Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
8 octobre 2014 3 08 /10 /octobre /2014 04:55

Avant tout, il est indispensable de préciser qu'il ne s'agit pas d'un recueil de nouvelles au sens strict. D'une part, il y a une photo d'ambiance signée Hermance Triay, à laquelle vient s'ajouter une image de l'arme du crime. D'autre part, un texte court de Marc Villard pour compléter l'illustration par la fiction. Un exercice vingt fois renouvelé, grâce à une variété de photographies et de textes. La rencontre entre l'instant figé restitué par une photo, et l'écrit développant des scènes vivantes, c'est une idée créative qui fonctionne fort bien ici. Est-il besoin de rappeler que Marc Villard est un maître de la nouvelle, du format court ? Américanophile, il est habile pour dessiner en quelques traits le contexte des nombreux textes se passant aux États-Unis. Jouant avec les clichés et les codes du roman noir, son regard est souvent enjoué, et la tonalité apparaît toujours juste.

Un survol de quelques-uns des textes de cet ouvrage :

Rivière profonde : la disparition d'une jeune vacancière sur une petite rivière d'Arizona, où elle était en villégiature avec sa famille et des amis locaux. À bout de souffle : Serge est un jeune type pourchassé par trois truands bien sapés, de Corvisart à la Gare d'Austerlitz. Le flingue capricieux : Stan trouve l'occasion de supprimer le mari garagiste de Cynthia, sa maîtresse, mais le caractère d'une femme peut être aussi imprévisible qu'un pistolet.

La neige endormie : en Arizona, dans un décor enneigé, ce trio de braqueurs choisit la même adresse que le SDF Bones pour planquer le butin de son casse. En plein cœur : par un froid de canard à Clamart, la prostituée qui se fait appeler Diana est agressée par son client dans un terrain vague décoré. Velours : Vincent et Fabienne mènent une vie cossue, mais les trahisons passées du braqueur de banque que fut Vincent vont le rattrapper.

Marc Villard–Hermance Triay : Scènes de crime (Le bec en l'air 2014)

La femme volage : en Californie, du côté de San Diego, l'agent immobilier Chuck a fini par tuer sa femme qui le cocufiait avec un militaire, mais la suite reste un sacré chantier. La part des autres : c'est en prison que fut programmé le braquage d'une banque d'Halifax, un coup qui vire bientôt au carnage, y compris pour les deux truands rescapés. Dans la cave : à Memphis, le policier Walker ne peut guère intervenir dans la vie de couple de sa jeune sœur Cindy, vingt-six ans, bien qu'elle soit souvent battue par son acariâtre mari et couverte de bleus.

Bienvenue en Amérique : à dix kilomètres de Los Angeles, récupérer des clandestins chinois dont peu ont survécu dans leur conteneur n'est pas une mission de tous repos. La banque : enquête sur le meurtre d'une jeune chanteuse de country, venue retirer de l'argent au distributeur de billet de la Bank of América, non loin de chez elle. À vendre : en cavale, Mary et Franck squattent une maison à vendre dans l'Illinois, avant de fourguer leur stock de drogue, mais cet endroit est moins sûr que prévu.

Et encore huit autres histoires courtes, quelques pages, tout aussi ciselées, accompagnées de photographies originales, d'images que nous voyons parfois sans assez les regarder. Une harmonie, que l'on pourrait qualifier de chaleureuse, règne entre les deux expressions artistiques dans cet ouvrage. Un aspect différent de “l'idée polar” !

Partager cet article
Repost0
7 octobre 2014 2 07 /10 /octobre /2014 04:55

Très belle région montagneuse au sud du Massif Central, les Cévennes ne se résument pas à des sites accueillant le tourisme. Vers les sommets de Lozère, on trouve encore certains villages et hameaux où la population n'a guère d'estime pour la modernité. Les émissaires du Crédit des Agriculteurs sont bien vite renvoyés à leurs banques citadines. Certes, il y a des gens qui s'enrichissent. Tel l'exploitant agricole Jean Paradis qui rachète toutes les terres du coin et emploie des clandestins sous-payés, ou le maire du Pont-de-Montvert avec sa scierie. À l'inverse, le hameau isolé Les Doges abrite les fermes de deux ours, des solitaires bien heureux que le monde ne s'occupe pas d'eux.

