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22 août 2018 3 22 /08 /août /2018 04:55

Luther Grandison est un sexagénaire aisé habitant à Dedham, sa propriété du Connecticut, à l’Est des États-Unis. On le considère comme un esprit distingué, auteur de plusieurs ouvrages de référence, criminologue à ses heures. Il est le tuteur de deux jeunes femmes, ses pupilles étant très différentes. Mathilda, dite Tyl, vingt-deux ans, est une riche héritière, mais pas très belle. Althea, c’est l’inverse : une ravissante personne, sans le sou, qui vient d’épouser Oliver, jeune homme brillant encore que superficiel. Un mariage arrangé par Grandison, qui espérait ainsi garder Mathilda sous son emprise. Partie en voyage, Mathilda est supposée avoir péri dans un naufrage. Secrétaire de Grandison, Rosaleen Wright s’est récemment suicidée, par pendaison, dans la bibliothèque de son employeur. Le policier Tom Gahagen enquête mollement sur cette affaire-là.

Jane Moyniham est la jeune tante de Francis Moyniham, le fiancé de la défunte Rosaleen. Elle est certaine que Luther Grandison a assassiné sa secrétaire. Elle convainc Francis. Pour le prouver, tous deux ont un plan, mais ce sera très difficile. Tandis que Jane devient la nouvelle secrétaire de Grandison, Francis se fera passer pour le mari de la disparue Mathilda. Toutefois, celle-ci réapparaît saine et sauve. Elle découvre alors qu’elle se serait mariée avec un certain Francis Howard. Malgré les preuves qu’il fournit, Mathilda n’est absolument pas dupe de ce soi-disant mariage (car elle était amoureuse d’Oliver). Même le témoignage du pasteur qui les aurait mariés n’y fait rien. Elle a surtout hâte de rentrer à Dedham auprès de Luther Grandison, le seul en qui elle ait une confiance aveugle.

Le policier Tom Gahagen pointe un détail horaire important sur le prétendu suicide de Rosaleen, sans insister tellement. Par contre, cela servira peut-être à Jane et Francis pour déterminer la véritable heure du crime. Tous deux veillent à ce que Grandison ne devine pas leur plan. Francis et Althea ont une conversation à l’abri des oreilles indiscrètes, le jeune homme cherchant des réponses, des précisions sur la mort de Rosaleen. De son côté, Mathilda se confie à son tuteur, lui répétant qu’elle ne croit nullement la version de Francis – un imposteur à ses yeux, qui viserait son héritage. Grandison est, lui aussi, très circonspect envers Francis, et confirme les doutes de sa pupille. La mort continue à rôder sur Dedham, avec un nouveau soi-disant suicide (au somnifère).

Francis et Jane sont sûrs qu’il s’agit à nouveau d’un meurtre, dont l’auteur ne peut être que Grandison – qui a éliminé ainsi un témoin gênant. Le policier Tom Gahagen hésite entre suicide et dosage inapproprié de somnifère, mais insiste peu. Mathilda a toujours pleinement confiance en son tuteur Grandison, modifiant son testament en faveur de celui-ci pour annuler le faux document instituant son "mari" comme héritier. Si Francis choisit d’affronter directement Luther Grandison, c’est à ses risques et périls…

Charlotte Armstrong : L’insoupçonnable Grandison (1947)

— La pauvre ne devait pas voir la vie en rose. Althea lui avait chipé son fiancé, et le jeune ménage était en train de s’installer à Dedham. Un sale coup pour elle ! On conçoit qu’elle ait désiré fuir le spectacle de leur bonheur. Aussi…
Mais Francis n’écoutait plus. Jane vit luire dans les yeux de son neveu la même lueur que jadis, lorsqu’il misait sur un cheval, et ayant gagné achetait pour sa mère avec le bénéfice ainsi réalisé, un bracelet d’un prix exorbitant. Comme elle avait aimé en lui ce goût de l’aventure chevaleresque que tempérait toujours, à l’ultime moment, son sens de la mesure ! À nouveau, il semblait prendre le mors au dent…

Quatrième roman écrit par l’auteure, “L'Insoupçonnable Grandison” fut publié en 1947 par Frédéric Ditis dans la collection suisse de Détective-Club, puis réédité en 1953 dans la coll.française de Détective-Club. En 1958, troisième parution dans le coll.La Chouette. En 1984, ce roman fut réédité dans la collection "Les maîtres du roman policier" chez Le Masque. L’histoire n’est pas "située" dans une époque définie et, géographiquement, on sait juste que ça se passe entre New York et le Connecticut, assez proche. Charlotte Armstrong s’est ici concentrée sur les rouages de cette affaire énigmatique.

On n’a pas de mal à imaginer un personnage "intouchable" tel que Grandison, dont le charisme influe sur son entourage et au-delà. Il garde toujours un calme apparent, fait semblant de mépriser les questions financières, s’exprime avec assurance. Mais, observatrice, Jane Moyniham a compris illico sa véritable nature et ses combines. Reste à collecter des preuves contre lui, ce qui s’avérera forcément compliqué – car ses deux pupilles ne l’accableront pas. Sans être négligeable, le rôle de la police reste mineur. La construction de l’intrigue est solide, impeccable, le récit ne nous cachant rien. Encore un parfait exemple de la qualité des romans d’alors, que l’on relit avec grand plaisir.

