L’ami Firmin Le Bourhis était un croyant humaniste. Firmin était généreux, tout en étant malade du cœur, quelle ironie ! Il avait fait plusieurs séjours en soins, sans que ça entame son moral, en apparence. Il restait toujours souriant, ouvert, optimiste, à l’écoute. Nous nous sommes souvent croisés, nous avons souvent dialogué. Y compris hors de l’univers polar. Il ne voulait pas en faire un argument de vente, mais il soutenait avec ses droits d’auteur Action Alzheimer (agissant autour des maladies neurodégénératives que sont Alzheimer, la Sclérose en Plaque, et la Maladie de Parkinson). Il savait combien ces lourds problèmes de santé pèsent sur les proches des personnes concernées. Réconforter en quelques mots, respecter la douleur de l’autre en oubliant la sienne, c’est devenu rare. Merci mille fois, Firmin. Le polar nous rapprochait, mais ce n’était pas l’essentiel.
Né à Kernével (Rosporden) en 1950, Firmin Le Bourhis fit carrière dans la banque. Il fut même en poste dans la région de Limoges, dont il gardait de bons souvenirs. Il habitait à Concarneau, mais se déplaçait dans quantité de festivals et salons du livre. C’est à l’occasion de celui de Châteauroux que Firmin Le Bourhis est décédé, ce samedi 21 avril 2018. Malgré ses maux, il était très actif. Il s’était investi chez Alain Bargain, son premier éditeur. Puis il s’est tourné vers les Éditions du Palémon, avec Jean Failler, où il a continué à promouvoir ses livres et ceux d’autres auteurs. Aucune initiative ne fonctionne sans enthousiasme, Firmin en avait à revendre.
Il a écrit une grosse trentaine de romans policiers, une série ayant principalement pour héros un duo d’enquêteurs basés à Quimper : le capitaine François Le Duigou et le lieutenant Philippe Bozzi. Toutes ces fictions s’appuyaient sur des faits divers réels. Dans une tradition du polar documentaire, il explorait des lieux, des situations, des caractères proches de la réalité. Les cas criminels étaient exacts, il les adaptait à nos décors régionaux. Il ne mettait que fort peu ses enquêteurs “en opposition” car, répondait-il, ce n’était pas sa façon de penser une intrigue. Si ses flics n’étaient pas des baroudeurs, ils se frottaient à des sujets de société. Et à des épisodes – forcément un peu sombres – de la vie de personnages ordinaires, crédibles. C’était sa manière, absolument respectable. Il avait lancé depuis quelques temps une nouvelle série, “Menaces”, à la tonalité plus dure.
Retour sur quelques titres de Firmin Le Bourhis…
"La belle Scaëroise" : Une lettre annonce aux policiers François Le Duigou et Philippe Bozzi qu’un meurtre a été commis la veille à Scaër, petite ville des environs. Il y avait foule en ce lundi de Pentecôte, jour de la traditionnelle Cavalcade, ce dont l’assassin a profité. Âgée de trente-cinq ans, la victime Patricia était belle et intelligente. Sa vie professionnelle était une réussite. Sa vie privée, moins. Mais elle allait bientôt avoir un enfant, et prendre un nouveau départ. Les policiers interrogent d’abord son meilleur ami, qui était (sans espoir) amoureux d’elle, puis son ex-compagnon, qui ne leur semble “pas net”. Des voisines ont vu quelqu’un grimé en clown sortir de chez Patricia à l’heure du crime. Mais le témoin n°1 reste Bruno Le Louarn, le nouvel amour de la jeune femme. Patron de société, ce dernier est encore marié. Le jour du meurtre, il préparait les changements à venir. Son alibi est faible, alors que des indices basés sur l’ADN l’accablent. Abattu par la mort de Patricia, il nie les hypothèses accusatrices des policiers. Quand il est mis en examen, Mme Le Louarn se démène, faisant pression sur les enquêteurs. On retrouve finalement l’arme du crime dans le bureau de Bruno…
"Étape à Plouay" : Un coureur cycliste de vingt-six ans est victime d’un accident mortel en voiture, suite à une attaque cardiaque. Son sponsor, qui fut suspect dans une précédente affaire, s’adresse aux policiers Le Duigou et Bozzi. Certes, le virage est dangereux. Mais on ne peut exclure l’influence des produits dopant sur la santé de ce futur pro. Le champion était apprécié par son club cycliste, où on refuse l’idée de dopage. Enceinte, la jeune épouse du défunt se montre peu coopérative dans un premier temps. Les contrôles étaient négatifs, répète-t-elle. Les policiers apprennent que des espoirs du cyclisme – dont le coureur fit partie – furent invités lors d’étapes du Tour de France. Certains de ces sportifs ont, depuis, quitté le vélo. On leur proposait des traitements indétectables, mais dangereux. Un nommé Théo, prétendu journaliste belge, contacta de nombreux jeunes, dont Thomas. Ex-cycliste, Thomas accepte d’aider la police. Il saura reconnaître Théo. La femme de la victime apporte aussi des éléments. Le 14 juillet, l’étape du Tour arrive à Plouay. Dans la foule en fête, Théo échappe à Thomas. Un spécialiste de l’étude du dopage sportif donne aux policiers des explications aussi complètes qu’effrayantes.
