Toni Musulin fait partie de ces personnes ayant marqué les esprits ces dernières années. Peut-être n’est-il toutefois pas inutile de résumer son heure de gloire. Né en juin 1970, Toni Musulin est ce convoyeur de fonds qui détourna 11,6 millions d'euros à bord de son fourgon, à Lyon. Âgé alors de trente-neuf ans, il possédait des placements immobiliers et des véhicules de luxe. Le 5 novembre 2009, il fausse compagnie à ses collègues après un chargement à la Banque de France. La police retrouve le fourgon vide peu après. Le coup semble bien préparé. Pas tant que ça, puisque deux jours plus tard, 9,1 millions d'euros sont découverts dans un garage loué sous une fausse identité par Toni Musulin.
Activement recherché, le convoyeur se rend à la police de Monaco le 16 novembre, avant d’être remis à la justice française. Il reconnaît le détournement, mais n’aurait pas conservé les millions d'euros manquants. En mai 2010, Toni Musulin est condamné à trois ans de prison ferme. Ayant fait appel, sa peine est alourdie à cinq ans de prison ferme, pour fraude à l'assurance concernant sa Ferrari F430.
La journaliste lyonnaise Alice Géraud-Arfi a recueilli les confidences de Musulin dans le livre “Toni 11,6, Histoire du convoyeur”(Éd.Stock). C’est cet ouvrage qui sert de base au film de Philippe Godeau “11.6”(sortie le 3 avril 2013). Les principaux rôles sont tenus par François Cluzet, Bouli Lanners et Corinne Masiero. Le scénario d’Agnès de Sacy et Philippe Godeau est librement adapté du livre en question. Le faits divers spectaculaire et la personnalité du convoyeur de fonds en font un excellent sujet pour le cinéma, c’est évident.
Ce serait probablement moins convaincant dans un roman. Car Toni Musulin n’est pas un héros, sans être non plus un simple raté. Certes, il peut nous apparaître sympathique puisque, à l’image d’un Albert Spaggiari au temps du mythique “Casse de Nice”, il n’a causé aucune victime. Voler ainsi les banques, c’est moins immoral aux yeux de beaucoup de gens. Toutefois, Musulin n’est pas un disciple de Robin des Bois, redistribuant le butin aux autres. En réalité, une opération mal pensée, un coup de branquignol, loin du chef d’œuvre de la cambriole. Devenir immédiatement le suspect n°1, laisser tant de millions dans une planque peu sûre, fuir vers une destination indéterminée, pas le profil du héros romanesque.
Oui, il existe des exemples tel Dortmunder, le héros de Donald Westlake, et ses mésaventures. Au moins a-t-il le mérite de nous faire sourire. Quelques autres losers aussi, bien sûr. Quant à Sam Millar, avec “On the Brinks”, ça se base sur une histoire vraie d’une toute autre ampleur. Surestimant sans doute ses capacités, et seulement motivé par le fric, Toni Musulin serait un piètre personnage de polar. Par contre, on comprend bien le parti que le cinéma peut tirer des mésaventures du convoyeur. L’excellent François Cluzet, né quant à lui en 1955, va sûrement incarner à merveille le rôle de ce délinquant pas comme les autres. Rendez-vous au cinéma dès le 3 avril pour découvrir ce “11.6”.