Ce roman fut transposé au cinéma sous le titre “Le crime était presque parfait” (1947) par Michael Curtiz, avec Claude Rains (Grandison), Joan Caulfied (Mathilda), Audrey Totter (Althea), Constance Bennett (Jane). À ne pas confondre avec le film homonyme d’Alfred Hitchcock (avec Grace Kelly), sorti en 1954.

Charlotte Armstrong : L’insoupçonnable Grandison (1947)
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20 août 2018 1 20 /08 /août /2018 04:55

Maximilien de Groote ayant appartenu à une famille fortunée, rien ne le prédestinait à séjourner un jour en prison. Pourtant, c’est ce qui lui arrive après un cambriolage raté. Il est enfermé à la MAVO, la Maison d’Arrêt du Val d’Oise. Il partage la cellule du rustre mais pas agressif Arnold, et s’entend bien avec Robert, de la cellule voisine. Le vieux détenu placé dans la geôle d’à côté n’est autre que Maurice Danglès, que l’on surnomma "Le Boucher du Val d’Oise". Il fut notamment condamné pour le double meurtre du couple Vallin. Aujourd’hui, il se sent proche de la mort. Maximilien de Groote se défend avec habileté, mais sa condamnation sera de trois ans de prison, dont un avec sursis.

Maximilien s’est bien gardé de révéler les vrais motifs de la série de cambriolages qu’il a commis, chez des hommes de loi. Au décès de son père, il estime avoir été spolié lors de la succession. Chez ses "victimes", il dérobait des documents importants pour eux et secrets, puis les faisait chanter quand c’était possible. Le petit jeu a donc mal tourné. En prison, Maximilien – qui n’a jamais exercé de véritable métier – doit se montrer capable d’insertion sociale, et déjà trouver une occupation. Ce sera l’art pictural, puisqu’un concours de peinture est organisé par l’administration pénitentiaire. Le style de Modigliani paraît l’inspirer. Il va réaliser un tableau "à la manière" de l’artiste.

En réalité, c’est plutôt la biographie de ce peintre du début du 20e siècle (il est mort en 1920) qui l’intéresse. Heureusement pour lui, Amadeo Modigliani fit partie des peintres protégés par le policier et collectionneur Léon Zamaron, qui évita la prison à quelques-uns des artistes de son époque. Après dix-huit mois derrière les barreaux, Maximilien rejoint Robert, le détenu de la cellule voisine, s’installant tous deux rue Saint-Placide. Moins inculte qu’Arnold, Robert doit respecter leur pacte : ne plus s’enivrer, observer une hygiène correcte, mener une vie saine afin de ne plus retourner en prison. Robert comprend que son ami Maximilien a un projet pour les sortir de la mouise. 

Pour ce faire, Maximilien devient un "traqueur de cold cases dans le monde de l’Art". Un article de journal a évoqué une affaire emberlificotée d’héritage, concernant un tableau de Modigliani. Cette "Jeanne au collier de perles noires", c’est forcément Jeanne Hébuterne, surnommée Noix de Coco, qui fut la maîtresse de Modigliani et se suicida. Mais quelles traces reste-t-il d’elle. Et quel rapport avec les confessions d’outre-tombe de Maurice Danglès, "Le Boucher du Val d’Oise", qu’il a fait transmettre à Maximilien ?…

Marie Devois : Peindre n’est pas tuer (Éd.Cohen & Cohen, 2018)

Marie Devois ne nous présente pas une nouvelle biographie de Modigliani, admirable artiste. C’est bien d’un polar orchestré autour de ce personnage et d’une de ses toiles (vraie ou imitée, car des faussaires ont fait circuler des tableaux douteux) dont il est question. Au centre de l’affaire, Maximilien de Groote n’est pas un délinquant ordinaire. Issu d’une "bonne famille", il est cultivé, ne manque ni d’intelligence, ni d’astuce. L’épisode de la prison lui permet de raisonner sur de nouvelles et meilleures bases, au risque quand même d’entraîner son voisin de cellule – le solitaire Robert – dans des investigations complexes au succès non-garanti.

Après des romans autour de Vincent van Gogh, Diego Velázquez, Paul Gauguin, William Turner, c’est Amadeo Modigliani que Marie Devois met à l’honneur dans ce nouveau titre. Comme toujours, l’intrigue est soignée, fignolée, maîtrisée, racontée avec souplesse. Et c’est avec un grand plaisir que l’on suit le parcours de Maximilien. Il est préférable de laisser la narration nous apprendre où il veut en venir. Notons par ailleurs une description de la vie carcérale qui sonne juste, ni misérabiliste, ni confortable, loin des idées souvent véhiculées. Un roman noir de belle qualité, Marie Devois possédant un talent certain.

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18 août 2018 6 18 /08 /août /2018 04:55

En Bretagne, Hoellic est une commune du Morbihan rural, dans la vallée de l’Oust, du côté de Josselin, à une soixantaine de kilomètres du littoral. Quadragénaire, après avoir exercé dans le social du monde pénitentiaire à Rennes, Solenn Triquenot a été élue maire de Hoellic. Elle a eu pour compagnon Jean-Noël Raël (dit Nono), mort récemment, un éleveur qui s’essaya à des méthodes moins polluantes. Si elle reste en contact avec Yvonne, la mère de Nono, ses rapports avec le père Raël – son prédécesseur à la mairie – sont tendus. Présidente du Syndicat pour la collecte et l’élimination des déchets, Solenn Triquenot se penche sur l’historique des dossiers en question, sentant que les pratiques y sont nébuleuses.