Quinquagénaire célibataire, le paysan Gustave Targot (dit Gus) vit dans la ferme héritée de sa famille, avec son chien Mars. Dix-sept vaches Aubrac et huit veaux, c'est bien assez de travail pour lui, sans compter l'entretien de ses terres. Son voisin, c'est le veuf Abel Dupuy, dans les soixante-dix ans. Tous deux sont un peu chasseurs, bien sûr. Ils ne se fréquentent pas tellement, juste pour échanger des outils agricoles, parfois boire un verre ensemble. Leurs familles ont été longtemps en bisbille pour des motifs aujourd'hui oubliés. Il faut dire que la méchanceté des parents de Gus, père buveur et mère agressive, était notoire. Seule la grand-mère lui apporta, jadis, un peu d'affection.

En ce froid hiver neigeux, ce mois de janvier 2006 est particulièrement rude. Malgré tout, Gus assume cette petite vie au jour le jour, avec Mars. Il est triste d'apprendre le décès de l'Abbé Pierre, c'est sûr. Ce jour-là, il entend cris et coups de feu du côté de chez Abel. Il y a des traces de sang dans la neige. S'il est intrigué, il se doute que ce n'est pas son voisin qui lui fera des confidences. Tracassé, Gus surveille quelque peu Abel, au risque de laisser des signes de son passage dans la neige. Après tout, il se peut que par accident, Abel ait tué son chien, comme il le dit. Ça pourrait raviver les tensions entre eux, ce petit mystère. Ayant chopé la crève, Gus n'a pas besoin de telles complications.

Dans les Cévennes, on est plutôt protestant, encore que Gus n'ait jamais été pratiquant. Quand un Évangéliste se présente dans sa ferme, même si ce “suceur de Bible” n'est pas antipathique, Gus le reçoit avec son habituelle rudesse. Il est bien plus coriace que cette engeance-là. Son rapport avec Dieu ne regarde que Gus. L’Évangéliste n'est pas vraiment ici pour le convertir. S'il explore l'endroit, c'est qu'il paraît plutôt rechercher quelqu'un. Gus ne peut guère l'aider, même quand le “suceur de Bible” a besoin d'un téléphone. Mars étant très affaibli, Gus peut y voir le signe d'un drame couve dans son entourage. Il est vrai que son voisin Abel cache quelques secrets aux conséquences sanglantes…

Franck Bouysse : Grossir le ciel (La Manufacture de Livres, 2014)

Dans le roman noir, il est fréquent d'aller chercher l'exotisme aux confins des Appalaches, à l'abri des bayous de Louisiane, dans les contrées glacées de l'Alaska. L'équivalent existe pourtant sous nos climats, nos régions n'étant pas dépourvues d'endroits insolites. Notre ruralité vaut bien celle d'ailleurs. “Ici, les lignées [familiales], elles s'éteignent toutes les unes après les autres, comme des bougies qui n'ont plus de cire à brûler. C'est ça le truc, la mèche, c'est rien du tout s'il n'y a plus de cire autour, une sorte de pâte humaine. Si bien que l'obscurité gagne un peu plus de terrain chaque jour ; et personne n'est assez puissant pour contrecarrer le projet de la nuit.”

Un monde en voie d'extinction, sûrement. Paysages enneigés et ombreux, de plus en plus désertés, conservant une étincelle de vie, fut-ce à l'ancienne. Dans la tradition des taiseux où même les silences ont un sens. Gestes ancestraux et ambiance au ralenti, voilà ce que décrit admirablement Franck Bouysse. Nos sociétés urbaines aiment les formules ridicules, telles “la France profonde, les villages où tout le monde se connaît”, affirmant même que “ça, c'était avant, y a plus de coins comme ça.” Des populations échappant au formatage, avec un peu moins de confort et beaucoup plus de liberté, il en reste. Parfois parqués dans des réserves naturelles, un peu comme les Indiens. Pas moins violent qu'ailleurs, juste d'une autre nature, le crime a aussi sa place dans ces petits univers-là. Belle intrigue pour un roman fort bien écrit, un suspense à découvrir.

Partager cet article
Repost0
5 octobre 2014 7 05 /10 /octobre /2014 04:55

Tristan Madec est un Nantais des bords de Loire. Âgé de trente ans, habitant Trentemoult, il est conducteur d'éléphant. Si l'on fréquente l'Île de Nantes, on verra que c'est possible. Solitaire, Tristan vit avec son chat Dog. La mélancolie le gagne quand il songe à son frère jumeau Anton, qui s'est noyé quinze ans plus tôt dans le Lac de Grand-Lieu. Situé à une dizaine de kilomètres au sud de l'agglomération nantaise, c'est un vaste plan d'eau peu profond, abritant une faune et une flore d'une grande richesse. Quelques pêcheurs sont autorisés à y pêcher la civelle, coûteux alevin d'anguille apprécié des gourmets, objet de lucratifs trafics. Depuis toujours, les mômes de la région vont y capturer des grenouilles. Ce fut un des grands plaisirs de Tristan et Anton.

