Pascal Polisset est un lecteur avisé, qui connaît et admire de longue date l'oeuvre de Patrick Mosconi. Il rend ici hommage aux deux derniers romans parus de cet écrivain. C’est avec plaisir qu’Action-Suspense laisse la parole à l'ami Pascal.
« Patrick Mosconi est un écrivain, à la fois,
intriguant et passionnant pour au moins deux raisons.
D’abord parce qu’il écrit rarement. Ce qui pourrait n’être que le fait des éditeurs est, en fait, la conséquence d’une foule d’autres vies sourdes et passionnées qui mènent pas à pas, l’homme dans l’ombre et l’envahissent à la limite de la rupture d’existence. Heureusement et malgré lui, ces vies exigent, pour se poursuivre, quelques éclats sombres qui le ravivent et lui imposent quelques trop courts retours au pas ou au galop, l’auteur ignorant le doux balancement d’un trot de longue haleine.
Ses deux derniers livres : “Sans mot dit” (Editions La Branche, coll. Suite Noire) et “Mélancolies” (Seuil, coll. Romans noirs) écrits coups pour coups, le réinventent, en même temps qu’ils le réinvitent sur les festivals, sur les rayons des libraires.
Dernièrement, au festival du roman noir de Frontignan, un ami commun me disait : « Mosco écrit toujours la même chose depuis trente ans ». J’ai trouvé cette phrase d’une incroyable justesse : sous couvert d’un humour acide, le frère commun définissait cet écrivain.
Patrick Mosconi écrit une incessante invitation à un détour de lecture, un peu comme ces bras de fleuves que les aménagements ont mis en marge du cours principal, et qui reviennent lentement, inlassablement au cours principal pour donner leurs eaux jusqu’à l’estuaire, jusqu’à la mer immense. Dans ces bras, que les aménageurs nomment « morts », les naturalistes savent retrouver toute l’histoire du fleuve, toutes ces espèces vivantes qui ont été mises au rencard des exigences économiques et qui s’immiscent en permanence pour redonner de la vie au cours principal. Dans ces bras, au bout des doigts de l’écrivain, un clavier pour outil, ce sont ces vies reléguées qui imposent leurs existences face au flux tendu des certitudes imposées et si débilitantes.
Dans “Sans mot dit” l’auteur balade ses personnages au gré des événements et des misères qui les ont créés. Dans “Mélancolies”, nous sommes dans un huis clos, plus précisément dans plusieurs cercles clos. Chaque personnage reste confronté à sa propre histoire et se retrouve « hors de lui », obligé de « partager » ce qui lui est le plus personnel.. tout autour d’un silence pesant.. d’une incroyable convergence.
Ce qui est essentiel dans l’écriture de Patrick Mosconi c’est que, si « il écrit toujours la même chose depuis trente ans.. », la petite musique de fond de ces livres oblige de changer de disques pour les mieux apprécier. Pour ce nouvel ouvrage, j’ai choisi a contrario : Paolo Conte. Cela m’a aidé à passer les épreuves du récit. »