Par contrat avec le Syndicat, c’est l’entreprise Maturin qui assure la collecte des déchets et la société Souig qui est chargée de leur élimination. Deux entités qui n’en font qu’une, car Maturin appartient au groupe Souig. C’est Yann Rufenec, le sémillant directeur régional de la Souig, qui a mené les transactions pour le rachat de Maturin. À Pontivy, Solenn visite l’usine d’élimination des déchets gérée par la Souig. Directeur d’exploitation du site, Hervé Terrasse ne cache pas à Solenn que, par le passé, il y eût quelques tricheries coûtant cher à la collectivité. Et qu’il y aura quelques "dépenses à programmer" pour le Syndicat, en vue de la mise aux normes de l'usine de Pontivy.

Rencontrant à Lorient le directeur régional Yann Rufenec, Solenn éprouve une impression défavorable à son égard. Les réponses préparées et l’obséquiosité de Rufenec laissent à penser qu’il ne dit pas la vérité. Solenn rencontre ensuite Mme Maturin. Celle-ci lui expose ingénument – en l’absence de son mari – les conditions de la vente de l’entreprise, et les combines permettant de frauder sur les chargements. Peu après, Solenn est contactée par Annie, une ex-détenue dont elle s’occupa naguère. Le mari de celle-ci, Jean-Luc Chaunay (surnommé Bitos), a des révélations pour Solenn. Concernant les entourloupettes sur le traitement des déchets et quant au rôle de Yann Rufenec.

Tandis que "l’enquête" de Solenn ne passe pas inaperçue, le directeur régional de la Souig rôde autour d’Yvonne Raël, qui doit bientôt vendre les biens de son fis Jean-Noël. Celui-ci était en contact avec Maurice Sempé, d’Avignon. Ce dernier expérimente des solutions sur le traitement des déchets, afin de réduire la pollution. Les cercles de l’agro-agri semblent approuver les progrès en la matière (on y suivait les initiatives de Jean-Noël), mais n’est-ce pas pour récupérer et annihiler ces méthodes nouvelles, moins néfastes ? Solenn est alertée d’un gros souci sanitaire à Hoellic : le captage d’eau consommable présente une inquiétante augmentation du taux de nitrates. La population n’est pas sans réagir. Solenn avait remarqué que plusieurs personnes étaient atteintes de dermatoses à Hoellic.

Grâce à Hervé Terrasse, Jean-Luc Chaunay et Maurice Sempé, Solenn progresse – mettant en évidence les manœuvres frauduleuses de Nicolas Maturin et Yann Rufenec. Mais s’en prendre à des sociétés comme la Souig n’est pas sans danger. Une brillante avocate et un soutien journalistique ne seront pas inutiles. Savoir pourquoi la soi-disant brocanteuse Catherine Le Deric et son fils Youenn ont reçu une vache en cadeau peut apporter à Solenn un des éléments de réponses…   

Hélène Crié-Wiesner : On peut toujours recycler les ordures (Série Noire, 2002)

Face à mon air ahuri, elle se reprit et expliqua sans la moindre gêne :
— Je ne sais pas ce que Bitos a dit exactement mais, dans le métier, tout le monde connaît la combine. On est payé à la tonne collectée. Les camions sont donc pesés à leur arrivée au centre de traitement, que ce soit une usine d’incinération ou une décharge. Les chauffeurs s’arrangent pour ne pas vider entièrement leur cargaison. Personne ne voit rien, ce sont des bennes hermétiques. Ils repartent en partie chargés, et quand ils reviennent à nouveau pleins, la balance enregistre une part de ce qui a déjà été compté […] Je vous dévoile aussi la variante : on arrosait les ordures avant d’arriver sur la balance. C’étaient des pratiques courantes, autrefois. Je ne dis pas que certains ne continuent pas…

Sans être extrémiste sur ces sujets, environnementaux et écologiques, il n’est pas interdit de s’interroger. Ruraux ou citadins, que l’on soit attentif à ne pas surcharger en produits phytosanitaires dans les campagnes, que les "urbains" trient ou pas leurs déchets, nous engendrons tous de la pollution. Qui, au final, se mesure par dizaines de milliers de tonnes d’ordures. La collecte et l’élimination des déchets forment un business utile, nécessaire, perpétuel. Avec probablement ses dérapages, ses connivences, ses arnaques. “On peut toujours recycler les ordures” d’Hélène Crié-Wiesner remonte à une quinzaine d’années, en 2002. Depuis, les contraintes environnementales ont évolué, se sont durcies. On pourrait ainsi supposer que, désormais, tout est limpide dans le traitement des déchets. Est-on sûr que ce soit le cas pour tous produits toxiques et autres métaux lourds ?