Pour retrouver les sensations d'antan et pour imaginer son jumeau vivant, Tristan utilise une drogue appelée batraxine. Elle lui permet de contrôler ses hallucinations, en cultivant le souvenir heureux de son frère. De même que la civelle, les crapauds servant de base à ce produit sont au cœur d'un trafic fructueux, mais pas sans danger. Le nommé Kalash, qui tient avec sa bien-aimée un fast-food à Morlaix, est aussi tueur à gages. Il vient de supprimer un maillon de la chaîne, un pêcheur, juste à côté de chez Tristan – qui n'a rien remarqué. Kalash se demande s'il doit éliminer ce voisin. Pendant ce temps, Tristan a décroché un job d'assistant pour un scientifique. Le Professeur Rostand s'intéresse aux difformités des grenouilles du Lac de Grand-Lieu, qui possèdent sept doigts.

Pablo Messager va épouser avec Barbara Daguerre. La vieille du mariage, le jeune Pablo se hasarde sur le Lac de Grand-Lieu, et disparaît soudainement. Tristan apprend ce triste fait divers par un copain devenu gendarme. Le mythe d'un silure géant s'attaquant aux hommes excite peu Tristan. Il est vrai que le Lac alimente d'autres légendes. Comme celle d'une cité jadis engloutie, Herbadilia, comparable à l'Atlantide ou la Ville d'Ys. Elle se serait transformée en royaume des grenouilles. Dans ce cas, il est a craindre que des enjeux de pouvoirs y troublent le côté paradisiaque de l'endroit, comme chez les humains. Dans ses voyages hallucinatoires sous batraxine, il peut arriver à Tristan d'y chercher son frère, qui aurait trouvé refuge dans cette ville secrète.

Le dealer de Tristan ayant été arrêté, il est probable que les enquêteurs s'occupent de lui bientôt, aussi. Encore ignore-t-il que Kalash rôde toujours dans les environs. Une certaine Gloria, rebelle et intrépide, est missionnée par ses congénères pour prendre contact avec Barbara, la fiancée de Tristan. De l'Île de Nantes à la Place du Bouffay, c'est un périple à hauts risques qui s'annonce pour la petite Gloria. Pourtant, c'est la condition pour que Barbara, Tristan, et leurs amis puissent espérer sauver Pablo…

Stéphane Pajot : Anomalie P (Éd.L'Atalante, 2014)

Quand on pénètre dans un roman de Stéphane Pajot, il faut s'attendre à de l'imprévu. Lui qui a fouiné dans tous les recoins de la région nantaise et connaît la moindre anecdote sur cette agglomération, on pourrait penser qu'il s'agit d'un monomaniaque intransigeant qui ne plaisante pas avec l'Histoire. Il suffit de lire ses fictions pour réaliser que Stéphane Pajot fait preuve de beaucoup plus de fantaisie. C'est même ce qui guide ses intrigues, un imaginaire qui extrapole largement le quotidien urbain aussi bien que les légendes. L'Île de Nantes et ses machines, la ville et ses quartiers, la Loire et les décors bucoliques environnants, voilà le “terrain de jeu” exploré par cet auteur. Et quand il écrit un roman mêlant réalité parfois burlesque et onirisme, ça devient un véritable feu d'artifice.

Trouver un moyen pour faire voyager le héros désabusé, ce n'est pas faire l'apologie des stupéfiants. Celui évoqué ici peut rappeler le psilocybe, champignon psychotrope pas moins dangereux mais qu'on dit plus “gérable” que les drogues de synthèse. Plus enivrant que “cette espèce de drôlerie qu'on buvait dans une taule de Biên Hòa, pas tellement loin de Saïgon, Les volets rouges, chez Lulu la Nantaise”. Les trips de Tristan introduisent une part de poésie fantastique dans le récit, sorte de conte actuel. Délicieux cocktail composé d'une intrigue bien dosée, d'images douces-amères et de fins sourires, ce suspense de déguste avec volupté.

