Dans la collection First Histoire, Philippe Valode et Robert Arnaut proposaient en 2010 “Les dossiers secrets de la Seconde Guerre mondiale”. Il s’agissait d’évoquer quelques points précis concernant l’époque, des faits parfois mal connus du grand public. Ce même duo poursuit aujourd’hui son œuvre de vulgarisation historique, en abordant quinze autres sujets dans “Les dossiers oubliés de la Seconde Guerre mondiale”. Ils reviennent sur le cas des sacrifiés de Dieppe en août 1942, sur l’évasion rocambolesque de Mussolini en septembre 1943, font le portrait d’Alan Turing savant et patriote anglais qui décrypta le code nazi Enigma, et encore celui de Janusz Korczak au cœur du Ghetto de Varsovie, misant sur les enfants.
L’histoire de Rudolf Hess nous donne l’occasion de nous rafraîchir la mémoire. On sait que, ayant participé dès le début à l’élaboration du nazisme, Hess fut un
ami de confiance d’Hitler. Son statut restait particulier dans de dispositif mis en place. Quand l’Angleterre entre dans la guerre en 1940, certains dignitaires nazis croient à la possibilité de
négociations, dont Hitler et Hess. Une affaire des plus délicates, qui doit obéir au secret le plus strict, ayant peu de chances d’aboutir. “Seul, peut-être Rudolf Hess est sincère et pense
qu‘il peut être le messager de la paix”. Son voyage aérien n’a, curieusement, été entravé par personne. Mais, dès qu’il arrive en Grande-Bretagne, il ne connaîtra plus que la prison,
jusqu’à sa mort.
En Angleterre, proche de Churchill, la famille Mitford appartient à l’aristocratie. Trois des filles sont assez jeunes politisées. Jessica montre son enthousiasme pour les vertus du communisme en URSS. À l’inverse, ses soeurs Diana et Unity sont fascinées par l’hitlérisme dès 1933. Diana finira par épouser Oswald Mosley, dirigeant d’un mouvement anglais pronazi. Le 3eReich monte militairement en puissance, mais bon nombre d’Anglais sont inconscient ou aveuglés. Y compris Lloyd George, reçu par Hitler au Berghof en septembre 1936. Installées en Allemagne, Unity et Diana deviennent des intimes du régime nazi. Alors que la guerre avec l’Angleterre est inévitable, Unity est totalement désemparée.
En France, le mouvement d’Eugène Deloncle trouble la politique d’Avant-guerre. D’inspiration royaliste, La Cagoule, ou CSAR, est prête à l’insurrection armée. Le moment venu, peut-être dans un éclair de lucidité, Deloncle renoncera à tenter le coup d’état. Son parcours ne s’arrête pas là puisque, dans les premières années de la guerre, il s’avère un chaud partisan de la collaboration. Bientôt déçu, il se rapproche du complot visant à éliminer Hitler… Au sommet du pouvoir, l’amiral Darlan a beaucoup plus navigué dans les cabinets ministériels que sur la mer. Ayant quasiment les pleins pouvoirs, désigné comme héritier de Pétain, c’est lui qui met en place la politique de collaboration et les premières sanctions contre les Juifs. Quand il est écarté par l’installation de Laval, Darlan prend contact avec les Alliés qui ont débarqué en Afrique du Nord. Toutefois, les monarchistes du “Groupe des Cinq” ont déjà décidé de le faire assassiner.
On a certainement oublié le maquis résistant du Capitaine Lecoze, dans la région de Loches. Début 1944, le Dr Jan s’installe dans cette ville. Bienveillant avec sa clientèle, il semble avoir traversé des drames depuis le début de la guerre. On se méfie quelque peu de lui chez les Résistants du secteur. Alors, il crée son propre réseau rassemblant un certain nombre d’excités dans son genre. Entre exécutions et parades tapageuses, il s’impose plutôt par la terreur qu’en faisant preuve d’héroïsme. Basé dans les châteaux des environs, ce maquis n’est que débauche, violence et mort. Courte période d’euphorie pour le Capitaine Lecoze, mais la fin de la guerre signera aussi la fin de sa gloire.
Un peu en marge de l’époque, on retrace également le parcours du soldat Mangin à partir du début 1918, amnésique interné à Rodez. Ce n’est pas un simulateur, à coup sûr. De multiples familles croient reconnaître un des leurs. Même le célèbre Pr Locard va tester la graphologie pour l’identifier. Des pistes auraient mérité d’être mieux exploitées, car il pouvait être ce Marcel Lemay reconnu par sa “veuve”. Il est possible que les Monjoin père et fils aient réellement pensé que c’était bien Octave Monjoin. L’homme décèdera en 1942, sans que son identité soit absolument confirmée.
Le cas de Joseph Darnand, celui de Pierre Pucheu, Xavier Vallat, Darquier de Pellepoix, René Bousquet et quelques autres sont encore évoqués dans ce livre d’histoire, qui nous rappelle tout le sinistre contexte de l’époque. Une bonne manière de revenir sur ces faits passés, racontés avec clarté et sobriété.