De nos jours, les dépotoirs sauvages ont été remplacés par des éco-stations, des centres de recyclages, des sites propres. Comme le montrait déjà l’auteure, ce sont les gros groupes qui décrochent les marchés de collecte et d’élimination des ordures. Quitte à confier la mise en œuvre à des sous-traitants, peut-être encore. Nos décideurs politiques de terrain sont satisfaits : la Délégation de Services Publics paraît fonctionner, et ils n’ont plus à se charger de ces affaires-là, chapeautées par des Communautés de communes ou d’agglomération (qui en assurent le financement, c’est quasiment tout). Ils se proclament bons gestionnaires des deniers publics. Le Code des marchés publics est respecté. Système exemplaire, vraiment ? La DSP, solution parfaite ? Possible, mais qui vérifie que de "vieilles pratiques", de l’approximatif ou des combines, des accords douteux, ne subsistent pas ? Il ne s’agit pas d’accuser, juste de comprendre.

C’est sur une tonalité enjouée, avec une part d’ironie bienvenue*, qu’Hélène Crié-Wiesner écrivit cette fiction – après que cette journaliste se soit documentée sur la question des déchets. (* “Les propriétaires des terrains menacés de restriction d’activités n’allaient pas se laisser faire facilement. Il est vrai que perdre la liberté de dégueulasser l’environnement est une dure contrainte. Décider que sur deux kilomètres à la ronde, personne n’aura le droit de stocker des huiles usées ou des produits phytosanitaires, d’installer une casse de vieilles bagnoles ou une production de porcs, ou tout simplement d’épandre du lisier alors que les cuves sont pleines, voilà qui constitue des atteintes intolérables au droit de propriété.”)   

Si elle situe l’action dans le Morbihan, plutôt moins intoxiqué par la pollution agricole que d’autres départements de l’Ouest, c’est visiblement parce qu’elle connaît bien les lieux qu’elle décrit – un élément rendant crédible son scénario. Son héroïne narratrice Solenn Triquenot, maire de la commune fictive de Hoellic, est partisane d’une vie "au plus proche du naturel", sans intransigeance radicale. Mais les magouilles au détriment de l’argent public, portant parfois sur des montants considérables – des chauffeurs restant dans leur camion à la pesée des déchets, ça finit par chiffrer lourdement, par exemple – ça mérite d’être révélé à la population, aux contribuables.  

L’auteure évoque aussi le rôle des maires, de plus en plus complexe, entre le social, les intérêts de leurs concitoyens, les moyens dédiés à l’entretien local, et les réglementations changeantes. Beaucoup d’entre eux (en particulier dans les communes petites et moyennes) font le maximum pour le bien de tous. L’urbanisation galopante dans certaines régions (où les terrains sont plus abordables) ne simplifie sûrement pas le problème des déchets, quand grossit inexorablement le nombre d’habitants. Aborder tout cela par le biais d’un roman permet d’illustrer ces thèmes actuels de façon moins aride que des rapports officiels ou des reportages. Afin de garder en tête que nos déchets représentent une vraie question sociétale.

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16 août 2018 4 16 /08 /août /2018 04:55

En 1895, la famille Coombes habite Playstow, quartier ouvrier de la région londonienne. Le père est employé d’une compagnie maritime, la mère (Emily) est femme au foyer. Ils ont deux fils : Robert, treize ans, et Nathaniel (dit Nattie) âgé de douze ans. Alors que leur père est en mer, à destination de New York, les deux frères se retrouvent seuls à la maison, leur mère semblant partie pour quelques jours. Ils "invitent" un traîne-patin du port, John Fox, à habiter chez eux durant l’absence de leurs parents. Robert Coombes s’efforce de trouver de l’argent, en s’adressant à des prêteurs sur gage. Mais au bout de quelques jours, leur tante et une amie de leur mère s’alarment d’être sans nouvelle de Mrs Coombe. Le cadavre de celle-ci est découvert dans sa chambre. Robert avoue à sa tante avoir poignardé sa mère.

Robert, Nattie et John Fox sont immédiatement inculpés et bientôt envoyés à la prison de Holloway, en attente de jugement. Une enquête est menée, tandis que les journaux décrivent de façon misérabiliste le quartier de Playstow. À son arrivée à New York, le père de Robert et Nattie est informé du crime. Il exprime son opinion sur la santé mentale de Robert : “Dès son plus jeune âge, il a commencé à se comporter bizarrement. En grandissant, il a montré une intelligence inhabituelle pour quelqu’un de son âge. Il était un phénomène par certains côtés, et cependant il y avait chez lui des traits indiquant la présence d’une espèce de défaillance cérébrale. Les médecins que nous avons vus ne sont pas parvenus à poser un diagnostic sur son problème.” Lors des étapes du procès, le cas psychologique de Robert Coombes sera évoqué, de façon contradictoire.

Sans doute le jeune garçon est-il plus imaginatif que dément. Ce qu’il a cultivé en lisant des romans d’aventure bon marché, comme ceux ayant pour héros Jack Wright qui voyage à travers le monde. En suivant de près des affaires criminelles aussi, tel le procès de Jack Canham Read qui assassina une de ses compagnes. D’ailleurs, Nathaniel révélera que son frère comptait les entraîner, avec John Fox, suite au meurtre de leur mère, dans un voyage en Inde. La question des romans lus par Robert se posera lors du procès, car il a sûrement été influencé par la fiction. Selon certaines proches de la victime, Mrs Coombes était trop indulgente envers ses fils. Robert s’attend à être condamné à la pendaison, ce qui ne lui fait pas peur. Il fait preuve d’une apparente légèreté durant le procès. Certains l’estiment “amoral plutôt que fou”.