Partager cet article
Repost0
5 octobre 2014 7 05 /10 /octobre /2014 04:40

Roman francophone    (162 votes exprimés)

1 – Sandrine Colette - Les nœuds d'acier - 48 voix

2 – Paul Colize - Un long moment de silence -36 voix
3 - Elena Piacentini - Le Cimetière des chimères - 28 voix
4 – Ian Manook - Yeruldegger - 25 voix
4 – Elsa Marpeau - L'Expatriée – 25 voix

Roman étranger    (158 votes exprimés)

1 – Sam Millar - On the brinks - 40 voix
2 – Martyn Waites - Né sous les coups - 36 voix
3 – Jo Nesbo - Fantômes - 31 voix
3 – Don Winslow - Dernier verre à Manhattan - 31 voix
5 – Victor Del Arbol - La Maison des chagrins - 20 voix

Les résultats des Trophées 813 – 2014

Maurice Renault    (146 votes exprimés)

1 – François Guérif / Ph.Blanchet - Du polar – 57 voix
2 – Claude Mesplède, 30 ans d'écrits sur le polar – 28 voix
3 – La Tête en noir – 27 voix
4 - Thiébault et Demetz - Polar – 19 voix
5 – Blog Action Suspense – 15 voix

Bande dessinée    (131 votes exprimés)

1 – Hyman, Matz d'après Ellroy -Le Dahlia Noir –58 voix
2 - Brüno et Nury - Tyler Cross – 17 voix
3 – Backderf - Mon ami Dahmer– 16 voix
4 – Guardino et Diaz Canales - Blacskad 5 – 14 voix
5 – Hureau et Rabaté - Crève Saucisse – 8 voix
5 - Balez et Le Gouëfflec - J'aurai ta peau Dominique A - 8 voix

L'association 813 a voté pour ses Trophées annuels. Du moins 171 adhérents sur plus de 700, ce qui est mieux que rien. Bravo à Sam Millar !

Je remercie donc les quinze adhérents de 813 qui aiment ce blog.

Partager cet article
Repost0
4 octobre 2014 6 04 /10 /octobre /2014 04:55
Jean-Pierre Ferrière, souvenirs meurtriers de Châtignes (1968-71)

Le romancier Jean-Pierre Ferrière est né en 1933 à Chateaudun, dans l'Eure-et-Loir. Cette charmante petite ville de treize mille habitants se situe à cinquante kilomètres de Chartres, à peine plus d'Orléans. Possédant un certain patrimoine culturel, elle n'est pas sans attraits. Toutefois, aux yeux de J.P.Ferrière, c'était dans les années 1950-60 la ville provinciale-type, plutôt endormie, confinée dans sa passivité. Un décor idéal pour placer quelques intrigues. Il va rebaptiser sa ville natale Châtignes. Voici trois romans, publiés dans la collection Spécial-Police du Fleuve Noir, s'y déroulant.

"Un climat mortel" (Fleuve Noir, 1968) : Entre commérages et pluie, on s'ennuie beaucoup à Châtignes en ces années 1960. Telle Marceline Loubet, vieille dame aveugle qui croit au retour prochain de sa petite fille qu'elle ne connaît pas. Telle Simone, sa garde-malade, une rêveuse invétérée. Tel Axel, un jeune homme un peu dérangé, qui espère que sa Denise lui reviendra. Telle la serveuse Yvette, qui ne pense qu'au cinéma. Ceux-là sont à ranger parmi les sympathiques. D'autres gens s'avèrent plus détestables. Comme la mère d'Axel, une femme cruelle, ou Mme Cochart, la patronne du Grand Hôtel. Avec M.Chandernont et le maire, elle fait partie des personnes influentes de Châtignes. Toujours à l'affût des racontars, elle traque les petits et grands secrets supposés de chacun. Avec une méchanceté à peine dissimulée.

L'arrivée à Châtignes d'Irène Monestier apporte un peu d'animation supplémentaire à ce petit monde. Les questions que se posent Mme Cochart sur sa cliente, et sur son fils qui l'accompagne, restent sans réponse précise. Axel vérifie qu'il ne s'agit pas de sa Denise. Yvette voudrait que Mme Monestier lui parle de Paris et de la vie d'artiste. L'inspecteur de police Vialles tombe vite sous le charme de la nouvelle venue. Quant à Simone, elle ne peut guère transmettre d'infos sur Irène Monestier à Marceline Loubet. Il faut avouer que cette femme est fort mystérieuse. Difficile de croire qu'elle ne connaisse personne ici, qu'elle soit arrivée là par hasard. Son fils malade ne quitte pas leur chambre. Irène sort presque en cachette. Mme Cochart est furieuse de ne rien savoir à leur sujet.

