En 1963, John Hathaway est âgé de dix-sept ans. Avec ses copains Charlie, Dan et Bill, il a créé les Avalons, groupe pop qui rêve de célébrité. Interprétant des reprises de chansons à succès devant le maigre public de petits clubs, ils croient en leur avenir. Il y a parfois de la baston avec les Teddy boys, partisans d’un rock plus violent. Hathaway devient l’amant de Barbara, employée de son père, de dix ans son aînée. Tandis que le braquage spectaculaire d’un train postal est à la une de l’actualité, les parents d’Hathaway voyagent en Espagne. En l’absence de son père, c’est son homme de confiance Sean Reilly qui gère les éventuels problèmes du fils Hathaway. Cet Irlandais fut un héros de la guerre, dans les commandos. Au retour de ses parents, Barbara est bientôt éloignée par Hathaway-père. John ne s’est jamais posé de questions sur les activités paternelles. Pourtant, il commence à réaliser que son père n’est pas un simple homme d’affaires.
Dans cette ville corrompue qu’est Brighton, station balnéaire qui ne cesse de se moderniser, le chef de la police est sans doute le plus pourri entre tous. Il touche sa part, fermant les yeux sur les bizness illicites du père de John. Continuant à se produire sur scène avec le groupe, le jeune homme participe quelque peu aux trafics de son père. Ce dernier place un de ses hommes pour dealer de la drogue autour de leurs concerts. Plus endurci que John, Charlie est aussi engagé par Hathaway-père. Officiellement, il devient manager de groupes pops, utilisant au besoin des méthodes radicales pour les imposer. L’un des problèmes actuels, c’est que les gangs de Londres cherchent à supplanter l’organisation du père Hathaway à Brighton. Ils ont déjà abattu l’ex-boxeur Freddie Mills, ami du mafieux, ce qui ressemble à une déclaration de guerre. Alors que John tombe amoureux de la cultivée Elaine, il va devoir s’impliquer dans les douteuses affaires paternelles.
De nos jours, voilà une quarantaine d’années que John Hathaway a succédé à son défunt père. Il s’est entouré d’hommes solides, anciens militaires ne manquant pas de jugeote. Ses activités tournent bien, mais il a encore des projets. Pourtant, un meurtre cruel vient bouleverser son bizness. Stewart Nealson, comptable des gangs de Brighton, a été empalé près du West Pier. En outre, un notable local, Laurence Kingston, semble s’être suicidé chez lui. Deux cas criminels auxquels l’ancien policier Robert Watts va s’intéresser, aidé par son ami entraîné Tingley. L’inspecteur Sarah Gilchrist est chargée d’élucider les faits, ainsi que le meurtre atroce d’un propriétaire de yacht et la disparition de son épouse et de l’équipage. Anciens soldats ayant connu la Bosnie, Bob Watts et Tingley se souviennent d’un Serbe dont les méthodes étaient comparables. Se sachant visé, Hathaway se rend en Normandie, pour demander conseil au vieux Sean Reilly…
Après “Promenade du crime” (2012), le deuxième volet de la trilogie que Peter Guttridge consacre à Brighton. On y retrouve les personnages principaux autour de Robert Watts. Dont son père, l’auteur de polars Victor Tempest, âgé mais toujours cinglant, qui connaît trop bien les secrets de la ville. La fameuse “malle sanglante de Brighton” ne fut pas le seul cas criminel associé à la belle station balnéaire. La célèbre “attaque du train postal” par Ronnie Biggs et ses amis aurait aussi un lien, quelques-uns des gangsters arrêtés étant d’ici. On n’a pas de mal à croire que des pratiques mafieuses se soient développées dans un lieu générant autant d’argent. On peut supposer que corruption et guerres entre bandes fassent partie d’une certaine “tradition”, le banditisme d’affaires allant de pair avec des actions plus meurtrières. La toile de fond de l’histoire est parfaitement plausible.
La seconde partie du récit traite de l’enquête parallèle sur plusieurs plans, menée par Watts. En réalité, c’est probablement la première qui reste la plus excitante. Il s’agit à la fois du portrait de John Hathaway, et d’une subtile reconstitution de l’ambiance de la décennie 1960 en Grande-Bretagne. L’intitulé de chaque chapitre est un titre de chanson à succès de l’année en cours, de 1963 à 1970. À cette époque, l’Angleterre est le pays le plus “branché” de la planète, pour la musique comme pour les modes vestimentaires. Le jeune Hathaway participe pleinement à tout cela. Son groupe pop va même virer au folk, le moment venu. Et ses tenues achetées à Londres seront “dans le vent”. Toutefois, il va se fixer un objectif plus sérieux, être à son tour le patron occulte de la ville. Toute médaille a son revers, même quarante ans plus tard. Car les truands venus des Balkans sont bien plus sanguinaires que les gangs britanniques. Un suspense de haute qualité !