Une fois n’est pas coutume, c’est un auteur de romans-jeunesse qui est à l’honneur. Né en 1972 à
Bordeaux, Guillaume Guéraud apporte une originalité à la littérature pour adolescents. Sans concession, il aborde de front des réalités sociales longtemps occultées dans cette catégorie de
livres. Des textes qui n’excluent pas la violence, puisqu’elle existe dans le quotidien. Ces romans sont publiés aux Éditions du Rouergue.
"Cité Nique-le-Ciel" (1998). On dirait une adresse du pays des merveilles, Cité Arc-en-Ciel, mais c’est rien d’autre qu’un quartier pourri. Rachid a treize ans, ça fait
exactement la moitié de sa vie qu’il habite ici et son frère vient de mourir. Sa copine Thui cache quelque chose de triste. Le fils du gardien s’abrite le nez dans ses bouquins. Et son pote
Lamine a les boulons qui pètent. À croire que tout vire à la catastrophe. À se demander pourquoi une cité si grise porte ce joli nom plein de couleurs. Rachid voudrait s’envoler. Il veut pas
jouer les apprentis vauriens. Il veut devenir pilote de ligne. Mais tout s’acharne à lui faire croire qu’il fallait naître ailleurs pour ça. Alors Nique-le-Ciel ! Une tonalité sans concession,
directe et incisive, pour décrire une réalité sombre et violente.
"Coup de Sabre" (2000). "Avant que l’homme existe, la guerre l’attendait." C’est sur cette phrase de Cormac McCarthy que s’ouvre ce livre sur le thème de la guerre, des guerres.
Le grand-père de Joey n’ouvre plus la bouche depuis qu’on lui a coupé la langue. Il n’a plus toute sa raison depuis que des soldats français ont violé et tué sa soeur. Dans un pays qu’on appelait
l’Indochine. Dans une guerre d’où certains sont revenus manchots et la plupart l’esprit en lambeaux. La guerre ne se termine jamais pour ceux qui restent avec leurs souvenirs et leurs morts. Tom
et Joey accompagnent Houng Chiu-faï jusqu’au bout de sa vengeance. Ils ne savent pas ce qu’ils feront de cet héritage. Psychologie et enquête policière, mais surtout retour sur un noir passé.
"Je mourrai pas gibier" (2006). Il s’appelle Martial, il vient d’abattre cinq personnes et en blesser gravement deux autres, lors du mariage de son frère. Il n’a pas pu se
suicider, il ne lui restait plus de cartouches. Construit en flash-back, le roman déroule l’engrenage fatal qui a mené cet adolescent au carnage. Dans son village, Mortagne, ils sont tous soit
scieurs, soit vignerons, deux clans ennemis qui s’affrontent depuis toujours. Alors, Martial préfère aller apprendre la mécanique plutôt que le travail du bois. Il veut échapper au proverbe que
citent aussi bien les scieurs que les gars de la vigne : "Je suis né chasseur ! Je mourrai pas gibier !" Parce qu’à Mortagne, la violence est partout. Dans les parties de chasse et les fêtes de
village. à la scierie, où le père de Martial a attrapé un cancer. Le seul en dehors de tout cela, c’est Terence, le débile du village, que tout le monde tient à l’écart. Lorsque le frère de
Martial, Arnaud, et son pote Frédo, vont se défouler sur lui, deux week-ends de suite, Martial se présente à la cérémonie du mariage la haine au coeur. Dans ce village, les armes sont partout. Alors, il se met à la fenêtre de la chambre de ses
parents et devient lui aussi chasseur. (Adapté en BD par Alfred, éditions Delcourt).
"La brigade de l’œil" (2007). Rush Island, 2037. La loi Bradbury interdit toutes les images depuis vingt ans sur l’ensemble du territoire. La propagande matraque : "Les
photographies sont nocives." "Le cinéma rend fou." "La télévision est l’opium du peuple." Les agents de la Brigade de l’OEil, les yeux armés du gouvernement, traquent les terroristes opposés à
cette dictature. Brûlent les images encore en circulation et les pupilles de ceux qui en possèdent. "Parce qu’un bon citoyen est un citoyen aveugle." Kao a quinze ans. Il ne craint pas les
images. Elles le fascinent. Après le lycée, il traîne dans les rues de Badwords pour en distribuer clandestinement. Une rumeur circule : des films auraient survécu. Ils seraient enfouis quelque
part dans l’île. Kao est prêt à risquer gros pour les sauver des flammes.
"Le contour de toutes les peurs" (2008). Lorsque Clément, 14 ans, rentre chez lui après le collège, il se trouve face à un inconnu qui l’agresse violemment. Il dit être à la
recherche de Maître Rivière, et Clément comprend alors que c’est sa mère, avocate, qui est visée. Son bureau est saccagé, des insultes et des menaces ont été peintes sur les murs. Tout ce que
l’homme dit, en pleurant, c’est qu’il avait une fille, Cannelle. Pendant plusieurs heures, dans l’attente de son retour, ils vont tous les deux se faire face. L'adolescent, immobilisé par des
fils d’étendage, assiste alors à une scène insoutenable et incompréhensible : l’homme s’enfonce plusieurs grosses agrafes dans sa main, dans son bras, puis dans sa bouche, avant de partir en
disant : "Je reviendrai"… Qui est cet homme ? Et pourquoi a-t-il agi ainsi ? La mère de Clément comprend immédiatement qu’il s’agit du mari d’une femme condamnée pour matricide, qu’elle a
défendue… Lui, après un court séjour à l’hôpital, tente de reprendre une vie normale, mais il vit en permanence avec la peur de voir surgir à nouveau son agresseur.
Tous ces titres sont publiés aux Éditions du Rouergue, collection DoAdo Noir.