Le premier polar de Jérémie Guez “Paris la nuit” est disponible chez J’ai Lu. Bonne occasion de découvrir ce jeune auteur…
Paris Nord, c’est le territoire d’Abraham depuis toujours. “Longtemps j’ai cru que l’existence c’était ça, ce bordel incessant. Ce n’est qu’en vieillissant que je me suis rendu compte que le bruit n’est inhérent qu’à la pauvreté. Cette fureur qui s’autoalimente est créée par le manque d’éducation, la violence et l’absence totale d’intimité. Dans ma rue, le repos est interdit, et on grandit tous de la même façon.” Abraham loge chez son père, vit de combines et de petits trafic, se drogue un peu. Il a une petite amie étudiante, Julia. Goran est son meilleur copain depuis l’enfance. Toujours de connivence, ils partagent certains moments excitants, telle cette baston à Pigalle, qui se termine par une nuit au poste de police.
C’est en accompagnant leur pote Nathan dans un clandé qu’Abraham émet l’idée de braquer les clients de cette salle de jeu d’argent. Sans doute Nathan y avait-il déjà pensé, mais c’est Abraham qui est capable de réunir une petite bande. Avec Goran et Nathan, Trésor (un grand Black), et Karim pour s’occuper de la voiture, le braquage apparaît possible. Un peu de préparation et un bon repérage, l’affaire est lancée. Abraham a besoin d’amphètes, mais aucun de ses complices ne craque durant l’attaque du clandé. “Écoutez les mecs, vous avez voulu jouer les durs, vous allez me prendre un peu de pognon. Mais croyez-moi, je vais vous retrouver parce que Paris, pour les gars comme nous, c’est petit” leur promet-on.
8000 Euros chacun, joli pactole qu’il convient de ne pas trop exhiber. Larguant Julia, Abraham se rapproche d’un groupe d’étudiants du Quartier Latin. Il méprise Pierre et ses amis, mais ceux-ci deviennent rapidement de bons clients toxicos. Si la jeune Alexandra ne manque pas de charme, Abraham se doute qu’elle sera vite accro aux drogues. Les semaines ont passé. Nathan et Trésor sont partis claquer leur part sur la Côte d’Azur. Goran se montre maintenant inquiet. Il pense que Karim les a balancés à leurs victimes du clandé. Même si ça ne suffit pas, il est prudent pour le duo de changer de planque. La violence ne tarde pas à s’exprimer de plus en plus fortement pour Abraham et Goran…
Utilisant un sujet qui a fait ses preuves, c’est un sympathique premier roman que produit ici Jérémie Guez. Petits truands combinards, braquage et partage du butin, un quotidien tout aussi médiocre par la suite, le risque impalpable en supplément. Des ingrédients solides du roman noir, correctement maîtrisés. Des personnages intemporels de la criminalité. Toutefois, on cherche vainement l’argument de LCI figurant en quatrième de couverture : “Avec des dialogues à la Audiard, des discours prenants et percutants.” Non, rien de vraiment neuf dans la narration, ni dans un dialogue tel que “Mais putain de merde, c’est un coup en or. On peut se faire un peu de blé sans risque, mec. C’est de l’argent sale, donc pas de police à l’arrivée.” On peut penser que cet auteur trouvera probablement sa propre tonalité dans ses romans suivants, car on sent un potentiel. Ça reste un polar de bon niveau, plutôt agréable à lire.