Incontestablement, le cas psychologique de Robert Coombes est particulier. Il est bel et bien condamné pour homicide volontaire, mais envoyé à l’asile de Broadmoor – où il passera le reste de sa jeunesse. En janvier 1914, Robert va finalement rejoindre son frère Nathaniel en Australie, colonie britannique, où débutera pour lui une nouvelle vie. À partir de ce changement, il se comporte en citoyen honorable…

Kate Summerscale : Un singulier garçon (Éd.10-18, 2018)

Dans ses livres, Kate Summerscale ne présente pas une version romancée des faits, mais les restituent tels qu’ils sont avérés. Elle s’appuie sur les documents d’époque, rapports de police ou compte-rendus de justice, articles de journaux (dont elle corrige les côtés souvent approximatifs). Dans l’épilogue, elle explique sa démarche, ses recherches. En Grande-Bretagne, à la fin du 19e siècle, l’époque victorienne affiche une certaine modernité, mais les archaïsmes sociaux restent stricts. D’une part, il y a l’élite, aristocratique, scientifique ou artistique ; de l’autre, la population, les sans-grade, vivant plus que modestement. Peu de classes sociales intermédiaires. Même ceux qui ont un emploi, comme le père de Robert, sont considérés tels de bas besogneux. Le système judiciaire fonctionne à l’image de ce temps-là, avec sévérité.

Un matricide était un crime très rare en cette fin 19e siècle. On n’en compte que deux par an en moyenne, beaucoup moins que cent ans plus tard. Ça explique que la presse populaire d’alors ait largement exploité le drame, de façon tapageusement morbide ou politique. La criminologie et son interprétation psychologique sont alors en plein essor, mais cerner la singularité de Robert Coombes n’est pas si simple. Étrange affaire, sans nul doute. En détaillant très précisément son histoire, Kate Summerscale nous fait partager les circonstances autant que le profil incertain du jeune coupable. Une reconstitution très vivante, qui captive en nous immergeant dans cette époque. Un livre à ne pas manquer.

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14 août 2018 2 14 /08 /août /2018 04:55

Charlie Parker n’est pas mort. Même s’il pense être passé un instant de l’autre côté. Avec ses inquiétants amis Angel et Louis, Charlie Parker a repris son activité de détective privé. Une mission pour le compte d’Edgar Ross, son contact au FBI. Faire arrêter l’insoupçonnable Roger Ormsby, cruel kidnappeur d’enfants, et sauver une fillette, c’est dans les compétences de Parker et de ses acolytes. Pour qu’il avoue ses crimes, on le menace de le laisser entre le mains du Collectionneur, cet effrayant mort-vivant face auquel Roger Ormsby comprend qu’il ne fera pas le poids. Affaire réglée, encore que l’agent du FBI Ross se demande s’il est bon de continuer à faire appel à Charlie Parker.

Sortant d’une prison du Maine, encore suivi en probation, Jerome Burnel a besoin des services du détective. Ils se rencontrent dans un bar de Portland, où l’ex-prisonnier raconte ses mésaventures à Parker. Jerome Burnel fut d’abord, involontairement, un héros. Alors qu’il faisait une pause dans une station-service, l’endroit fut attaqué par des braqueurs. Armé, Burnel tira sur les voleurs. Malgré les témoignages, Burnel n’est pas sûr d’avoir abattu celui qui se faisait appeler Henry Forde. Avec Barry Brown, leur complice Gideon, et une femme nommée Corrie, ils attiraient des hommes seuls, avant de les faire chanter, usant de violences. Les braquages faisaient aussi partie de leurs méfaits.

Après cet acte de bravoure, Jerome Burnel fut accusé de pédophilie, quand on retrouva chez lui du matériel pornographique impliquant des mineurs. Il s’est toujours déclaré innocent, refusant même un arrangement avec la Justice. C’était un coup monté, il répète qu’il a été piégé. Après sa libération, Burnel reste fiché, ayant peu de recours. Il compte sur Charlie Parker, lui proposant une piste. En Virginie-Occidentale, il existe un territoire vivant en complète autarcie, fermé aux étrangers, possédant un système de défense infranchissable, qu’on appelle l’Entaille. Certains délinquants qui pensaient s’y introduire l’ont payé de leur vie. Ces derniers jours, la police du comté a de nouveau ramassé les cadavres de deux dealers près du secteur de l’Entaille.

