abcpolar.over-blog.com/

Mes chroniques polars sont toujours chez Rayon Polar http://www.rayonpolar.com/

Action-Suspense Ce Sont Des Centaines De Chroniques. Cherchez Ici Par Nom D'auteur Ou Par Titre.

Action-Suspense via Twitter

Pour suivre l'actualité d'Action-Suspense via Twitter. Il suffit de s'abonner ici

http://twitter.com/ClaudeLeNocher  Twitter-Logo 

ACTION-SUSPENSE EXISTE DEPUIS 2008

Toutes mes chroniques, résumés et commentaires, sont des créations issues de lectures intégrales des romans analysés ici, choisis librement, sans influence des éditeurs. Le seul but est de partager nos plaisirs entre lecteurs.

Spécial Roland Sadaune

Roland Sadaune est romancier, peintre de talent, et un ami fidèle.

http://www.polaroland-sadaune.com/

ClaudeBySadauneClaude Le Nocher, by R.Sadaune

 http://www.polaroland-sadaune.com/