Née en 1951, la Québécoise Danielle Charest est décédée en octobre 2011. Cette romancière fut une militante du lesbianisme radical, très active. De 1998 à 2002, elle avait publié quatre polars aux Éditions du Masque : “L’Érablière, “L’Échafaudage”, “L’Étouffoir”, “L’Entrave”. Elle publia encore “Conte à rebours” aux Éditions Diesel en 2003. Sans doute est-ce le même roman qui est réédité aujourd’hui dans la collection Badgirls, des éditions Sirius. Commençons par un survol de ce “Conte à rebours” (2012).
À Montréal, Jocelyne Sauvageau est depuis très longtemps dévouée à la société qui l’emploie. Mais l’ambiance devient
pénible chez Beaugrand-Courtois-Delors. Le mépris
dont font preuve ses employeurs la révoltent sourdement. Elle a l’espoir de changer de vie, car son père est actuellement hospitalisé en très mauvais état de santé. Impresario réputé au Québec,
Léon Sauvageau a été un homme aux principes moraux stricts. Jocelyne a un demi-frère, Michel, un marginal qui est dans la musique, proche du groupe de rock réunissant Lucky et ses amis. Michel
contacte Jocelyne, affirmant que leur père est mort. Tous deux cachent à peine leur rapide envie d’hériter. Michel entraîne sa demi-sœur dans son appartement, avant d’aller à
l’hôpital.
C’est un piège. Assommée, Jocelyne se trouve séquestrée et attachée sur un lit, dans une pièce insonorisée. Michel n’est pas seul. Il s’est dégoté une complice, Claude, sans doute d’origine française. Il lui a fait croire qu’il devait se venger de Jocelyne, qui l’aurait mis dans une situation délicate. Ils vont faire des photos compromettantes pour écarter Jocelyne de l’héritage. Un temps désorientée par les évènements qu’elle maîtrise mal, la prisonnière n’a pas le caractère à renoncer. Elle va devoir faire preuve de psychologie pour faire comprendre à cette Claude les mensonges de Michel.
Pendant ce temps, au bar-club L’Accès, où se réunissent quelques lesbiennes montréalaises, Lorraine attend en vain son amie intime, Jocelyne. Ce n’est pas en restant écouter les comédiennes de seconde zone et autres filles qui l’entourent ici, qu’elle pourra retrouver son amante. De son côté, Jocelyne gagne peu à peu des points contre son demi-frère…
Outre l’intrigue criminelle, il est évidemment beaucoup question de lesbiennes dans cette histoire. Quelques coups de griffes sont également destinés à souligner un certain ostracisme québécois: “Les quelques mots glanés de la bouche de Josiane n’en confirmaient pas moins la réalité du conformisme ambiant et, plus effrayant encore, la vitesse avec laquelle les idées rabougries se répandent et grugent sournoisement les esprits.” La douane canadienne se montre aussi assez tatillonne, semble-t-il, au point qu’une voyageuse s’énerve : “Voulez-vous bien me dire de quoi le Canada doit se protéger ?”. S’adressant à un public français, on a jugé utile de traduire quelques mots, tels ratoureuse, trop d’adon, s’enfarger ou rapailler.
C’est l’occasion de se souvenir d’un autre titre de Danielle Charest,
“L’entrave” qui fut publié aux Éditions Le Masque en 2002.
Jean Lecarré est un ministre canadien arriviste. Sa femme Pauline a décidé de ne plus jouer le jeu de l’épouse parfaite. Quand ils s’aperçoivent de la disparition de leur fille Margo, âgée de quinze ans, Lecarré alerte l’enquêteur Normand Fréchette. C’est un vieil ami à lui qui saura se montrer discret, car l’affaire ne doit pas être ébruitée. Pauline est convaincue que les deux hommes complotent dans son dos. Alors que Normand Fréchette essaie de l’amadouer tout en lançant ses investigations, elle prend contact avec Le Groupe. Ces justicières ont fait parler d’elles dans de précédentes affaires. Elles acceptent la mission.
Enlèvement, suicide, fugue, meurtre, aucune hypothèse n’est exclue. Deux faits semblent essentiels. Margo aurait été violée quelques semaines plus tôt par quatre fils de bonnes familles qui n’ont pas été inquiétés. Et la jeune fille a été en contact avec l’Église du Renouveau Spirituel, qui a tout l’air d’une secte. Une demande de rançon est adressée aux parents. Pauline se demande si des mafiosi québécois en rapport avec son mari sont impliqués. Claudia, du Groupe, rencontre la mère de Josée, qui fut la meilleure amie de Margo. Alors qu’un nouveau courrier des ravisseurs double la rançon, l’un des violeurs de la jeune fille est assassiné. Une piste à exploiter pour le Groupe, qui espère retrouver vivante la disparue.