Selon les épisodes et les auteurs, Le Poulpe traverse parfois des aventures agitées jusqu’à en être assez délirantes. Marin Ledun choisit de nous présenter un Gabriel moins dépressif, très offensif, dans “Un singe en Isère” (Éd.Baleine). Une très bonne version poulpesque, solide et sérieuse, parmi les meilleures de la série.
Cette fois, c’est à Grenoble que Gabriel Lecouvreur est appelé par de vieux amis. Non pas pour soutenir les éco-citoyens qui campent dans les arbres du Parc Paul Mistral. Ceux-ci s’opposent depuis plusieurs années au chantier, déjà avancé, d’un futur stade de football au centre de Grenoble. Quelques décisions de justice leur ont été favorables, mais la municipalité n’est pas loin d’envoyer les forces de l’ordre contre ces militants. Un meurtre vient d’être commis aux abords de ce chantier controversé. Alors qu’elle cherchait son amie disparue Mathilde, SDF comme elle, Judith a été violée et tuée. Les enquêteurs ont arrêté José, ami de cœur de la jeune femme. Ils ont trouvé quelques affaires appartenant à Judith dans l’appartement de José, ce qui suffit à les convaincre de sa culpabilité.
Pour Alain, le père du suspect, et leur copain Michel, Gabriel cherche des indices de l’innocence de José. Le refuge de la victime a été saccagé. Le Poulpe apprend que Judith était amoureuse de Mathilde, et non de son soupirant. À première analyse, rien de probant en faveur de José. Pourtant, Gabriel ne renonce pas à sa promesse : “Refaire le boulot, fouiller, fouiller jusqu’à ce que José sorte de taule, et qu’Alain cesse de pleurer.” Il interroge l’étudiant Jean-Baptiste, qui soutien les éco-citoyens, puis le jeune ouvrier Simon, employé sur le chantier. Tous deux amis de José, ils manquent de franchise dans leurs réponses. Gabriel s’introduit dans le bureau du chef de chantier, dérobant un document important. Mais celui-ci, un colosse nommé Vincent, l’intercepte. Gabriel parvient à fuir.
L’étudiant Jean-Baptiste semble être le maillon faible de l’affaire. Gabriel le prend en filature jusqu’à la Fac. C’est ainsi que Le Poulpe se laisse charmer par la belle Sophie. Ayant vu Vincent en contact avec Jean-Baptiste, Gabriel intervient juste à temps pour sauver l’étudiant d’une fatale overdose. C’est bien Vincent qui a voulu le supprimer. La colère lui donnant des ailes, Gabriel tente une visite nocturne sur le chantier du stade. Le colosse s’interpose avec violence. Suite au pugilat, Le Poulpe est déjà heureux de s’en sortir vivant.
Le “nettoyage” annoncé du parc Paul Mistral, sur ordre de la mairie, entraîne une manifestation militante. Gabriel préfère s’intéresser au jeune ouvrier Simon. Dans l’appart vide de celui, il repère des traces de Mathilde, l’amie disparue de Judith. Aux archives des services de l’urbanisme, Le Poulpe consulte le dossier concernant le futur stade. Les embrouilles autour de sa construction comportent un début de réponse. Si Mathilde et Simon sont encore en vie, s’il existe une possibilité de disculper José, Le Poulpe doit maintenant agir au plus tôt…
Comme il ne se tracasse pas au sujet de sa relation avec la blonde Chéryl, ici totalement absente, Le Poulpe garde les
idées claires lors de son enquête de terrain. Investigations mouvementées, durant lesquelles il reçoit d’inévitables mauvais coups. Autant de chocs lui donnant l’énergie nécessaire pour résoudre
l’affaire. Le Poulpe reste fidèle à ses principes, même s’il n’est guère amateur de manifs : “Personne ne le convaincra jamais de marcher au pas (…) On a la liberté qu’on peut et la fierté
déplacée qui va avec. Ce qui n’empêche pas Gabriel de porter un respect sans borne à ceux qui s’y collent, parce que merde, tous ces gens prêts à sacrifier le repas dominical ou une journée de
travail sont des héros, au même titre que ceux qui se lèvent le matin pour aller au turbin.” Il admet aussi que les anars évoluent : “Après tout, les temps changent. Même les anarchistes mangent
bio et trient leurs déchets.”
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