Grand Prix des lectrices de Elle 2005, "Passage du Désir" de Dominique Sylvain marqua le début d’une série de romans ayant pour héroïnes un étonnant duo, Lola Jost et Ingrid Diesel. L’ex-commissaire de police et la jeune Américaine ont désormais leurs doubles à l’écran. En effet, l’adaptation du roman est annoncée sur France 2 le vendredi 3 février à 20h35. Dominique Sylvain ayant vu le résultat, elle a la gentillesse de répondre à quelques-unes de mes questions.
Dans l'adaptation de ton roman "Passage du Désir", Muriel Robin tient le rôle de Lola Jost, et Fatou Ndaye, celui d’Ingrid. Que penses-tu de leur interprétation ?
Dominique Sylvain : J'ai beaucoup aimé l'interprétation de Muriel Robin. Elle dégage une autorité naturelle, et est en même temps très drôle. Elle donne au personnage une belle dimension empathique, maîtrisée, sans pathos. La première scène où on la voit danser en kimono tout en dégustant son moment puzzle, tranquille dans son antre avec son verre de rouge, est très réussie. Fatou Ndaye est ravissante, fraîche, et fait ce qu'elle peut pour donner de l'énergie au personnage, mais je regrette qu'elle soit si différente de mon Ingrid. Son anglais n'est guère convaincant. Mais je suppose que dans une adaptation audiovisuelle d'un roman, il faut faire des choix. Et je crois que les scénaristes ont décidé de mettre l'accent sur Lola. ça correspond à ce qu'un producteur m'avait expliqué un jour : "Dans un film, l'histoire est racontée par un seul personnage".
On a l’impression que, dans les romans dont-elles sont les héroïnes, tu n’as pas cherché à leur donner un visage. Elles existent par leur caractère, leur volontarisme, leur excentricité aussi ?
D.S. : Leurs traits restent un peu flous, c'est vrai. Mais je donne tout de même une certaine description au début de la série. Lola est très enrobée, elle a une soixantaine d'années, et une tronche de bouledogue quand elle est de mauvaise humeur. Ingrid est à la fois sexy et athlétique. Elle a une courte crinière blonde ébouriffée, de grands yeux clairs. En fait, dans mon esprit, Lola c'est un mélange de Simone Signoret, époque Veuve Couderc, et de Katy Bates dans le remake américain des Diaboliques. Et Ingrid est belle et sympathique comme la délicieuse Claire Danes. Je ne me suis pas lancée dans une description précise pour laisser le droit aux lecteurs de se les approprier. Je préfère suggérer.
L'épisode a été tourné dans les quartiers de Pigalle et du canal St Martin. Pas de trahison dans les décors, donc ?
D.S. : Les décors sont impeccables. Le restaurant Les Belles donne envie de s'y attabler. Il y a aussi une très jolie scène "japonaise", le long du canal Saint-Martin, sous la pluie. Le psy Antoine Léger promène Sigmund, son dalmatien, la nuit. Il abrite Lola sous son grand parapluie rouge qui ressemble à une ombrelle. On a l'impression de se trouver dans un film japonais. C'est parfait.
Jackye Fryszman et Jérôme Foulon, les scénaristes, sont-ils restés fidèles à l’esprit des personnages et de l’intrigue ?
D.S. : Oui, l'histoire a été simplifiée, mais de nombreux dialogues ont été conservés. Les scénaristes ont décidé de tabler sur le côté comédie, et sur la fantaisie de la série. Dans les romans, il y a une dimension plus large dans le sens où les moments de rigolade alternent avec des scènes fortement dramatiques. Et dans le dernier roman de la série, "Guerre sale", la tragédie prend le pas. Mais encore une fois, je suppose qu'il faut faire un choix. C'est pour cette raison que je n'écris pas de scénario. Ceci étant dit, je constate tout de même qu'une série comme Dr House sait être à la fois hilarante et dramatique. J'en déduis qu'il s'agit d'une spécialité anglo-saxonne. Une tradition dont je me sens très proche tout en étant 100% frenchy.
Un grand merci à Dominique Sylvain. Ici, quelques infos sur ce téléfilm. Mes chroniques sur d'autres romans de D.Sylvain : "L'absence de l'ogre" - "La nuit de Géronimo", "Manta Corridor" - "Baka" (une enquête de Louise Morvan). Dominique Sylvain a aussi répondu au Portrait Chinois et à l'Interview Express.