Françoise Laurent : « Dolla » (Krakoen, 2008)
Cette histoire se passe dans dix ans, en 2018, un demi-siècle après les évènements de “mai 68”. Une communauté des
anciens regroupe dans le région niçoise d’ex-soixante-huitards, désormais septuagénaires. C'est un rassemblement hétéroclite de caractères et de parcours différents. Ils habitent une bâtisse
sur la rive du Paillon. Tous sont réunis pour les obsèques de Dolla, la compagne d’Augustin. Autrefois, le bistrot du couple était le centre de gravité de leur groupe. Perpétuellement optimiste
Dolla parvenait à les fédérer. Cinquante ans de bonheur entre Dolla et Augustin, ça ne s'efface pas si vite. Dandy friqué loin de leurs idéaux, leur fils Boris est venu avec sa belle et froide
fiancée Gaïa, étudiante en médecine. Ce qui ne console guère Augustin. Ici, chacun reste fidèle à ses convictions d’antan, occasion de houleux débats. Arthur, leur docteur, veille sur leur santé.
Clémence, jeune punkette destroy, s’occupe de l’intendance. Ces rebelles décatis forment un pathétique îlot de résistance dans ce monde individualiste, formaté, sécurisé par des milices. La mort
de leur copain Lionel le soir des obsèques pouvait passer pour naturelle. Celle de Joséphine est bien plus suspecte. Des traces d’insuline incitent Arthur et Augustin à s’interroger. Les vieux
réfractaires sont bientôt entraînés dans une affaire qui sent le complot, mais ont bien l'intention de réagir...
Toujours animés par l’esprit de mai 68, ces sympathiques contestataires ! Pour eux, ce n'est pas de l'histoire ancienne. Bien que décrépits, et conscients de l’échec des utopies, ils ont encore envie d’action. Une fois repéré chaque membre du groupe, on prend plaisir à suivre les péripéties qu'ils traversent. La tonalité amusée du récit n'empêche de s'interroger sur ce futur proche, inquiétant, uniformisé, morose. Un roman à découvrir.
© Claude Le Nocher