À Manchester. Quand Kate Brannigan dresse le bilan de son activité, le situation est mitigée : “Chez Brannigan & Co, mon cabinet de détectives privés, nos missions sont assez variées. Auparavant, lorsque j’étais associée à Bill Mortensen, nous enquêtions sur des problèmes de fraudes financières, de sécurité informatique, d’espionnage et de sabotages industriels, sans compter des affaires que des amis nous confiaient de temps en temps. Depuis le départ de Bill pour l’Australie, il fallait que je ratisse large pour m’en sortir. J’avais arraché à quelques cabinets d’avocats des missions d’huissier, ajouté "surveillance" à notre papier à lettres et démarché les compagnies d’assurances pour leur proposer mes services d’enquêtrice sur les fraudes.” C’est ainsi que Kate accepte de servir de garde du corps à la célèbre star-télé Gloria Kendal.
Les Anglais sont accros à leurs feuilletons télévisés : “Dieu sait pourquoi, mais les Britanniques pardonnaient les vices des acteurs de leur feuilleton préféré plus facilement que ceux de la Maison de Windsor, même s’ils payaient aux deux des salaires considérables, l’un par le biais des impôts, l’autre par celui plus discret des écrans publicitaires.” Une mission très rentable s’annonce donc pour Kate. L’actrice Gloria Kendal a reçu plusieurs lettres de menaces et tous les pneus de sa voiture ont été tailladés. Ce qui explique son besoin d’être sous protection. Dorothea Dawson, la voyante attitrée des studios de télé NPTV confirme que la mort rôde autour de Gloria. La détective privée ne cache pas que la voyante et ses prédictions la laissent sceptique.
Sans négliger ses collaborateurs – son assistante Shelley, le fils Noir de celle-ci Donovan qui a souvent des ennuis, l’expert-informatique Gizmo – Kate Brannigan devient l’ombre de Gloria Kendal. Au studio, se pose un problème annexe (il y a des fuites sur les futurs scénarios du feuilleton, relayées par les journaux), que doit régler John Turpin, le Coordinateur Administration et Production de NPTV. Le mouchard figure certainement parmi le petit monde travaillant pour le studio, peut-être même le maquilleur Freddie qui sait tout ce qui se passe. Sinon, l’atmosphère semble assez décontractée au sein de l’équipe du feuilleton, Kate ne repérant personne qui voudrait tuer Gloria Kendal. Jusqu’à ce que paraisse un article sur elle et ses ennuis, ce qui provoque quelques tensions dues à une part de jalousie entre acteurs.
Ce n’est pas Gloria qui est assassinée, mais la voyante Dorothea Dawson. Si le sergent Linda Shaw se montre plutôt amicale avec Kate Brannigan, ce n’est pas le cas de son supérieur, l’inspecteur-chef Cliff Jackson. La détective constate que l’opinion sur Dorothea Dawson était nettement positive : “Elle te parlait des relations entre les planètes et de leurs effets sur ta vie. Une analyse très fouillée, tu sais. Elle savait tout sur les gens auxquels elle avait affaire. Dorothea avait l’habitude de garder le moindre renseignement, aussi insignifiant fût-il… Tout ça contribuait au mythe de la voyante extralucide.” C’est en se penchant sur le passé de Dorothea – avec un épisode douloureux datant de vingt ans – que Kate progresse dans ses investigations. Vu que l’inspecteur-chef Jackson la soupçonne maintenant du meurtre de la voyante, Kate a intérêt à se montrer efficace…
De 1992 à 1998, la détective Kate Brannigan a été l’héroïne de six romans (Le dernier soupir – Retour de manivelle – Crack en stock – Arrêts de jeu – Gènes toxiques – Mauvais signes). Cette ultime enquête a été récompensée par le Prix du Roman d’Aventure, attribué par les éditions Le Masque. Richard, le compagnon de Kate, journaliste de rock, ne joue ici qu’un rôle mineur, mais leur ami Dennis – ex-cambrioleur – va être accusé du meurtre d’un malfrat. Et le jeune Donovan, à cause de sa couleur de peau, a beaucoup de mal à remplir les missions confiées par Kate. Toutefois, l’essentiel de l’intrigue se déroule dans le milieu de la production télévisuelle. L’ambiance décrite par Val McDermid paraît proche de la réalité des studios. Le récit est enjoué, prêtant souvent à sourire. D’autant que Gloria, actrice d’âge mûr, est une extravertie sans naïveté sur sa notoriété. Un polar très réussi.