Un meurtre et un enlèvement se produisent la même nuit au Grand Hôtel. Quelques heures plus tard, un automobiliste est assassiné. Le policier Vialles ne peut évidemment pas être totalement objectif dans son enquête. Malgré les journalistes et la prochaine arrivée de ses collègues, il tente néanmoins d'approcher la vérité… (Ce roman fut réédité chez Le Masque)

Jean-Pierre Ferrière, souvenirs meurtriers de Châtignes (1968-71)

"Je t'assassine, tu m'assassines" (Fleuve Noir, 1969) : Delphine et Julia sont deux jeunes femmes de Châtignes fort différentes, avec quand même un point commun. La riche Delphine fut la fiancée de Frédéric Portal. Le modeste Julia a été la maîtresse du même homme. Quatre ans plus tôt, il les a abandonnées toutes les deux. Il a refait sa vie à Paris, où il a épousé la fortunée Isabelle. Aujourd'hui, leur couple ne fonctionne plus aussi bien. Ce qu'ignorent Julia et Delphine, bien sûr. Celles-ci restent rivales, espérant toujours le retour de Frédéric. La population locale connaît leur histoire, dont on sourit… C'est un autre couple de Parisiens qui débarque bientôt en ville : David et Anouk Beverly. Ils ne passent pas inaperçus, et semble s'ennuyer fortement à Châtignes. Alors pourquoi y séjournent-ils ?

Julia a trouvé un moyen de faire parler d'elle. Elle a engagé Michel pour faire croire à tout le monde (à commencer par Delphine) qu'il est son nouveau fiancé. Pas impossible qu'elle tombe réellement amoureuse de Michel, d'ailleurs, car il ressemble vaguement à Frédéric. Dans l'espoir de souder leur couple à nouveau, Frédéric propose à Isabelle des vacances hors du climat parisien. À Châtignes, par exemple. La nouvelle de leur venue est vite sue en ville. Delphine trouve une idée pour être mieux informée que quiconque : elle demande à sa jeune employée de maison Nelly de se faire engager chez Frédéric et Isabelle. Le rôle de Michel auprès de Julia est moins limpide qu'elle ne l'a cru. Il s'intéresse beaucoup à Anouk et David Beverly, ce Michel. Quand à Frédéric, son retour a aussi une bonne raison. Un meurtre risque fort d'être bientôt commis…

"Une atroce petite musique" (Fleuve Noir, 1971) : Quadragénaire célibataire, Marie est responsable de la bibliothèque de Châtignes. Elle y est assistée par Joëlle, une jeune fille qui pense davantage à ses amours avec le fils du notaire local, qu'à toute autre chose. La vie de Marie n'est guère heureuse : vingt ans plus tôt, Daniel Musselet (qu'elle aimait, et qu'elle aime encore) épousa Irène. La morne vie de la bibliothécaire va être bousculée par l'arrivée impromptue de son frère Gérard… qui décède bientôt d'une attaque cardiaque. Ce qui va offrir à Marie l'opportunité de se venger d'Irène, par l'entremise du truand parisien Clarence. Celui-ci a profité d'une absence de Marie pour fouiller dans sa chambre, à la recherche de bijoux volés.

Provoquer un accident entraînant la mort d'Irène, tel est le plan que Marie mène à bien. Elle a de grandes chances de récupérer Daniel, de devenir Mme Musselet comme elle le souhaite tant. Mais, suite au décès de son épouse, Daniel exprime le besoin de s'éloigner, de prendre des vacances. Un simple petit grain de sable, qui en masque un beaucoup plus gros : la relation entre Daniel et la jeune Joëlle. Marie est restée en contact avec ce diable de Clarence. Il possède assez de relations douteuses pour organiser un nouveau meurtre. Mais le scénario imaginé par Marie ne se déroulera peut-être pas cette fois aussi bien qu'elle l'a prévu...

Partager cet article
Repost0
3 octobre 2014 5 03 /10 /octobre /2014 04:55

La classe de l'intransigeante Miss Marple est partie en voyage scolaire à Londres. Parmi ses élèves du collège Maurice-Leblanc, il y a trois perturbateurs qu'elle surveille de près. “Longue ficelle blonde aux joues tâchées de rousseur”, la jeune Agatha lui paraît la plus turbulente. Avec son copain rondouillard Hercule et leur ami sportif Sherlock, ils forment un trio d'incontrôlables. Bien que maîtrisant mal la langue anglaise malgré ses origines, Agatha espère bien croiser le beau Prince William. Même par hasard, peu de chances que ça arrive. À l'hôtel, Agatha partage la chambre de la timide et silencieuse Camille, ce qui est censé la calmer. Le séjour débute par un traditionnel tour de Londres dans un de ces hauts bus rouges accueillant foule de touristes.