Le détective n’ignore pas que les habitants de ce territoire pratiquent le culte du Roi Mort. Tout ce qui touche à ces sujets – ésotérisme et surnaturel, autour de la mort – ça excite sa curiosité sans lui faire peur. Lui-même se sent protégé par l’âme de sa fille Sam. Charlie Parker recontacte Gordon Walsh, policier de l’État du Maine, qui le revoit à contrecœur. Le soi-disant Henry Forde est-il vraiment mort ? Walsh ne peut le certifier. Le détective ne peut guère espérer d’aide de l’avocat de Burnel. Par contre, il lui apparaît de plus en plus évident – même s’il est peut-être déjà trop tard pour sauver Burnel – que c’est en s’attaquant à l’Entaille, qu’il obtiendra des réponses…

John Connolly : Le temps de tourments (Presses de la Cité, 2018)

Parker avait changé. Pour commencer, il avait maigri, il avait plus de rides et plus de blanc dans les cheveux. Il semblait aussi plus taciturne, plus distant, mais Dave supposait que se faire tirer dessus, mourir et être ramené à la vie plusieurs fois pouvait avoir ce genre d’effet.
Son regard surtout était différent. S’il est vrai que les yeux sont les fenêtres de l’âme, celle de Parker brûlait d’une flamme nouvelle. Son regard recelait une conviction tranquille que Dave ne lui connaissait pas auparavant. Il s’agissait d’un changement fondamental : Parker était revenu non pas plus faible mais plus fort qu’avant, à la fois plus et moins que ce qu’il avait été.

Depuis “Tout ce qui meurt” (2001), Charlie Parker – ex-policier du NYPD – a vécu plusieurs aventures où il a frôlé la mort. “Le temps de tourments” est le quatorzième titre de cette série. Déjà dans “Sous l'emprise des ombres” (2015), à travers l’exemple de la ville de Prosperous, l’auteur évoquait la suprématie des cultes parallèles. On est ici dans un autre cas avec l’Entaille, dont les habitants revendiquent (depuis le 18e siècle) d’appartenir à un monde différent. Si cette enclave se dépeuple quelque peu, des vieux briscards comme Oberon Olhouser ou Cassander Hobb restent vigilants pour la protéger, ayant foi dans le culte improbable du Roi Mort. Rien de pire que ce genre de fanatisme.

Au delà du contexte, c’est la vie chaotique de Charlie Parker – ponctuée de moments critiques, mais aussi de réussites – qui sert de fil conducteur au récit. Il n’a pas oublié la mort de ses proches, et pense qu’appliquer la justice (à sa manière) est la seule façon pour lui de rester vivant. Parker est un personnage introspectif, ce qui ajoute de la force à l’image qu’il nous renvoie. Voilà pourquoi le lecteur ne le juge pas, bien que la violence s’inscrive dans ses méthodes. Ce nouvel épisode est encore et toujours passionnant. 

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12 août 2018 7 12 /08 /août /2018 04:55

Dans la région de Brighton, au sud de la Grande-Bretagne, le commissaire Roy Grace appartient à la police judiciaire du Sussex et du Surrey. Avec sa compagne Cleo, et leur fils de cinq mois Noah, ils déménagent actuellement dans une nouvelle maison. Roy Grace reste marqué par le souvenir de son épouse Sandy, portée disparue sans explication. En ce mois de décembre, deux affaires viennent se télescoper, mobilisant le commissaire et son équipe. Alors qu’elle rentrait chez elle, Logan Somerville – vingt-quatre ans, diplômée en chiropraxie – a disparu dans le parking souterrain de son immeuble. Son fiancé Jamie Ball a très vite alerté la police, pensant à un enlèvement.

Par ailleurs, sur un chantier des environs, des ouvriers ont découvert un squelette de femme. Selon la légiste, la victime aurait été tuée il y a trente ans, son corps ayant sans doute été déplacé pour le ré-enterrer là où on l’a trouvé. Pour Roy Grace, le cas de Logan Somerville reste prioritaire, car plus le temps passe, plus l’issue risque d’être fatale pour elle. En réalité, le ravisseur aime jouer avec les femmes qu’il enlève et séquestre. Il les appelle des "projets" et se plaît à les torturer. Captive, Logan imagine d’abord que c’est Jamie qui a organisé son enlèvement, car elle était en train de rompre leurs fiançailles. La police soupçonne également le jeune homme, mais sa culpabilité est improbable.

Le psychiatre Jacob Van Dam, oncle de Logan Somerville, reçoit un étrange patient, envoyé par le Dr Edward Crisp, généraliste à Brighton. Cet homme, qui dit s’appeler Harrison Hunter, prétend être un criminel et savoir comment entrer en contact avec le ravisseur de Logan. Sachant que la vie de sa nièce est en jeu, Van Dam s’interroge : doit-il dénoncer ce patient à la police, ou bien s’agit-il d’un mythomane ? Pendant ce temps, Roy Grace poursuit ses investigations. Il associe la disparition de Logan à celle, récente aussi, d’Emma Johnson, une jeune fille ayant la même allure qu’elle. Si le ravisseur est un criminel en série, il est probable qu’il chasse des femmes aux mêmes caractéristiques. 

