Romancier et scénariste de BD, José-Louis Bocquet publia dans la Série Noire "Sur la ligne blanche" (1993), "Point mort" (1994), "Karmann blues" (1996), ainsi que beaucoup d'autres livres chez divers éditeurs. En 2010, il a publié "Les lumières de la ville ne s'éteignent jamais" (Le Masque). Retour sur un de ses très bons titres, sorti en 2002 : "Les chênes rouges" (Le Masque).
Bretagne, forêt de Brocéliande. Vincent, jeune maçon, découvre un œil qui le regarde lors
du décoffrage d’un pilier en béton. Pour l’enquête, le capitaine Chenevez (flic peu conformiste) rejoint à Kernéant les lieutenants Cattala (jeune femme assez froide) et Morin (authentique noir
breton). Selon le Dr Gorry, la légiste, le corps de la victime serait déchiqueté dans ces piliers. Des indices permettent d’identifier la disparue : Sonia, une universitaire de la région.
Elle paraît avoir déménagé, mais tout prouve qu’il s’agit d’elle. Les soupçons du policier se portent sur la famille du maçon. Malgré "l’omerta bretonne", il va établir les circonstances
de la mort de Sonia.
Mais des détails essentiels manquent. Les témoignages de Pascaline – amie de Sonia – et de Langeac – l’éditeur de la victime – laissent penser que c’est moins simple. Pourquoi Sonia a-t-elle contacté le sulfureux journaliste Jacky Malgorn ? Si les légendes régionales racontées par le guide Gwendal intéressent le policier, il s’interroge sur la personnalité de La Baudrière, hobereau local, et de son régisseur Yann Lansson. Son ami des R.G. le renseigne sur le détestable passé du châtelain. Au cours de l’Histoire, l’autonomie bretonne a connu des pages noires. Il y fut mêlé. Le cadavre de Pascaline est retrouvé. On peut s’inquiéter pour Jacky. Un ancien activiste d’extrême gauche habite par ici sous un faux nom. Chez lui, on récupère le journal de Sonia. Elle y parle de réunions secrètes nocturnes au cœur de la forêt. Des fachos tirent sur les policiers, Morin est blessé. Le "rassemblement païen" visé par le groupuscule pourrait bien être la rave party qui débute dans le secteur...
« Il m’a fallu dix ans pour oser prendre comme héros de mes livres les gens enracinés là où je vis. Je ne voulais pas être faux » (*) dit Bocquet. En effet, décor et personnages sonnent juste. On le croit quand il précise : « Je suis un descriptif plus qu’un imaginatif» (*Dimanche Ouest-France, 28/07/2002.). Car il se sert des réalités passées et présentes pour installer l’ambiance de cette excellente histoire. On part d’une affaire criminelle insolite pour en arriver à l’ambiguïté de la cause Bretonne, entre politique et culture. Un sujet déjà traité, mais que Bocquet sait pimenter à sa façon. La narration fluide progresse à un bon rythme. Un très bon roman, à redécouvrir.