Faisant une pause-sandwich à Saint-James Park, Agatha et ses amis font la connaissance d'un ado de leur âge, James. Il appartient à la famille royale, c'est un petit-neveu de la reine. Plus tard, la classe de Miss Marple visite Westminster Palace, lieu chargé d'histoire entre tous. Dans quelques jours, une cérémonie y sera organisée autour d'un document précieux, le Traité de Paix entre la Grande-Bretagne et l'Irlande. S'égarant dans le palais, Agatha se retrouve piégée dans une pièce interdite au public. Hercule et Sherlock vont bientôt la rejoindre, heureusement. Pendant ce temps, le fameux Traité de Paix a été volé. La sévère Miss Marple prive Agatha, Hercule et Sherlock des visites suivantes dans Londres. Ce qui n'empêche nullement le trio de revenir à Westminster Palace.

Accompagnés par leur royal ami James, les trois collégiens explorent un passage secret, un tunnel souterrain avec d'effrayantes chauves-souris. Cachés, ils ne reconnaissent pas l'individu mystérieux qui utilise aussi le tunnel. Probablement le voleur du Traité de Paix. Ils débouchent dans un bureau de Buckingham Palace, où James est chez lui. Malgré la vigilance de Miss Marple, le trio se lance dans une expédition nocturne à Westminster Palace, toujours avec James. Le vieux concierge Edward s'explique mal le vol du document précieux, car la sécurité est assurée ici. Le lendemain, c'est le jour J pour la cérémonie officielle entre autorités irlandaises et britanniques. Le trio fausse à nouveau compagnie au groupe de Miss Marple, pour tenter de récupérer le Traité de Paix…

Caroline Triaureau : Agatha Doyle au service de Sa Majesté (Naïve Livres, 2014)

Ce roman jeunesse offre une belle manière de s'initier aux romans policiers anglais de la grande tradition. La jeune héroïne porte les noms combinés d'Agatha Christie et d'Arthur Conan Doyle, écrivains incontournables de la littérature de mystère. En fin de volume, l'auteure explique aux jeunes lecteurs ses clins d'œil concernant les autres personnages principaux : la “vraie” Miss Marple était une vieille dame perspicace et non une prof dure, Hercule Poirot avec ses “petites cellules grises” et le détective Sherlock Holmes ont inspiré les prénoms des camarades d'Agatha Doyle.

Il eût été étonnant que Moriarty ne jouât pas un rôle dans les mésaventures de nos intrépides collégiens français. Quelle chance ils ont d'avoir rencontré un jeune membre de la famille d'Elisabeth II, ces trois-là ! Il s'agira donc de retrouver un document dérobé, ce qui permet d'expliquer en exergue un point d'histoire, le conflit entre Grande-Bretagne et Irlande. Au fil du récit, quelques phrases simples en anglais donnent aussi le ton. Reste à savoir si la jeune Agatha réussira à croiser son prince charmant, marié (sûrement par erreur, estime-t-elle) à la duchesse Kate. Un suspense parfait pour jeunes lecteurs, et peut-être pour moins jeunes.

Partager cet article
Repost0
2 octobre 2014 4 02 /10 /octobre /2014 04:55

Un procès à New York, au début des années 1950, présidé par le juge Bardoley. Toutefois l'affaire remonte à dix-sept ans. Elle concerne un meurtre commis le 28 juillet 1935. Des faits nouveaux ont permis de rouvrir le dossier. Ce procès a été confié au juge Bardoley, alors qu'il revenait de longues vacances, à la suite du décès de son épouse. L'affaire l'embarrasse un peu, car il fit autrefois partie de l'entourage social de l'accusée.

Valentina Abbott était à l'époque l'épouse du docteur Pound, un médecin mondain. Séduisante jeune femme, Valentina contribuait à la notoriété de son mari. Dans leurs cercles, elle ne manquait pas d'admirateurs, dont Bardoley et son ami Leonard Coombs. Ce n'était pas le premier mariage de Valentina. Française d'origine, elle avait d'abord été mariée à Michael Arum. Après son second divorce, d'avec le docteur Pound, elle épousa un M.Abbott. Elle fit venir de France une vieille tante, Émilie Constant, afin qu'elle vive auprès d'elle.