Les ossements du chantier semblent correspondre au cas de Katy Westerham, âgée de dix-neuf ans à l’époque de sa disparition, voilà trente ans. D’après des photos, elle ressemblait énormément à Logan Somerville. L’enquête fut appelée Opération Yorker. Roy Grace consulte les archives sur cette vieille affaire, cherchant la signification du tatouage DCD sur le corps de Katy Westerham. Quand la jeune Ashleigh Stanford disparaît à son tour, vu qu’elle ressemble aussi aux victimes précédentes, la police met en œuvre de gros moyens. Une piste mène à un soi-disant Martin Horner, un nom peut-être trop courant pour être vrai. Mais la vérité est certainement plus complexe…

Peter James : Lettres de chair (Pocket, 2018)

Il retourna à la tente des techniciens et retira sa combinaison, puis fonça vers sa voiture. Avant de démarrer, il prit quelques notes. Les relevés dentaires permettaient parfois une identification, mais les circonstances n’étaient pas favorables. Contrairement à l’ADN, dont la base de données était centralisée, il faudrait contacter des milliers de dentistes britanniques pour espérer obtenir un résultat. Il faudrait aussi en savoir plus sur la victime. Si elle n’était pas britannique, les chances de trouver son dentiste étaient nulles.
L’ADN n’était pas une piste facile non plus, dans le cas présent. À moins que la victime se soit retrouvée en garde à vue, son ADN ne figurerait nulle part. S’il devait remonter trente ans plus tôt, aucune chance que son ADN soit inscrit dans une base de données. Ils allaient donc devoir éplucher le fichier des personne portées disparues en s’appuyant sur les informations données par Lucy Sibun : femme entre 15 et 30 ans, disparue entre trente-cinq et quinze ans plus tôt.

Il s’agit du onzième titre consacré aux enquêtes du commissaire Roy Grace. Une série rencontrant un beau succès international. Ce qui apparaît logique, car ce sont des romans policiers s’inscrivant dans une forme traditionnelle autant que dans notre temps. L’auteur n’oublie pas de donner à son héros une vie privée, entre le souvenir d’une épouse ayant mystérieusement disparu et le couple actuel du policier. Si, entouré de collègues compétents et d’experts en médecine légale bien inspirés, Roy Grace ne manque pas de flair et se pose les bonnes questions, c’est un coupable peu suspect qu’il devra cerner dans la présente affaire. Il se peut qu’un détour par un hôpital de Munich lui offre des réponses plus personnelles. Grâce à sa souplesse narrative et à un récit détaillé, “Lettres de chair” est un suspense qui captive immédiatement le lecteur. On suit avec intérêt les recherches du commissaire, jusqu’à la cachette où il dénichera le coupable. Un roman très réussi.

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10 août 2018 5 10 /08 /août /2018 04:55

Aux États-Unis, le comté de Moose se trouve à six cent kilomètres au nord de partout. La petite ville de Pickax a connu un passé plus glorieux, au temps des pionniers, puis grâce aux mines de charbon. Aujourd’hui, on y vivote gentiment. C’est là qu’habite Qwilleran, un journaliste sans souci financier, qui vit avec un couple de chats siamois, Koko et Yom Yom. Il est convaincu que Koko est doué d’une intuition qui, dans certaines affaires criminelles, donne d’utiles indices. Encore faut-il traduire ces signes. Connu de toute la population locale, Qwilleran est fiancé à Polly Duncan, la bibliothécaire de Pickax.

Ces jours-ci, la ville est en fête, autour de plusieurs événements : le Rassemblement Écossais présente une série de compétitions sportives celtiques, un hommage est rendu à Mark Twain, et le vieil hôtel a été complètement rénové devenant une luxueuse auberge. Le premier client prestigieux sera M.Delacamp, négociant en bijoux de Chicago. La propriétaire de l’auberge ayant été une amie de la défunte mère de Qwilleran, il va être le premier à découvrir les nouvelles installations. Par la même occasion, il va louer son appartement vacant à Barry Morghan, le jeune directeur de l’auberge.

Si l’on donne une soirée de gala réunissant l’élite de Pickax (dont Qwilleran et Polly) pour l’inauguration de l’établissement, c’est surtout la venue de M.Delacamp que l’on attend. Il donne une réception pour entrer en contact avec les femmes désireuses de vendre ou d’acheter des bijoux, des transactions qui se font uniquement en argent liquide. Delacamp est accompagné de sa nièce, Pamela North. À peine Qwilleran a-t-il fait sa connaissance que Delacamp meurt la nuit suivante à l’hôtel. Il s’agit d’un homicide, il a été asphyxié avec un oreiller entre deux heures et trois heures du matin. Dans les lieux publics de Pickax, les commérages vont bon train, chacun prétendant savoir quelque chose.

Que signifient les simagrées du chat Koko avec des noix du Brésil et autres crayons jetés sur le tapis, chez Qwilleran ? Si le meurtre de M.Delacamp a choqué les habitants, les festivités ne continuent pas moins. Réceptionniste à l’auberge, le jeune John Campbell, dit Boze, est médaillé à l’une des épreuves du Rassemblement Écossais. C’est aussi le suspect principal du meurtre de M.Delacamp. Andrew Brodie, chef de la police de Pickax et joueur de pibrock, connaît bien le parcours de cet orphelin. Qwilleran apprend que l’assassin a volé l’argent liquide de sa victime – sans doute une forte somme – mais pas les bijoux, trop difficiles à revendre. Même si l’on doit pourchasser Boze dans les anciennes mines de charbon, il n’est probablement pas l’instigateur de ce meurtre…

Lilian Jackson Braun : Le chat qui volait une banque (Éd.10-18, 2000)

Lilian Jackson Braun (1913-2011) écrivit plusieurs romans à la fin des années 1960, ayant pour héros Jim Qwilleran et son chat siamois Koko (Le Chat qui lisait à l'envers – Le Chat qui mangeait de la laine – Le Chat qui aimait la brocante). Elle l’interrompit jusqu’en 1986, où “Le chat qui voyait rouge” connut un réel succès public. “Le chat qui volait une banque” appartient à cette seconde série. C’est avant tout l’ambiance dans une petite ville américaine – où chacun est supposé se connaître – qui anime l’histoire. Les origines de fondateurs de Pickax (dont fit partie la famille de Qwilleran – les Macintosh) donne ici le prétexte à des fêtes "à l’Écossaise", avec ses compétitions typiques. L’intrigue criminelle est assez légère, mais permet un semblant d’enquête de la part de Jim Qwilleran. Avec une décontraction de dilettante, et de l’humour. Sympathique !