"Peinture brûlante à Pontivy" : François Le Duigou et Phil Bozzi sont provisoirement affectés dans le Morbihan. Une voiture a été volée à Pontivy. On la retrouve incendiée. A l’intérieur, un cadavre entièrement calciné. Cela complique la recherche ADN. Michel Van Queven, utilisateur du véhicule, artiste-peintre belge vivant en Bretagne, a un alibi. Le duo d’enquêteurs rend visite à Marie-Jeanne de Kermao, future épouse de Van Queven. Elle confirme. Peu après, une deuxième voiture et un cadavre sont brûlés selon le même procédé, encore dans une propriété isolée. Le peintre belge s’est absenté. Marie-Jeanne contacte François et Phil. Elle est sans nouvelle de sa cousine partie en voyage. C’est Van Queven qui l’avait conduite à la gare. Aidé de Pierrot, policier solitaire, le duo se renseigne sur le Belge. Il est plutôt courtier en tableaux. Il semble faire réaliser à Varsovie des toiles qu’il signe de son nom. Paolina, sa petite amie polonaise, vit en Bretagne. Cette jeune femme n’aime que l’argent et le luxe. Le couple a quitté la région, après avoir effectué un important retrait en billets sur le compte de Marie-Jeanne. Les enquêteurs trouvent la trace du couple en fuite, sur Paris…
"En rade à Brest" : Une bande efficace et parfaitement renseignée vient de braquer une société quimpéroise. L’affaire est confiée aux policiers François Le Duigou et Phil Bozzi. Deux cas similaires se sont récemment produits dans la région brestoise. Le duo s’installe à Brest, afin de poursuivre ses investigations. Leur collègue Marco fut chargé d’éclaircir les cambriolages en question. Ayant vécu certains échecs, celui-ci est désabusé et amer. Alcoolique, il ne paraît plus très fiable. Pourtant, François et Phil l’associent à leur enquête. Marco prétend avoir un indic sûr. Il semble que deux groupes de malfaiteurs se soient alliés pour monter des gros coups. Marco étant ivre, ces précisions restent incertaines. Peu après, le braquage d’un camion de cigarettes – qui fait une victime – confirme la version de Marco. Un grand Noir et un maghrébin seraient en cause. Une vaste opération de police est menée sur Brest, visant les populations concernées. On procède à de nombreuses arrestations. Il est évident que la bande recherchée a échappé à la rafle. Tandis que des flics spécialisés dans les trafics arrivent en renfort, le duo de policiers s’interroge sur l’indic de Marco. Ils finissent par identifier plusieurs personnes, qu’ils poursuivent sans succès lors d’une tentative de vol.
"Drôle de chantier à Saint-Nazaire" : Une voiture immergée est extraite de l’Odet au port du Corniguel, à Quimper. Côté passager se trouve un cadavre. Ce véhicule de location a été volé quelques jours plus tôt à Saint-Nazaire. Le loueur est un responsable technique polonais, collaborant avec les Chantiers de l’Atlantique. Il explique que le vol s’est produit lors d’une petite fête entre employés. Les policiers François Le Duigou et Phil Bozzi sont chargés de l’affaire. Tandis qu’un portrait du mort non identifié est diffusé, ils se rendent à Saint-Nazaire. Le Polonais et ses compatriotes ne semblent pas impliqués. La victime était un jeune ingénieur, intérimaire aux Chantiers, Michel Le Kerbraz. Nul ne s’est inquiété, car on le croyait en voyage. Il devait partir en Thaïlande avec sa fiancée. Toutes les hypothèses sont envisagées, de l’espionnage industriel au crime crapuleux d’une bande de délinquants. On vérifie les emplois du temps de chacun. On se renseigne aux Chantiers. Annie, la fiancée de Michel, est découverte assassinée chez elle. Valérie, de la police nazairienne, croit au crime passionnel. Sans doute est-elle influencée par son expérience personnelle. Bientôt, les policiers tiennent un très bon suspect.