En juillet 1935, le couple Lecoq habitait dans un immeuble new-yorkais. Dans la nuit du 28, M.Lecoq fit une chute depuis leur appartement du sixième étage. On le retrouva mort, à peine identifiable. Cet homme n'était autre que Michael Arum, et la femme vivant avec lui, c'était Valentina. M.Abbott, son mari, la croyait en vacances à Atlantic Beach, en compagnie de Mme Constant. À vrai dire, le mari en titre de Valentina avait des doutes. Via son avocat, il avait fait engager des détectives pour être fixé. Le couple divorça peu après cette affaire, mais ne fut pas impliqué dans la mort brutale de Michael Arum.

Dans le procès présidé par le juge Bardoley, tout paraît accuser Valentina. En particulier, la dispute ayant précédé la mort de Michael Arum. Elle affiche également un certain cynisme de mauvais aloi concernant son mariage avec le médecin. Sa disparition au moment de la mort d'Arum plaide contre elle, autant que sa désinvolture en répondant aux questions gênantes. Le juge se remémore les faits dont il a été témoin dix-sept ans plus tôt. Ce qui ne rend pas plus facile sa compréhension du dossier, ni de la vérité…

John Stephen Strange : L'accusée (Éd.Ditis, 1954)

John Stephen Strange était le pseudonyme de la romancière américaine Dorothy Stockbridge Tillet (1896-1983). Quelques-uns de ses romans furent publiés chez Le Masque : 65 place des Vosges (1957), Pas de crime parfait (1959), Revanche d'un policier (1959), Fanny écrivait trop (1963), Au bénéfice du doute (1963). Let the Dead Past” (1953) fut publié en français sous le titre L'Accusée (Éditions Ditis Genève, 1954) puis réédité la même année dans la collection Détective-club, en 1957 dans la collection La Chouette et chez J'ai Lu Policier en 1965. La traduction fut assurée par Gabrielle-A Catelot et Georgina Arnao.

Un roman policier largement diffusé, on le vérifie. Il est vrai que l'ambiance est très réussie : l'auteure entretient un doute permanent, et offre progressivement des éclairages divers sur l'affaire. Certes, la base pourrait manquer de réalisme, n'importe quel juge est dessaisi lorsqu'il connaît de près un accusé. Mais c'est vite gommé par la construction de l'intrigue, par son habile mécanisme. Un classique du polar à redécouvrir, sans nul doute.

Partager cet article
Repost0
1 octobre 2014 3 01 /10 /octobre /2014 04:55

Marco Benjamin est lieutenant de police à Lyon. Âgé de quarante-trois ans, il est divorcé de Caroline. Marco et elle ont une fille de seize ans, Chloé. Son ex-femme vit désormais avec l'artiste-peintre Julio Savenaze. Le commissaire Massé, son supérieur, n'ignore pas l'impétueuse nature de Marco Benjamin. Il l'a pourtant désigné comme chef de groupe, pour enquêter sur un tueur en série qui s'attaque à des adolescentes. Le coupable est un cruel sadique qui torture à mort ses victimes. La dernière disparue est une fugueuse âgée de seize ans, Jennifer. Telle sa fille Chloé, celle-ci a pu fréquenter des concerts de rock, et y croiser un pseudo-photographe qui l'aurait enlevée. Un guérisseur apprécié des notables lyonnais, Ismaël, pourrait probablement aider Marco.

Le policier se rend dans une ferme ardéchoise afin de rencontrer cette espèce de gourou, sosie d'un Jésus-Christ idéalisé. Ses visions semblent précises. Marco se lance dans une opération en campagne, entre une vache excitée et un corbeau mort. Il découvre bientôt la cabane où a été torturée Jennifer, ensanglantée et moribonde. Image fantomatique qui ne va plus le quitter, jusqu'à ce qu'il mette la main sur le tueur. Un tel choc entraîne pour Marco quelques séances chez un psy. Auquel le policier préfère parler des comics Marvel et des super-héros de bédé, plutôt que de son état de santé. Marco invente un personnage à son image, Suicide-Man. Il crée un site Internet à la gloire de ce héros dépressif mais invulnérable. Sur les photos, Marco arbore le tee-shirt de Superman.

