Parmi les romans réédités par Le Livre de Poche en janvier 2012, retenons deux titres. Le premier n’est d’ailleurs pas un polar, le second est un solide suspense signé James Patterson.
Martin Provost : “Bifteck”
À Quimper, au début du 20e siècle, la boucherie de Loïc et Fernande Plomeur est appréciée d’une large clientèle. Dans cette famille, on est tous
élevés dans la viande, bouchers de père en fils. André Plomeur a suivi dès son plus jeune âge cette tradition, ayant acquis un beau savoir-faire. Blond, le front bas, un faux air d’albinos, André
est aussi précoce quant aux plaisirs du sexe. Il n’a que treize ans quand la belle Jeannine éveille en lui des prédispositions viriles. C’est au temps de la Première Guerre mondiale, tous les
hommes sont au combat. Le jeune étalon attire les clientes. Tout en leur préparant la viande, sans malice, il en choisit quelques-unes pour des rendez-vous amoureux. Tout à une fin, même la
guerre. Lorsque les maris reviennent, les bébés nés des étreintes entre André et ses clientes s’avèrent encombrants. C’est ainsi qu’on dépose anonymement devant la boucherie un de ces bébés, puis
un deuxième, et encore d’autres. Voilà bientôt sept bébés, cinq garçons et deux filles, dont le jeune André s’occupe avec enthousiasme. Au détriment de la boucherie, qui va vite péricliter,
causant le décès de ses parents. Orphelin à seize ans, avec sept enfants à charge et un commerce à tenir, André se sent capable de faire face. Sauf que la situation se complique, au point qu’il
doit s’enfuir avec sa marmaille…
Il serait vain de faire entrer ce livre dans une catégorie précise, ou d’ajouter un long commentaire. Il s’agit là d’un conte plein d’humour et de tendre fantaisie. L’histoire concoctée par l’auteur est drolatique et savoureuse, riche en jolies trouvailles, racontée avec une fluidité bienvenue, avec un certain suspense.
James Patterson : “Une ombre sur la ville”
Veuf depuis quelques mois, Michael Bennett s’occupe autant qu’il peut de ses dix enfants, tous adoptés. Par chance, il peut compter sur la jeune nounou Mary
Catherine. Et sur Seamus, le grand-père ecclésiastique de Michael. La tribu Bennett est actuellement touchée par une épidémie de grippe. D’autres soucis, Michael en rencontre déjà beaucoup dans
son métier. Négociateur de la police new-yorkaise, il a “presque” réussi sa dernière mission, un sniper n’appartenant pas à la police ayant abattu le preneur
d’otage. Une journaliste désigne Michael Bennett comme fautif dans un article accusateur. Déjà, une nouvelle affaire de tueur psychopathe s’annonce. À Manhattan, une jeune
femme a été poussée sur les rails du métro. Peu après, un vendeur d’une boutique de grand luxe est assassiné. Puis c’est le maître d’hôtel d’un restaurant chic de New York qui est tué par un faux
livreur. Michael Bennett est chargé de diriger l’enquête. Le criminel portait trois tenues différentes, mais Michael est bientôt sûr qu’il s’agit d’un seul homme. Pas un tueur en série classique,
estime Michael : “Ce gars-là fait preuve d’un grand sang-froid. La plupart du temps, on a affaire à des individus vindicatifs, perturbé, partis en vrille. Ce n’est visiblement pas son cas”. En
effet, celui qui se surnomme Le Professeur a établi un plan précis, dans le but de donner des leçons à quelques concitoyens. Il a même rédigé et adressé à la presse un manifeste expliquant sa
mission…
C’est avec grand plaisir qu’on retrouve ici le héros de “Crise d’otages”, entouré de sa nombreuse famille. D’une tonalité assez ironique, le récit à la première personne offre une bonne dose de vivacité à ses mésaventures. La souplesse narrative reste la première qualité d’un bon polar. L’adversaire est un psychopathe en croisade. Un criminel ordinaire aux prétentions moralistes ? Un tueur vite pisté par les enquêteurs ? Peut-être, à moins que quelques faux-semblants et d’autres victimes ne masquent la vraie démarche de l’assassin.