"Embrouilles briochines" : A Quimper, Le Duigou et Bozzi enquêtent sur un simple accident de chantier. Un ouvrier d’une entreprise de ravalement a fait une chute mortelle. Le patron de cette société de Saint-Brieuc est injoignable. Hervieux, le chef de chantier, disparaît avec le second ouvrier et leur matériel. L’entreprise n’employait que des étrangers clandestins. A Saint-Brieuc, le duo de policiers visite l’appartement servant de siège social à la société. Il ne reste guère de traces. L’agence immobilière ne sait rien non plus. La relation entre l’entreprise fantôme et celle, sérieuse, qui leur confia cette sous-traitance apparaît assez floue. Le patron en fuite est bientôt identifié. Sexagénaire, Marc Cesson est connu pour ses faillites. Cette fois, il s’était acoquiné avec un repris de justice, Jacques Ginglin, le faux Hervieux. Même l’ancien avocat de Cesson le qualifie de magouilleur. Les enquêteurs s’interrogent sur les meilleurs amis de Cesson : les chefs d’entreprises Langueux et Saint-Julien, et le notaire Beauvallon. Ils disent avoir refusé de soutenir les nouveaux projets de Cesson, et ignorer où il se cache. Peu convaincus, les policiers placent ces notables sous surveillance discrète. C’est ainsi qu’ils retrouvent l’homme recherché, qui nie tout puisqu’il n’existe pas de preuves directes contre lui.
"Poitiers, l’affaire du Parc" : La jeune Élodie Sakkar a été poignardée dans un local technique du Futuroscope, parc où elle était hôtesse. C’est la première affaire importante sur laquelle le lieutenant de gendarmerie Boissardeau doit enquêter. Tout accable Jean-Daniel, un autiste. Perturbé par une séance au “cinéma dynamique”, il aurait assassiné Elodie dans une crise de démence. Vu son cas psychologique, il est hospitalisé sous surveillance. Sa famille et l’éducatrice qui s’occupe de Jean-Daniel refusent de le croire coupable. Le gendarme rencontre les parents d’Élodie, Turcs d’origine. La victime semble avoir été tuée avec son propre couteau. Elle était enceinte. Son petit-ami Lionel est profondément marqué par ce crime. S’ils sont bien intégrés, un malaise règne dans le couple Sakkar. Le père appartient à une association dont le but philosophique est discutable. La mère de la victime ne semble pas heureuse. Même si subsistent doutes et zones d’ombre, l’enquête est close. Jean-Daniel obtient un non-lieu, en raison de son état, ce qui ne satisfait pas ses proches. La mobilisation médiatique en sa faveur ne fait que commencer. Le détective Richard Korosool reprend le dossier. Consultant des médecins, il est vite convaincu que le jeune autiste n’a pu avoir un comportement meurtrier.
"Gros gnons à Roscoff" : Un cadavre a été découvert dans la remorque d’un camion en partance pour l’Angleterre. Le mort est un clandestin originaire d’Afghanistan. Il peut s’agir d’une mort accidentelle par overdose. Les policiers François Le Duigou et Phil Bozzi sont chargés de l’enquête. Ils se rendent à Roscoff, port d’où devait partir ladite remorque. Ils y seront assistés d’un jeune gendarme. Question trafic de migrants, la situation n’est pas aussi grave que dans d’autres ports. Néanmoins, il existe ici de petits squats, et on suppose que des passeurs aident les clandestins. Les policiers n’obtiennent guère de témoignages sur le défunt Afghan. Toujours à Roscoff, François et Phil sont appelés sur une autre enquête. M.Le Restel, patron d’une société d’exploitation des algues marines, a été violemment agressé chez lui. Son associé confirme que le dossier important qu’il détenait n’a pas été volé. Entre cambriolage raté, commando aux motivations inconnues, et affaire privée, le duo de policiers n’exclut aucune hypothèse. À Rosporden, ils interrogent la dirigeante d’une autre entreprise exploitant les algues. Si les policiers en apprennent beaucoup sur les pressions subies par cette filière, ça ne leur offre aucune piste précise. La surveillance du port de Roscoff finit par porter ses fruits. Cinq asiatiques clandestins sont arrêtés alors qu’ils allaient tenter de passer en Angleterre.