Entre son ex Caroline et Chloé, qui demande à prendre la pilule, le moral ne risque pas de s'améliorer pour Marco. Son collègue Paul est blessé d'un coup de couteau le soir où Marco et lui pensent avoir identifié le tueur. Après avoir pris en otage une fillette, l'homme s'enfuit. Suicide-Man a sauvé la gamine, c'est le plus important. Tout juste âgée de dix-huit ans, la rousse Elsa est une fervente admiratrice du site de Suicide-Man. Elle a fugué, ce qui se conçoit quand on constate la bêtise de son père. Marco accepte d'héberger la jeune fille, malgré l'ambiguïté de leur différence d'âge. Le policier et Elsa consultent à nouveau Ismaël, au sujet du tueur qui a blessé Paul avant de disparaître. Le spiritisme du gourou ne donne cette fois que des indications imprécises.

Disposant d'un appât, Marco et Ismaël vont traquer avec succès le criminel. Toutefois, le policier reste insatisfait, imaginant que leur suspect a été piégé par son donneur d'ordres. Pour le commissaire Massé, les clowneries de Suicide-Man ont suffisament duré. Joanna, l'assistante d'Ismaël, va requinquer sexuellement Marco. Au grand dépit de la jalouse Elsa. Le policier va être accusé d'un meurtre. Ça n'est pas pour déplaire à son collègue Lanson. Si Suicide-Man n'a pas dit son dernier mot, il lui faut d'abord échapper à la police…

Alain Gagnol : Un fantôme dans la tête (Le Passeur Éd., 2014) – Coup de cœur –

Certes, les enquêtes de police ordinaires ne sont pas sans charme. Un flic bedonnant qui fume la pipe, collecte les indices, interroge les témoins puis le suspect, un scénario de bon aloi. Néanmoins, quand le flic est beaucoup plus déjanté, pas loin d'avoir “les fils qui se touchent”, au point de se transformer en personnage de bédé pour éviter de sombrer dans la plus noire dépression, ça devient nettement plus excitant. Quand il s'occupe des crises de somnambulisme de son ex-épouse, s'inquiète de l'obsession pour la pilule de sa fille, se fait casser les oreilles dans des soirées rock pour djeunes, ça le rend plus attirant. Quand il s'invite dans une sorte de secte façon hippie, écoute un Jésus-Christ réincarné, se laisse séduire par une adepte bronzée, c'est peu conventionnel et bien plus piquant.

Marco Suicide-Man ne perd jamais de vue la monstruosité du tueur qu'il pourchasse. Mais lui-même applique des méthodes pouvant laisser perplexes sa hiérarchie et ses collègues. C'est dire qu'il s'embarque (et le lecteur avec lui) dans des aventures mouvementées et pleines de risque. Sans se départir d'un humour mi-jovial, mi grinçant : “J'aime bien quand tu te compares à des hémorroïdes, Lanson, cela prouve qu'il te reste encore des moments de lucidité.” Vêtu d'un vieux tee-shirt défraîchi de Superman censé le protéger, notre héros bouscule avec bonheur les investigations classiques. Sourires et succession de péripéties sont au programme de cet excellent suspense. Bravo à Alain Gagnol pour ce polar, un des plus endiablés de l'année. Coup de cœur.

Partager cet article
Repost0

Action-Suspense Contact

  • : Le blog de Claude LE NOCHER
  • : Chaque jour des infos sur la Littérature Policière dans toute sa diversité : polar, suspense, thriller, romans noirs et d'enquête, auteurs français et étrangers. Abonnez-vous, c'est gratuit !
  • Contact

Toutes mes chroniques

Plusieurs centaines de mes chroniques sur le polar sont chez ABC Polar (mon blog annexe) http://abcpolar.over-blog.com/

Mes chroniques polars sont toujours chez Rayon Polar http://www.rayonpolar.com/

Action-Suspense Ce Sont Des Centaines De Chroniques. Cherchez Ici Par Nom D'auteur Ou Par Titre.

Action-Suspense via Twitter

Pour suivre l'actualité d'Action-Suspense via Twitter. Il suffit de s'abonner ici

http://twitter.com/ClaudeLeNocher  Twitter-Logo 

ACTION-SUSPENSE EXISTE DEPUIS 2008

Toutes mes chroniques, résumés et commentaires, sont des créations issues de lectures intégrales des romans analysés ici, choisis librement, sans influence des éditeurs. Le seul but est de partager nos plaisirs entre lecteurs.

Spécial Roland Sadaune

Roland Sadaune est romancier, peintre de talent, et un ami fidèle.

http://www.polaroland-sadaune.com/

ClaudeBySadauneClaude Le Nocher, by R.Sadaune

 http://www.polaroland-sadaune.com/