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8 août 2018 3 08 /08 /août /2018 04:55

À Manchester. Quand Kate Brannigan dresse le bilan de son activité, le situation est mitigée : “Chez Brannigan & Co, mon cabinet de détectives privés, nos missions sont assez variées. Auparavant, lorsque j’étais associée à Bill Mortensen, nous enquêtions sur des problèmes de fraudes financières, de sécurité informatique, d’espionnage et de sabotages industriels, sans compter des affaires que des amis nous confiaient de temps en temps. Depuis le départ de Bill pour l’Australie, il fallait que je ratisse large pour m’en sortir. J’avais arraché à quelques cabinets d’avocats des missions d’huissier, ajouté "surveillance" à notre papier à lettres et démarché les compagnies d’assurances pour leur proposer mes services d’enquêtrice sur les fraudes.” C’est ainsi que Kate accepte de servir de garde du corps à la célèbre star-télé Gloria Kendal.

Les Anglais sont accros à leurs feuilletons télévisés : “Dieu sait pourquoi, mais les Britanniques pardonnaient les vices des acteurs de leur feuilleton préféré plus facilement que ceux de la Maison de Windsor, même s’ils payaient aux deux des salaires considérables, l’un par le biais des impôts, l’autre par celui plus discret des écrans publicitaires.” Une mission très rentable s’annonce donc pour Kate. L’actrice Gloria Kendal a reçu plusieurs lettres de menaces et tous les pneus de sa voiture ont été tailladés. Ce qui explique son besoin d’être sous protection. Dorothea Dawson, la voyante attitrée des studios de télé NPTV confirme que la mort rôde autour de Gloria. La détective privée ne cache pas que la voyante et ses prédictions la laissent sceptique.

Sans négliger ses collaborateurs – son assistante Shelley, le fils Noir de celle-ci Donovan qui a souvent des ennuis, l’expert-informatique Gizmo – Kate Brannigan devient l’ombre de Gloria Kendal. Au studio, se pose un problème annexe (il y a des fuites sur les futurs scénarios du feuilleton, relayées par les journaux), que doit régler John Turpin, le Coordinateur Administration et Production de NPTV. Le mouchard figure certainement parmi le petit monde travaillant pour le studio, peut-être même le maquilleur Freddie qui sait tout ce qui se passe. Sinon, l’atmosphère semble assez décontractée au sein de l’équipe du feuilleton, Kate ne repérant personne qui voudrait tuer Gloria Kendal. Jusqu’à ce que paraisse un article sur elle et ses ennuis, ce qui provoque quelques tensions dues à une part de jalousie entre acteurs.

Ce n’est pas Gloria qui est assassinée, mais la voyante Dorothea Dawson. Si le sergent Linda Shaw se montre plutôt amicale avec Kate Brannigan, ce n’est pas le cas de son supérieur, l’inspecteur-chef Cliff Jackson. La détective constate que l’opinion sur Dorothea Dawson était nettement positive : “Elle te parlait des relations entre les planètes et de leurs effets sur ta vie. Une analyse très fouillée, tu sais. Elle savait tout sur les gens auxquels elle avait affaire. Dorothea avait l’habitude de garder le moindre renseignement, aussi insignifiant fût-il… Tout ça contribuait au mythe de la voyante extralucide.” C’est en se penchant sur le passé de Dorothea – avec un épisode douloureux datant de vingt ans – que Kate progresse dans ses investigations. Vu que l’inspecteur-chef Jackson la soupçonne maintenant du meurtre de la voyante, Kate a intérêt à se montrer efficace…

Val McDermid : Mauvais signes (Le Masque, 1998) – Prix du Roman d’Aventure 1998 –

De 1992 à 1998, la détective Kate Brannigan a été l’héroïne de six romans (Le dernier soupir – Retour de manivelle – Crack en stock – Arrêts de jeu – Gènes toxiques – Mauvais signes). Cette ultime enquête a été récompensée par le Prix du Roman d’Aventure, attribué par les éditions Le Masque. Richard, le compagnon de Kate, journaliste de rock, ne joue ici qu’un rôle mineur, mais leur ami Dennis – ex-cambrioleur – va être accusé du meurtre d’un malfrat. Et le jeune Donovan, à cause de sa couleur de peau, a beaucoup de mal à remplir les missions confiées par Kate. Toutefois, l’essentiel de l’intrigue se déroule dans le milieu de la production télévisuelle. L’ambiance décrite par Val McDermid paraît proche de la réalité des studios. Le récit est enjoué, prêtant souvent à sourire. D’autant que Gloria, actrice d’âge mûr, est une extravertie sans naïveté sur sa notoriété. Un polar très réussi.

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