Petit hommage à un des auteurs-phares de la collection Spécial-Police du Fleuve Noir. Deux suspenses de forme différentes, mais tous deux de très belle qualité.
La maison dans les vignes (1980)
Didier Dorfmann est un adolescent âgé de seize ans. Il passe ses vacances du côté de Ramatuelle et Saint-Tropez. Son père est un garagiste de Sarcelles, quelque peu râleur. Sa mère est une rousse, sujette aux maux de tête. Le coin qu'ils ont choisi pour installer leur camping-car est plutôt sympa, proche de la mer. La tente de Didier est plantée tout près. Il repère non loin de là une maison au milieu des vignes. De nuit, il s'en approche, et observe l'habitante des lieux, nue. Une révélation pour lui. Cette femme, il faut qu'il fasse sa connaissance. Dès le lendemain, sous un prétexte, il se rend chez elle. Cette Viviane n'est pas insensible au charge du garçon. Elle devient vite sa maîtresse. Une autre nuit, un homme pénètre chez Viviane et la menace, commençant à la rudoyer. Didier intervient, tuant l'agresseur, un certain Ferrero.
Viviane et Didier se débarrassent immédiatement du corps, qui sera bientôt retrouvé. Quelqu'un a vu les amants, qui fait chanter Viviane, réclamant une forte somme qu'elle ne possède pas. Vendre ses bijoux, c'est ce que lui ordonne le maître-chanteur pour payer ce qu'il exige. Étonnante suggestion, car la jeune femme n'en tirerait qu'une somme dérisoire. Didier pense avoir reconnu le maître-chanteur, un type qui joue nerveusement avec ses clés de voiture. Il l'a vu à Sarcelles, le retrouve curieusement ici. Cet homme constituant une menace aux yeux de Didier, il faut le supprimer, même un peu accidentellement. Toutefois, la mort de celui-là peut entraîner une enquête de police très stricte. C'est le moment que choisit le père de Didier pour décider de poursuivre leurs vacances ailleurs. Dans une telle situation de crise, Didier ne sait comment réagir face à Viviane...
En tant qu'auteur, Brice Pelman est au mieux de son inspiration quand il écrit ce roman. Narration fluide, personnages idéalement décrits, et rebondissements à foison, pour un des très bons titres de ce grand romancier.
L'avenir dans le dos (1984)
Aujourd'hui âgé de soixante ans, Jacques Dauteuil est un écrivain reconnu, un auteur de polars respecté. Un épisode de son passé ressurgit brusquement, en la personne de Julie. Dauteuil s'est toujours montré un mari exemplaire. Mais il eût une petite aventure avec cette Julie, alors jeune fille. Un amour-passion, qu'il n'a jamais vraiment mis de côté, qui le hante encore. Julie lui a écrit qu'elle souhaitait le revoir. Elle habite à Nice. A-t-elle divorcé d’Édouard Becket, ou est-elle veuve ? Elle ne le précise pas. Dauteuil a une grande envie de la revoir mais, par égard pour son épouse, il hésite. Il y va quand même.
La villa Mykonos où vit Julie baigne dans une ambiance assez étrange. Kevin, le maître d'hôtel, n'inspire guère confiance à Dauteuil. Édouard Becket est devenu un adepte fervent de la religion. Plane l'ombre de Charles, le frère d’Édouard, qui a disparu depuis quelques mois lors d'un voyage aventureux. Julie est visiblement heureuse que l'écrivain soit venu. Il est possible qu'elle se sente menacée. Elle reste extrêmement prudente vis-à-vis de son mari ou de Kevin. Dauteuil ne peut espérer d'intimité avec son ex-amante.
Le romancier ne se sent vraiment pas à l'aise dans cette propriété. Il réalise que la seule manière de reconquérir Julie serait de supprimer son mari. Ce serait une folie, même pour un auteur de fictions polar. Avant tout, il observe ce curieux petit monde, cherchant à discerner la personnalité de chacun...
Pour savourer cette excellente et énigmatique intrigue, il faut savoir que c'est Léo Malet (à qui est dédicacé le roman) qui raconta à Brice Pelman un souvenir insolite personnel. Puis il lui dit “Cette histoire, il n'y a que toi qui puisse l'écrire.” Le créateur de Nestor Burma ne se trompait pas, connaissant le goût de son ami pour l'étrangeté des ambiances. Résultat parfait, et clins d'œil nombreux. La vie du héros s'inspire à la fois de celle de Léo Malet et de Brice Pelman. Le nom de la villa rappelle nom de celle de Pelman. Fidèle à son style personnel et captivant, l'auteur termine par un dénouement plutôt astucieux.