Le n°3 du magazine L’Indic (36 pages) vient de paraître. On peut le commander (4 Euros, sans frais de port) à
l’association Fondu au Noir, 27 rue Anatole Le Braz, 44000 Nantes ou se renseigner ici :
http://fonduaunoir44.blogspot.com
“Polar & alcool”, tel est le thème principal de ce numéro. Plutôt que d’en présenter le sommaire – avec les interviews de trois traducteurs, un article sur Ken Bruen, un autre sur la Prohibition, une réflexion sur l’alcool et le talent, quelques chroniques sur des romans à ne pas manquer, etc. – voici un court extrait de roman qu’auraient pu utiliser nos amis de L’Indic. L’alcoolisme fut le sujet de prédilection de David Goodis. Dans “L’allumette facile”, son héros (Rif) est un pyromane qui ne se souvient plus s’il a causé la veille un incendie mortel (cinq victimes). Il est activement recherché par la police qui connaît ses antécédents. En découvrant le plaisir du vin, il avait cru trouver un remède à sa manie incendiaire. Dans cet extrait, est décrite sa première expérience alcoolique :
“Ils avaient fait connaissance sept ans auparavant (…) Comme Rif frottait son allumette, Burt Pomfret l’avait hélé pour lui offrir à boire. Rif lui avait répondu qu’il ne buvait jamais. Burt lui avait demandé pourquoi, et Rif avait expliqué que le goût du whisky ne lui plaisait pas. Burt avait hoché la tête, l’air sagace : « D’accord, avait-il déclaré, le whisky a une odeur dégueulasse, de même que la bière et, en plus, c’est plein de bulles, autant boire du vent. Mais le vin, et surtout le muscat, ça n’a rien à voir. C’est une invention formidable qui vous procure à la fois la chaleur et le bien-être, tant au moral qu’au physique. Faut en avoir goûté pour s’en rendre compte. » Rif l’avait écouté en silence, souhaitant qu’il le laissât tranquille. Mais Burt avait si bien vanté les mérites du muscat que, finalement, rien que pour avoir la paix, Rif avait accepté la bouteille qu’on lui tendait et avait bu une goulée. Après y avoir goûté un certain nombre de fois, il avait senti se dissiper peu à peu cette fièvre qui le poussait à allumer le feu (…) Petite cause, grands effets ! Rif y avait songé plus d’une fois au cours des années suivantes : d’un seul coup, l’incendiaire s’était mué en ivrogne, sans douleur.” (© Gallimard, 1958 – Série Noire n°421, traduction Alain Glatigny)